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jeudi 31 décembre 2020

COVID-19, HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (10), BILAN 2020 ET PERSPECTIVES 2021, DE L’ENTROPIE POLITIQUE ET DU KIDNAPPING VERS UNE AGGRAVATION DE LA SITUATION OU UNE ENTENTE INTERHAITIENNE (?)

 

COVID-19, HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (10), BILAN 2020 ET PERSPECTIVES 2021, DE L’ENTROPIE POLITIQUE ET DU KIDNAPPING VERS UNE AGGRAVATION DE LA SITUATION OU UNE ENTENTE INTERHAITIENNE (?)

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

31 DECEMBRE 2020

 

1.       INTRODUCTION

Je pourrais reprendre le même titre du bilan 2019 et Perspectives  2020[1], tellement 2020 ressemble à 2019.Toutefois, si, sur le plan politique, on relève certaines similitudes, avec cette fois-ci, la prédominance du Pouvoir Exécutif, un Président de la République doté d’un pouvoir incontrôlable, contrairement  au pouvoir du Parlement, en 2019, et une opposition décidant du rythme de la vie quotidienne. Deux facteurs déterminants dans la vie de tous les jours en Haïti le kidnapping lié à l’entropie politique, qui s’est aggravé en 2020, et le Coronavirus qui s’est invité au festin de la vie quotidienne haïtienne à partir de Mars 2019 à date. Cette pandémie mondiale, qui a fait des dégâts considérables au niveau des grands pays, s’est comportée en bon enfant au niveau de la Caraïbe, en particulier en Haïti, où il a grandement contrarié les plans de l’opposition politique. En effet, l’opposition politique a bénéficié de l’apport non recherché du phénomène de kidnapping (à partir de Décembre 2019 à date) et de la rébellion policière soldée, après des incendies du Local logeant l’Etude de Me Madistin, des stands carnavalesques au Champs de Mars et des chars carnavalesques stationnés au Stade Sylvio Cator, par la création de syndicats au sein de la Police National d’Haïti (PNH). Malheureusement ou heureusement, l’arrivée du Covid-19 a permis au pouvoir en place de retourner la situation politique en sa faveur, sans arriver à juguler le phénomène du kidnapping. Toutefois, l’opposition se prépare à en découdre avec le pouvoir en place et lui donne jusqu’à 7 Février 2021, date, selon elle, de fin de mandat du Président Moïse, pour faire place à « la transition de rupture » prônée par cette opposition. Et le pouvoir en place a, lui-même, les yeux fixés sur le 7 Février 2022, malgré la défaite à la présidentielle américaine de son allié, Donald Trump, et confirmée par les grands électeurs, le 14 Décembre 2020. D’où le titre de ce bilan 2020 et perspectives 2021 : « COVID-19, HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (10), BILAN 2020 ET PERSPECTIVES 2021, DE L’ENTROPIE POLITIQUE ET  DU KIDNAPPING VERS UNE AGGRAVATION DE LA SITUATION OU UNE ENTENTE INTERHAITIENNE (?) ».

Notons que, pour produire ce bilan, j’ai dû revoir le bilan de l’année 2019, passer en revue toutes les chroniques mensuelles produites au cours de l’année 2020, jeter un coup d’œil sur les journaux traditionnels, écouter/visionner les stations de radio et de télévision de tous bords, jeter un œil critique sur les réseaux sociaux, et m’appuyer sur deux textes très intéressants de Frantz Duval[2] et de Thomas Lalime[3], etc.

C’est à la faveur de cette démarche que ce bilan est élaboré. Il passera en revue la situation mondiale en lien surtout avec le Covid-19, s’attardera sur la situation sociopolitique, l’entropie politique et sur la situation socioéconomique et financière, dégagera des perspectives pour 2021, tant sur les plans sociopolitique et socioéconomique, et  se termine sur ce questionnement en termes de l’aggravation de la situation ou d’une entente inter haïtienne (?).

2.       COVID-19, LA SITUATION AU NIVEAU MONDIAL ET EN HAITI

Le coronavirus a atteint, au 31 Décembre 2020[4], le seuil de 83, 207,199  cas de contamination, 1, 813,229  cas de mortalité et  54, 539,148  cas de récupération. La 2e vague de Covid-19 bat des records journaliers en termes de nouveaux cas de contamination en Amérique et en Europe. Ce qui a obligé certains pays européens (France, Allemagne, Italie, etc., et américains (Canada et quelques Etats américains à recourir au confinement de leurs populations). Qui dit confinement dit ralentissement de l’économie, récession (-4.4%)[5]. En effet, la récession mondiale bat son plein avec des taux de croissance négatifs du PIB, le critère de mesure par excellence de l’économie mondiale. Les prévisions pour l’année 2021, malgré la découverte et la distribution des vaccins anti-covid-19, sont plutôt sombres. Et comme le monde fonctionne à la manière d’un grand village, Haïti suit le courant comme tout le monde, certes à un degré moindre par rapport au Covid-19 mais très durement en matière économique.

