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mercredi 27 juillet 2011

HAITI, SORTIRA-T-ON DE L’AUBERGE ?

JEAN ROBERT JEAN-NOEL
Le 27 juillet 2011

La situation haïtienne est des plus complexes ces trois derniers mois. C’est la rentrée parlementaire ; c’est l’amendement constitutionnel raté ; c’est la prise du pouvoir par le nouveau président de la République ; c’est la saison cyclonique ; c’est la recrudescence du choléra, de l’insécurité ; c’est le rejet de Mr ROUZIER comme Premier Ministre pressenti et désigné ; c’est l’expectative en matière politique durant une à deux semaines ; c’est la désignation d’un nouveau Premier Ministre en la personne de Me Bernard GOUSSE sur fond de confrontation entre le Parlement et la Présidence ; c’est la multiplication des voyages du Président MARTELLY à l’étranger . C’est le succès de l’évènement ”Livres en folie” ; c’est l’organisation des examens d’Etat ; c’est l’anniversaire de naissance des anciens chefs d’Etat, Jean Claude DUVALIER (60 ans) et Jean Bertrand Aristide (58 ans) ; c’est le début des fêtes champêtres d’Eté ; C’est la disparition de notre Azor, le Trésor national en matière de musique traditionnelle. C’est la poursuite des négociations avec le Parlement sur la ratification du Premier Ministre désigné. C’est l’annonce d’une probable prorogation d’un an de la CIRH sur fond de contestation de certaines organisations. C’est la visite du couple présidentiel dans le Nord du pays ponctuée de ”jets de pierres ” selon une certaine presse, de ”deux bouteilles lancées par des membres de la Base « Renfort »” selon le réseau citadelle . C’est la mort d’un député, celui de Beaumont. C’est enfin de compte le ralentissement de l’économie haïtienne sans apparemment une conscience claire de la part du Parlement et de la Présidence. Sortira-t-on de l’auberge ? Et que faire pour s’en sortir ?

Remarques

Dans cette grisaille politique qui surplombe notre pays, les aspects les plus encourageants restent et demeurent la culture et l’éducation. On peut certes reprocher les failles relevées dans l’organisation des examens d’Etat, mais on constate avec plaisir que ces examens sont organisés en temps et lieu, malgré les multiples problèmes que confronte le pays haïtien.

D’un autre coté, l’évènement culturel annuel « Livres en folie »a eu, une fois de plus cette année, un succès fou. Toutes les catégories sociales se sont déplacées comme pour dire au monde entier, « ça c’est notre force, aucune puissance étrangère ne peut nous l’enlever ». Cette puissance culturelle s’exprime encore plus dans les fêtes champêtres qui connaissent chaque année un succès extraordinaire mais qui, cette année, grâce à l’amélioration des réseaux routiers, enregistrent beaucoup plus d’affluence de gens de l’intérieur du pays (tourisme local) et de la diaspora haïtienne. Les fêtes d’anniversaire de deux anciens chefs d’Etat (réf. Haïti en Marche)avec leurs amis dans leur pays après des années d’exil, les funérailles nationales de notre Azor, un trésor culturel haïtien dans l’art du maniement du tambour, ce sont là des traits culturels haïtiens qui nous confortent et nous permettent de traverser dignement des moments de grisaille politique.

L’éducation d’un coté, la culture de l’autre, les deux piliers sur lesquels devra s’appuyer notre pays pour se refonder, en commençant par la résolution tout de suite de la crise gouvernementale en puisant dans notre culture et dans notre histoire de peuple capable d’étonner le monde quand il le fallait.

Solutionner la crise gouvernementale

Après l’échec de Rouzier, le Président Martelly avait dit qu’il allait demander au Premier Ministre, Bellerive, de faire plus que liquider les affaires courantes. Depuis, on ne sent pas « ce faire plus ». Au contraire ! Les ministres laissent le gouvernement petit à petit. Ceux qui sont là fonctionnent au ralenti. Le Président a-t-il organisé un Conseil des Ministres pour confirmer ses dires et donner plus de marge de manœuvres au gouvernement ? En tout cas, on ne sent pas le gouvernement de Bellerive. D’où le ralentissement de l’économie qui se traduit par le manque d’emploi, une réduction de la production nationale, une impression de manque sécurité (assassinats spectaculaires, Toussaint, Dorvil), une insécurité alimentaire qui pointe à l’horizon et qui pourrait déboucher sur les émeutes de la faim et favoriser une exploitation politique. En attendant la ratification de Me Gousse ou le choix d’un autre Premier Ministre, un Conseil des Ministres pourrait statuer sur un programme minimum à exécuter par le gouvernement démissionnaire. Il y va de la nécessité de sauver ce qui peut l’être d’un exercice fiscal partiellement compromis et de préparer le prochain exercice fiscal 2011-2012. Le Sénateur PRIVERT, en tant que l’un de nos meilleurs spécialistes de la question, si ce n’est le meilleur tout au moins en matière fiscale, a le devoir de convaincre ses collègues du Parlement de s’élever à leur niveau d’hommes et de femmes d’Etat pour doter le pays, avant octobre 2011, d’un budget pour l’exercice fiscal 2011-2012, naturellement en accord avec le Président Martelly. Sinon, on sera obligé, à la fin de cet exercice, de reconduire le budget de 2.6 milliards de USD, alors qu’il nous faudrait, selon la FONHDILAC, un budget de l’ordre de 4 milliards d’USD pour soutenir une croissance économique de 8 à 12% pour l’exercice 2011-2012. Or il est possible de trouver une partie de cet argent dans le cadre de la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti (CIRH) qui sera probablement prorogée pour une période d’au moins 1 an. Réalisme politique et économique oblige ! Il faudrait solutionner la crise gouvernementale par la nomination d’un nouveau gouvernement ou l’élargissement du mandat du Gouvernement Bellerive.

Alors, peut-on sortir de l’auberge ?

Le jusqu’auboutisme ne nous mènera nulle part. La Présidence le sait. Le Parlement aussi. Alors, pour sauver ce pays qui est nôtre, il faudrait :

1) Continuer les négociations en évitant la confrontation ouverte : modération du langage des deux cotés car Haïti l’exige, il y va du bien-être de la nation. Nous avons besoin de paix et de sérénité.

2) Convoquer un Conseil des Ministres pour permettre au Gouvernement Bellerive de faire plus que liquider les affaires courantes en l’instruisant de mettre en application les points non pris en compte dans les recommandations de l’article :” Haïti, une cigarette allumée aux 2 bouts”(Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2011/06/haiti-une-cigarette-allumee-aux-2-bouts.html. Journal le Matin et Haïti en Marche)

3) Continuer le processus de ratification de Me Gousse ou d’un autre Premier Ministre sur la base des négociations avec les deux parties relatives à la décision arrêtée en termes de partage de responsabilités au sein du Gouvernement avec les trois (3) ministères accordés au Groupe GPR, Economie et Finance, Agriculture et Santé, selon le Sénateur Zeni (Radio Vision 2000).

4) Encourager le Président, le Premier Ministre désigné, le Premier Ministre sortant et son gouvernement, et les parlementaires à s’investir dans la création d’un climat de confiance entre les deux (2) parties en donnant au pays l’impression que tout va pour le mieux.
5) Donner au Premier Ministre désigné les mains libres pour dégager une majorité au Parlement sur la base de négociations et non sur la base de chantage. En aucun cas, les négociations ne doivent dépasser les limites de l’indécence.

6) Se garder (Présidence et Parlement ), durant la période de négociations, de toutes déclarations intempestives susceptibles de jeter de l’huile sur le feu. Certains Sénateurs et le Président doivent se contrôler durant leur prise de parole.

7) Procéder (Le Parlement )à l’analyse des pièces du PM désigné qui, une fois ratifié, procédera à la présentation de sa politique générale qui sera adoptée à coup sûr par les deux chambres parce qu’elle sera le fruit d’un compromis.

8) Procéder (Le Président) à l’investiture officielle du nouveau gouvernement qui rentrera en fonction en remplacement de celui de Bellerive.

