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lundi 26 avril 2010

HAITI : COMBINAISON D’OPTIONS DE DÉVELOPPEMENT, LE DERNIER COMBAT DE L’INTELLIGENCE COLLECTIVE HAITIENNE

HAITI : COMBINAISON D’OPTIONS DE DÉVELOPPEMENT, LE DERNIER COMBAT DE L’INTELLIGENCE COLLECTIVE HAITIENNE

Jean Robert JEAN-NOEL

25 avril 2010

En 2003, j’avais développé une thèse un peu farfelue pour démontrer à mes amis découragés que notre chère Haïti ne pourra pas périr. Cette thèse était basée sur quatre options de développement : l’option haïtienne, l’option dominicaine, l’option régionale et l’option internationale. J’en avais fait un article qui a connu un certain succès à l’époque (avril 2004), « Combinaison d’options de développement, la porte de sortie pour Haïti ? » (Réf. Le Nouvelliste, et www.jrjean-noel.blogspot.com , avril 2008).

Depuis 2004, c’est la combinaison d’options de développement qui est en application avec la présence des troupes étrangères dans le pays. En témoignent le cadre de coopération intérimaire (CCI) sous les gouvernements de Latortue et d’Alexis, le document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP) sous les gouvernements d’Alexis, de Pierre-Louis et de Bellerive, et le plan d’action pour le relèvement et le développement national d’Haïti (PARDNH) sous le gouvernement de Bellerive et très certainement sous les gouvernements à venir jusqu’en 2030 où Haïti deviendra ce « pays émergeant » et « moderne » selon la vision de l’actuel Gouvernement.

La « souveraineté limitée » ou contrôlée

En effet, depuis 2004, la communauté internationale (CI), sous l’obédience de la Banque mondiale, s’est associée avec les gouvernements haïtiens pour produire les cadres de coopération en tenant compte de leurs points de vue. A ces exercices ont participé, à coté des experts étrangers, les cadres haïtiens de l’administration publique, de la société civile et du secteur privé, avec en prime un certain niveau de validation nationale dans certains cas. Il faut noter et souligner que ces documents sont produits selon les modèles conformes aux « exigences de la communauté internationale et surtout des bailleurs de fonds ». C’est ce que j’appelle la combinaison d’options de développement.

Alors que la combinaison d’options de développement se reflète dans ces cadres de coopération dont les projets/programme s’exécutent à travers des unités de coordination de projets (UCP) créées au sein des structures étatiques, des organisations non gouvernementales (ONG) et des agences de coopération internationale (ACI), les bailleurs de fonds ont mis en place toute une structure de contrôle interne et externe pour s’assurer de limiter la corruption et d’obtenir des résultats, tout ceci doublé d’un ensemble de conditionnalités les unes plus contraignantes que les autres. Ces conditionnalités sont très souvent à la base des retards enregistrés dans la mise en œuvre des projets et programmes et, dans certains cas, des échecs criants enregistrés. C’est l’ère de la « souveraineté limitée » pour répéter le mot du Président Boniface Alexandre.

L’arme de la corruption

Malgré le contrôle exercé par les bailleurs et les efforts du GOH pour la mise en place et le renforcement des structures haïtiennes de contrôle de la corruption, l’ULCC, l’UCREF, la commission nationale des marchés publics (CNMP), la Cours Supérieure des Comptes et des Contentieux administratifs (CSCCA), Haïti occupe toujours les dernières places dans les derniers classements de transparency international. A force de nous répéter que nous sommes corrompus et nous d’utiliser l’arme de corruption contre nos adversaires politiques, et le plus souvent sans preuve, la perception a fini par devenir réalité. J’ai sorti trois articles sur l’indice de perception de la corruption pour demander aux haïtiens de ne pas utiliser le mot corruption sans preuve. Au contraire, on ne fait que cela. Rappelez-vous les 197 M USD : c’est la remise sur pied du CNE, c’est en partie l’augmentation de la production agricole en 2009 de 45% à 53% (CNSA), soit un poids de 8% dans la croissance de 2.9% du PIB de 2009 (MEF). Pourtant, malgré le rapport illustré fourni au Parlement, ces 197 M USD ont été utilisés par le Senat pour renvoyer la Première Ministre, Mme Pierre-Louis. Les leaders politiques utilisent ces 197 M USD pour taxer le GOH de corrompu. Quant à la communauté internationale, elle sait très bien que son argent est plutôt « bien géré » par les UCP et les ACI. Le peu qui passe directement par le GOH a, depuis 2004, plutôt eu une gestion acceptable aux yeux de la CI qui, à travers le FMI, délivre des certificats de satisfécit au GOH, au point de procéder à l’annulation de plus d’un milliard de la dette d’Haïti en juin 2009. Pourtant, lors du voyage du Président Préval à Washington (mars 2010), il y a eu toute une orchestration autour de la corruption au sein du GOH au point qu’il a du se défendre du bec et des ongles par rapport à cette perception. Cette orchestration n’était pas innocente. Elle visait, à mon avis, à forcer la main au GOH pour accepter des mécanismes inédits dans le cadre du nouveau cadre de coopération exigé par la reconstruction, une sorte de grignotement sur la souveraineté déjà limitée de l’Etat d’Haïti.

