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dimanche 3 novembre 2019

HAITI, « PEYI LOK » 3.1, LE SUMMUM DE L’ENTROPIE POLITIQUE



HAITI, « PEYI LOK » 3.1, LE SUMMUM DE L’ENTROPIE POLITIQUE
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
3 NOVEMBRE 2019


Après le Peyi Lok 1, en février 2019, on a eu droit au Peyi lok 2, en juin 2019, et  au mois de septembre 2019 jusqu’à date, c’est le Peyi Lok 3. Dans cet article, nous parlerons de Peyi lok 3.1. C’est comme un logiciel qu’on affine à chaque version. Cette version nous semble être le summum de l’entropie politique haïtienne.

Dans la version du mois de septembre 2019[1], nous avons démontré toute la stratégie mise en place par l’opposition politique haïtienne pour se débarrasser du Président Jovenel Moïse, en obtenant coûte que Coûte sa démission. Et l’ensemble des secteurs organisés sont amenés à l’évidence que le Président devrait partir, pour sauver ce qui peut être sauvé en Haïti, et, aussi, pour éviter d’être une victime expiatoire comme Dessalines, Salnave et Vilbrun Guillaume, tous les trois assassinés au pouvoir.

Comme par magie, malgré une mobilisation dans toutes les grandes villes du pays, une stratégie « Peyi lok » à nulle autre pareille, M. Moïse est encore président d’Haïti. Jusques à quand ? Personne ne sait. Si le Président est encore au Palais, ce n’est pas la faute de l’opposition politique, qui a su non seulement gagner la bataille médiatique, mais aussi et surtout rendre le pays invivable, avec, en plus, par un tour de passe-passe dont elle-seule a le secret, faire passer le Président de la République comme l’unique responsable de cette situation. Inouï !

En effet, le mode opératoire utilisé par l’opposition est le krazebrize. Le pays est bloqué par des barricades. Aucune communication entre la Capitale Port-au-Prince et la province, aucune communication entre les départements du pays, et même entre la plupart des communes et sections communales, sauf dans de rares cas. Le porte-parole de l’opposition, Me Michel André, s’en donne à cœur joie, en incitant la population à monter plus hautes encore les barricades, avec des dérapages au niveau de ces barricades, rançonnement des passants en véhicules, motocyclettes, automobiles, camions de transport. Plus grave encore, ce sont les jets de pierres, les tirs d’armes à feu. Lors des manifestations « pacifiques », les casses de véhicules, de magasins, les attaques de commissariats de police, de tribunaux, d’écoles,  des stations d’essences, de radios, et, qui pis est, des pertes en vies humaines par balles et autres, plus d’une centaine, naturellement attribuées à la Police Nationale d’Haïti (PNH), la seule institution qui fonctionne encore dans le pays. Le seul responsable de toute cette entropie politique est M. J. Moïse, selon l’opposition politique, et personne n’a le droit de penser autrement et surtout de dire le contraire.

Le Président a tenté à plusieurs reprises d’expliquer à la population et à travers la presse, le bien-fondé de sa présence au Palais, la nécessité d’un dialogue inter haïtien pour sortir le pays de cette situation, et, à chaque fois, a réitéré ses appels au dialogue aussitôt rejetés par l'opposition. A chaque sortie, on dirait qu’il jette de l’huile sur le feu. Barikad Pired ! Comme l’opposition et comme il l’a fait à l’Arcahaie, le 18 Mai 2019, en réponse au discours accusateur de la Mairesse de l’Arcahaie[2], il a dénoncé le système et arrêté un certain nombre de mesures à l’encontre de certains acteurs, profiteurs et maitres du système, (casser des contrats d’énergie, engager des firmes d’avocats pour récupérer 123 M d’USD « surfacturés »), passer aux institutions de sécurité publique des instructions pour reprendre le contrôle de la rue. Pourtant, on n’a pas l’impression d’une cassure dans la mobilisation. Au contraire !

En tout cas, chaque axe routier dégagé au niveau de la zone métropolitaine au cours de la nuit, se retrouve barricadé le lendemain. Et les leaders de l’opposition passent de station de radio en station de radio, pour motiver la population et attaquer les mesures adoptées. C’est une véritable guerre psychologique. Entre temps, le pays se meurt. Les barricades fonctionnent à plein régime. Dans la zone de Croix-des-Bouquets, des tirs sporadiques suivis de tirs de gaz lacrymogène vous coupent la respiration, vous font pleurer tant qu’au propre qu’au figuré comme une madeleine. Sortir et revenir n’est pas garanti, de plus, il faut payer votre droit de passage aller-retour à la maison en cas d’extrême nécessité (maladie, récupérer un cousin, un ami à l’aéroport, etc.).