Haïti, comme en 1803 après le Congrès de l’Arcahaie, sortira de l’auberge pour entamer, cette fois-ci et pour de bon, sa refondation en toute tranquillité. Ce sera l’heure de la délivrance et notre pays sera sauvé parce que, comme Pétion et Dessalines, le Parlement et la Présidence auront compris qu’il faudra privilégier la concertation à la confrontation pour sauver ce qui peut l’être encore de cette nation en lambeaux. Nos actuels dirigeants ont-ils cette grandeur d’âme et ce sens du bien commun pour rééditer le passé ? A eux de le prouver !!!

mardi 21 juin 2011

HAITI, UNE CIGARETTE ALLUMEE AUX 2 BOUTS

JEAN ROBERT JEAN-NOEL
21 JUIN 2011

Le 14 Mai 2011, M. Michel MARTELLY est investi comme le 56e Président d’Haïti. Le « changement » est en marche. Mais l’ancienne administration fortement représentée au Parlement à travers le groupe parlementaire du renouveau (GPR) avait laissé, « continuité » oblige, des dossiers brulants non suffisamment traités :(i) le choléra (+5000 morts depuis novembre 2010) et son pic épidémique à l’approche de la saison pluvieuse et cyclonique 2011, (ii) les nombreuses familles encore sous les tentes, en particulier au niveau de l’ensemble des places publiques de la Capitale,(iii) la crise électorale issue des résultats électoraux définitifs du 20 avril 2011, (iv) la crise constitutionnelle avec la publication du « faux amendement constitutionnel » dans le Moniteur du 13 mai 2011. De quoi inciter l’apôtre du « changement » à opérer dans la « continuité » !Une bonne cigarette allumée au deux (2) bouts ! Que fallait-il faire ? Et que faire maintenant ?

Eviter la confrontation ?
Sweet Micky a toujours été perçu comme un « bagarreur ». Mr Martelly en campagne ne s’est pas trop départi de cette image. Le jour de son investiture comme Président, son discours est resté électoraliste donc bagarreur. Donc, l’autre camp l’attendait au tournant comme cet ”éléphant dans un magasin de porcelaine ». Selon un principe acquis de ma longue expérience, il ne faut jamais laisser les autres utiliser vos défauts contre vous. Ainsi, on arrivera à déjouer tous les pièges tendus par des amis et par des ennemis. Donc, le Président aurait dû choisir la coopération à la confrontation, et sur la base de cette « Haïti d’abord ! »,amorcer le « changement dans la continuité ». Mon article sous le même titre donnait la recette. Malheureusement, les conseils n’ont pas été suivis. On est donc en pleine confrontation alors que le pays a besoin de coopération. Que fallait-il faire ?

Couper la cigarette en trois (3) parties
Plus spécifiquement, au nom de son amour déclaré pour ce pays, au nom du changement prôné, le Président aurait du couper la cigarette en 3 parties : (i) reconduire le gouvernement Bellerive avec le même objectif de 8% de croissance prévu par le budget 2010-2011, en exigeant la gestion par le gouvernement reconduit de l’ensemble des dossiers brulants en cours et la préparation du budget 2011-2012 autour des 4 milliards de USD engagés dans le cadre de la CIRH ; (ii) Mettre en place avec son équipe un « schadow gouvernement » à coté du gouvernement reconduit pour roder cette équipe et faciliter le contrôle de l’ancienne dans la gestion des affaires de l’Etat , et (iii) se placer au dessus de la mêlée pour mieux voir et mieux coordonner tranquillement la mise en place du nouveau Gouvernement prévu pour la fin de l’exercice en cours avec parallèlement l’entame du processus de ratification du nouveau Premier Ministre. Pour agir de cette manière, il fallait une grande maitrise de la situation politique, un grand esprit de sacrifice et un grand leadership pour expliquer ses choix au peuple haïtien si impatient. C’aurait été une grande leçon de coopération, une bonne manière de rétablir la confiance entre nous, une grande opportunité ratée de bien amorcer le changement.

Alors, maintenant que faire ?
La Présidence et le Parlement n’ont qu’un seul choix : Haïti d’abord ! Il leur faut coute que coute éviter la confrontation en faisant taire leur orgueil de groupe et en pensant Haïti. Haïti ne peut plus se permettre de perdre un autre mois dans cette grisaille politique. Certes, il n’est plus possible de contempler un taux de croissance de 8%, mais il est encore possible de sauver les 3 derniers mois de l’exercice en cours. Nos hommes politiques doivent au moins comprendre cela. Nos experts financiers et le Group Croissance en tête nous ont déjà fourni assez d’éléments pour comprendre ce minimum en matière économique. Alors, chers Messieurs et Dames, arrangez vous pour que le pays soit doté d’un gouvernement durant cette fin de mois de juin 2011. Ce gouvernement, tout en sollicitant l’aide de l’ancienne administration pour au moins 3 mois et en créant des conditions pour rétablir la confiance entre les haïtiens, aura un cahier de charge en quatorze (14) points pour les trois derniers mois de l’exercice en cours, en vue de :

1) Gérer les affaires du pays à partir du budget 2010-2011 avec le souci d’atteindre un bon niveau de croissance économique en septembre 2011 ;

2) Gérer les urgences liées à la flambée de cholera, la saison cyclonique, les gens sous les tentes, en restructurant le service national des Endémies majeures (SNEM), en renforçant les structures de gestion des risques et désastres, en restructurant l’EPPLS (logements sociaux), en restructurant le SPPREN (Service d’entretien routier) ;

3) Organiser les examens officiels de l’Education Nationale et Préparer la réouverture des classes en Septembre 2011 tout en bien expliquant au grand public que l’école gratis est un processus progressif sur une période relativement longue ;

4) Préparer et lancer les campagnes agricoles d’Eté et d’Hiver pour réduire l’insécurité alimentaire ;

5) Préparer le budget 2011-2012 d’un montant de 4 milliards de USD avec les hypothèses suivantes : un taux de croissance de 10%, un taux d’inflation <10%, un taux de change stable de 40 gourdes pour 1 USD ;

6) Nommer le Président de la Cour de Cassation ;

7) Mettre en place le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire ;

8) Trouver des solutions à la crise électorale, à la crise constitutionnelle ;

9) Mettre en place le Conseil Electoral Permanent une fois la crise constitutionnelle résolue ;

10) Mettre en place le Conseil Constitutionnel tel que prévu par la Constitution amendée ;


11) Assurer une coordination sérieuse des actions des ONG et des agences de Coopération technique tant bilatérales que multilatérales ;

12) Préparer les élections Sénatoriales partielles, les Mairies, les CASEC et les élections indirectes ;

13) Mettre en branle le processus pour transformer la CIRH en cette agence de développement d’Haïti (ADH) prévue par le plan d’action pour le relèvement et le développement national d’Haïti (PARDNH) en octobre 2011 ;

14) Engager la responsabilité de la MINUSTAH en matière de l’introduction du choléra en Haïti et un processus de dédommagement pour des pertes en vies humaines et économiques encourues et pour aider à combattre le déficit d’image du pays à l’extérieur, tout ceci en vertu des conventions en la matière.

La mise en application de ce cahier de charge par le nouveau gouvernement permettra au pays d’éviter la confrontation et d’amorcer le processus de changement qui débouchera à coup sûr sur le processus de mise en marche de la nouvelle Haïti qui deviendra à l’horizon 2030, « un pays émergent et moderne », et à nouveau ”la Perle des Antilles, l’exception culturelle de la Caraïbe.” C’est le rêve de tout Haïtien digne de ce nom et ce devrait être le rêve de tous nos politiciens, surtout ceux qui sont au pouvoir. Alors, Messieurs et Dames, Marquez la rupture par rapport à l’ancien système mis en place depuis 1806 ! Haïti ne l’oubliera jamais !!!

lundi 30 mai 2011

HAITI, NECESSITE D’UNE REVOLUTION DE CROISSANCE ECONOMIQUE

Jean Robert JEAN-NOEL
29 Mai 2011

EN 2010, Haïti, avec 360 Hab./km2 et avec un PIB de 700 USD/Hab., est considérée comme un pays surpeuplé et extrêmement pauvre. La croissance démographique du pays est supérieure à 2% et se maintient presque constamment autour de ce pourcentage. Sa croissance économique a décru pendant longtemps au point d’être comparée à celle d’un pays en guerre durant ces 40 dernières années. L’économiste, Kesner Pharel, a titré un article en décembre 2009 sur l’économie haïtienne relative à la décennie 2000-2010 comme « une décennie perdue ». Alors comment expliquer une telle situation ? Et que faut-il faire pour s’en sortir ?

