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jeudi 3 décembre 2020

COVID-19 : HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS(9), L’ENTROPIE POLITIQUE ET LE KIDNAPPING (2), « VERS UNE ENTTENTE NATIONALE POUR REFONDER LA NATION (?) »

 

COVID-19 : HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS(9), L’ENTROPIE POLITIQUE ET LE KIDNAPPING (2), « VERS UNE ENTTENTE NATIONALE POUR REFONDER LA NATION (?) »

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

3 DECEMBRE 2020

REVU, CORRIGE ET AUGMENTE LE 4 DECEMBRE 2020

Mes obligations professionnelles ne m’ont pas permis de publier à temps ma chronique mensuelle. Le mois dernier, j’avais terminé ma chronique en m’appuyant sur deux femmes d’âge mur, Mme Odette Roy Fombrun et Mme Suzy Castor Pierre-Charles. Ce mois-ci, je reviens avec cette épineuse question d’entente nationale, sans oublier le Coronavirus qui fait ravage au niveau mondial, en particulier aux Etats Unis d’Amérique où il a grandement influencé la victoire de Joe Biden à la présidentielle, contestée jusqu’à date par le président D. Trump. Ce refus de concession de la part de Trump était prévisible[1], puisqu’il avait refusé, lors des débats d’envisager sa défaite, sauf des cas de fraudes de la part des démocrates. Comme à ses habitudes d’aller jusqu’au bout de sa logique, il est en pleine manœuvre, malgré l’évidence de la victoire de Biden, pour s’être fait élire par les grands électeurs même si cette perspective est de moins en moins envisageable. 

Par contre chez nous, en Haïti, c’est le maintien du statuquo, l’entropie politique, l’aggravation des cas de kidnapping, une véritable « industrie » selon le mot du Nouvelliste, qui engendre une peur panique, décapitalise une population aux abois avec la remontée du dollar (66.71 G pour 1 USD, taux de référence de la BRH au 3 Décembre 2020, 80-82 G au marché informel/ parallèle), et qui incite la Conférence des Evêques  d’Haïti (CEH), la plus haute instance de l’église catholique à offrir sa médiation entre les protagonistes politiques moyennant la preuve de leur « sincérité », exige la CEH[2].

On est donc toujours à la croisée des chemins tant au niveau mondial, où la Covid-19 fait rage et force les gouvernements à lui déclarer « la guerre » à partir des nouveaux vaccins trouvés, qu’en Haïti, où elle amorce une certaine remontée comme le dollar américain mais sans aucune comparaison avec la remontée des cas de kidnapping où nos entrepreneurs en gangstérisme exigent, pour des libérations contre rançons, des montants en dollars américains dépassant largement le million. Ces montants faramineux exigés (au-dessus de la capacité de leurs clients haïtiens et souvent renégociés)  leur permettraient de s’autofinancer (ce qui déterminerait la longévité de cette industrie très lucrative et, jusqu’à présent, sans trop de grands risques), au lieu de dépendre du secteur politique et du secteur privé comme par le passé. Rappelez-vous à ce sujet les propos de l’ex-sénateur, Sorel Jacinthe[3], en pleine séance au Parlement Haïtien[4], le 6 Décembre 2018, « ke se swa nan sectè prive-a, ke se swa nan gouvèneman e nan opozisyon-an, nou tout gen gang» ; M. Jacinthe était  encore allié du pouvoir à l’époque.

1.       CORONAVIRUS AU NIVEAU MONDIAL ET AUX USA

Même si les recherches pour des vaccins anti-Covid-19 aboutissent à des résultats très encourageants au point de favoriser massivement la production de vaccins et l’élaboration des plans de distribution dans la plupart des grands pays les plus affectés, cette pandémie mondiale reste très préoccupante et emportera encore bien des vies, comme celle de l’ancien président, Valéry Giscard Destin, à l’âge de 94 ans, le 2 Décembre 2020, avant les séances de vaccination massive.

Actuellement (3/12 /2020)[5], les cas confirmés se chiffrent à 64, 723,945, les cas de mortalité à 1, 497,093, et les cas de récupération à 41, 492,850.  C’est la situation au niveau mondial, les USA sont toujours en tête avec 13, 943,627 cas de confirmation, 273,920 cas de mortalité, et 5, 322,128 cas de récupération. C’est dans cette ambiance de covid-19 en pleine 2e vague qu’ont eu lieu les élections américaines, le Congrès, le Sénat et la présidentielle.