« La tutelle consacrée »

Avec ce nouveau cadre de coopération d’environ 34 milliards d’USD, le PARDNH 2010-2030, pour lequel les bailleurs se sont engagés lors de la conférence de reconstruction de New York (31 mars 2010) à hauteur de 9.9 milliards d’USD sur 10 ans, les deux parties, le Gouvernement Haïtien (GOH) et la Communauté internationale (CI) se sont donnés deux outils inédits jusqu’ici en Haïti : la commission intérimaire de reconstruction d’Haïti (CIRH) coprésidée par l’ex-Président, Bill Clinton, l’Envoyé Spécial du Secrétaire Général de l’ONU, et le Premier Ministre, Jean Max Bellerive, et le fonds fiduciaire multi-bailleurs (FFMB) sous la responsabilité de la Banque Mondiale (BM). Cette fois-ci, les deux parties ne sont pas seulement liées par des accords internationaux ratifiés par le Parlement mais la combinaison d’options de développement est consacrée par la fameuse loi prolongeant l’état d’urgence de 18 mois et votée séparément par les deux chambres. C’est la « tutelle consacrée » selon certains. D’où les réactions nationalistes de l’opposition accusant le pouvoir de « vendre le pays » et les explications des gouvernants se défendant d’être sous tutelle. D’ailleurs, le Président n’a-t-il pas le droit de véto consacré par cette même loi ? Donc peut-être pas tutelle totale mais souveraineté encore plus limitée qu’avant.

En tout cas, de la « souveraineté limitée » à la « tutelle consacrée », il est clair que le pouvoir ne pouvait pas grand-chose face à cette puissance de la communauté internationale qui a promis 9.9 milliards d’USD et qui avec patience a tissé sa toile d’araignée pour nous amener à cette extrémité depuis des années. Rappelez-vous les divers accords d’ajustement structurel (Marc Bazin, in Le Nouvelliste). Au point que la plupart d’entre nous condamnant publiquement cette occupation, l’acceptent en privé ; il suffit d’écouter la réaction du peuple pour comprendre notre niveau de déchéance par rapport à certaines valeurs inculquées par nos pères fondateurs. De toute manière, à ce stade, être sous tutelle ou pas, cette reconstruction se fera avec ou sans nous, car la CI ne pourra plus se permettre d’échouer cette fois-ci. Faut-il laisser faire pareil ou se battre pour qu’elle ne soit pas que physique et/ou saupoudrage ?

Les actions à entreprendre

Le PARDNH renferme des éléments théoriques pour éviter cela : la refondation territoriale, la refondation économique, la refondation sociale et la refondation institutionnelle. Et puis, il y a ce document « Haïti Demain » produit par le comité interministériel à l’aménagement du territoire (CIAT) qui favoriserait une mise en œuvre harmonieuse du PARDNH. Il en est de même pour le document du secteur Privé, le plan stratégique de sauvetage national (PSSN), le document de la FONHDIIAC. Prenons l’exemple du plan d’investissement du ministère de l’agriculture (environ 800 M USD) qui est partie prenante du PARDNH mais qui demeure essentiellement haïtien et qui, du 22 au 24 avril 2010, a été l’objet de validation dans le cadre d’un débat national. Pour les grandes réalisations physiques, elles pourront être fournies clé en main au GOH selon le modèle de TAIWAN. En témoignent la route Cayes-Port-à-Piment, les stadium de Gonaïves, de St-Marc et du Cap-Haïtien, ce sont des réalisations clé en main de la Firme Taïwanaise, OECC. Cependant on peut penser les choses physiques, les concevoir avec l’étranger même s’il les exécute. Par contre, pour le soft, on peut influencer les choses à notre manière et déboucher sur l’essentiel, l’éducation, la santé, etc. A nous de jouer à l’intelligent! Il ne faut pas non plus l’accaparement de tout par un petit groupe, un petit clan. Nous parlons ici de cette intelligence collective qui nous avait permis d’arracher notre indépendance le 1er janvier 1804. C’est cet exploit qu’il faudra renouveler.

En guise de conclusion, je reprends, en y ajoutant quelques nuances, mes conclusions d’avril 2004. « C’est l’occasion pour nous autres haïtiens sans exclusive qui maîtrisons la question et le terrain et qui sommes conscients de la situation catastrophique héritée de nos deux cents (200) ans de manque de développement et de ce terrible tremblement de terre du 12 janvier 2010, de saisir cette opportunité en faisant taire nos intérêts mesquins, en plaçant la question nationale au centre des débats, en défendant nos points de vue face à l’international et en imposant de manière intelligente notre option de développement à la leur comme on a commencé à le faire dans le PDNA et le PARDNH.

Dans cette nouvelle conjoncture, c’est notre option de développement combinée avec celle de la communauté internationale qui nous ouvrira la porte du salut. Comme l’a dit George Michel, face à l’occupant, Haïti a toujours gagné la bataille politique. Faisons en sorte que cette fois-ci la victoire débouche sur le développement intégral de notre pays pour que le citoyen haïtien compétitif puisse évoluer correctement au sein de son organisation et dans son environnement naturel régénéré et équipé d’infrastructures indispensables avec des moyens économiques et financiers suffisants et grâce à une gouvernance politique responsable et incitatrice. Tout un programme, n’est-ce pas ? »

Ce programme pourrait intégrer le PARDNH lors de sa mise en œuvre durant ces 20 prochaines années et surtout durant les 18 prochains mois.