La situation socio-économico-politique

En comparant l’économie haïtienne par rapport à elle-même de 1980 à 2011, on constate une augmentation constante de la pauvreté avec toutes les conséquences que cela implique sur l’environnement physique du pays. La dégradation de l’environnement haïtien, qui a débouché sur la vulnérabilité proverbiale du pays, est étroitement liée, entre autres, à notre manière de faire de la politique et à l’ignorance de la majorité de nos hommes politiques des concepts économiques liée, elle-même, à notre système éducatif qui n’a pas pris en compte notre éducation financière et économique depuis l’école primaire. J’en prends pour preuve le mot d’ordre des ainés dans la lutte contre la dictature des Duvalier qui nous disaient inlassablement « lèse’l pouri » (laissez les choses se gâter en français). En d’autres termes, même si vous avez la possibilité de faire les choses correctement, ne le faites pas pour embarrasser le gouvernement et provoquer à terme un mécontentement généralisé qui devrait déboucher sur une révolution politique sans tenir compte des effets désastreux de cette stratégie sur l’économie du pays. Cette stratégie ajoutée à la corruption endémique a beaucoup nui à l’avancement du pays. Car elle a amplifié la pauvreté et complexifié la situation socio- économico-politique du pays.

La politisation à outrance pour se servir avec le peuple comme leader

Depuis, les années 1980, notre pays est entré dans un cycle d’instabilité politique qui va s’aggraver à partir de 1986. Le départ de Duvalier Fils va nous permettre d’amorcer un cycle de démocratisation qui s’articule autour de la politisation du pays avec des luttes acharnées pour le pouvoir politique non pour apporter le changement souhaité inscrit dans la Constitution de 1987 mais pour continuer à s’enrichir ou s’enrichir tout cours à partir de la politique. La politique pour se servir et non pour servir. La multiplication des partis politiques de type familial ou autour d’un homme providentiel va s'amplifier en lieu et place de vrais partis politiques avec des idéologies clairement définies tel que prôné par la Constitution de 1987. Avec ces groupuscules politiques, les démons de la division vont s’installer plus profondément dans l’âme haïtienne. Et pour arriver à gagner les élections, nous allons laisser faire le peuple au lieu de le guider. En conséquence, la situation globale du pays se dégrade au fil des ans pour aboutir, après le tremblement de terre du 12 janvier 2010, à la situation d’aujourd’hui. Alors, que faire ?

Prendre appui sur le PARDNH et réviser à la baisse le taux de croissance de 2010-2011

En Mars 2010, Haïti avec l’appui de la communauté internationale s’est dotée d’un plan d’action pour le relèvement et le développement national d’Haïti (PARDNH) de 34.5 milliards de USD sur 22 ans dont 9.9 milliards ont été promis par la Communauté Internationale en mars 2010 à la Conférence de New York. Actuellement, près de 40% des fonds liés à cette promesse sont soit engagés soit décaissés. Et le gouvernement de Mr Bellerive a prévu des investissements (y inclus le fonctionnement) de l’ordre 2.65 milliards de USD pour l’exercice en cours pour atteindre un taux de croissance de 8.9% du PIB après une contraction de l’économie de (-5% du PIB) pour l’exercice écoulé. La situation politique actuelle exige de revoir à la baisse le taux de croissance. Le Ministre des finances prédisait , en avril 2011, que l’on pourrait atteindre 8% à la fin de l’exercice si rien n’est venu perturber la situation. Avec les tractations plutôt difficiles pour la mise en place du nouveau gouvernement et l’adaptation obligatoire des nouveaux ministres à leur fonction, il faudrait présumer que le taux de croissance serait encore plus bas. L’idéal pour le Président Martelly serait de reconduire le gouvernement actuel jusqu’à la fin de l’exercice en cours pour avoir une chance de se rapprocher des 8% de croissance prévus par l’actuel Ministre des Finances. Mais ce ne serait pas « politiquement correct », même s’il favorisait l’amorce d’ « une révolution de croissance économique ».

Amorcer « la révolution de croissance économique » à partir de 2011-2012

De toute manière, si l’on veut sortir de cette situation et contempler le développement de ce pays d’ici 2035, il faudrait viser haut en matière de croissance économique. Comme l’a rapporté la Fondation Haïtienne pour le développement intégrale latino américain et caribéen (FONHDILAC) dans son « document d’orientation pour la refondation de l’Etat d’Haïti selon une vision haïtienne. Avril 2011 », les économistes, Charles CASTEL, Gouverneur de la Banque de la République d’Haïti (BRH), Carl BRAUN, PDG de l’UNIBANK, et Charles CLERMONT, PDG du Fonds d’Opportunité et du Renouveau d’Haïti (FORH),pensent respectivement que notre pays peut doubler son PIB en 10 ans avec 7% de croissance l’an, en 6 ans avec 12% de croissance par an, et en 5 ans avec 15% de croissance l’an. Ces économistes ont appuyé leurs prévisions sur leur longue expérience du marché financier haïtien et de l’économie haïtienne. Carl Braun pense qu’il faudrait « une révolution de croissance » pour arriver à développer ce pays. Au sein de la FONHDILAC, nous pensons qu’il faudrait des investissements de l’ordre de 4 milliards de USD par an pour des taux annuels de croissance économique dans une fourchette de 8 à 12% du PIB. Pour soutenir le développement du pays, jusqu’à en faire un pays émergent à l’horizon 2035, les investissements devraient se faire dans les six axes de développement adoptés par la FONHDILAC, l’humain, le social, l’environnemental, l’infrastructurel, l’économique et la gouvernance (politique) avec une répartition équitable des effets de cette révolution de croissance économique. Ces six axes englobent parfaitement les quatre (4) axes de l’administration Martelly ou 4 E, à savoir : Education, Emploi, Environnement et Etat de Droit. Alors ? En avant donc pour cette révolution de croissance économique tout en réduisant notre croissance démographique et en répartissant de manière équitable la richesse issue de cette croissance économique soutenue ! Kote sa nou pa ka fè la ?

vendredi 29 avril 2011

INITE ET MARTELLY OU LE CHANGEMENT DANS LA CONTINUITE ?

Jean Robert Jean-Noël

Le 28 avril 2011

Le candidat Michel Joseph Martelly a fait campagne sous le thème « changement ». Très critique par rapport au système en place qui a produit tant de misère et tant de souffrance, Il a promis de le changer. Par contre, l’INITE a mené campagne sous le thème « continuité ». En d’autres termes, le Parti du Président Préval croyait dur comme fer qu’il était sur la bonne voie. Il faudrait tout simplement améliorer certaines choses. Le 28 novembre 2010, le peuple est sorti voter. Le 7 décembre 2010, les résultats ont été prononcés. Le peuple estimant avoir été volé avait mis le pays à feu et à sang causant des dommages et pertes estimés à 100 M d’USD par les économistes. Une crise électorale s’est installée et avait du attendre l’intervention de l’OEA pour trancher contre le candidat de l’INITE en faveur de Mr Martelly au 2e tour. Le 2e tour opposa M. Martelly à Mme Manigat arrivée en première position au 1er tour. Le 20 mars 2011, le 2e tour a eu lieu couronné par la victoire de Mr Martelly aux présidentielles au verdict préliminaire du CEP prononcé le lundi 4 avril 2011. Ce verdict a consacré un grand nombre d’élus de l’INITE et d’autres entités aux législatives et laissé en ballotage favorable d’autres entités par rapport à l’INITE. Tout s’est passé dans la joie ce 4 avril 2011 et sans heurt. Malheureusement, les choses allaient se gâter le 20 avril 2011, lorsque les sénateurs et députés en ballotage favorable se sont retrouvés en position de vaincus par rapport à l’INITE au verdict final du CEP. Ce qui a conduit, une fois de plus, à des casses et une rentrée parlementaire sans les contestés en attendant de trouver une solution avec la fameuse OEA pour compléter le parlement.
Alors, comment se présente la situation au niveau du Parlement qui déterminera la configuration du Gouvernement ? Quelle marge de manœuvre aura le Président Martelly avec un Parlement à majorité dominée par l’INITE? Analysons la situation au Parlement, la situation du développement laissé par le Président Préval, la vision de changement de l’administration Martelly, et dégageons comme perspective le changement dans la continuité.

