HAITI : LE
PRESIDENT PRIVERT PEUT NOUS SORTIR DE CET IMBROGLIO
JEAN-ROBERT
JEAN-NOEL
30 JUIN 2016
Le 14 Juin 2016, comme le 14 Mai, n’a pas vu partir le
Président Privert qui a remis son sort entre les mains du Parlement selon
l’article 7 de l’accord du 6 Février 2016. Le Parlement s’est réuni
difficilement en Assemblée Nationale, mais n’a su et pu arrêter une décision
sur le sort du Président qui est devenu depuis cette date un « président
de facto ». La raison évoquée, la majorité et la minorité n’ont pas su s’entendre
sur la simple question de vote séparé ou non de la feuille de route et de la
prorogation du mandat du Président Privert. Ce qui a conduit à la mise en
continuation de la séance en Assemblée Nationale. Est-ce la seule explication à
cette mise en continuation de l’Assemblée Nationale (AN)? Il faut aller
chercher ailleurs la vraie explication à ce désaccord entre pouvoir et
opposition. D’ailleurs, la lettre de la minorité au Sénat à l'officiel panaméen, Roberto Zuniga BRID, pour dénoncer la présence du Président Privert parmi
ses pairs à l’inauguration de l'extension du canal de Panama préludait déjà ce qui
allait se passer à cette séance en assemblée nationale, mainte fois convoquée
et renvoyée.
Les mêmes causes produisent les mêmes effets dans les
mêmes circonstances
L’actuel groupe minoritaire au Senat pro martelliste
(Latortue, Cantave, Foucand, Jacques Sauveur Jean, Onondieu Louis, Zenny), agit
comme le G6 (Moïse, Bien-Aimé, Polycarpe, Exius, John Joel Joseph, Jeanty ( ?)
), le groupe minoritaire, qui, sous l’administration Martelly, bloquait toutes
les initiatives gouvernementales, en particulier le processus électoral, en
infirmant le quorum, en s’absentant du parlement pour ne pas voter la loi électorale
amendée (réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/03/haiti-le-dialogue-inter-haitien-lunion.html ).
Ce groupe à l’époque était qualifié d’extrémiste, de
jusqu’au boutiste, de radical ainsi que ses alliés politiques (LAVALAS, le
MOPOD), opposants farouches à Martelly. Voici ce que j’avais écrit au sujet du
G6, le 31 Aout 2014: « En dépit de la mise en place de ce CEP
« acceptable » réclamé par la plupart des acteurs politiques, le
Sénat n’a pas encore voté, plus de 158 jours depuis son vote par la Chambre
Basse, la loi électorale amendée. La grande majorité des haïtiens y inclus
certains anti-Martelly, attendent impatiemment ce vote. A chaque fois, le
Groupe des six Sénateurs radicaux (G6), qui réclame l’application de l’article
289 pour la mise en place d’un CEP constitutionnel, infirme le quorum pour
empêcher ce vote" (Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/08/haiti-imbroglio-politique-desras.html .
Baton ki bat chien blan se li ki bat chien nwa. Les
mêmes causes produisent les mêmes effets dans les mêmes circonstances. C’est ce
que pensent nos politiciens de l’actuelle opposition, proche de Martelly. C’est
l’explication à leur comportement. C’est notre perception de l’actuelle
opposition. C’est le groupe minoritaire au Senat et ses alliés politiques,
opposants farouches à Privert, qui veulent à tout prix le capoter. Le groupe
minoritaire actuel du Senat se comporte de la même manière que le G6, il bloque
la prolongation du mandat du Président Privert en infirmant le quorum. Eux qui
taxaient de radical le G6 par rapport au boycott de l’administration Martelly,
au refus de voter la loi électorale amendée, à la velléité de pousser Martelly
à la démission, font la même chose que
le G6, pousser le Président, J. Privert à l’abandon de son poste de président
provisoire, même si le groupe minoritaire actuel dispose de « quatre (4) ministres au sein du
gouvernement actuel et en veut quatre (4) autres », selon le Sénateur
Bien-Aimé. Ce qu’a catégoriquement nié le Sénateur Latortue. En tout cas, le Sénateur
Bien-Aimé crie fort à ceux qui veulent l’entendre et persiste dans sa vérité.
