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mercredi 8 mai 2024

HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (45) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ET GUERRE ISRAELO-HAMAS/IRAN ; HAITI : LE CONSEIL PRESIDENTIEL VS BANDITS

 

HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (45) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ET GUERRE ISRAELO-HAMAS/IRAN ; HAITI : LE CONSEIL PRESIDENTIEL VS BANDITS

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

7 MAI 2024

La 44e chronique sur l’interrogation « Haïti et le monde à la croisée des chemins (?), a analysé la situation mondiale et haïtienne, en se basant sur les guerres Russo-Ukrainienne, Israélo-Hamas, et sur la complexité de la saga haïtienne, dominée par les gains territoriaux des bandits et leur visée de la prise directe du pouvoir Haïti.

Dans cette 45e chronique, les mêmes thèmes persistent auxquels il faut ajouter l’Iran qui régionalise un peu plus le conflit Israélo-Hamas, tandis qu’en Haïti, l’installation du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) semble faire pencher la balance du coté de la communauté internationale (CI) par rapport à la visée des bandits d’imposer leur solution ou tout simplement de faire partie de la solution.

Pourtant, rien n’est joué si l’on se base sur les déclarations des bandits et des luttes internes pour la présidence du CPT. On croirait que la situation épineuse d’Haïti n’affecte en rien les deux acteurs de terrain de la crise multiforme du pays, à savoir les bandits qui continuent avec leurs stratégies d’occupation de territoires et de rendre invivable la vie en Haïti, tandis que les membres du CPT se préoccupent de qui sera président du CPT, au point de se diviser en deux groupes dont celui majoritaire a fait le choix d’Edgard Leblanc. Et les pratiques de corruption semblent régner de plus belle au sein de ce CTP.

C’est pourquoi je titre cette 45e chronique : « HAITI ET LE MONDE A LA COISEE DES CHEMINS (?) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ET GUERRE ISRAÉLO-HAMAS/IRAN ; HAITI : LE CONSEIL PRESIDENTIEL VS BANDITS.

I.           SITUATION AU NIVEAU MOMDIAL

Avant de rentrer dans le vif du sujet en relation avec les grands points d’actualité internationale que nous allons analyser, parlons rapidement de l’élection présidentielle au Sénégal gagnée haut la main par Bassirou Diomaye Faye (44 ans), l’homme avec deux épouses officielles, qui, en moins d’une semaine après son investiture, a mis en place avec son Premier Ministre, Ousmane Sonko, un gouvernement de plus d’une vingtaine de ministres et arrêté des mesures en faveur du Sénégal par rapport à la Communauté Internationale. C’est un événement en soi, et dans un pays africain en plus. On pourrait se pencher sur la saga Trump qui occupe l’actualité aux USA. On y reviendra dans un article ultérieur.

Maintenant regardons ensemble les autres points saillants de l’actualité internationale : La guerre Russo-Ukrainienne, la Guerre Israélo-Palestinienne et l’engagement américain dans ses deux conflits et leurs répercutions sur la politique interne américaine.

1.1.     Guerre Russo-Ukrainienne, les Russes à l’offensive

Par rapport à notre dernière chronique, la situation a connu des avancées diverses de la part des Russes et des Ukrainiens. L’Ukraine qui perd du terrain dans le Donbass, se contente de défendre surtout les zones-clés de la ligne de front de 1200 Km et de toucher les sites stratégiques de la Russie (Usines Gaz, Pétrole, centres de production des armes et munitions, aérodromes). Sur le terrain, les Russes avancent avec beaucoup de pertes en vies humaines et en matériels militaires, mais en grignotant du terrain ukrainien, en étant actifs sur plusieurs zones névralgiques du front et en continuant à bombarder à distance les 7 grandes villes ukrainiennes avec des fortunes diverses.