En Haïti, la 2e vague (89 nouveaux cas 18 et 19 Décembre 2020) a vraiment démarré avec l’arrivée de la diaspora haïtienne, malgré le kidnapping. En septembre, Octobre, c’était plutôt l’accalmie. A ce qu’il parait certains hôtels affichent complets, ou tout au moins, a un taux de remplissage acceptable. Les nightclubs organisent des festivités et accusent un taux de remplissage acceptable vu les circonstances. L’inapplication des mesures barrières favorise cette 2e vague. Même si, comme pour la première vague, le pays n’a pas enregistré beaucoup de morts ni beaucoup de cas de contamination, on enregistre une hausse en ce mois de Décembre 2020. A date, la situation du Covid-19 se présente ainsi, 9,999 cas de contamination, 236 cas de mortalité et 8,598 cas de récupération[6]. La contamination récente de l’ex-président Michel Martelly ferait prendre conscience aux incrédules de la présence de la maladie dans le pays et les inciterait à appliquer les mesures barrières prônées par le Ministère de la Santé Publique et de la Population (MSPP) et dont on constate un regain du travail de sensibilisation en ce mois de Décembre 2020. Ce qui nous ramène à l’objet principal de cette chronique, Haïti bilan 2020.

3.       HAITI BILAN 2020

Le bilan de 2020 du pays haïtien sera analysé sous deux aspects essentiellement, la situation sociopolitique  et la situation socioéconomique.

3.1.  SITUATION SOCIOPOLITIQUE

2020, une tournure plutôt catastrophique

Depuis le début de l’année, la situation politique prend une tournure plutôt catastrophique. A la base de tout cela, un ensemble de faits marquants exacerbant davantage la polarisation de la situation politique :

(i)                  Le kidnapping qui va s’intensifiant, « près de 3000 cas durant 2020, dont plus de 1000 depuis Octobre »[7] et dont la plupart, en plus des rançons faramineuses réclamées, sont accompagnés de viols et d’assassinats;

(ii)                La caducité du Parlement qui a donné lieu à des débats contradictoires au sein de la société et a ouvert une sorte de « boulevard » au Président de la République, devenu par ainsi le seul maître à bord « après Dieu » ;

(iii)               L’échec du dialogue inter-haïtien au niveau de la Nonciature Apostolique qui a fait naitre beaucoup d’espoir mais qui a laissé un goût amer juste à cause de petits détails en lien avec les clans politiques et au détriment du pays ;

(iv)               La rébellion policière alimentée par la bataille pour syndiquer la police nationale d’Haïti (PNH), qui se retrouve, en fin de compte, avec deux syndicats en son sein, aggravant la division au sein de la seule institution du pays chargée de garantir les vies et les biens ;

(v)                 L’apparition au sein de la PNH de FANTOM-509, un corps de bandits  qui incendie principalement les objets appartenant à l’Etat, stands et chars carnavalesques, véhicules, bâtiments publics, en particulier ceux affectés à la confection et distribution, entre autres, des cartes d’identification nationale ou « cartes DERMALOG », selon le sobriquet de l’opposition politique ;

(vi)               La mise en place d’un gouvernement de facto conduit par le Premier Joseph JOUTHE, le 2 Mars 2020, sans un large consensus qui aurait permis de calmer la situation, mais qui a favorisé une reprise en main par le pouvoir exécutif de la situation politique ;

(vii)             L’apparition des deux premiers cas de contamination du Covid-19, le 19 Mars 2020, qui a affaibli considérablement les manœuvres de l’opposition politique et contrarié son agenda;

(viii)           La dégringolade continue de la gourde par rapport au dollar américain avec un pic de 125 G pour 1 USD, son appréciation surprise par rapport au dollar à partir de fin Août 2020 et l’amorce de sa dépréciation à nouveau à partir de Novembre 2020, tout cela a soulevé des débats enrichissants au sein de la société, tout en soulevant beaucoup de questionnement et faisant des heureux et des malheureux;

(ix)               Les multiples décrets controversés du pouvoir exécutif et les tollés provoqués jusqu’à la prochaine publication d’un autre et puis encore d’un autre, tout ceci pleinement assumé par le Président ;

(x)                 L’assassinat spectaculaire du bâtonnier de l’Ordre des Avocats, Dr Monferrier Dorval, et d’un certain nombre de paisibles citoyens, entrepreneurs, travailleurs de presse, dont le seul but est de nous faire peur, nous indigner ;

(xi)               La question de l’énergie qui est revenue sur le tapis mettant le pouvoir en porte-à-faux par rapport à la Cour Supérieur des Comptes et du contentieux administratif (CSCCA) et qui s’est soldée heureusement par une accélération du processus de doter le pays de courant 24/24, cher au Président de la République.