La configuration du Parlement
Avec la validation des pouvoirs , ce lundi 25 avril 2011, de 79 députés sur 99, la 49e législature est constituée. Le lendemain, c’était le tour des sénateurs élus. Et les observateurs ont une idée assez claire de la configuration du Parlement . Sous la plume de Victor Jean Junior dans Le Nouvelliste du 25 avril 11, Le processus électoral loin d'être bouclé, il est écrit ceci : « Avec 17 représentants au Sénat et - si l'on en croit les récents propos du sénateur Joseph Lambert - environ 70 élus et alliés à la Chambre basse, INITE est l'organisation politique majoritaire au Parlement. Viennent ensuite LAVNI, AAA, Alternativ et Ansanm nou fò. Deux candidats de la plateforme INITE, Jean Edzer Valentin (La Vallée de Jacmel, Sud-Est) et Jude Destiné Pierre (Ganthier/Fonds-Verrettes, Ouest) sont encore dans la course. Outre ces circonscriptions, les législatives auront lieu aussi le 29 mai prochain à Verretes (Artibonite) ».
Le samedi 23 avril 2011, l’Agence HPH a rapporté que : « La plateforme INITE et ses alliés ont présenté samedi le "Groupe parlementaire du renouveau" avec plus de 70 députés et 17 sénateurs faisant du GPR le groupe majoritaire au parlement. Les élus de la plateforme INITE et leurs alliés ont participé à une journée de travail qui a consacré la formation de ce nouveau groupe parlementaire, le premier de la 49e législature. Celle-ci devrait entamer ce lundi ses activités. “Nous sommes à un carrefour qui exige l’unité et la solidarité,” a déclaré le sénateur Joseph Lambert, coordonateur de la plateforme INITE à l’ouverture de la rencontre. »

Sur la base de ces informations, en attendant la décision de l’OEA et les élections complémentaires, la Plate-forme INITE semble incontournable dans la constitution d’une majorité présidentielle pour la mise en place du gouvernement. Le parti du Président élu n’ayant que 3 députés à la Chambre basse ne peut que faire des alliances pour constituer une majorité présidentielle pour gouverner le pays. Avec qui ? Probablement avec INITE et alliés. Car, en constituant le groupe parlementaire du renouveau (GPR), l’INITE se positionne comme la première force au Parlement et est en mesure de négocier avec le Président élu. Quand on dit négociation, c’est donnant-donnant. Tant au niveau vision, programme et gouvernement. Ce sera une bataille serrée et sérieuse pour le partage du pouvoir. Or le Président veut le changement et l’INITE la continuité. Qu’est-ce que l’INITE a son actif ou tout au moins quel est l’héritage du Président Préval ?

La situation du développement du pays
Si sur la plan politique, on peut parler d’échec partiel de Préval car il n’est pas arrivé, comme prévu, à placer son héritier à la présidence de la République, la configuration du Parlement actuel lui laisse quand même des marges de manœuvre assez importantes au niveau gouvernemental, tout au moins son équipe au parlement si elle fait preuve de discipline de parti ou de groupe ( souvenez-vous du CPP). Par contre, sur le plan de développement, les trois (3) gouvernements de Préval ont laissé un bilan « acceptable » qui n’a pas été suffisamment exploité par le Président sortant politiquement parlant. Oyez.

Sur le plan macro économique, la discipline a toujours été au rendez-vous. De 37% l’héritage du Président Aristide, l’inflation a été ramenée à 16% par Boniface-Lotortue en 2006 avec des réserves de change supérieures à 200 M d’USD avec un des taux de change autour de 42 GHT pour 1 USD. Les 3 gouvernements de Préval ont stabilisé le taux de change autour de 40 GHT pour 1 USD, un taux d’inflation à 1 chiffre qui a atteint un seuil négatif à certain moment, même le taux actuel de 7% en glissement annuel est plus qu’importé que produit par l’économie haïtienne (Kesner Pharel, Investir du 23 avril 2011). Malgré une gestion politique plutôt catastrophique pour notre économie, le taux de croissance de 8.9% pour l’exercice n’est pas tout à fait compromis et pourrait se chiffrer en fin d’exercice à 8% selon le Ministre de l’économie. Les réserves de change sont autour de 800 M d’USD, soit 3 mois et demi d’importation. L’économie haïtienne est plutôt « saine » pour répéter le Ministre Baudin. Le système bancaire haïtien est un modèle du genre au niveau de la Caraïbe, une vraie paradoxe pour un pays corrompu. C’est un atout précieux pour n’importe quel gouvernement. Le gouvernement a entamé un certain nombre de réformes pour rendre le système global plus performant et surtout plus transparent en informatisant la Direction Général des Douanes, la direction général des impôts (DGI), l’administration centrale et déconcentrée (processus en cours), selon le ministère de l’économie et des finances (MEF).

Sur le plan des grandes actions en cours dans le cadre du DNSCRP (4.3 milliards USD) et du plan d’action pour le relèvement et le développement national d’Haïti (PARDNH 34.5 milliards d’USD) dont 9.9 milliards d’USD ont été promis à New York par la communauté internationale (CI) le 31 mars 2010, il faut noter le décaissement/engagement de 37.2% selon Bill Clinton, les 74 projets approuvés par la CIRH, la retour à l’école, à l’université, la relocalisation de 700,000 sans abri, l’enlèvement d’une bonne partie des débris, la création de près d’un million d’emplois temporaires selon le PAM, la réhabilitation et la réalisation des grands axes routiers comme Port-au-Prince-Hinche, Port-au-Prince-Gonaïves, Port-au-Prince-Cayes-Jérémie, Miragoâne-Petit-Trou de Nippes, qui favorisent (même en situation de construction en cours) la réduction de moitié le temps mis dans certains cas pour atteindre la destination finale et vice versa , la construction achevée du tronçon Ouanaminthe-Cap-Haïti, de l’Aéroport de Jacmel, de l’Aéroport du Cap (en cours), la construction du Warf de Labadie, le processus de mise en place d’une zone franche dans le Nord du pays, la réhabilitation et construction de systèmes d’irrigation, d’eau potable, d’hôpitaux, de centres de santé etc. Autant d’actions en cours et achevées qui ouvrent la voie au développement du pays sans parler des actions mises en œuvre par le secteur privé haïtien et étranger, les ONGs, les agences de coopération.

En parcourant le pays en dehors de Port-au-Prince, on a cette favorable impression que les choses bougent mais qu’il manque cette coordination de l’Etat. Certes, on est loin de l’idéal souhaité mais on n’est pas non plus dans une situation catastrophique et sans espoir. En tant que Gonaïvien, les travaux entrepris aux Gonaïves depuis 2004 et continués par l’administration Préval commencent à donner de très bons résultats. En grande partie toutes ces actions réalisées sont à l’actif de l’administration sortante donc d’une certaine manière au groupe ESPWA/INITE. On ne peut les rejeter d’un revers de main quel qu’en soit notre sentiment par rapport au Président Préval qui n’a pas su capitaliser dessus et a laissé cette impression de quelqu’un qui n a rien foutu. Or en politique impression vaut fait. En tout cas quelle qu’en soit la vision du développement du Président élu, elle ne peut être en totale rupture par rapport à l’ensemble de ces actions décrites plus haut selon le principe même de continuité de l’Etat.

La vision du changement de l’administration Martelly
La vision de M. Martelly est exprimée dans ses prises de parole, celles de ses conseillers et dans son programme, Le courage de changer. Cette vision est axée sur : (i) La Relance de la production agricole nationale,(ii) la Sécurité des personnes et des biens,(iii) l’Education et la formation pour tous, (iv) Replacer Haïti sur la carte du monde, (v)Tourisme et culture, (vi) Santé préventive et soins pour tous, (vii) Dynamiser l’économie et le secteur privé.