Malgré les 61 Mrds d’USD votés par la Chambre Basse des USA, les Russes avancent inexorablement en attendant la concrétisation de cette aide sur le terrain, les Ukrainiens se battent à 1 contre 4 à 5 dans certaines zones. Avec un manque criant de munitions et d’hommes, c’est un véritable exploit de leur part. Ingénieux, avec les moyens du bord, ils arrivent à frapper la Russie en profondeur à partir de matériels adaptés et fabriqués en Ukraine pour la grande majorité, en détruisant des usines et des aérodromes et avions russes. Ils utilisent les matériels occidentaux (britanniques, français et autres), mis à disposition pour frapper la Russie, surtout dans les zones occupées. Les dégâts sont conséquents, 13% de l’économie russe liées au Gaz et au pétrole sont perdus. Les Américains ont demandé aux Ukrainiens de suspendre les bombardements sur le gaz et le pétrole, malheureusement sans succès. Il faut noter que l’effort de guerre de la Russie se base sur l’exportation de ces produits, tout en manœuvrant par alliés interposés dont l’Iran, pour nuire à l’approvisionnement de l’Ukraine en armes et en munitions.

1.2.     Guerre Israélo-Hamas, l’Iran s’implique davantage

En effet, Israël était un gros fournisseur de l’Ukraine  en armes et munitions. Sous l’instigation de l’Iran, allié de la Russie, le Hamas a déclenché, le 7 octobre 2023, la guerre Israélo-Hamas, privant par ainsi l’Ukraine de l’appui israélien. Israël est devenu trop occupé dans son offensive contre le Hamas dans la bande de Gaza, dans ses démêlés avec le Hezbollah libanais et les Houthis du Yémen, tous des proxis d’Iran, pour continuer à aider l’Ukraine.

Les alliés occidentaux d’Israël comme les USA, les Britanniques et les Français, ont dû prioriser leur allié par rapport à l’Ukraine. Les Israéliens, qui ont dû frapper un consulat Iranien en Syrie, tuant une quinzaine de personnes dont des généraux de l’Iran, ont eu comme réponse une attaque massive et directe de l’Iran de 300 drones et missiles supersoniques et balistiques dont 99% ont été interceptés par Israël et ses alliés occidentaux et arabes. Israël a dû répliquer en attaquant des bases iraniennes sans succès si l’on en croit la dérision avec laquelle le ministre des Affaires étrangères de l’Iran a ridiculisé cette attaque israélienne. Ceci a eu pour effet de désamorcer l’escalade au niveau de la région.

Entre temps, le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, maintient la pression sur la bande de Gaza malgré les injonctions américaines pour un cessez-le-feu, en continuant à raser les infrastructures (bâtiments et autres) et à tuer les Palestiniens de cette zone sous prétexte d’éradication des leaders du Hamas. Ce qui a provoqué une antipathie presque mondiale contre Israël, en particulier aux USA, où les étudiants propalestiniens protestent avec violence contre le génocide israélien. Comme l’a souligné un citoyen engagé haïtien, Dimitri Norris : « Israël à force de se croire au-dessus des lois et de toutes autres formes de considérations est peut-être en train de perdre la seule bataille qui vaille, celle de l'opinion publique américaine. »

1.3.     Les Américains s’engagent un peu plus

Le Gouvernement américain, malgré les protestations de la plupart des étudiants et d’une bonne partie de la population propalestinienne, a dû se battre pour le vote d’un bill de plus 100 Mrds d’USD pour venir en aide à l’Israël et à l’Ukraine. L’engagement américain du côté israélien a permis de faire face à l’attaque de l’Iran, et aussi à se défaire des attaques des Houthis pro-iraniens au niveau de la Mer Rouge et dans la protection des navires qui traversent le Canal de Suez. Malgré tout, plus de 35% du commerce mondial ont dû éviter cet itinéraire. Ce qui contribue à la situation d’inflation que vit le monde actuellement et en particulier les USA, en pleine année électorale.

J’emprunte ce constat de Dimitri Norris pour terminer la synthèse de l’actualité mondiale et faire la transition vers la situation haïtienne : « Enfin on ne saurait ne pas terminer cette synthèse de l’actualité mondiale sans mentionner l'intervention du représentant de la Fédération de Russie au Conseil de Sécurité sur le dossier haïtien. Définitivement le peuple haïtien et la nation haïtienne ont un champion et je parie que la question haïtienne est une des priorités de la diplomatie russe ». 