Trois domaines prioritaires du pouvoir en place

Par rapport à cette situation décrite plus haut, il faut mettre à l’actif du pouvoir, en plus de la question énergétique qui connait une grande amélioration, certaines actions de développement telles, (i) la construction du barrage de Marion (en cours), la réhabilitation du périmètre de Latannerie (en cours), la mise en place des pompes solaires sur les petits périmètres irrigués au niveau du Nord-Est, du Nord-Ouest, de l’Artibonite et du Centre ;(ii) la route Hinche–Saint Raphaël, la continuation des travaux sur les tronçons : Ennery-Cap-Haïtien, sur les tronçons : Gonaïves-Gros Mornes-Port-de-Paix-Anse-à-Foleur, sur le tronçon : Beaumont-Carrefour Charles (route Cayes-Jérémie) ;(iii) les travaux de rénovations urbaines à Port-de-Paix, à Port-au-Prince, la cité administrative, pour ne citer que celles-là. Pour les actions physiques, le pouvoir exécutif se concentre, entre autres, sur trois domaines prioritaires, l’énergie, l’agriculture et le transport/Travaux publics. Il faut noter aussi le renforcement de facto du système de santé publique, coronavirus oblige.

« La démocratie à la Jovenel »

Le pouvoir en place est en train de changer l’Etat ; la quarantaine de décrets pris va en ce sens. Pour l’opposition politique, c’est une orientation vers la dictature. Pour le pouvoir, c’est une orientation vers le changement en faveur du peuple haïtien. En tout cas, c’est une sorte d’autocratie et Le Nouvelliste parle de « déficit de démocratisation ». Le Président Moïse croit dur comme fer qu’il est sur la bonne voie dans le processus de changement de l’Etat « pezesouse », c’est « la démocratie à la Jovenel » en nette opposition à des « oligarques » qui prennent le pays en otage. Il croit être en train de casser le cou au monopole. Il croit, comme Préval avant lui, que la Constitution de 1987 favorise le maintien de cet Etat prédateur, corrompu. Il propose de la changer et met en place un comité consultatif indépendant pour rédiger une nouvelle constitution que le peuple haïtien aura à valider ou non dans un référendum, mode opératoire formellement interdit par la constitution de 1987. En plus des décrets déjà pris et à prendre, c’est cette nouvelle constitution(?) qui devrait sonner le glas de cet Etat prédateur mis en place en 1806. Le conseil Electoral provisoire(CEP), concocté de manière controversée, devrait organiser le référendum ainsi que les élections en 2021.

2021, l’année de tous les dangers

C’est bien beau tout cela, mais c’est sans compter avec l’opposition politique qui compte faire échec à tout ce processus assimilé à une marche vers la dictature à la manière de François Duvalier. Pour cela, elle se donne jusqu’à 7 Février 2021, pour forcer le Président Moïse à se démettre de ses fonctions, tandis que ce dernier ne compte laisser le Palais National que le 7 Février 2022. Ces deux dates  symbolisent les enjeux de la bataille politique pour le pouvoir. Elles annoncent la lutte acharnée entre les deux protagonistes politiques pour le pouvoir en 2021, l’année de tous les dangers.

Par rapport à cette situation, quel est le rôle des deux autres pouvoirs de l’Etat, le Pouvoir Législatif et le Pouvoir Judiciaire, et de celui du 4e Pouvoir ?

Pour le Pouvoir législatif, il ne reste que 10 Sénateurs presque tous acquis à la cause du Pouvoir Exécutif, donc inexistant et très peu impliqué dans le débat politique. Mis en part le Sénateur Dumont qui montre au créneau de temps à autre, on n’entend même pas le bruit des autres Sénateurs. Ce sont des symboles d’un pouvoir inexistant dont le sort en monocaméralisme ou en bicaméralisme est en train d’être discuté sans sa participation à l’aune de la nouvelle constitution.

Quant au Pouvoir Judiciaire, c’est le silence ou l’attentisme pour l’héritage du pouvoir exécutif en cas de démission ou départ forcé du Président Moïse[8], le 7 Février 2021. En attendant, c’est le fonctionnement au ralenti ou le non fonctionnement car secoué par des grèves de certaines entités au sein du grand corps judiciaire à n’en plus finir. Le justiciable haïtien ne sait à qui s’adresser, tant ce pouvoir est inopérant. Mises à part les apparitions dans des cérémonies officielles organisées par le Pouvoir Exécutif, c’est le silence, l’indifférence, le wait and see, pour utiliser un anglicisme.