Il qualifie de tous les adjectifs l’actuel groupe minoritaire du Sénat présidé
par le Sénateur Jacques Sauveur Jean, le rend responsable de tous nos malheurs
actuels et l’accuse avec PHTK d’être à la base des actes de banditisme et de
terrorisme enregistrés au pays ces derniers temps.
Or, en
politique l’évidence n’est pas forcément la vérité
A la faveur
de cette crise politique sans fin, et malgré les intermèdes footballistiques,
Copa America Centenario remporté aux tirs au but par le Chili au détriment de
l’Argentine, la Coupe d’Europe au stade de quart de finale, les forces
rétrogrades ont repris du service. Les bandits passent à l’attaque, le vol, le
viol, le kidnapping, la raquette ; le terrorisme aussi : l’attaque
contre les grandes entreprises étrangères et nationales, notamment
l’hôtel Marriott, la Digicel, la Natcom, Bermahn Motors, Automeca, la Sogebank
à Delmas 30; un mois plus tôt l’attaque du commissariat des Cayes,
l’incendie des pompes à essence. Pour les partisans du pouvoir en place, c’est
l’opposition politique qui opère à travers ses sbires. C’est tellement évident
que dans de telles circonstances l’accusée devrait être automatiquement
l’opposition. Et certains alliés du pouvoir, et non des moindres, ont vite fait
d’accuser PHTK et alliés. Et le commun des mortels a tendance à sauter sur ces
genres de conclusions trop évidentes à mon goût. Or, en politique, l’évidence
n’est pas forcément la vérité. Qui est-ce qui veut entretenir cette division entre nous ? Qui en a
intérêt ? A qui profite le crime ? En tout cas, cette radicalisation
de la situation politique qui favorise les actes de banditisme et de terrorisme
pourrait être exploitée par les ennemis du pays pour nous enfoncer davantage,
et, plus grave encore, pourrait attirer le terrorisme international dans le back
yard américain pour mieux frapper « le Grand Satan » comme il le fait déjà en Europe (France, Belgique,
Turquie). Ce que ne comprennent pas nos politiciens qui s’accusent mutuellement
sans une analyse approfondie et au second degré de ces actes apparemment sans
liens.
Essayer de « Vivre
ensemble »
Alors qu’en réalité, il aurait fallu d’abord penser
pays des deux côtés au lieu de penser clans. Ce qui est en train de se passer
je l’avais déjà prévu à la fin de mon bilan 2014-2015 sur Haïti, où j’avais
fait un certain nombre de recommandations pour sortir de la crise ou, tout au
moins, pour essayer de « vivre ensemble ».
Lisez plutôt : « Ces
recommandations n’auraient de sens que dans le cas d’une entente entre Haïtiens
pour Haïti. Dans le cas d’un déchoucage du clan de Martelly (« opération
Boukina Faso »), le clan de l’opposition radicale jubilerait et aurait
tout gagné sans aller aux élections. Mais il aurait toutes les difficultés du
monde à (i) mettre en place un Gouvernement qui n’aurait d’autre choix que
de « diriger par décret », (ii) maintenir une trajectoire
positive de la croissance économique et (iii) surtout organiser les élections
inclusives à tous les niveaux en 2015 à moins d’un miracle. Haïti retombera tôt ou tard dans la même
crise sous une forme ou une autre avec cette fois-ci le clan Martelly en face,
n’est-ce pas le cas actuellement de Lavalas en souvenir de 2004 ?
Alors pourquoi ne pas s’entendre maintenant avec un Martelly affaibli pour une
Haïti forte et unie? Au lieu d’hériter d’une Haïti faible, désunie et
susceptible de retomber dans les mêmes antagonismes dans un avenir pas trop
lointain ? Elections avec ou sans Martelly ? La balle est dans le camp du
MOPOD et alliés » (Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/12/haiti-bilan-2014-perspectives-2015-du.html ).
Se
démarquer du lot pour proposer…un accord politique, la voie proposée et indiquée aux décideurs
politiques
A cette
phase de radicalisation de la crise comme aujourd’hui qui a des répercussions
sur la situation économique du pays (inflation et taux de change à la hausse,
budget rectifié non voté, non élaboration du nouveau budget au mois de Juin
2016, le Sénateur Privert avait su, face à une situation similaire en Novembre
2014, se démarquer du lot pour proposer.