L’inflation passe à 20%, le taux de croissance de PIB est à -1%, le taux de chômage à 66%, selon l’économiste Dr Eddy Labossière. Chaque jour qui passe le pays devient plus pauvre. La situation de l’insécurité alimentaire est alarmante. C’est le cri d’alarme des organisations humanitaires. Les prisonniers meurent de faim, la population également. Les malades ne reçoivent plus de soins, rupture de stocks de médicaments, pénurie de tout, faute de communication entre la capitale et les villes de province. On est en pleine crise humanitaire. Quel sera le prix de ce peyi lok ? En comparaison à l’ouragan Matthew (Octobre 2016), autour de 35 à 50% du PIB de 2018 ? Les études viendront confirmer ou infirmer mon hypothèse.

C’est le contrôle du pays par « djab mele ak bon mas », l’administration ne contrôle rien. Regarder le fonctionnement des barricades ; contrairement à l’affirmation de Me André, ce ne sont pas les pétrochallengeurs qui en ont le contrôle, ce sont, pour la grande majorité, de véritables bandits armés. Trois de mes amis agronomes et ingénieur ont failli y laisser leur peau. L’opposition par l’organe de Me André dit qu’elle circule dans le pays sans aucune difficulté. Elle a pu traverser sans problème une cinquantaine de barricades de Croix-des-Bouquets à Mirebalais, alors que les médecins qui travaillent à l’hôpital de Référence de Mirebalais ont toutes les peines du monde à s’y rendre. C’est le tableau grimaçant de cette entropie politique.

Dans cette bataille rangée entre nous, le Bureau Intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), opérationnel depuis le 16 Octobre 2019, ne se fait pas encore sentir. Les américains regardent d’un œil distrait ce qui se passe dans ce « pays de merde » car le Président Trump est empêtré dans une procédure de destitution votée par la Chambre des Représentant à majorité démocrate. Les pays amis d’Haïti sont plus dans l’expectative qu’autre chose. On annonce l’arrivée sous peu d’un navire hôpital américain dans la rade de Port-au-Prince, on parle aussi d’arrivée d’aide humanitaire doublée d’une aide logistique sollicitée par l’Administration haïtienne auprès de l’Administration américaine, cette aide commencerait à arriver par avions selon ce qui circule sur les réseaux sociaux. Il semblerait que deux autres bateaux américains devraient arriver incessamment. Lors d’une des interventions du Président Moïse, il a parlé d’un programme de 70,000 emplois qui serait en cours dans le pays. Il faudrait arriver à la concrétisation de tout cela pour atténuer cette entropie politique et ses conséquences sur le social et l’économie, qui ont atteint leur summum  à partir de ce Pays Lock 3.1.

Dans l’hypothèse de n’importe quelle solution à l'amorce de la résolution de la crise, il faudrait  (i) mettre en place un gouvernement inclusif, (ii) contrôler la situation d’insécurité, en particulier les bandits au niveau des barricades et dans les zones de non droit, (iii) mettre en place un programme humanitaire d’une durée de 6 mois et à reprendre chaque année jusqu’à atteindre un niveau acceptable d’apaisement social dans le pays, (iv) redémarrer les programmes de développement mis en veilleuse par l’entropie politique tout en les renforçant par d’autres programmes du même genre, (v) préparer et organiser la grande concertation nationale, (vi) amender et/ou élaborer une nouvelle constitution, (vii) Jeter les bases du nouveau système, (viii) préparer et organiser le procès Petrocaribe et les autres procès exigés par la population, (ix), Organiser les élections générales par un Conseil Electoral Permanent, et (x) Mettre correctement en œuvre  le nouveau système pour que, plus jamais,  on ne retombe dans une situation de Pays Lock, avec une entropie politique qui a atteint son summun au cours de cette période sous réflexions et dont la fin est loin d’être prévisible. Que Dieu nous vienne en aide ! Ayez toujours à l’esprit Haïti d’abord et avant tout !