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mercredi 2 février 2022

COVID-19- HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS ?(23), INCLUSION VS EXCLUSION OU LE RISQUE DE CONTINUITE DANS L’INSTABILITE POLITIQUE (?)

 

COVID-19- HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS ?(23), INCLUSION VS EXCLUSION OU LE RISQUE DE CONTINUITE DANS L’INSTABILITE POLITIQUE (?)

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

1ER FEVRIER 2022


Dans la chronique no 22  de la thématique « Covid-19 : Haïti et le Monde à la croisée des chemins (?), nous nous sommes penchés sur le bilan 2021 et perspectives 2022, et nous faisions l’hypothèse que si l’année 2021 était « l’année de tous les dangers » avec ses 7 chocs depuis l’assassinat crapuleux du président Moïse, l’année 2022 pourrait être  « l’année de toutes les incertitudes(?)[1]». Si l’on fait un listing de tous les événements encourus durant le mois de janvier 2022 en Haïti et aussi à l’étranger, en particulier le tremblement de terre du 24 Janvier dans le Département des Nippes et l’inondation dans les départements du Nord et du Nord-Est, que je considère comme le 8e Choc et le 9e Choc subis par notre pays depuis l’assassinat du président Moïse, et les ravages de l’Omicron en Europe et aux USA et d’autres faits inquiétants comme la possibilité d’une guerre entre la Russie et l’Ukraine,  cette hypothèse semble s’orienter vers la vérité. En plus, en ce qui concerne Haïti, plus particulièrement, la polarisation politique entre les protagonistes de l’accord de Montana et celui de la Primature semble s’accentuer, surtout après les « élections au second degré (?) », pour répéter le Sénateur Dumont, faisant de l’économiste Fritz Jean le président d’Haïti et de l’ancien sénateur Steven Benoit le premier ministre. Comment déloger le premier ministre actuel, Ariel Henry, et placer à la tête du pays les deux « élus » de Montana, quand le PM actuel persiste à dire que le prochain locataire du Palais National sera issu d’élections au suffrage universel ? C’est la rue qui va trancher, semble suggérer l’un des fers de lance de Montana. La bataille de l’inclusion par rapport à l’exclusion  vient de prendre une autre tournure : au lieu de nous unir pour Haïti, on décide de se battre pour le pouvoir et de continuer dans l’instabilité politique, le vrai responsable de tous nos maux. D’où le titre de cette 23e chronique : « COVID-19- HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS ?(23), INCLUSION VS EXCLUSION OU LE RISQUE DE CONTINUITE DANS L’INSTABILITE POLITIQUE (?) ».

Dans cette chronique, on va voir ensemble brièvement la situation  au niveau mondial avec un clin d’œil sur la situation au niveau de l’Ukraine et  sur le coronavirus et son variant omicron, on s’attardera sur la situation haïtienne de manière globale et sur le dernier développement lié aux « élections de Montana », et on terminera sur les conclusions appropriées.

A.      La situation au niveau mondial

Le monde est troublé. L’Afrique s’enveloppe dans des coups d’Etat (Guinée, Mali et Boukina Faso) et s’ouvre de plus en plus à la Chine et à la Russie. L’Union Européenne  et l’OTAN se préparent à un envahissement de l’Ukraine par la Russie, et comptent sur les USA en pleine confusion pour y faire face. En Asie, la Chine menace d’envahir Taïwan et les USA seraient prêts à aider son allié et mobilisent leurs amis dans la zone Indopacifique en cas de besoin. Et ces bruits de guerres n’arrivent pas à occulter l’actualité par rapport à la pandémie de coronavirus et son nouveau variant, omicron.

Le Coronavirus

Si l’Afrique du Sud d’où est parti l’Omicron semble atteindre une immunité collective par rapport à ce nouveau variant, l’Europe et les USA subissent par contre ses assauts et ce variant jette  la confusion chez les scientifiques par rapport à l’attitude à tenir vis-à-vis des doses de vaccins à y appliquer (3e dose ou pas ?). En tout cas, à date, la situation se présente ainsi[2] :

(i)                  Au niveau mondial, les cas de contamination se chiffrent à 379,460,051, et les cas de mortalité à 5,677,734, avec les USA en tête suivis de l’Inde, du Brésil, de la France, du Royaume Uni et de la Russie.

PAYS

CAS DE CONTAMINATION

CAS DE MORTALITÉ

USA

74,983, 410

887,408

INDIA

41,469,499

496,242

BRESIL

25,463,530

627,589

FRANCE

18,709,368

128,197

ROYAUME UNI

17,315,897

155,754

RUSSIE

11,795,059

325,321

 

(ii)                En Haïti, on dénombre, malgré une épidémie de fièvre et de grippe, 29,217 cas de contamination et 786 cas de mortalité, soit une augmentation de 3,232 cas de contamination, et de 20 cas de mortalité en un mois, mais totalement occultés par les préoccupations socioéconomiques et sociopolitiques.