Alors, Haïtiennes et Haïtiens au sein de l’appareil étatique, de la société civile, du secteur privé et des collectivités territoriales, de la diaspora, conspirons pour une refondation d’Haïti à la mesure de nos ambitions et surtout des ambitions de nos pères fondateurs. Ne soyons pas seulement « intelligents individuellement », comme me disait un ami étranger, mais aussi et surtout collectivement. Cette intelligence collective haïtienne a été imbattable avec des analphabètes en 1803 face à l’adversité des puissances de l’époque, elle le sera encore plus en 2010 avec des haïtiens bien formés tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, et, cette fois-ci, avec l’appui de la communauté internationale. Avec la combinaison d’options de développement comme choix imposé et/ou accepté, la refondation de l’Etat d’Haïti passe nécessairement par l’intelligence collective haïtienne. C’est le passage obligé pour la réussite de ce dernier et long combat pour le développement durable d’Haïti. Etes-vous prêts ? Alors à l’assaut ! Sa Ki…

mercredi 31 mars 2010

HAITI : APRES LE SEISME, LA CONFERENCE DE RECONSTRUCTION DE NY

HAITI : APRES LE SEISME, LA CONFERENCE DE RECONSTRUCTION DE NY
Jean Robert JEAN-NOEL
31 MARS 2010

Le cadre de coopération intérimaire (CCI) 2004-2007 (1.4 mrds USD) avait provoqué son lot de conférences sur Haïti, de juillet 2004 à Washington à novembre 2006 à Madrid. Le document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP) 2008-2011 (4.3 mrds USD) n’a eu droit enfin de compte qu’à une seule conférence, celle de Washington d’avril 2009. Le plan d’action pour le relèvement et le développement national (PARDN) 2010-2030 (34.48 mrds USD) concocté après le 12 janvier 2010 par le Gouvernement Haïtien (GOH) avec l’appui de la communauté internationale (CI) connait sa première conférence, celle de New York, ce 31 mars 2010, au siège des Nations Unies, dont l’objectif est de trouver 3.8 mrds d’USD pour les 18 premiers mois de mise en œuvre du PARDN.

Pour arriver à cette date, il a fallu entreprendre toute une série d’actions tant au niveau du GOH, de la CI et de la société civile haïtienne de l’intérieure et de la diaspora. Dans le cadre de cet article, nous allons essayer de manière objective de refaire le cheminement suivi par ces acteurs impliqués dans le processus de refondation de notre pays.

La catastrophe du 12 janvier 2010

Le séisme du 12 janvier 2010 a frappé Haïti au niveau de deux départements, l’Ouest et le Sud-est. Les villes les plus touchées sont la capitale Port-au-Prince, Léogane, Carrefour, Gressier, Petit Goâve, Grand Goâve, Delmas, Tabarre, etc. pour l’ouest, et Jacmel pour le sud-est. « Plus de 300 000 décès et autant de blessés selon les autorités nationales, 1,5 millions de sans abris et de déplacés, des familles brisées, des orphelins sans ressources ». (PARDN mars 2010). Les dommages et les pertes, dont on mesure chaque jour davantage l’ampleur, sont estimés à près de 8 milliards de $US (environ 120% du PIB de 2009) selon l’évaluation des pertes et des dommages produites au cours des dernières semaines. Selon la même étude, les besoins sont de l’ordre de 11, 5 milliards de $US. (PDNA, mars 2010).

Les actions

Le peuple
Certaines actions sont entreprises tout de suite après les premières secousses par le peuple haïtien lui-même dans le cadre d’une solidarité inter haïtienne extraordinaire permettant de sauver beaucoup plus de vies que toute la communauté internationale avec sa batterie de technologies de toutes sortes, de personnes et de chiens entrainés. Cette solidarité s’est aussi manifestée dans la récupération des cadavres. Selon Jacky Lumarque, recteur de l’Université Quisqueya, sur radio mélodie, un jeune de 15 ans a permis de sauver des vies et dégager des cadavres des décombres de l’université. De plus, on a constaté une grande solidarité dans le partage d’un morceau de pain, d’un récipient d’eau, d’une couche. Il faut signaler qu’actuellement cette solidarité a tendance à s’effriter.

La diaspora haïtienne

Elle va entrer en scène des les premières nouvelles du séisme en interagissant par la seule station qui émettait, Signal FM. Elle va se mobiliser comme elle ne l’a jamais fait au paravent. Et aussitôt les communications rétablies, les maisons de transfert et banques opérationnelles, elle va puiser dans ses réserves pour venir en aides aux parents et amis de l’intérieur. Son action combinée avec d’autres facteurs allait permettre une bonne appréciation de la gourde par rapport au dollar américain. Dans sa composante intellectuelle, elle fera des propositions formelles à la nation moins d’un mois après le séisme sans tenir des nombreuses réflexions émises sur le net. Actuellement, elle continue de peaufiner des plans pour la refondation d’Haïti.