Organes de presse et la prédominance de l’approche binaire

Quant à la Presse ou le 4e Pouvoir, c’est la cacophonie, l’envahissement. Chaque entité de ce corps non organisé joue sa partition sans tenir compte des sons émis par les autres entités. La presse écrite se réduit comme une peau de chagrin, heureusement elle est supplée par la presse en ligne. Quant à la presse parlée, c’est la grosse caisse, beaucoup de bruit pour rien. La presse télévisée est concurrencée par une floraison de chaines sur YouTube, sur Facebook, le tout relayé par d’autres médias comme WhatsApp et  Tweeter. Les informations contradictoires circulent à la vitesse de la lumière. Elle est traversée globalement par les contradictions de la société haïtienne profondément liée à la situation sociopolitique prédominante. Les informations politiques sont légion et occupent l’essentiel de l’information. Tout le monde se déclare journaliste au niveau de ces médias ou leader d’opinion, abordant avec arrogance n’importe quel sujet en relation avec la faune politique.

L’approche binaire ou manichéenne (pour ou contre) est la caractéristique fondamentale de l’ensemble des médias ; très peu développent une attitude objective ou pratiquent l’objectivité qui est la caractéristique fondamentale de tout organe de presse. Ceux-là qui se sont conformés à ce critère de base sont qualifiés « d’équilibristes », dans le sens péjoratif du terme. C’est le règne de la pensée unique. En tout cas et heureusement, certains médias, certains organes de presse et pas des moindres, gardent encore un bon niveau d’objectivité, prenant leur distance par rapport à l’opposition politique ou au pouvoir en place. Ce qui nous permet d’avoir accès à une information de qualité. Malheureusement, les sujets liés au développement du pays n’occupent pas une place de choix au sein de ces médias et organes de presse. Il faut noter à leur décharge, qu’Haïti ne vit que de politique et nous politisons tout, « même le kidnapping », pour répéter «ambassadeur Marli» dans sa dernière sortie sur FB, cette jeune dame qui, dans ses vidéos, nous met face à notre conscience.

3.2. LA SITUATION ECONOMIQUE ET FINANCIERE

« L’année 2019 s’est achevée sur une accalmie politique sur fond de kidnapping, qui avait pris de l’ampleur durant la 2e moitié du mois de Décembre. C’était une année d’ouragan politique qui s’est traduit par un taux de croissance négatif (-1.2%)[9]selon le FMI, (-2%) selon le grand argentier du pays, Joseph JOUTHE », écrivais-je dans ma chronique mensuelle de Janvier 2020, publiée le 2 Février 2020. En fin de compte, le taux de croissance officiel pour l’exercice 2018-2019 était de (-1.7%). Jouthe prévoyait un taux de croissance du PIB de (0.2%)[10]pour2019-2020 contrairement à la Banque Mondiale qui tablait sur une décroissance de (-1.4%) ». Selon l’Agence de développement économique, information rapportée par Thomas Lalime, le taux de croissance  du PIB pour 2019-2020 serait de (-4%)[11]. Les taux de croissance cumulés pour les deux exercices écoulés, si le taux de (-4%) se confirmait, avoisineraient (-5.7%) ; ce qui nous rapprocherait du taux de croissance de 2010 de (-5.5%), après le tremblement de terre. 

Toujours par analogie, les catastrophes politiques, humanitaires (covid-19), naturelles (ISAAS) et le phénomène de kidnapping, qui saccagent le pays depuis les 6,7 et 8 Juillet 2018 à date, seraient comparables aux pertes et dégâts infligés au pays par le tremblement de terre du 12 Janvier 2010. Poussant plus loin mon analogie, au risque de choquer nos économistes, serait-il possible de chiffrer à 120 % du PIB de 2017[12], les pertes et dégâts enregistrés, toutes choses étant égales par ailleurs? Là où le bât blesse, en fonction des informations disponibles, il serait purement impossible d’atteindre en 2021 un taux de croissance du PIB de (5.7%), comme ce fut le cas en 2011 (5.5%) de croissance économique, un an après le tremblement de terre de 2010.  Le FMI prévoit une récession économique mondiale de (-4.4%). Dans la note de cadrage du Premier Ministre Jouthe relative au budget de 2020-2021 (254.7 Mrds de gourdes ou 4 Mrds de USD), il est prévu un taux de croissance positive du PIB de 2.4% en pleine année électorale et de catastrophes politiques annoncées et en pleine année de récession mondiale.