 

B.      La situation globale au niveau d’Haïti

Globalement, durant ce mois de janvier 2022, Haïti a connu des moments très difficiles, caractérisés par un ensemble d’événements courants et nouveaux qui font craindre que notre hypothèse d’un pays plongé dans les incertitudes les plus surprenantes puisse s’avérer. 

1.       Les diverses interviews des « Grands rendez-vous économiques » de Kesner Pharel du mois de janvier 2022

Je me fais le devoir et le plaisir d’écouter et de regarder religieusement chaque année, les interviews de Kesner Pharel du Group Croissance et de Radio Métropole avec des responsables d’Etat, du secteur privé, des spécialistes  sur la situation haïtienne et sur la situation mondiale en lien avec  Haïti, pour bien m’informer et bien appréhender la situation socioéconomique et sociopolitique au début de l’année. Dans ce mois de janvier 2022, j’ai été tout simplement gâté. J’ai pris un plaisir jouissif à visionner et ré-visionner le package des 6 vidéos constituant autant d’émissions de grands rendez-vous économiques distribuées sur YouTube et jetant un éclairage complet sur la situation globale haïtienne avec des incursions instructives au niveau international, en particulier les USA et la République Dominicaine. J’ai partagé ces vidéos dans le cercle de mes réseaux dans le souci d’informer et d’éduquer. Ce sont des émissions réalisées avec : (i) le ministre de l’économie et des finances, Patrick Boisvert[3], (ii) le gouverneur de la Banque Centrale, Jean Baden Dubois[4], (iii) le représentant du secteur Privé, l’optimiste Pierre-Marie Boisson[5], (iv) le Rédacteur en chef du Journal Le Nouvelliste, Frantz Duval[6], (v) l’économiste professeur à l’Université de Virginia, l’ancien chroniqueur sportif très apprécié de Radio Métropole, Robert Fatton[7], et (vi) le correspondant de Radio Métropole en République Dominicaine, Jean-Michel Caroit[8].

2.       La situation socioéconomique

Après avoir visionné ces vidéos, on sait que la situation globale du pays se révèle  plutôt catastrophique. Sur le plan macroéconomique, le PIB global est négatif -1.8%. Selon un tweet de Thomas Lalime, citant IHSI, « En 2021, les trois principaux secteurs de l’économie haïtienne ont enregistré des baisses significatives. Le secteur primaire s’est incliné de -4.1% contre -2.4% en 2020. Les valeurs ajoutées des secteurs secondaire et tertiaire ont décru respectivement de -2.4% et de -2 % ».Le secteur primaire chute à 18%.

Cela s’explique et est corroboré par les informations fournies par le ministère de l’agriculture lors de la journée porte ouverte, organisée par l’Unité de Statistique Agricole et d’Informatique(USAI) du ministère. Voici ce qu’en a rapporté Le Nouvelliste[9] : «  Les productions de riz, de haricot, de maïs ont baissé respectivement de -14%, -10,74% et -32,61% en 2020 par rapport à l’année précédente…La production de riz est passée de 186 087 tonnes métriques (TM) en 2019 à 159 306 TM, celle de haricot (93 786 TM à 83 717 TM) et de maïs (194 597 TM à 131 132 TM). C’est le même constat pour la production de banane, d’igname, de patate douce et plusieurs autres cultures, à l’exception du sorgho, du manioc, de l’arachide, etc. ». Cette baisse est constatée également au niveau de la production animale et de l’élevage en particulier.

 

On comprend que cette baisse généralisée de la production nationale a entrainé une nette augmentation de l’importation (5.2 Mrds d’USD) rendue possible par les transferts de la diaspora (4 Mrds d’USD), pour des exportations de 1.1 Mrds d’USD. Ce qui a considérablement nui à notre balance commerciale. Et le dollar a regagné ses lettres de créance par rapport à la gourde qui se change officiellement à 101.24 G à l’achat et à 102.73 G à la vente pour 1 USD, et à plus de 110 G sur le marché parallèle. On a aussi noté une nette augmentation du coût de la vie, malgré une réduction du déficit budgétaire au premier trimestre de l’année fiscale 2021-2022. Il faut noter que, même si l’on n’en parle pas, l’industrie du kidnapping est toujours florissante et les actes de terrorisme continuent de se commettre au niveau de la Croix-des-Bouquets (assassinats de civils, de policiers)  et de Martissant (assassinats de passants en bus, à motos et même à pied). Ajoutés à tout cela, le tremblement de terre de magnitude 5.4 du 24 janvier dans les Nippes, 2 morts, 2 disparus, des sans-abri et des pertes matériels importants (plus de 100 maisons détruites et/ou endommagées), et l’inondation dans le Nord et le Nord-Est du pays, les derniers jours du mois, viennent aggraver la situation socioéconomique par les dommages et les pertes de récoltes occasionnés. Avec l’incertitude liée à la situation sociopolitique, on n’est pas prêt de sortir de l’auberge.