II.        SITUATION AU NIVEAU D’HAITI

Depuis la mise sur pied, le 29 février 2024, de ce mouvement « viv Asanm » par des bandits, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Ariel Henry, « deyò, deyò nèt » a officiellement démissionné ; les bandits ont posé des actes répréhensibles malgré leurs promesses d’accompagner le peuple dans une forme de révolution contre ses bourreaux et de changer le système haïtien ; le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) est mis en place et la division reprend le dessus comme d’habitude.

2.1.     Les bandits persistent et signent

Pendant tout le mois de mars et jusqu'à la fin d'avril 2024, la zone métropolitaine de Port-au-Prince a été ravagée par des actes criminels sans précédent. Les bandits ont ciblé une quinzaine de commissariats de police, assassinant des agents et s'emparant d'armes ; des prisons ont été attaquées, entraînant la libération de plus de 4000 détenus, renforçant ainsi leurs rangs ; plusieurs ministères ont été saccagés et leurs équipements et archives détruits ; des banques et des entreprises privées ont été cambriolées, avec des vols d'argent, de nourriture et d'autres biens ; des institutions gouvernementales ont été délibérément détruites, y compris les archives nationales et le journal Le Moniteur ; des établissements de santé et des pharmacies ont été pillés, avec des équipements détruits et des médicaments volés ; des écoles, tant publiques que privées, ont été dépouillées et vandalisées, y compris le Collège Saint Martial ; même les facultés d'État ont été attaquées, avec des dommages infligés aux installations de l'Agronomie, de la Médecine, de l'École Normale Supérieure, entre autres ; des domiciles privés ont été la cible de pillages, de vols, de viols et de violences meurtrières. Ce déchaînement de violence au nom de la révolution ne fait que perpétuer la souffrance du peuple depuis trop longtemps.

Donnons la parole à nouveau à notre ami Dimitri Norris : « Et parlant de mutilations ce qu'on retiendra du mois d'Avril 2024 c'est les destructions d'ouvrages marqueurs de l'identité haïtienne par la coalition de gangs "Viv ansamm". Elle dit vouloir faire la révolution… La mise à sac de la bibliothèque nationale, des Presses nationales, du Petit Séminaire Collège Saint Martial et de tant d'autres monuments marquant la mémoire nationale et surtout plus encore la destruction de l'école Élie Dubois montre que sous un narratif de révolution est en train d'avoir lieu un génocide civilisationnel et mémoriel. »

La zone métropolitaine de Port-au-Prince est pratiquement sous le contrôle des bandits, on estime à 10% l’espace sous le contrôle de l’Etat. La majorité des gens restant au niveau de la zone métropolitaine se concentre sur ces 10% de territoires. Plus de 150,000 personnes ont abandonné la zone métropolitaine en se réfugiant dans les zones de province. Une crise humanitaire est en train d’être vécue au niveau de la zone métropolitaine avec des répercutions sur les zones de province. Or il se trouve que cette zone représente environ 80% des activités économiques du pays et le point central de toutes les décisions politiques. Le pays est donc paralysé à l’heure actuelle, les communications avec les zones de provinces sont pratiquement inexistantes, les bandits contrôlant les entrées et les sorties de la zone métropolitaine. Que restera-t-il au conseil présidentiel de transition comme territoire à gérer au niveau de la zone métropolitaine de Port-au-Prince

2.2.     Le Conseil Présidentiel de Transition et les préoccupations politiciennes

Après maintes tractations de la communauté internationale à travers la CARICOM, une solution institutionnelle en dehors de la constitution a été trouvée avec les acteurs politiques pour la mise en place d’un Conseil Présidentiel de Transition (CPT) de 9 membres dont 2 observateurs. Ce CPT devra choisir un premier ministre, mettre en place avec le premier ministre un gouvernement, rétablir la sécurité, mettre en place un conseil électoral, réformer la constitution à valider par le peuple, organiser les élections générales et remettre le pouvoir aux élus en février 2026.

Cette solution a été contestée par plusieurs groupes dont le groupe Viv ansanm. Certains voulaient utiliser l’article 149 de la constitution de 1987, d’autres comme « viv Ansanm veulent faire partie de la solution. Le CPT a eu toutes les peines du monde à être installé. Une fois installé, les divisions apparaissent au grand jour quant au choix du coordonnateur. Et Haïti continue de se péricliter au grand dam du peuple haïtien ne sachant à quel saint se vouer.