4.          CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES 2021

D’un côté la situation politique annoncée est exacerbée. La polarisation de la situation politique en lien aux dates butoirs du 7 Février 2021 et du 7 Février 2022, qui nécessitent une entente « pour sauver le pays », message de Noël du Président Moïse, risque de s’aggraver. Le phénomène du kidnapping aussi, malgré les efforts de la PNH. La remontée du coronavirus en Décembre 2020 (89 cas en 24 h) et la mutation du virus pourraient, à partir de l’inapplication des mesures barrières, favoriser une 2e vague beaucoup plus sérieuse que la première. C’est vrai que les nouveaux vaccins suscitent beaucoup d’espoir. Comme la Caraïbe n’a pas été trop frappée, c’est naturel qu’il ne soit pas prévu assez de doses pour cette zone. Ce qui pourrait compliquer la situation socioéconomique en cas d’une 2e vague plus contagieuse.

De l’autre côté, la situation socioéconomique ne s’annonce pas du tout rose. Il est à signaler et à souligner, La dépréciation de la gourde depuis Novembre 2020, la vie chère qui s’ensuit, la situation socioéconomique précaire de la population en matière de sécurité alimentaire et de sécurité tout court où les cas de kidnapping forcent les gens à des débours très au-dessus de leurs capacités financières, les prévisions économiques et financières un peu trop optimistes de la part du pouvoir en place, en pleine année électorale, en pleine année de récession économique mondiale. Les perspectives sont plutôt sombres pour 2021.

PERSPECTIVES 2021

Les perspectives pour 2021 s’appuient principalement sur les deux textes respectivement de Frantz Duval du Journal Le Nouvelliste, et du docteur en économie, Thomas Lalime. Citons.

 

« Le cours de l’année qui vient n’est connu de personne. Les hommes et les femmes de ce pays ont en main une partie de leur destin. La providence, la chance, le hasard se chargeront de l’autre partie… Le pays va devoir digérer en 2021 la querelle sur la date de fin de mandat du président Jovenel Moïse, le processus de changement de la constitution qui avance sans consensus ni sur le fond ni sur la forme, les élections générales ou une transition. »

 

« Le premier janvier 2021, Haïti va se réveiller en plein dans le cauchemar de l'érosion de la démocratie. Il n'y aura pas de Parlement, une Constitution en veilleuse, une composition du Conseil électoral provisoire (CEP) contestée, pas assez de cartes d’identification nationale distribuées à un nombre significatif de citoyens et une flopée de décrets baignant dans un esprit autoritaire. Le tout sur la petite musique de la poursuite de la pandémie Covid-19 chez nos pays amis et pour la diaspora. Rien de facile ne nous attend en 2021. » Frantz Duval

 

« Les perspectives pour l’année 2021 ne sont guère reluisantes. Les nuages de turbulences politiques se pointent déjà à l’horizon. L’opposition réclame le départ du président Jovenel Moïse le 7 février 2021 alors que celui-ci voit son mandat se terminer le 7 février 2022. Il n’a jamais réalisé aucune élection depuis sa prise de fonction. En conséquence, des institutions démocratiques sont dysfonctionnelles. Avec la prolifération des gangs armés, il sera très difficile d’organiser des élections libres, honnêtes et démocratiques en 2021. La performance économique de l’exercice fiscal 2020-2021 dépendra du climat politique comme cela a été le cas depuis 34 ans. » Thomas Lalime.

 

Va-t-on vivre une aggravation de la situation socioéconomique et politique en 2021, comme tout le laisse présager, ou trouvera-t-on une entente entre nous « pour sauver notre pays », comme le suggère le Président Moïse dans son message de Noël ??? Question à 4 milliards de dollars américains pour amorcer le développement de notre pays ou sombrer  dans l’inconnu d’une énième occupation.

Nous faisons nôtre ce souhait de Frantz Duval et du Nouvelliste pour ne pas sombrer dans l’inconnu

« En souhaitant du courage et de la clairvoyance à tous en 2021, la rédaction du journal s’associe à la direction et à tout le personnel du Nouvelliste pour dire à chacun : n’ayez point crainte du pire, savourez le meilleur en 2021. ».

 

Meilleurs vœux 2021 à chacune et chacun de vous !!!



[5] FMI

[6] Idem que 4.

[8] Dans ce cas précis, il est prévu de passer la présidence à un membre du Pouvoir Judiciaire, issu de la Cour de Cassation (CC), la plus haute instance de ce pouvoir.