Les politiciens

La plupart des politiciens tout en critiquant le GOH ont fait des propositions intéressantes et d’autres come Rébu ont entrepris des actions en apportant les premiers soins, en hébergeant des personnes, en les nourrissant. D’autres enfin ont gardé le silence. Durant ces dernières semaines, ils sont présents sur les ondes pour s’opposer aux « décisions unilatérales du GOH », au plan de reconstruction réalisé « sans concertation », à la proposition de la loi d’urgence du GOH. De même, quelques semaines auparavant, ils s’opposaient à l’idée du Président d’organiser les élections à la fin de cette année. Mis à part le Plan stratégique de sauvetage national (PSSN) auquel la plupart des politiciens ont collaboré, il n’y a pas à proprement parler de plan de refondation du pays proposé par les partis politiques. Il faut signaler aussi que le Parlement n’est pas resté inactif durant cette période sous étude. Il n’y pas eu de démarche dans le sens d’une proposition pour la refondation de l’Etat mais seulement un souci de mettre un GOH à la hauteur de la situation avec intégration de nouvelles personnalités.

Le Gouvernement

Quant au GOH, malgré une grande hébétitude durant les premières heures après le séisme, il a su réagir en apportant des secours, en procédant aux enlèvements des cadavres qui jonchaient les rues, en dégageant les espaces de circulation, en assurant une certaine coordination par l’utilisation de ce qui reste de l’appareil gouvernemental et par la mise en place de certaines commissions, en assurant une certaine gestion de l’aide internationale avec l’appui de la CI, les USA en tête, en déclarant un peu tardivement l’état d’urgence. Le Ministère de l’agriculture a sorti un programme post-sismique et le GOH a lancé quelques jours plus tard le processus PDNA tout en continuant à gérer les urgences humanitaires. Le Premier ministre, le Président et les ministres ont reçu de nombreuses délégations et personnalités étrangères et ont effectué des voyages à l’étranger pour plaider la cause de la reconstruction. Il faut noter que le GOH a posé, à mon avis, quatre actions importantes : (i) la gestion des urgences humanitaires avec l’appui de la CI,(ii) la préparation de la phase de relèvement immédiat avec la réalisation d’un manuel d’opération pour harmoniser les travaux de création d’emplois ou HIMO en vue de faire face à la prochaine saison pluvieuse et/ou cyclonique et de favoriser l’autonomisation des victime du séisme et des familles en insécurité alimentaire, (iii) l’élaboration du PDNA et du PARDN, l’élaboration par le CIAT du plan d’aménagement du territoire publié sous le titre Haïti Demain, et (iv) l’organisation avec ses amis de la CI de cette conférence du 31 mars à NY.

La société civile

Quant à la SC organisée, elle a mis du temps à réagir. La Fondation Haïtienne pour le développement intégrale latino-américain et caribéen (FONHDILAC) a sorti son plan de refondation le dimanche 7 février 2010, le plan stratégique de sauvetage national est sorti à la même époque. D’autres propositions allaient suivre dont celles du secteur privé très récemment. C’est à cette époque que va être lancé le processus d’élaboration du PDNA avec l’appui de la communauté internationale et de certains cadres de la SC. Près de deux cents cadres haïtiens allaient participer à cet exercice qui, selon les TDR, devaient déboucher sur 3 extrants dont un plan stratégique de développement national. Ce plan stratégique est actuellement connu sous le vocable PARDN et est l’objet de cette conférence de reconstruction d’Haïti du 31 mars. Le secteur privé haïtien, qui a présenté tardivement son plan , participe à cette conférence, assurément sur la promesse du GOH de prendre en compte ses recommandations et de les intégrer dans le PARDN. En tout cas, avant son départ pour cette conférence, le Président a fait savoir à la nation que le plan qui va être présenté est celui de tous les haïtiens.

La communauté internationale

Dès le lendemain du séisme, elle commençait à se manifester par l’intermédiaire de ses représentants sur place en dépit des pertes énormes subies. Le Président Fernandez de la République Dominicaine s’est invité lui-même. Il était accompagné de toute l’armada humanitaire dominicaine. Ces dominicains ont mis la main à la pate à la manière des cubains qui étaient déjà sur place. Avec l’arrivée massive des autres, on a eu tendance à oublier ces actions de nos voisins immédiats. Cette solidarité internationale s’est manifestée et se manifeste encore dans toutes les actions entreprises par Haïti. La CI était haïtienne durant les premiers jours de la catastrophe. Ella n’a jamais cessé son appui depuis les urgences humanitaires, l’élaboration des dossiers, la préparation de la phase de relèvement jusqu’à la phase de reconstruction. Elle s’est investie sans relâche dans le PDNA, le PARDN, est omniprésente dans cette conférence, et sera partie prenante de la mise en œuvre de ce PARDN.

Plan d’action pour le relèvement et le développement national (PARDN)

C’est un des résultats de l’évaluation conjointe des besoins post-désastre qui, à la demande et sous la direction du Gouvernement de la République d’Haïti, a été conduite du 18 février au 24 mars en Haïti, avec le soutien technique de l’ONU, la BID, la CEPAL, la Banque Mondiale et la Commission Européenne.

Voici la vision telle qu’exprimée par le Premier Ministre lors de lancement du processus d’élaboration du PDNA : voir Haïti comme un pays émergeant d’ici 2030, société de la simplicité, équitable, juste et solidaire, vivant en harmonie avec son environnement, sa culture et une modernité maîtrisée où l’État de droit, la liberté d’association et d’expression et l’aménagement du territoire sont établis, dotée d’une économie moderne, forte, dynamique, compétitive, ouverte et à large base territoriale, où l’ensemble des besoins de base de la population sont satisfaits et géré par un État unitaire, fort, garant de l’intérêt général, fortement déconcentré et décentralisé.