Quant à la communauté internationale, elle a applaudi et commence à prendre des dispositions pour l’arrivée de la Force Multinationale. Avec l’arrivée de certains matériels emmenés par les Américains, on sent une certaine panique parmi les bandits qui se traduit par un langage plus conciliant.  Et du côté du CPT et du côté des bandits, les deux principaux acteurs de terrain, Haïti reste le cadet de leurs préoccupations. Que va-t-il se passer ? L’avenir dira le reste.

2.3.     Haïti n’est toujours pas la priorité

Quand on regarde de plus près la situation d’Haïti, les deux groupes qui occupent le terrain n’ont rien à voir avec le bien-être du peuple haïtien. Les bandits se renforcent et veulent accéder directement au pouvoir pour consolider leur prédominance et leurs privilèges afin d'échapper à la justice. Pour les politiciens au niveau du CTP, ils veulent préserver leurs privilèges, ceux de leurs clans et de leurs patrons au niveau du secteur des affaires. Dans les deux camps Haïti n’est toujours pas la priorité. Car ce sont les mêmes qui ont conduit notre pays à cette extrémité et qui se battent maintenant pour accéder au pouvoir politique. Les bandits veulent y accéder pour se protéger, tandis les politiciens pour perpétuer le système ou tout au moins pour le renouveler.

III.      CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES 

La situation au niveau mondial reste très préoccupante. A côté de la guerre Russo-Ukrainienne qui voit l’offensive russe s’accentuer sur le terrain, au point déloger les Ukrainiens sur au moins une position occupée depuis 2014 dans le Donbass, la guerre Israélo-Hamas se régionalise avec les attaques israéliennes sur un Consulat iranien en Syrie, tuant une quinzaine de personnes dont des généraux iraniens. Les Iraniens ont dû directement répliquer. Ils ont envoyé   300 drones et missiles, interceptés par les Israéliens avec l’appui de ses alliés occidentaux, dont en premier lieu les Américains. Les Israéliens ont remis ça en attaquant des installations en Iran, sans succès à ce qu’il parait, puisque les Iraniens se sont moqués des Israéliens.

 Le Gouvernement américain qui a déconseillé les Israéliens de répliquer, puisque la massive attaque iranienne n’a tué personne et n’a pas fait trop de dégâts, a quand même forcé le Congrès à passer un bill de plus de 100 milliards d’USD, dont 61 milliards d’USD pour l’Ukraine promis depuis longtemps et bloqués au niveau de la Chambre basse pour des raisons de politiques politiciennes. En attendant l’arrivée de cet argent, les Russes profitent du manque en hommes et en munitions de l’Ukraine pour accaparer plus de territoire dans le Donbass et menacer la ville de kharkiv, la 2e ville du pays.

On comprend que, dans ces circonstances, la crise multiforme et multidimensionnelle haïtienne ne constitue qu’une simple épine dans les pieds de l’Occident, trop occupé avec les deux autres guerres citées plus haut. C’est vrai que la dimension humanitaire de la crise haïtienne force l’ONU à prendre des décisions pour l’atténuer. Cela reste au niveau des palabres. Les actions sur le terrain tardent à se concrétiser si l’on fait exception de quelques avions déversant leurs cargaisons sur le pays. Mais comment atteindre les populations quand les principales routes du pays, surtout à la sortie de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, sont sous le contrôle des bandits ? Il faut noter aussi quelques matériels militaires emmenés par les Américains, créant une forme de panique chez la plupart des bandits.

Ces politiciens, membres du CPT, qui, hier encore, faisaient partie, des groupes politiques qui armaient les bandits, et qui se battent actuellement pour coordonner le CPT, pourraient-ils prendre de la hauteur pour consacrer la première place à Haïti au détriment de leurs intérêts immédiats et personnels ? Le sort du peuple est le cadet des soucis de ces deux groupes qui se battent pour les broutilles de pouvoir. Haïti est vraiment à la croisée des chemins. Quand et comment trouver le vrai chemin à suivre ?