Elections Américaines

    A la faveur de la mauvaise gestion de la Covid-19, exploitée à fond par les démocrates, leur parti  est en passe de regagner la Maison Blanche, de rester maître du Congrès et de reprendre le Sénat à la faveur du 2e tour de la Sénatoriale dans l’Etat de Georgia en janvier 2021 ; cet Etat est remporté au finish pour la première fois depuis 28 ans par un ticket démocrate, Joe Biden et Kamala Harris, au point que Trump a vraiment insisté pour le recomptage des bulletins dans cet Etat traditionnellement républicain, recomptage qui a confirmé la victoire de Biden. 

    Le président élu a obtenu plus de 6 millions de votes que Trump, avec 306 électoraux votes contre 232, le même score obtenu par Trump en termes de votes électoraux face à Hillary Clinton qui avait plus de 3 millions de votes populaires  que lui en 2016. Malgré tout, Trump qui s’enorgueillissait d’avoir bien battu Hillary avec 306 votes électoraux, refuse d’accepter la victoire de Biden



« Une République bananière »

Jusqu’à date, Trump ne s’avoue pas  vaincu et continue, avec son équipe d’avocats dirigée par  Rudy Giulani, l’ancien maire de New-York, de rendre la vie dure au président élu, au point de le priver, dans un premier temps, d’avoir accès aux dossiers sensibles qui lui permettraient de bien préparer la transition. La stratégie c’est de trouver des failles dans le processus électoral et d’en profiter pour aller jusqu’à la Cour Suprême avec l’espoir de se maintenir au pouvoir grâce à la majorité des juges conservateurs de cette Cour. 

A ce qu’il paraît, il attend la décision de la confirmation ou non des grands électeurs de l’élection de Joe Biden, le 14 Décembre 2020. Même là encore, il ne compte pas concéder la victoire à « sleepy Joe », « le pire candidat » présenté par le parti démocrate, selon M. Trump. Le suspens continue jusqu’au 20 Janvier 2021, le jour de l’investiture des présidents américains. La plus grande démocratie du monde se comporte comme « une République bananière », pour répéter un Gouverneur républicain. Donc notre petite Haïti vient de faire école en termes de contestations post-électorales.

Haïti et la nouvelle vague de Covid-19(?)

Revenons dans notre sacré petit pays. Haïti, qui s’est affranchie de la Covid-19 durant deux mois, s’est réveillée avec quelques poches de la maladie dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, ce qui a poussé le gouvernement à rappeler les mesures barrières, complètement négligées par les haïtiens, ces derniers temps et même au pic de la maladie dans le pays. Les cas relevés à date se traduisent par : 9,313 cas de confirmation, 233 cas de mortalité et de 8,091 cas de récupération. Peut-on parler de nouvelle vague[6] ? C’est trop tôt. 

En tout cas, comme le rapporte Le Nouvelliste, on relève certains cas qui ressemblent à la maladie, mais comme l’a expliqué Dr Pape[7], il y a une grippe saisonnière, Grippe Influenza, qui provoque les mêmes symptômes. Donc il faut être prudent. Pour les cas confirmés à l’hôpital de Mirebalais et dans d’autres hôpitaux, ce sont bien des cas de Covid-19. Mais, jusqu’à présent la structure d’accueil mise en place est loin d’être débordée. 

C’est pourquoi il faudra être précautionneux, surtout avec des jeunes qui reviennent des USA, de la République Dominicaine et qui vont participer à des ambiances festives à la faveur des fêtes de fin d’année et du nouvel an. Le communiqué du ministère de la communication et de la culture s’inscrit dans cette logique[8]. Il faut aussi insister sur l’entropie politique qui favorise les actes de banditisme de FANTOM-509[9] (10 véhicules brulés), sur des manifestations de rue qui,  à partir des rassemblements de plusieurs individus dansant, chantant et brisant souvent, sans respecter les mesures barrières, pourraient aggraver la situation sanitaire en Décembre 2020 et en Janvier 2021.

2.       ENTROPIE POLITIQUE ET KIDNAPPING

Le remplacement du Directeur de la police nationale d’Haïti (PNH), Normil Rameau, par Léon Charles[10], le revenant qui a occupé cette fonction (2004-2005), n’a pas encore l’effet escompté, en témoignent son baptême de feu par FANTOM-509 et l’augmentation des cas de kidnapping en dépit de son discours musclé, et ses ajustements au sein de la PNH.  Les cas de kidnapping sont légion au niveau de la zone métropolitaine et expriment l’arrogance des kidnappeurs qui osent rentrer dans des bureaux privés pour kidnapper des ingénieurs, qui bloquent des véhicules pour emmener les occupants et prendre possession de ces véhicules en plein jour. Ces cas et d'autres,rapportés par Le Nouvelliste, (barricades sur la voie publique, incendies de véhicules, d'édifices publics/privés, port d'armes illégales,etc.) sont désormais considérés comme des actes de terrorrisme, passibles de 50 ans de prison et de tres fortes amendes. (Réf. Décret du 26 Novembre 2020 dans le Moniteur). 