Les priorités du Plan d’Action Post Séisme, qui s’articulera autour de vingt (20) chantiers et qui nécessitent 34, 481, 000,000.00 USD, sont de faire face à l’urgence dans l’immédiat, redémarrer les activités économiques gouvernementales et sociales, réduire la vulnérabilité du pays face aux catastrophes naturelles et relancer Haïti sur la voie du développement.
Plus spécifiquement : (i) Assurer la préparation de la saison cyclonique et des pluies 2010, particulièrement pour les populations déplacées ; (ii) Inscrire systématiquement les aspects environnementaux dans toutes les décisions liées au processus de redressement et de développement ; (iii) Assurer l’intégration de la gestion des risques et des désastres dans toutes les activités de reconstruction pour tous les secteurs ; (iv) Mettre en place une politique active de l’emploi en appuyant les micro-entreprises, en renforçant la formation professionnelle, en intégrant les principes de haute intensité de main d’œuvre (HIMO) et en associant l’entreprenariat haïtien, la main d’œuvre locale ainsi que les communautés ; (v) Placer de façon accrue l’État comme prestataire de services de base déconcentrés et décentralisés, tout en assurant un renforcement substantiel de son autorité auprès des entités non étatiques. A cet égard, amorcer la création d’un filet de protection sociale pour les plus démunis ; (vi) Décongestionner la zone métropolitaine de Port-au-Prince par une politique de déconcentration et de décentralisation en mettant en place des incitations pour la sédentarisation de la population autour de pôles de croissance ; (vii) Continuer d’apporter assistance et soutien à 1.3 million d’haïtiens qui ont tout perdu et à 3 millions de personnes affectées par le désastre, tout en accélérant le processus de relèvement pour éviter une dépendance vis-à-vis de l’aide extérieure.

Ce plan se décline en deux temps. Soit l’immédiat qui porte sur une période d’une année et qui constitue la période de transition avant que tout le mécanisme de la refondation de l’État ne soit opérationnel. Le second temps s’ouvre sur une perspective temporelle de dix ans, permettant ainsi de tenir compte de trois cycles de programmation des Stratégies Nationales de Croissance et de Réduction de la Pauvreté.

C’est pourquoi le Plan propose la mise en place d’une Commission intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti (CIRH) et d’une Agence pour le Développement d’Haïti (ADH) ainsi qu’un Fonds Fiduciaire Multi-Bailleurs (FFMB) qui permettront l’instruction des dossiers, la formulation des programmes et projets, leurs financements et leurs exécutions, tout cela dans une approche coordonnée et cohérente.

Le Plan cible prioritairement les activités financées par l’aide publique au développement (APD) puisqu’il s’agit d’une conférence de donateurs. Il laisse cependant une large place aux autres intervenants du secteur des affaires, du secteur privé et des ONG qui sont des opérateurs incontournables du renouveau d’Haïti. Il propose un cadre macro-économique axé sur la croissance et un train de mesures qui faciliteront la création de richesses par le secteur privé.

En guise de conclusion, le PARDN contient une série de thématiques qui feraient partie de n’importe quel plan haïtien. Le document d’aménagement du territoire intitulé Haïti Demain qui indique, entre autre, le processus de mise en œuvre du PARDN pourrait plaire à l’ensemble des haïtiens avec quelques nuances à modifier ou à adapter. En parcourant les divers plans, les différences ne sont pas énormes, questions de nuances et de formulations. Il y a donc lieu de les fusionner après cette première conférence pour en faire un plan haïtien. Les premiers engagements obtenus (10 milliards de dollars) de la communauté internationale témoignent de leur approbation par rapport à ce plan dit du gouvernement. Alors, forçons la main au GOH pour son amélioration et pour une mise en œuvre non partisane de ce plan devenu enfin haïtien. Ce minimum de consensus, on le doit bien à nos milliers de morts et disparus. Un petit effort, mesdames et messieurs !!!

mercredi 17 février 2010

HAITI : LA GESTION DE L’INSECURITE ALIMENTAIRE EN 2010

HAITI : LA GESTION DE L’INSECURITE ALIMENTAIRE EN 2010
PAR Jean Robert JEAN-NOEL
16 Février 2010


J’ai terminé mon dernier article de 2009, « Bilan 2009 du secteur agricole, un bond de la sécurité alimentaire », par cet avertissement : « 2010 et ses cohortes d’événements seront les seuls capables de prédire l’avenir immédiat du secteur agricole et du Pays Haïtien, l’imprévisible. A bon entendeur, salut !!! ». (Réf. www.jrjean-noel.blogspot.com).

Malgré cet avertissement, je n’avais pas à l’esprit, ce 30 décembre 09, qu’Haïti, mon pays, allait être, quatorze (14) jours plus tard, dévastée par ce terrible tremblement de terre causant plus de 200000 morts, des dégâts évalués à 60% du PIB par le Premier Ministre Jean Max Bellerive, et ajoutant 1500000 individus au nombre de personnes déjà en insécurité alimentaire (IA) dans les deux départements (Ouest et Sud-est) les plus affectés par ce séisme du 12 janvier 2010 survenu à 4h 53 PM.