Sans entrer dans une analyse exhaustive du programme de M Martelly par rapport au PARDNH, pour l’observateur averti, ces sept (7) axes du programme se retrouveraient sans grande difficulté dans les quatre piliers du PARDNH, la refondation sociale, la refondation économique, la refondation territoriale et la refondation institutionnelle. C’est peut-être la façon d’opérer qui va être différente avec un leadership différent, peut-être une meilleure coordination et plus de transparence. Mais dans le fond, il y a matière à négociation. Prenons, l’exemple de l’agriculture, l’administration Martelly ne peut pas mettre de coté tout le travail accompli en termes de documents stratégiques visant la relance de la production nationale agricole, la politique de développement agricole (PDA 2010-2025), le plan national d’investissement agricole 2010-2016 (PNIA 790 M USD) dont au moins 250 M USD sont négociés et prêts à être décaissés, le plan national de sécurité alimentaire et nutritionnelle 2010-2025(PNSAN), le Plan Directeur de Vulgarisation agricole (PDVA).La finalité de ces documents c’est de projeter « une Haïti sans faim à l’horizon 2025 ». Il ne peut pas non plus mettre de coté : le plan national d’éducation, le Maillage routier national, les travaux des diverses commissions présidentielles en termes de compétitivité, d’éducation, d’amendement constitutionnel, les travaux du CIAT dont une bonne partie est exprimée dans le document Haïti Demain mars 2010. Alors, en toute logique, les négociations entre les deux parties devraient déboucher sur une sorte de compromis que l’on pourrait appeler « changement dans la continuité ».

Le changement dans la continuité
Sur la base de l’analyse précédente, le jeu politique entre l’équipe Martelly et le Groupe GPR devrait être très serré et très sérieux avec comme enjeu certes le partage du pouvoir entre élus mais dans un but bien précis le développement du Pays Haïtien. Le compromis basé sur le changement dans le continuité devrait s’appuyer sur les éléments les plus pertinents des actions en cours, et les marier avec les axes fondamentaux du programme le courage de changer pour en faire un programme gouvernemental de 5 ans ancré dans une vision plus large de 25 ans. Ce programme gouvernemental aborderait (i) les questions urgentes liées à l’amendement constitutionnel, au choléra, aux sans abri, à la prochaine saison cyclonique 2011 et aux autres saisons cycloniques durant les 5ans, à la gestion des risques et désastres, à l’insécurité alimentaire, à la création d’emploi ; (ii) les questions structurantes liées à la poursuite et au renforcement des actions de développement en cours (Agriculture, éducation, santé, route, irrigation, eau potable, électricité, école, université, centre de santé, hôpital, reforme institutionnelle, la stabilité macroéconomique, etc.), (iii) la grande concertation nationale ( la confiance entre Haïtiens, la réconciliation nationale, la vision de 25 ans et la refonte des divers plans pour en faire un plan consensuel, la constitution de 1987 et les nouveaux amendements , etc) ; (iv) l’organisation des élections sénatoriales partielles, des collectivités territoriales et des élections indirectes. Ne seraient-ce pas là des éléments pertinents pour un compromis vers le changement dans la continuité ?

dimanche 27 mars 2011

HAITI-ELECTIONS 2e TOUR, RESULTATS 31 MARS 2011, HAITI D’ABORD !

HAITI-ELECTIONS 2e TOUR, RESULTATS 31 MARS 2011, HAITI D’ABORD !
Jean Robert JEAN-NOEL
27 Mars 2011

Le 7 décembre 2010, le Conseil Electoral Provisoire (CEP) proclama les résultats des élections du 1er tour des présidentielle et législatives du 28 novembre 2010. Ces élections et leurs résultats provoquèrent près d’une dizaines de morts et des dégâts matériels estimés à 100 M d’USD par nos économistes et une crise électorale qui a mis à nue la dépendance du pays vis-à-vis de la Communauté Internationale (CI). Face à la désolation ressentie durant ces deux jours d’émeute, je me suis permis, le 10 décembre 2010, en tant que citoyen haïtien vivant en Haïti, de ramasser les cinq (5) propositions citoyennes sur cette crise et d’y ajouter deux (2) propositions après une analyse très judicieuse dégageant la responsabilité du pouvoir en place dans cette crise électorale, dont une, la 6e sera reprise par l’OEA proposant de remplacer le candidat du pouvoir par Mr Martelly au 2e tour (www.jrjean-noel.blogspot.com), .
En effet, face à l’aggravation de la situation globale du pays en ce mois de décembre 2010, malgré l’implication directe de la CI dans cette crise, en particulier l’OEA, le Président de la République, Mr Préval, a fait appel à des experts de cette institution pour aider Haïti à trouver une solution à la crise électorale. Par des artifices de calculs qui s’apparentaient beaucoup plus à une solution politique, les « experts de l’OEA » ont proposé de remplacer Mr Célestin par Mr Martelly au 2e tour des élections présidentielles, solution avalisée par la CI dans son ensemble et appliquée par le CEP. Ce qui nous a valu deux mois de retard sur le calendrier électoral et l’organisation de ce 2e tour, ce 20 mars 2011, entre Mme Manigat et Mr Martelly. La proclamation des résultats de ces élections est prévue pour ce 31 mars 2011. Qu’en sera-t-il ? Le pays aura-il à payer à nouveau les pots cassé de notre inconscience ?

La position des deux camps

Selon les premières estimations des médias basés sur les dépouillements le soir même des élections, et sur certains procès verbaux affichés aux centres de vote, les tendances seraient plutôt favorables à Mr Martelly dont la photo est publiée en première page de l’Hebdomadaire Haïti en Marche (Haïti en Marche # 09 ), Premiers chiffres : Michel Martelly pourrait l’emporter jusqu’à 60%, selon HEM. Sur cette base et d’autres, disent-ils en leur possession, les partisans de Mr Martelly ont crié victoire. Sur les médias en ligne, c’est l’empoignade. Chacun se dit en possession d’informations les plus fiables. Sur ces entrefaites, le camp Manigat a fait sortir un communiqué signé de Mr Patrice Dumont disant détenir d’informations laissant croire que Mme Manigat est dans une position confortable pour gagner les élections. Les alliés de Mme Manigat, en l’occurrence MM Latortue et Beauplan, invitent d’aller débattre au centre de tabulation. Un groupe appartenant à « Repons Peyizan » a tenu aussi sa conférence en clamant la victoire de Mr Martelly. Toutes ces interventions ont eu pour effet de rétablir « l’équilibre » et de forcer les observateurs et le commun des mortels à un certain attentisme et à spéculer aussi sur « d’éventuelles magouilles » du CEP qui a interdit de publier les tendances.

D’un autre coté, en écoutant les déclaration des uns et des autres, en lisant les empoignades sur le net, on a cette désagréable impression que les deux camps sont prêts à en découdre et sont prêts à lâcher leurs sbires dans la rue pour « faire respecter le vote du peuple ». On a comme l’impression, que notre pays, notre chère Haïti, n’est pas l’enjeu principal de ces élections, que chaque camp se bat pour sa chapelle et non pour cette Haïti meurtrie par un tremblement de terre qui a fait officiellement 316,000 morts, malade du choléra, dévastée par des cyclones, gangrenée de corruption, fragilisée par sa vulnérabilité environnementale et son positionnement sur la route des ouragans , et ses risques de tremblement et/ou de tsunami . L’observateur averti que je suis est inquiet, d’autant que hier samedi 26 mars 2011, j’ai vécu, à Miragoâne, à la localité de Chalon un incident qui pourrait se révéler le signe avant coureur de ce qui va se passer après le 31 mars 2011.

L’incident de Miragoâne

En effet, ce 26 mars, j’ai été dans la zone de Miragoâne pour une consultation sur l’irrigation. Vers midi, j’ai vu des barricades sur la Nationale no 2. J’ai demandé à mon chauffeur d’avancer prudemment. On a été accueilli par des jets de pierres et des tirs d’armes à feu au niveau de Chalon. La raison de cet incident est simple. Le PAM qui a ouvert des chantiers « cash for work » au niveau de la zone, a eu un retard de paiement. Voilà la raison pour laquelle, on a du perdre deux heures de temps à négocier avec des mécontents et certains ont vu la vitre de leur véhicule briser. Qu’est-ce qu’un usager de la route a à voir avec un retard de paiement d’une organisation internationale qui a ouvert des chantiers pour essayer de recapitaliser la population de la zone ?