[10] [2]Interview du 1er Janvier avec K Pharel de Radio Métropole

[12] Le taux de croissance du PIB de  2017 est consécutif au passage, en Octobre 2016, de l’Ouragan Matthew, qui a causé des pertes et dégâts estimés à 32% du PIB (PDNA Janvier 2017)

jeudi 3 décembre 2020

COVID-19 : HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS(9), L’ENTROPIE POLITIQUE ET LE KIDNAPPING (2), « VERS UNE ENTTENTE NATIONALE POUR REFONDER LA NATION (?) »

 

COVID-19 : HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS(9), L’ENTROPIE POLITIQUE ET LE KIDNAPPING (2), « VERS UNE ENTTENTE NATIONALE POUR REFONDER LA NATION (?) »

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

3 DECEMBRE 2020

REVU, CORRIGE ET AUGMENTE LE 4 DECEMBRE 2020

Mes obligations professionnelles ne m’ont pas permis de publier à temps ma chronique mensuelle. Le mois dernier, j’avais terminé ma chronique en m’appuyant sur deux femmes d’âge mur, Mme Odette Roy Fombrun et Mme Suzy Castor Pierre-Charles. Ce mois-ci, je reviens avec cette épineuse question d’entente nationale, sans oublier le Coronavirus qui fait ravage au niveau mondial, en particulier aux Etats Unis d’Amérique où il a grandement influencé la victoire de Joe Biden à la présidentielle, contestée jusqu’à date par le président D. Trump. Ce refus de concession de la part de Trump était prévisible[1], puisqu’il avait refusé, lors des débats d’envisager sa défaite, sauf des cas de fraudes de la part des démocrates. Comme à ses habitudes d’aller jusqu’au bout de sa logique, il est en pleine manœuvre, malgré l’évidence de la victoire de Biden, pour s’être fait élire par les grands électeurs même si cette perspective est de moins en moins envisageable. 

Par contre chez nous, en Haïti, c’est le maintien du statuquo, l’entropie politique, l’aggravation des cas de kidnapping, une véritable « industrie » selon le mot du Nouvelliste, qui engendre une peur panique, décapitalise une population aux abois avec la remontée du dollar (66.71 G pour 1 USD, taux de référence de la BRH au 3 Décembre 2020, 80-82 G au marché informel/ parallèle), et qui incite la Conférence des Evêques  d’Haïti (CEH), la plus haute instance de l’église catholique à offrir sa médiation entre les protagonistes politiques moyennant la preuve de leur « sincérité », exige la CEH[2].

On est donc toujours à la croisée des chemins tant au niveau mondial, où la Covid-19 fait rage et force les gouvernements à lui déclarer « la guerre » à partir des nouveaux vaccins trouvés, qu’en Haïti, où elle amorce une certaine remontée comme le dollar américain mais sans aucune comparaison avec la remontée des cas de kidnapping où nos entrepreneurs en gangstérisme exigent, pour des libérations contre rançons, des montants en dollars américains dépassant largement le million. Ces montants faramineux exigés (au-dessus de la capacité de leurs clients haïtiens et souvent renégociés)  leur permettraient de s’autofinancer (ce qui déterminerait la longévité de cette industrie très lucrative et, jusqu’à présent, sans trop de grands risques), au lieu de dépendre du secteur politique et du secteur privé comme par le passé. Rappelez-vous à ce sujet les propos de l’ex-sénateur, Sorel Jacinthe[3], en pleine séance au Parlement Haïtien[4], le 6 Décembre 2018, « ke se swa nan sectè prive-a, ke se swa nan gouvèneman e nan opozisyon-an, nou tout gen gang» ; M. Jacinthe était  encore allié du pouvoir à l’époque.

1.       CORONAVIRUS AU NIVEAU MONDIAL ET AUX USA

Même si les recherches pour des vaccins anti-Covid-19 aboutissent à des résultats très encourageants au point de favoriser massivement la production de vaccins et l’élaboration des plans de distribution dans la plupart des grands pays les plus affectés, cette pandémie mondiale reste très préoccupante et emportera encore bien des vies, comme celle de l’ancien président, Valéry Giscard Destin, à l’âge de 94 ans, le 2 Décembre 2020, avant les séances de vaccination massive.

Actuellement (3/12 /2020)[5], les cas confirmés se chiffrent à 64, 723,945, les cas de mortalité à 1, 497,093, et les cas de récupération à 41, 492,850.  C’est la situation au niveau mondial, les USA sont toujours en tête avec 13, 943,627 cas de confirmation, 273,920 cas de mortalité, et 5, 322,128 cas de récupération. C’est dans cette ambiance de covid-19 en pleine 2e vague qu’ont eu lieu les élections américaines, le Congrès, le Sénat et la présidentielle.