Alors, comment adresser la question de l’insécurité alimentaire et surtout comment la gérer durant cette année 2010 ? Pour y répondre, nous nous basons sur certaines observations liées à la situation post-sismique, une émission de radio conduite par Kesner Pharel, Investir du 13 février, dans laquelle est intervenu le Coordonnateur de la CNSA, Mr G. Mathieu, en fournissant des informations pertinentes, et sur un document de réponse au séisme du ministère de l’agriculture.

Les observations post-sismiques liées à l’insécurité alimentaire
Tout de suite après le séisme, plus de 500000 personnes ont littéralement fui la Capitale pour se rendre dans les autres villes et départements non affectés. Les personnes qui restent dorment à la belle étoile soit sur des places publiques, soit dans les rues ou des endroits dégagés, en particulier sur la cour de leurs maisons endommagées au pas par peur des répliques ou pour respecter les consignes des autorités. Ces personnes, surtout celles qui vivent en dehors de leur cour, sont dépourvues de tout et du minimum vivere. Quant à celles qui vivent sur leur cour, elles arrivent très difficilement pour la grande majorité à joindre les deux bouts. Pour ce qui a trait à la nourriture, la majorité des haïtiens sinistrés ont passé les premiers jours sans nourriture, sans eau pour boire voire pour se laver. La débrouillardise aidant, la solidarité entre gens de même sort et l’arrivée timide de l’aide ont permis une certaine survie.

Une semaine après, avec la reprise d’une certaine normalité, les prix des produits de première nécessité couplés avec la « crise du carburant » ont grimpé de 30 à 50%, et se sont maintenus malgré la résolution par le Gouvernement de la crise de carburant qui était tout simplement fabriquée par certains inconscients. Malgré l’arrivée massive de l’aide avec ses cohortes de problèmes de coordination et de distribution, la situation de l’insécurité alimentaire, si elle subit une amélioration par rapport aux premiers jours, se débat toutefois encore dans de sérieuses difficultés dues en grande partie à son insuffisance.

Selon Marcus Gracia, éditorialiste de Radio Mélodie FM, dans l’éditorial du lundi 15 février 10, le pourcentage de l’aide qui arrive aux nécessiteux ne dépasse pas 10% après être amputée des diverses charges. Un Député du peuple de la région sud du pays a constaté que dans les zones de Léogane, de Grand Goâve et de Petit Goâve, à peine 10% de la population étaient touchées au niveau urbain, en particulier là où opéraient les cameras de la presse internationale (Radio Caraïbes, émission de nouvelles du matin du 15 février). Cette situation nécessite donc une gestion très sérieuse de la part des parties prenantes, en particulier sur la base des précisions du Coordonnateur de la CNSA.



Les précisions du Coordonnateur de la CNSA
Face à cette situation, la Coordination nationale de la sécurité alimentaire (CNSA) par la voix de son principal représentant, Mr G. Mathieu, a apporté un certain nombre de précisions basées sur une simulation de 2 millions de personnes en insécurité alimentaire aigue après le 12 janvier et qui nécessitent du « secours d’urgence et de l’aide alimentaire ».

Ces deux millions de personnes auraient besoin, selon les standards internationaux, 450,000 tonnes équivalent céréale (TEC) pendant 12 mois. Selon le bilan alimentaire de 2009 (CNSA 2009) 53% des besoins exprimés pourraient être couverts par l’agriculture haïtienne, surtout les besoins des déplacés vers les provinces.

Pour la période de janvier à juin 2010, 47% de la demande alimentaire, qui représente 105,000 TEC, devraient être satisfaites par des importations, soit un total de 17,000 TEC/mois. Pour la période de juillet à septembre 2010, avec les hypothèses d’une diminution du nombre de sinistrés sous les tentes, de création d’emplois temporaires (HIMO) et d’une disponibilité alimentaire de 60% à partir de la saison de printemps, les besoins alimentaires du pays tomberaient autour de 9,000 TEC/mois, soit un total de 27,000 TEC. De même, pour la période d’octobre à décembre 2010, on aurait encore besoin de 9.000 TEC par mois, soit 27.000 TEC pour secourir les sinistres qui sont dans les groupes vulnérables (enfants, femmes enceintes et allaitantes, vieillards, etc.)

Comme on sera déjà en pleine saison cyclonique 2010, il faudrait prévoir environ 1 million de sinistrés dans les départements du Sud, Sud Est, Nippes, Artibonite, Ouest, Grand Anse. D’où la nécessité de la constitution d’un stock de sécurité de 90.000 TEC pendant 5 mois (juillet à novembre 2010) dont 53% pourraient être constitués de produits locaux. Dans le cas où il n’aurait pas de cyclones dévastateurs, on pourrait liquider le stock de sécurité sur les marchés, les hôpitaux, les cantines scolaires à partir de décembre 2010.

Il faut noter qu’annuellement l’aide alimentaire atteint 116.000 TEC dont 73% est monétisé. Exceptionnellement, elle atteindra cette année 159.000 TEC. Le Gouvernement pourrait, selon G. Mathieu, exiger la monétisation de près de 50% de l’aide à partir du sixième mois (juin 2010) pour investir l’argent dans des travaux de création massive d’emplois temporaires (HIMO) de cash for work, en vue de recapitaliser les familles nécessiteuses et de leur permettre d’avoir accès aux aliments par l’achat et non par don. Ce qui éviterait de créer chez elles une mentalité d’assisté. Cette création massive d’emplois pourrait se faire dans le cadre du document de réponse du ministère de l’agriculture post-cyclonique 2008 et post-sismique 2010.