L’état d’esprit avant la proclamation des résultats le 31 mars 2011.

Cet incident témoigne de l’état d’esprit qui prévaut actuellement dans le pays où la moindre étincelle peut provoquer une explosion incontrôlable favorable aux éternels fauteurs de trouble . Les nerfs sont donc à fleur de peau. Quand on sort travailler ou vaquer à ses occupations, on ne sait pas si on va rentrer sain et sauf à la maison. On est tout le temps sur le qui vive. On n’a pas la tranquillité d’esprit nécessaire pour réfléchir aux grands défis qui attendent le pays. Et nos intellectuels sur le net, surtout ceux-là qui vivent à l’extérieur au lieu d’y pencher car en principe plus à même de le faire en lieu et place de nous autres qui confrontons la réalité quotidienne de terrain, s’entredéchirent pour des questions sans grandeur de partisannerie politique. Que l’élu soit Manigat ou Martelly, les défis d’Haïti ne changeront pas. Alors, s’il vous plait, évitez d’alimenter les antagonismes au sein de la population, noir-mulâtre, riche-pauvre, partisan Manigat-partisan Martelly, Haïtien de l’intérieur-Haïtien de l’extérieur, intellectuel-simple d’esprit, etc. Haïti a besoin de tous ses fils et filles pour affronter ses défis et se refonder. Ce ne sont pas les résultats des élections qui vont changer quoi que ce soit en Haïti ! Les deux protagonistes auront à confronter les mêmes problèmes et les mêmes défis surtout ceux liés la refondation d’Haïti. Qu’ils convient leurs partisans à ne pas empirer la situation du pays en brisant et en cassant quelle que soit l’issue de ce 2e tour. Rappelez-vous que ce 2e tour n’est autre qu’un compromis politique suite à la gargote électorale du 1er tour ! Rien d’autre !

Haïti d’abord !

Tacitement, nous avons accepté ce compromis d’aller à ce 2e tour car nous sommes fatigués. Nous avons accepté de laisser Mr Préval aller jusqu’au 14 mai 2011 car nous sommes fatigués. Nous avons accepté le retour de MM Aristide et Duvalier car nous sommes fatigués. Nous avons accepté la hausse du prix du carburant qui va avoir des répercussions sur le cours de notre vie car nous sommes fatigués. Nous acceptons de vivre dans cette précarité car nous sommes fatigués. Alors, acceptons les résultats de ce soit disant 2e tour comme une première étape vers cette grande concertation nationale pour jeter les bases d’un grand sauvetage national de l’Haïti de demain, moderne, émergeante, décentralisée et souveraine. Haïti d’abord, c’est notre cri de ralliement dorénavant ! Vous vous retrouvez dans ce cri, alors « faisons la route ensemble » et laissons les autres se battre pour leur chapelle, tout en les suppliant de ne pas briser et casser le petit reste qui reste. Ils nous doivent bien cela, n’est-ce pas ? Après tout, c’est leur pays aussi ! Donc Haïti d’abord s’il vous plait !!!

vendredi 10 décembre 2010

HAITI-ELECTIONS DU 28 NOVEMBRE 10, LES SEPT OPTIONS DE SORTIE DE CRISE

HAITI-ELECTIONS DU 28 NOVEMBRE 10, LES SEPT OPTIONS DE SORTIE DE CRISE
Jean Robert JEAN-NOEL
10 Décembre 2010

2010 est à ma connaissance l’année la plus terrible qu’Haïti ait connue. En effet, notre pays fut victime du tremblement de terre qui a fait plus de 250000 morts et des dommages estimés à 120% du PIB de 2009;le cyclone Tomas a fait une dizaine de victimes et des dommages estimés à des dizaines de millions de dollars américains ; le choléra a franchi le cap de 2000 morts, et les résultats des élections du 28 novembre ont provoqué près d’une dizaine de morts et des dommages importants aux Cayes, au Cap, à Port-au-Prince, à Pétionville et une paralysie du pays depuis la proclamation de ces résultats. Les résultats de ces élections viennent exacerber la crise haïtienne. Quelles sont les options possibles pour s’en sortir ?

La crise électorale et ses racines historiques
Cette crise est en grande partie provoquée par le pouvoir en place. En effet, après la prise du pouvoir en 2006, au lieu de réaliser les élections indirectes pour la mise en place du Conseil Electoral Permanent (CEP), le Président Préval et son Premier Ministre, Jacques Edouard Alexis, avec la complicité de certains leaders politiques, préférèrent procéder à la mise en place d’un nouveau conseil électoral provisoire(CEP). Ce nouveau CEP avait organisé les sénatoriales contestées de 2009. Ces sénateurs « mal élus » ont permis au pouvoir d’asseoir sa mainmise sur le Parlement qu’il avait déjà dominé au niveau de la chambre basse grâce à un contrôle du groupe parlementaire CPP. Cette mainmise permit au Président de se débarrasser de Mme Pierre-Louis, la Première Ministre qui, entre temps, avait remplacé Mr Jacques Edouard Alexis, lui-même lâché par le Président et renvoyé par le Senat alors dominé par les Sénateurs qui allaient par la suite se considérer comme des opposants au Président Préval, et qui, paradoxalement, allaient prendre position pour Mme Pierre-Louis lorsque le Président décida de s’en débarrasser. Cet appui à Mme Pierre-Louis et les bons résultats obtenus par cette dernière(2.9% de croissance du PIB en 2009) n’avaient pas empêché le Président de la renvoyer malgré l’avis contraire de la plupart des haïtiens et de la communauté internationale, et de la remplacer par Mr Jean Max Bellerive, le Premier Ministre actuel. Le Président, sûr de ses forces et ayant le vent en pourpre, créa le Parti INITE et procéda à un léger remaniement du CEP qui avait prévu d’organiser les législatives en février 2010, et ce, malgré les protestations de l’opposition. Ces législatives n’avaient pu avoir lieu à cause du tremblement de terre du 12 janvier 2010, et ont du être fusionnées avec les Présidentielles pour être organisées le 28 Novembre 2010, malgré le refus de participation d’une frange de l’opposition à cause même, disent-ils, de la mainmise du pouvoir sur le CEP. Ces élections ont pu avoir lieu en effet ce 28 novembre 2010 avec beaucoup d’irrégularités et de fraudes, de l’avis de tout le monde et même du Président de la République lui-même. Sur la crise globale haïtienne vient donc se greffer une crise électorale sérieuse.

Comment sortir de la crise électorale ?
Haïti est au bord du gouffre cette fois-ci depuis la proclamation des résultats préliminaires de ces élections, le 7 Décembre 2010. Pour sortir de la crise électorale actuelle qui a déjà provoqué des dégâts considérables et des pertes en vies humaines, et qui pourrait avoir des conséquences incalculables pour notre pays, il y a plusieurs propositions/options sur le tapis (i) L’annulation des élections du 28 novembre 2010 ;(ii)L’organisation d’un second tour à 4 candidats ;(iii) L’organisation d’un second tour à 3 candidats;(iv) Le renvoi pur et simple du Président Préval ;(v) Le remplacement du Gouvernement tout en conservant le Président jusqu’au 7 février 2010 ; (vi) L’organisation d’un second tour sans le candidat du pouvoir ; (vii)Un compromis entre le pouvoir et Martelly pour « l’élection de Mme Manigat » au 1er tour. Ces deux dernières options sont miennes.

(i) L’annulation des élections du 28 novembre 2010
Cette proposition vient du groupe des 12 candidats à la présidence qui , le 28 novembre 2010, avait lancé un appel à l’annulation des élections pour cause d’irrégularités et fraudes massives. Quand on écoute la déclaration de l’ensemble des candidats, on a l’impression que tout le monde accuse le CEP sans distinction, y incluse la plate-forme INITE qui réclame la victoire à 52%. Cette proposition s’accompagnerait du renvoi du CEP. Cette proposition devrait avoir l’aval du pouvoir et de la communauté internationale pour être mise en application.