Elections Américaines

    A la faveur de la mauvaise gestion de la Covid-19, exploitée à fond par les démocrates, leur parti  est en passe de regagner la Maison Blanche, de rester maître du Congrès et de reprendre le Sénat à la faveur du 2e tour de la Sénatoriale dans l’Etat de Georgia en janvier 2021 ; cet Etat est remporté au finish pour la première fois depuis 28 ans par un ticket démocrate, Joe Biden et Kamala Harris, au point que Trump a vraiment insisté pour le recomptage des bulletins dans cet Etat traditionnellement républicain, recomptage qui a confirmé la victoire de Biden. 

    Le président élu a obtenu plus de 6 millions de votes que Trump, avec 306 électoraux votes contre 232, le même score obtenu par Trump en termes de votes électoraux face à Hillary Clinton qui avait plus de 3 millions de votes populaires  que lui en 2016. Malgré tout, Trump qui s’enorgueillissait d’avoir bien battu Hillary avec 306 votes électoraux, refuse d’accepter la victoire de Biden



« Une République bananière »

Jusqu’à date, Trump ne s’avoue pas  vaincu et continue, avec son équipe d’avocats dirigée par  Rudy Giulani, l’ancien maire de New-York, de rendre la vie dure au président élu, au point de le priver, dans un premier temps, d’avoir accès aux dossiers sensibles qui lui permettraient de bien préparer la transition. La stratégie c’est de trouver des failles dans le processus électoral et d’en profiter pour aller jusqu’à la Cour Suprême avec l’espoir de se maintenir au pouvoir grâce à la majorité des juges conservateurs de cette Cour. 

A ce qu’il paraît, il attend la décision de la confirmation ou non des grands électeurs de l’élection de Joe Biden, le 14 Décembre 2020. Même là encore, il ne compte pas concéder la victoire à « sleepy Joe », « le pire candidat » présenté par le parti démocrate, selon M. Trump. Le suspens continue jusqu’au 20 Janvier 2021, le jour de l’investiture des présidents américains. La plus grande démocratie du monde se comporte comme « une République bananière », pour répéter un Gouverneur républicain. Donc notre petite Haïti vient de faire école en termes de contestations post-électorales.

Haïti et la nouvelle vague de Covid-19(?)

Revenons dans notre sacré petit pays. Haïti, qui s’est affranchie de la Covid-19 durant deux mois, s’est réveillée avec quelques poches de la maladie dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, ce qui a poussé le gouvernement à rappeler les mesures barrières, complètement négligées par les haïtiens, ces derniers temps et même au pic de la maladie dans le pays. Les cas relevés à date se traduisent par : 9,313 cas de confirmation, 233 cas de mortalité et de 8,091 cas de récupération. Peut-on parler de nouvelle vague[6] ? C’est trop tôt. 

En tout cas, comme le rapporte Le Nouvelliste, on relève certains cas qui ressemblent à la maladie, mais comme l’a expliqué Dr Pape[7], il y a une grippe saisonnière, Grippe Influenza, qui provoque les mêmes symptômes. Donc il faut être prudent. Pour les cas confirmés à l’hôpital de Mirebalais et dans d’autres hôpitaux, ce sont bien des cas de Covid-19. Mais, jusqu’à présent la structure d’accueil mise en place est loin d’être débordée. 

C’est pourquoi il faudra être précautionneux, surtout avec des jeunes qui reviennent des USA, de la République Dominicaine et qui vont participer à des ambiances festives à la faveur des fêtes de fin d’année et du nouvel an. Le communiqué du ministère de la communication et de la culture s’inscrit dans cette logique[8]. Il faut aussi insister sur l’entropie politique qui favorise les actes de banditisme de FANTOM-509[9] (10 véhicules brulés), sur des manifestations de rue qui,  à partir des rassemblements de plusieurs individus dansant, chantant et brisant souvent, sans respecter les mesures barrières, pourraient aggraver la situation sanitaire en Décembre 2020 et en Janvier 2021.

2.       ENTROPIE POLITIQUE ET KIDNAPPING

Le remplacement du Directeur de la police nationale d’Haïti (PNH), Normil Rameau, par Léon Charles[10], le revenant qui a occupé cette fonction (2004-2005), n’a pas encore l’effet escompté, en témoignent son baptême de feu par FANTOM-509 et l’augmentation des cas de kidnapping en dépit de son discours musclé, et ses ajustements au sein de la PNH.  Les cas de kidnapping sont légion au niveau de la zone métropolitaine et expriment l’arrogance des kidnappeurs qui osent rentrer dans des bureaux privés pour kidnapper des ingénieurs, qui bloquent des véhicules pour emmener les occupants et prendre possession de ces véhicules en plein jour. Ces cas et d'autres,rapportés par Le Nouvelliste, (barricades sur la voie publique, incendies de véhicules, d'édifices publics/privés, port d'armes illégales,etc.) sont désormais considérés comme des actes de terrorrisme, passibles de 50 ans de prison et de tres fortes amendes. (Réf. Décret du 26 Novembre 2020 dans le Moniteur). 