Il faut toutefois remarquer que les cas de kidnapping suivis de tueries  comme celle  de cette jeune demoiselle, Evelyne Sincère,  qui a révolté la conscience de tout le monde au début du mois de novembre, font place à des cas où des kidnappés sont plutôt bien traités moyennant paiement des rançons. Les témoignages d’anciens kidnappés rapportés par Le Nouvelliste[11] en font foi. A noter aussi les 17 arrestations effectuées[12] du 15 Novembre au 2 Décembre 2020 par la PNH. Est-ce le début de l’effet Léon Charles ? Attendons voir !

Par rapport à la situation politique, elle est exacerbée par les positions jusqu’auboutistes des acteurs politiques. Les décrets pris par le pouvoir en place, dont les deux derniers en relation avec la sécurité nationale, kidnapping et autres, création d'une Agence Nationale d'Intelligence (ANI), sans concertation, certaines paroles du Président et/ou de ses conséillers dérangent l’opposition politique et certains membres de la société civile, et le pouvoir en place est agacé par les manifestations violentes et les propos injurieux de l’opposition politique (Jovenel, un Duvalier en herbe?). Est-ce suffisant pour ne pas se parler et rester chacun sur la corde raide? 

En tout cas,le pouvoir met le cap vers la réforme constitutionnelle et éventuellement le référendum y relatif (en Mars 2021, selon le ministre des affaires étrangères, Claude Joseph), et vers l’organisation des élections en 2021, en cela il semble être appuyé par la communauté internationale[13] (Core Group). Quant à l’opposition, elle reste sur sa position première, la démission du Président au plus tard le 7 Février 2021. Leur dernière sortie[14] en témoigne. C’est pourquoi peut-être que l’église catholique se propose à nouveau comme médiatrice pour favoriser une entente inter-haïtienne.

3.       VERS « UNE ENTENTE NATIONALE INTER-HAÏTIENNE POUR REFONDER LA NATION[15] (?)

Par rapport à la situation décrite précédemment, Haïti est vraiment à la croisée des chemins. Le pays se meurt. Le kidnapping tue, décapitalise et appauvrit le peuple. La misère atteint la majorité de la population. Personne ne peut penser au lendemain. Trop de stress, trop de peur. 

La vie se résume à s’enfermer chez soi pour mourir de faim ou sortir dans la rue au risque d’être kidnappé. Pour ceux-là qui disposent les moyens de survivre, ils restent au maximum à la maison. Pour la grande majorité, ils préfèrent sortir affronter la réalité. Ils n’ont pas le choix. Rester chez soi c’est la mort assurée par la faim ; sortir c’est peut-être le kidnapping, l’insécurité, mais c’est aussi une chance  d’avoir quelque chose à mettre sous les dents. 

C’est dans cette ambiance qu’évolue le peuple dans sa grande majorité, surtout au niveau de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Tout ceci est lié à la situation politique, cette instabilité qui favorise les nageurs en eau trouble. La CEH l’a compris et se propose de nous aider à nous en sortir. On ne sent pas l’empressement de nos politiciens à saisir la balle au bond. C’est comme s’ils se complaisent dans cette crise sans fin. C’est comme si leur survie en dépend.

En tout cas, les évêques insistent, en dépit de tout, sur la nécessité d'une « entente nationale inter-haïtienne pour refonder la nation ». Le chat échaudé craint l’eau froide. Ils veulent toutefois avoir la garantie de sincérité de nos politiciens avant de se lancer dans cette nouvelle initiative pour sauver ce qui peut l’être encore dans notre pays. Ils attendent la réponse de nos politiciens. Ils disposent aussi des critères pour évaluer la sincérité de nos politiciens pour ne pas répéter les erreurs du passé.

Ainsi, « La CEH peut jouer un rôle dans les initiatives nationales qui veulent rassembler les forces vives du pays afin de dégager un consensus pour remettre les institutions en place et redonner confiance au peuple mais à certaines conditions. Il est possible de trouver ce consensus même si les acteurs veulent souvent rester sur la corde raide. Avant de nous engager à jouer un rôle de médiateur, nous allons être vigilants en nous assurant de la sincérité des acteurs dans la mesure où ils ne veulent pas utiliser les institutions comme ascenseur pour arriver à leurs fins. Nous avons nos critères pour juger de leur sincérité, autrement nous n’allons pas participer ».

A vous, Messieurs et Dames, les politiciens et politiciennes de vous engager! La balle est dans votre camp. Saisissez-la pour sauver la patrie commune et la sortir des griffes des kidnappeurs. Que Dieu nous vienne en aide !!!



[8] Id.