(ii) L’organisation d’un second tour à 4 candidats classés en tête de liste par le CEP
Cette proposition a été faite par Gérard Daniel Rouzier avant même la proclamation des résultats des élections du 28 Novembre 2010. Si le CEP en avait tenu compte, cela nous aurait évité la situation actuelle. Mais face à cette situation, cette option peut-elle encore être appliquée? D’autant que Céant qui vient en 4e position reste un farouche défenseur de l’option annulation.

(iii) L’organisation d’un second tour à 3 candidats
Cette proposition est déduite d’une interview de Valérie Numa sur Vision 2000 avec Mme Odette Roy Fombrun. Elle est reprise par certaines personnes qui croient que, face à l’ampleur de la crise électorale, il faudrait une solution politique pour sauver ce qui peut encore l’être.

(iv) Le renvoi pur et simple du Président Préval
C’est ce que demande la frange de l’opposition qui n’a pas été aux élections, c’est ce qu’exigent certains manifestants, c’est ce que proposent certains cadres sur les sites de la diaspora et de certains médias en ligne. Cette proposition n’est pas réaliste pour la bonne et simple raison qu’il ne reste que deux mois à Mr Préval pour laisser constitutionnellement le pouvoir. La mise en application d’une telle proposition dépendrait de la volonté du Président de partir avant l’heure, de la disposition de la communauté à accepter une telle option et de la capacité des manifestants à rester mobilisés sur une période plus au moins longue avec les conséquences désastreuses que l’on sait. Cette option, à mon avis, est à écarter.

(v) Le remplacement du Gouvernement tout en conservant le Président Préval jusqu’au 7 février 2010
Cette proposition prévoit la mise en place d’un nouveau gouvernement qui accompagnerait le Président jusqu’au 7 février 2011. Le Président serait remplacé à partir de cette date par le Président de la Cour des Cassations qui aurait trois à six mois pour organiser les élections. Il est aussi prévu tout un agenda pour ce nouveau gouvernement. Cette proposition sans le dire annulerait les élections du 28 Novembre 2010 et renverrait le CEP. A coté du remplacement du gouvernement qui me parait irréaliste à 2 mois de la fin du mandat du Président Préval, je pense que cette proposition ne permettrait pas d’apaiser la tension actuelle liée en grande partie à l’élimination de Mr Michel Martelly. L’annulation des élections satisferait les 12 candidats, la frange de l’opposition qui n’a pas participé aux élections, certains manifestants, certains cadres de la diaspora, mais lèserait les trois premiers candidats en lice.

(vi) L’organisation d’un second tour sans le candidat du pouvoir
Cette proposition se base sur les conséquences des 2 premières journées de protestation qui traduisent un ras le bol par rapport au pouvoir en place et qui se traduit par le rejet de Mr Jude Célestin en procédant à la mise à feu du local de la plate-forme INITE, des photos géantes de ce candidat du pouvoir, et en lui vouant une hostilité frisant la haine. En fonction de ce constat, Mr Célestin s’effacerait au profit de Mr Martelly. Cette proposition exigerait beaucoup de sacrifices de la part du pouvoir en place qui s’est arrangé pour en garder le contrôle à travers Mr Célestin. Trop d’intérêts de groupes seraient en jeu au détriment de ceux du pays pour l’application d’une telle option. Il faudrait un sens poussé de l’Etat et une compréhension profonde des intérêts supérieurs de la nation haïtienne de la part des tenants du pouvoir pour la mise en application d’une telle proposition. Une déclaration de renoncement de Mr Célestin au profit de Martelly serait l’une des meilleures options pour calmer la tension actuelle selon moi.

(vii) Un compromis entre le pouvoir et Martelly pour « l’élection de Mme Manigat » au 1er tour
C’est une option purement politique pour sauver la situation et ce qui reste de l’intégrité du pays. Jude Célestin (48 ans) et Michel Martelly (49 ans) feraient une déclaration commune qu’ils accordent leurs voix à Mme Manigat (70 ans). Le Président Préval, le CEP et la Communauté internationale prendraient acte et cautionneraient cette solution négociée. Le groupe des 12 ainsi que la frange de l’opposition qui n’a pas participé à ces élections applaudirait cette solution dans un élan patriotique. La société civile prendrait position publiquement pour cette solution politique négociée. Et Haïti étonnerait une fois de plus le monde.
Sommes-nous capables d’une telle grandeur d’âme et d’un tel élan patriotique ? Moi, Jean Robert JEAN-NOEL, je le Crois, et vous ??? A moins que ces leaders qui nous gouvernent ou qui aspirent à le faire n’aient aucune considération pour cette pauvre Haïti « tant chérie » par eux !!!

vendredi 30 juillet 2010

HAITI RECONSTRUCTION, LA CIRH ET LE FONDS FIDUCIAIRE MULTI BAIILLEURS OU EN SOMMES-NOUS ?

HAITI RECONSTRUCTION, LA CIRH ET LE FONDS FIDUCIAIRE MULTI BAIILLEURS OU EN SOMMES-NOUS ?
Jean Robert JEAN-NOEL

Le 26 juillet 2010

Pour les observateurs objectifs, le plan d’action pour le relèvement et le développement national d’Haïti (PARDNH) a eu, depuis sa présentation à la Conférence de Reconstruction de New York au siège des Nations Unies où il a reçu 9.9 milliards d’USD de promesses de financement, quelques résultats physiques et techniques acceptables. A noter que les résultats présentés avaient à voir avec la situation d’avant le séisme et d’après le séisme du 12 janvier 2010. Pour la situation d’après le 12 janvier, on s’est surtout basé sur les prévisions du PARDNH et les actions physiques y relatives et les projets présentés par Haïti à la Conférence de PUNTA CANA (RD) (réf. www.jrjean-noel.blogspot.com ). Au cours de cette conférence, Haïti a présenté ses représentants dans la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti (CIRH) mais a très peu parlé du Fonds Fiduciaire Multi Bailleurs (FFMB). Dans le cadre de la reconstruction où en sommes-nous par rapport à ces deux mécanismes depuis cette conférence de New York du 31 mars 2010 ? Pour répondre à cette interrogation, appuyons-nous sur le PARDNH en regard de ces deux entités et analysons leur situation par rapport aux informations disponibles.

Le PARDNH et les deux entités en question

Selon le PARDNH, « le séisme du 12 janvier marque une rupture dans les approches utilisées jusque là » et nécessite « véritablement une nouvelle forme de coopération, une responsabilité mutuelle Haïti – Communauté internationale dans les résultats à atteindre ». D’où l’obligation « d’agir maintenant tout en mettant en place les conditions de la croissance structurelle nécessaire dans la durée. Aussi, le PARDNH subdivise-il les étapes de la refondation d’Haïti en « trois grands moments » de la planification des interventions (i) La période d’urgence, (ii) La période d’implantation (dix-huit mois) des projets déclencheurs pour cette Haïti de demain, et (iii) La période de concrétisation de la reconstruction et de la refondation d’Haïti sur un horizon de dix ans pour remettre le pays sur la voie du développement et dix ans de plus pour en faire véritablement un pays émergeant, les échéances sur lesquelles Haïti demande l’appui de la communauté internationale pour réussir cette refondation qui s’avère un devoir historique pour chaque Haïtien et chaque Haïtienne ».

La mise en œuvre d’un tel plan exige la mise en place de deux entités inédites jusqu’ici en Haïti, la CIRH et le FFMB.

La Commission Intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti (CIRH)

Selon le PARDNH, la CIRH, qui est commission paritaire composée d’Haïtiens et d’étrangers et coprésidée par l’Ex US Président et le Premier Ministre Haïtien, a pour mission « d’assurer la coordination et le déploiement efficaces des ressources et de répondre aux préoccupations relatives à la responsabilisation et à la transparence afin de maximiser les appuis fournis par les bailleurs de fonds internationaux ». En attendant de devenir la Régie pour le Développement d’Haïti (RDH) après 18 mois, le mandat de la CIRH « consiste à mettre en œuvre le Plan de Développement pour Haïti soumis par le Gouvernement. Elle donne son approbation à des propositions de projets évalués en fonction de leur conformité et de leur coordination avec le Plan de développement pour Haïti, élaborer et solliciter des projets compatibles avec les priorités du Plan de développement pour Haïti et décide de la recevabilité des soumissions externes ». « Les attributions de la CIRH seront exercées dans le cadre de l’état d’urgence. Elle dispose, en Conséquence, des pouvoirs nécessaires en vue d’exercer efficacement sa mission ». D’où cette fameuse loi d’urgence controversée de 18 mois.