Lisez avec
attention ce que j’avais écrit à l’époque
à propos de la prise de position du Sénateur Privert :
« Face à cette radicalisation
politique, notre ami, le Sénateur Privert, propose une sorte de sortie de crise
même s’il s’en défend : « Face à cet imbroglio politique et
l’imminence du vide institutionnel qui s’annonce à partir du deuxième lundi de
janvier 2015, seul un accord politique, avec les partis et
regroupements politiques de l’opposition et sous l’œil vigilent des
secteurs organisés de la société, est capable d’éviter au pays de sombrer dans
l’inconstitutionnalité, l’incertitude et le chaos avec toutes ses conséquences
pour les acquis démocratiques, la stabilité politique, la croissance économique
et la paix sociale ». Le Sénateur s’est servi de l’expérience de M.
Préval en 2010 tout de suite après le tremblement de terre, pour faire la
proposition d’éviter le vide institutionnel. Dans cette proposition axée en
grande partie sur la Constitution, on sent l’Homme d’Etat qui veut à tout prix
éviter le chaos. Mais, du côté du G6 au Parlement, du G6+ partis politiques de
l’opposition radicale, voient-ils les choses de la même manière ? De plus,
M. Préval avait la majorité au Parlement donc il pouvait compter sur le
Parlement, ce qui n’est pas le cas pour M. Martelly. De toute manière, pour
éviter le vide institutionnel et… le chaos, aucun sacrifice ne devrait répugner
les vrais Hommes d’Etat. Il a conclu sa proposition ainsi : « Ce
n’est pas une proposition de sortie de crise. C’est uniquement la voie proposée
et indiquée aux décideurs politiques pour éviter, au pays, ce vide
institutionnel et évacuer le spectre grimaçant de l’instabilité et du chaos qui
se profile à l’horizon ». Port-au-Prince, le 20 novembre 2014 ».
(Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/11/haiti-se-conjugue-en-tion-une-lueur.html ).
Sortez nous de cet imbroglio, Monsieur Le
Président !
Qu’est-ce qui empêche à notre ami et
condisciple, une fois au pouvoir, de se souvenir de cette magnifique
proposition pour sortir le pays de
l’imbroglio actuel ? Est-ce que, comme disait souvent mon papa, « l’homme
aux abords du pouvoir n’est pas l’homme au pouvoir » ? En tant que Président
Provisoire, mon ami a-t-il oublié son profil de sénateur « homme
d’Etat » ? Ou encore n’a-t-il-pas le temps de se relire ? Ou est-il tout simplement sous l’influence des groupes et des clans politiques qui l’empêchent
de penser pays ? Mon ami, on est en pleine « instabilité…, le chaos se profile à l’horizon ». Mon
cher Président, ne me dites pas que vous ne pouvez pas choisir cette « voie
proposée et indiquée aux décideurs politiques » au plus fort de la
crise. Cessez de projeter l’image d’un président trop liée à l’ancienne
opposition à Martelly, trouvez un accord politique ou , tout au moins, une
entente avec votre « ami » Martelly et alliés (Evans Paul, Latortue)
pour et au nom du pays, et passer des instructions au CEP pour introduire le
vote électronique dans le processus électoral, en demandant aux pays comme le
Brésil, le Venezuela de nous aider (ils en ont l’expertise) ; et pourquoi
pas la République Dominicaine toute proche ? Pour répéter Ricardo Seitenfus, il ne s’agit en fin de compte que de 13,000 bureaux de vote à équiper
d’appareils électroniques (une bagatelle pour un pays comme le Brésil). Cette
décision réduirait les possibilités de fraudes et donnerait plus de confiance
aux 27 candidats qui ont reconfirmé leur candidature à la présidence, dont Jovenel
Moïse du PHTK, ainsi que les candidats pour le renouvellement du tiers du Sénat
au processus électoral. Rappelons que le vote électronique est une des
recommandations de la Commission Indépendante d’Évaluation et de Vérification
Electorale (CIEVE). Alors faites cet accord politique ou cette entente et
sortez nous de cet imbroglio, Mr Le Président ! C’est votre responsabilité
de Président et d’Homme d’Etat.