Il faut toutefois remarquer que les cas de kidnapping suivis de tueries  comme celle  de cette jeune demoiselle, Evelyne Sincère,  qui a révolté la conscience de tout le monde au début du mois de novembre, font place à des cas où des kidnappés sont plutôt bien traités moyennant paiement des rançons. Les témoignages d’anciens kidnappés rapportés par Le Nouvelliste[11] en font foi. A noter aussi les 17 arrestations effectuées[12] du 15 Novembre au 2 Décembre 2020 par la PNH. Est-ce le début de l’effet Léon Charles ? Attendons voir !

Par rapport à la situation politique, elle est exacerbée par les positions jusqu’auboutistes des acteurs politiques. Les décrets pris par le pouvoir en place, dont les deux derniers en relation avec la sécurité nationale, kidnapping et autres, création d'une Agence Nationale d'Intelligence (ANI), sans concertation, certaines paroles du Président et/ou de ses conséillers dérangent l’opposition politique et certains membres de la société civile, et le pouvoir en place est agacé par les manifestations violentes et les propos injurieux de l’opposition politique (Jovenel, un Duvalier en herbe?). Est-ce suffisant pour ne pas se parler et rester chacun sur la corde raide? 

En tout cas,le pouvoir met le cap vers la réforme constitutionnelle et éventuellement le référendum y relatif (en Mars 2021, selon le ministre des affaires étrangères, Claude Joseph), et vers l’organisation des élections en 2021, en cela il semble être appuyé par la communauté internationale[13] (Core Group). Quant à l’opposition, elle reste sur sa position première, la démission du Président au plus tard le 7 Février 2021. Leur dernière sortie[14] en témoigne. C’est pourquoi peut-être que l’église catholique se propose à nouveau comme médiatrice pour favoriser une entente inter-haïtienne.

3.       VERS « UNE ENTENTE NATIONALE INTER-HAÏTIENNE POUR REFONDER LA NATION[15] (?)

Par rapport à la situation décrite précédemment, Haïti est vraiment à la croisée des chemins. Le pays se meurt. Le kidnapping tue, décapitalise et appauvrit le peuple. La misère atteint la majorité de la population. Personne ne peut penser au lendemain. Trop de stress, trop de peur. 

La vie se résume à s’enfermer chez soi pour mourir de faim ou sortir dans la rue au risque d’être kidnappé. Pour ceux-là qui disposent les moyens de survivre, ils restent au maximum à la maison. Pour la grande majorité, ils préfèrent sortir affronter la réalité. Ils n’ont pas le choix. Rester chez soi c’est la mort assurée par la faim ; sortir c’est peut-être le kidnapping, l’insécurité, mais c’est aussi une chance  d’avoir quelque chose à mettre sous les dents. 

C’est dans cette ambiance qu’évolue le peuple dans sa grande majorité, surtout au niveau de la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Tout ceci est lié à la situation politique, cette instabilité qui favorise les nageurs en eau trouble. La CEH l’a compris et se propose de nous aider à nous en sortir. On ne sent pas l’empressement de nos politiciens à saisir la balle au bond. C’est comme s’ils se complaisent dans cette crise sans fin. C’est comme si leur survie en dépend.

En tout cas, les évêques insistent, en dépit de tout, sur la nécessité d'une « entente nationale inter-haïtienne pour refonder la nation ». Le chat échaudé craint l’eau froide. Ils veulent toutefois avoir la garantie de sincérité de nos politiciens avant de se lancer dans cette nouvelle initiative pour sauver ce qui peut l’être encore dans notre pays. Ils attendent la réponse de nos politiciens. Ils disposent aussi des critères pour évaluer la sincérité de nos politiciens pour ne pas répéter les erreurs du passé.

Ainsi, « La CEH peut jouer un rôle dans les initiatives nationales qui veulent rassembler les forces vives du pays afin de dégager un consensus pour remettre les institutions en place et redonner confiance au peuple mais à certaines conditions. Il est possible de trouver ce consensus même si les acteurs veulent souvent rester sur la corde raide. Avant de nous engager à jouer un rôle de médiateur, nous allons être vigilants en nous assurant de la sincérité des acteurs dans la mesure où ils ne veulent pas utiliser les institutions comme ascenseur pour arriver à leurs fins. Nous avons nos critères pour juger de leur sincérité, autrement nous n’allons pas participer ».

A vous, Messieurs et Dames, les politiciens et politiciennes de vous engager! La balle est dans votre camp. Saisissez-la pour sauver la patrie commune et la sortir des griffes des kidnappeurs. Que Dieu nous vienne en aide !!!



[8] Id.