Pour exercer correctement sa fonction, la CIRH a en plus de son conseil d’administration (CA) un secrétariat exécutif coordonné par un directeur exécutif. Ce secrétariat « comporte des services de planification, de communications et de gestion de projets, une équipe de conseillers sectoriels et des bureaux attribués au secteur privé et aux ONG. Ce secrétariat est composé d’experts d’Haïti, de la Diaspora haïtienne, et de personnes détachées par les principales institutions financières internationales et les bailleurs de fonds ». Entre temps les modalités de fonctionnement du secrétariat ont été définies et acceptées par le CA. Les membres de la CIRH sont en place, le Directeur Exécutif également.

Le Fonds fiduciaire Multi-Bailleurs ( FFMB)

Qu’en est-il du FFMB ? Voici ce qu’en dit le PARDNH « Le Fonds Fiduciaire Multi-Bailleurs (FFMB) est un instrument qui doit faciliter l’harmonisation entre les programmes et projets nécessitant du financement et les fonds disponibles. C’est un dispositif qui permet de regrouper les fonds pour des programmes dont l’envergure dépasse les capacités d’un seul bailleur de fonds. C’est finalement un mécanisme qui doit en principe faciliter la coordination des aides externes et assurer la saine gestion des fonds mis à disposition pour la refondation d’Haïti ». Toujours selon le PARDNH « Haïti a demandé la création d’un Fonds Fiduciaire Multi-Donateurs dont l’administration sera confiée à la Banque mondiale. Un partenariat regroupant la Banque Interaméricaine de Développement, les Nations Unies et la Banque Mondiale doit permettre d’atteindre les objectifs cités au paragraphe précédent, mais il doit y avoir obligation de résultats, i.e. (1) permettre de mobiliser davantage de fonds et les rendre disponibles plus rapidement, (2) accroître la fluidité des flux financiers, (3) accélérer les procédures d’approvisionnement et de mobilisation des opérateurs pour l’exécution des programmes, (4) fournir, aux partenaires contributeurs, les garanties de probité et de diligence dans l’utilisation des ressources financières et (5) réduire les coûts de transaction de l’aide ».

Le PARDNH rapporte un peu plus loin : « Il est peu prévisible, même si c’est là le souhait du Gouvernement d’Haïti, que tous les fonds disponibles, y compris ceux qui transitent par les agences multilatérales et les ONG, vont effectivement être gérés via ce fonds. Il est donc impératif de préciser la portée effective de la compétence de ce fonds et de ses modalités d’approvisionnement et de décaissement ». Ce qui nous conduit tout droit vers l’analyse de la situation par rapport aux informations disponibles.

Analyse de la situation par rapport aux informations disponibles

A la lecture des informations tirées du PARDHN, il est clair que le GOH devait prendre une loi d’urgence pour favoriser l’évolution de la CIRH. D’un autre coté, la communauté des bailleurs n’était pas tout à fait d’accord avec le souhait du GOH d’avoir un fonds unique pour pouvoir mieux gérer la reconstruction. Elle a estimé que sa façon d’opérer était correcte et qu’elle n’avait pas à se courber par rapport à un souhait du Gouvernement Haïtien. Comme elle était partie prenante de l’élaboration du PARDNH, elle l’a fait passer dans ce document pour pouvoir mieux faire à sa façon par la suite.

D’où les propos de Jean Michel CAROIT dans le journal Le Monde, le 30 mars 10 : « Inspiré par l'expérience de l'agence pour la reconstruction mise en place en Indonésie après le tsunami de décembre 2004, ce modèle risque de se heurter aux réticences de plusieurs bailleurs de fonds soucieux de préserver le contrôle et la visibilité de leurs apports. Pour le responsable de la mission des Nations unies en Haïti, Edmond Mulet, la constitution d'un fonds unique multi donneur serait la meilleure façon d'éviter l'éparpillement des initiatives et les doubles emplois. Craignant que cette formule soit peu réaliste, il suggère que chaque grand bailleur prenne en charge une zone géographique ou un secteur d'activité, ce qui permettrait de mieux évaluer les résultats ». Et un peu plus loin, il rapporte que « C'est aux Haïtiens qu'il appartient de définir leur avenir, répètent les responsables de la communauté internationale (CI) ».

C’est cela notre plus grand problème, nous ne savons pas négocier avec la CI et défendre correctement les points de vue haïtiens argument contre argument. Ainsi, nous nous sommes retrouvés avec une CIRH pratiquement imposée par la CI, malgré les susceptibilités proverbiales de l’Haïtien eu égard à la question de souveraineté du pays. Mais cette CI, malgré les principes de la déclaration de Paris, malgré les multiples problèmes liés à l’harmonisation des procédures et pour des questions de simple visibilité, s’est arrangée pour échapper au FFMB pourtant claironné par le GOH comme une victoire, et surtout pour continuer à fonctionner chacun avec ses propres procédures. Le GOH aurait pu exiger de la communauté des bailleurs d’avoir des procédures consensuelles ou, tout au moins, l’adoption des procédures de l’un des bailleurs. Ce qui fait qu’enfin de compte, le FFMB ne gérerait, selon deux responsables de la CI en Haïti, que 10 à 15% des fonds promis à New-York. Aux dernières nouvelles, le montant total du FFMB est de 500 M d’USD, soit seulement 5% des promesses de NY. Voici ce qu’en rapporte Radio Métropole ce 24 juillet 2010 : « Les 97 millions de dollars représentent moins de 20% du montant total (500 millions) du fonds fiduciaire multi donateur ». La BM serait incessamment en attente des fonds « du Canada, de l’UE, de la France, de la Géorgie, de l'île Maurice, du Qatar, de l'Arabie saoudite, de la Corée du Sud, de l'Espagne, de la Suède et des USA ».

Pour l’auteur de cet article, fin observateur de la situation haïtienne depuis des années, c’est de la foutaise cette belle envolée du PARDNH : « Selon le prospectus du Fonds, ce mécanisme a comme objectif de faciliter le leadership du Gouvernement d’Haïti sur la structure d’approbation et d’exécution des programmes et projets. Il doit en outre permettre de développer une structure de gouvernance inclusive des différents paliers du gouvernement, de la société civile, du secteur privé et des ONG ».

En tout cas, ce qui va se passer, la CIRH, à travers son secrétariat exécutif, va avoir toutes les peines du monde à orienter les programmes et projets vers les multiples bailleurs y inclus cette nouvelle entité, le FFMB, avec l’obligation pour les ministères qui vont exécuter ces programmes et projets de respecter les procédures de ces divers bailleurs de fonds. Ceci va grandement compliquer la tâche de la CIRH et l’Etat Haïtien qui vont être accusés d’incompétents par « manque de capacité d’absorption » à cause même des multiples procédures à appliquer. Malheureusement pour cette communauté internationale (CI), elle fait partie intégrante de cet organe de décision qui s’appelle CIRH et qui deviendra plus tard RDH.

En guise de conclusion, le GOH n’avait pas à souhaiter la mise en place d’un fonds commun mais devait l’exiger. Il fallait forcer les bailleurs à appliquer intégralement les principes de la déclaration de Paris y inclus celui d’Harmonisation. La responsabilité de réussir la refondation d’Haïti est certes avant tout haïtienne, elle est aussi mutuelle par l’implication de nos amis de la CI. S’il est fait exigence au GOH de se courber à certains principes, il en est de même pour la CI. Il est donc du devoir des co-présidents de la CIRH d’exiger de la communauté des bailleurs d’adopter le FFMB ou tout au moins des « procédures consensuelles et célères pour Haïti ». Les 250000 morts l’exigent, Messieurs, et votre devoir le commande également !