Le document de réponse du ministère de l’agriculture
Le « Programme Spécial d`Urgence et D’appui à la Production Alimentaire en Haïti en Réponse aux Quatre Cyclones de L’été 2008 et au Tremblement de Terre du 12 Janvier 2010 et à l’intégration des Populations Déplacées. » est une bonne réponse à la situation de l’insécurité alimentaire. Mais, même appliqué dans son intégralité durant la période de 3 ans prévue, il sera insuffisant pour résorber l’insécurité alimentaire, car l’insécurité alimentaire est une problématique multisectorielle qui aurait dû avoir une réponse gouvernementale à la dimension de sa multi-sectorialité. En tout cas, s’il est appliqué, ce sera un pas de géant vers la bonne direction.

En effet, ce programme de réponse d’environ 700 millions d’USD et localisé, en majeure partie, dans les zones ayant reçu les déplacés, vise les objectifs suivants :
• Au niveau général : améliorer l’offre alimentaire, valoriser la main d’œuvre rendue disponible par les populations déplacées et accroitre le flux monétaire dans le milieu rural.
• Aux niveaux spécifiques : réhabiliter et reconstruire les infrastructures productives, (i) en renforçant la capacité productive des agriculteurs par l’amélioration des conditions de la production agricole, (ii) en améliorant la valorisation des produits agricoles (végétaux et animaux) et l’accès des producteurs aux marchés, et (iii) en préservant les ressources naturelles et les infrastructures de production des plaines.

Ce programme en 7 composantes, en regard de sa stratégie participative et inclusive (implication d’acteurs tant nationaux qu’internationaux), conduira aux effets suivants : (i) la mise sous irrigation de14.000 hectares supplémentaires et la facilité d’accès à ces exploitations agricole au moyen de 600 km de pistes rurales, (ii) l’augmentation de rendement des cultures entrainant une augmentation de la production des denrées alimentaires de base, (iii) la facilité de manière durable de l’accès des groupes cibles du programme aux intrants et services agricoles de proximité, (iv) la création d’environ 45 millions de personnes/jour d’emplois (62500 emplois/mois en moyenne) dans le milieu rural, (v) l’augmentation de la valeur ajoutée dégagée par les producteurs, (vi) l’obtention d’une meilleure insertion des producteurs dans la filière agroalimentaire.

Conclusion
La gestion de l’insécurité alimentaire pour l’année 2010 et au delà n’est pas au dessus des capacités de ce Gouvernement. Il dispose en son sein parmi les meilleurs spécialistes dans ce domaine et des structures qui méritent d’être légalisées et renforcées, des politiques publiques à mettre en application (Politique de développement agricole 2010-2025, plan national de sécurité alimentaire et nutritionnelle 2010-2025, programme post-séisme, document d’orientation sur la reconstruction de la ville des Gonaïves, le DSNCRP, etc.).

Et ce, sans mettre dans la balance certains documents produits par la société civile haïtienne tant de l’intérieur que de la diaspora comme le « Plaidoyer pour la refondation de l’Etat d’Haïti selon une vision haïtienne » (réf. www.jrjean-noel.blogspot.com) du Groupe FONHDILAC et le « Plan stratégique pour le sauvetage national » du Camp Patriotique, pour ne citer que ceux-là.

Un petit effort de leadership et de coordination de la part du gouvernement, une petite pression et une certaine compréhension de cette problématique multisectorielle de la part des autres pouvoirs de l’Etat, surtout le Parlement, permettront la mise en application des solutions proposées, la gestion de cette problématique pour l’année 2010 et la mise en route d’un train de mesures susceptibles de résoudre définitivement cette problématique à l’horizon 2025.

Le séisme du 12 janvier 2010 nous a fait prendre conscience de notre mauvaise manière d’agir depuis plus de 200 ans. Alors, agissons différemment de manière inclusive en profitant des compétences de la nation partout où elles se trouvent sans discrimination ni préjugés. Il y va de notre survie de peuple et de la construction de la Nouvelle Haïti, « la perles des Antilles et l’exception culturelle de la Caraïbe ». Cela vaut bien un petit sacrifice. N’est-ce pas, Messieurs et Dames? N’est-ce pas, Mr le Président, le Premier des Haïtiens ? N’oubliez pas que la communauté des nations est avec nous contrairement aux pères fondateurs qui ne pouvaient compter que sur eux-mêmes. En d’autres termes, cette fois-ci, nous avons beaucoup plus de chances de réussite qu’eux. Alors, fonçons ensemble. Main dans la main !!!