 

C.       Analyse de la situation haïtienne par rapport au dernier développement

Depuis l’assassinat du président Moïse,  le pays a subi en 2021, 7 chocs. Le tremblement de terre du 24 janvier et l’inondation dans le grand Nord peuvent être considérés comme les 8e et  9e chocs qui ont frappé le pays. Quant à l’ouragan politique, on en a appris en visionnant les vidéos liées aux grands rendez-vous économiques de Pharel. De plus, cet ouragan semble se renforcer depuis les « élections au second degré» de Montana avec Fritz Jean comme président et Steven Benoit comme premier ministre. Avec la défection des électeurs de FANMI LAVALAS au dernier moment, les 42 grands électeurs, qui ont élu le président et le premier ministre au second degré, ont été choisis au premier degré par qui ? De qui tirent-ils leur légitimité ? Dans la tradition haïtienne des élections au second degré, le peuple élisait au premier degré les députés et les sénateurs qui, eux, procédaient à l’élection au second degré du président de la République. En ce sens, Montana a innové en excluant le peuple, en le remplaçant par une certaine élite.  

Cet événement politique ne favorise pas la résolution de la crise politique, à mon humble avis ; il tue l’espoir de voir fusionner les 2 principaux accords, celui de Montana et celui de la Primature. A ce qu’il parait, il y aurait une alliance entre l’accord PEN et Montana, et certainement avec celui de Louisiane. Dans le cas où le premier ministre actuel ne démissionnerait pas pour laisser la place aux deux « élus de Montana » d’où viendrait la « rédemption du pays », c’est la rue qui déciderait du son sort d’Ariel Henry, selon un membre influent de l’accord de Montana.

L’idéal serait de fusionner l’ensemble des accords en un seul accord. Comme cela ne se fait pas, la bataille pour le pouvoir se gagnerait donc dans la rue. On retournerait à la case départ, comme en 2004 : GNB contre LAVALAS, comme en 2019, 2020 et 2021 : les oppositions contre Jovenel Moïse. En cette année de grâce 2022, à partir du 7 février, les oppositions à Jovenel, scindées en plusieurs protagonistes dans les différents accords, se préparent donc à s’entredéchirer. Quant aux amis de JOMO, on ne comprend pas trop bien ce qu’ils veulent ni ce dont ils ont besoin, mise à part la justice pour Jovenel. C’est vrai qu’ils reprennent dans leur lettre les  priorités prônées  par Jovenel. Mais comment comptent-ils se battre pour atteindre leurs objectifs ?

En plus, il faut s’attendre à ce que des groupuscules qui ne font partie d’aucun accord, les déçus des accords ou de tel accord par rapport à un autre, se repositionnent aussi. Donc, dans les prochains jours, il faudrait s’attendre à un repositionnement des forces en présence, à plus de division au sein de la famille politique haïtienne, à plus de méfiance, à plus d’exclusion.

 

D.      Conclusions

Par rapport à ce qui se passe au niveau mondial, il ne faut pas trop attendre grand-chose des amis d’Haïti vis-à-vis de notre petit pays, malgré  la convocation au Congrès du Président Biden sur le dossier Haïti et la récente rencontre virtuelle organisée par le Canada et les 160 M d’USD prévus pour nous venir en aide. Ces pays sont trop préoccupés par leurs propres problèmes pour se pencher en profondeur sur le dossier d’Haïti, d’autant que nos politiciens ne semblent pas vouloir suivre les instructions de ces pays amis, orientées globalement vers l’inclusion et une bonne entente inter-haïtienne. Or ce qui nous intéresse, c’est de continuer dans la division, accéder au pouvoir au profit de nos clans respectifs au détriment du pays. Donc, comme les mêmes causes produisent les mêmes effets dans les mêmes circonstances, nous risquons de continuer avec les mêmes impairs et nous retrouver dans la même instabilité politique, source de tous nos malheurs.

D’où la nécessité, pour la plupart d’entre nous, de continuer la bataille pour l’inclusion par rapport à l’exclusion, en forçant nos politiciens à se mettre réellement ensemble sans exclusive, à se comporter en gens civilisés, en combattant ensemble l’insécurité, en choisissant ensemble les membres du CEP, en modifiant ensemble la constitution de 1987, en se donnant ensemble une nouvelle constitution, en organisant ensemble la consultation pour sa validation, en réalisant ensemble  les élections générales pour élire au suffrage universel les nouveaux dirigeants du pays qui auront pour principale tâche de fonctionner dans le cadre défini par cet Etat Inclusif, favorisant le bien-être de chaque Haïtien quelle que soit son origine, tenant et aboutissant  du processus de développement du nouvel Etat d’Haïti, élevé au rang de Phare du monde en l’année 2054, l’année de son 250e anniversaire de création. Rêvons ! Espwa fè viv !