mercredi 10 février 2010

Plaidoyer pour la refondation de l’Etat d’Haïti selon une vision haïtienne

Par
FONHDILAC

LE CONTEXTE
La République d’Haïti occupe le tiers occidental de l’île d’Haïti (Quisqueya) dans la Mer des Caraïbes sur une superficie totale de 27 750 km2. La population haïtienne était estimée à 9.8 millions d’habitants en 2009 alors que le pays ne comptait que 3 millions de personnes en 1950. Cette forte croissance démographique se traduit en une forte densité d´environ 350 habitants par km2. Malgré une tendance à l’urbanisation progressive, la population en milieu rural représente encore 60% de la population totale.
Le pays est administrativement divisé en dix (10) départements. Parmi ces 10 départements, celui de l’Ouest à lui seul absorbe 39% de la population totale avec une très forte concentration dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince (25% de la population).
Située sur la route des cyclones, Haïti est régulièrement victime des ouragans. En 2004, elle a fait les frais de deux inondations majeures suite à des phénomènes climatiques exceptionnels à Mapou/Fond Verrettes en mai et Gonaïves en septembre qui font plus de 4,000 morts. En 2008, elle a été dévastée par quatre tempêtes tropicales (Fay, Gustave, Hanna, Ike) ayant frappé neuf (9) des dix (10) départements du pays. Ces ouragans dévastateurs avaient fait, d’après les organisations humanitaires, plus 800 morts, 800,000 sinistrés et causé des pertes matérielles estimées à environ1 milliard de dollars américains (15% du PIB).
Haïti est une fois de plus frappée par une catastrophe naturelle. Il s’agit cette fois-ci d’un séisme de magnitude 7.3 sur l’échelle de Richter survenu le 12 janvier 2010 à 4 h 50 P.M. Il a été suivi de plusieurs répliques dont une de magnitude 6.0 le 20 janvier à 6 h A.M.
Diverses régions et populations sont directement affectées par ce tremblement de terre: les 20 communes du département de l’Ouest, les 10 communes du département du Sud-Est. L’impact a été particulièrement sévère à Port-au-Prince, Léogâne, Pétion-Ville, Delmas, Carrefour, Gressier, Grand Goâve, Petit Goâve, Jacmel.
Des dégâts considérables sont ainsi enregistrés, 60% du PIB du pays selon le Premier Ministre, Joseph Jean Max Bellerive. Selon les dernières estimations des autorités haïtiennes en date du 2 février 2010, le tremblement de terre a fait des dizaines de milliers de morts (au moins 200,000), 300,000 blessés, 4,000 personnes amputées, plus d’un (1) million de sans abris, 250,000 maisons détruites, au moins 23 centres hospitaliers effondrés, des écoles, des églises, des maisons de commerce, des banques et des bâtiments publics effondrés. Plus de 500,000 personnes qui résidaient à Port-au-Prince ont fuit la capitale.
Selon une note du Collectif d'auteurs haïtiens-québécois « Au-delà des pertes humaines et matérielles, c'est la continuité et la légitimité du gouvernement, la souveraineté de l'État et l'avenir indépendant d'Haïti qui semblent s'être momentanément en partie effondrés.
C'est tout cela qu'il faudra reconstruire: des communautés locales et une nation intégrative, des réseaux de communication sociale et des centres de culture, des institutions politiques et la souveraineté fragilisée de l'État, en plus des infrastructures et structures. Bref, reconstruction s'entend construction d'une autre société. Qui peut construire cette société nouvelle et a la légitimité pour le faire? Évidemment, le peuple haïtien unifié, soutenu par la solidarité internationale. »
Ce « plaidoyer pour la refondation de l’Etat d’Haïti selon une vision haïtienne », présente des propositions de solutions qui tiennent compte des aspects d’urgence, de relèvement, de reconstruction/développement parfaitement imbriqués les uns dans les autres jusqu’à leur finalité, le développement durable et harmonieux du pays. Il est le fruit de réflexions des professionnels de la FONHDILAC complétées par les réflexions d’autres professionnels haïtiens et étrangers.
Ce plaidoyer est articulé autour de (i) une vision de la nouvelle Haïti, ii) la décentralisation par le biais des 41 arrondissements, (iii) la déconcentration administrative, (iv) le déplacement de la Capitale au centre du pays, (v) la réalisation du plan d’aménagement du territoire et des plans directeurs des 41 arrondissements et la réorganisation du pays en trois régions, NORD, CENTRE et SUD, (vi) la proposition de mise en place de l’Autorité d’Aménagement Global d’Haïti (Etat, Secteur Privé, Société Civile et Diaspora) appuyée par la communauté internationale,(vii) la nécessité d’une grande concertation nationale, (viii) la tentative de chiffrage de la refondation, (ix) le calendrier de mise en œuvre de la refondation, (x) les risques et la gestion des risques.

1. UNE VISION DE LA NOUVELLE HAÏTI
En ce début du 21ème siècle et du 3ème centenaire de l’indépendance nationale, la vision d’Haïti à promouvoir est celle d’un pays moderne, administrativement et économiquement décentralisée, politiquement stable et bien intégrée dans le concert des nations, qui serait l’exception de la Caraïbe au triple point de vue politique, économique et culturel et où il ferait bon vivre.
En termes d’environnement et de qualité de vie, la nouvelle Haïti devra être dotée d’espaces verts, d’infrastructures de loisirs et de sports adéquats tant en quantité qu’en qualité. Le réaménagement complet du bord de mer de la nouvelle ville de Port-au-Prince (malecon) n’est plus un rêve et peut devenir une réalité, de Cité Soleil jusqu’à Mariani. L’instauration de zonage (zones protégées, dont le Morne de l’Hôpital et la Plaine du Cul-de-Sac, zones industrielles et commerciales, zones résidentielles) permettra de reconstruire une ville conviviale, en harmonie avec l’homme. Et ceci est valable pour l’ensemble des arrondissements, surtout ceux situés au bord de mer.
Port-au-Prince est victime de son obésité et le pays de sa macrocéphalie. La concentration de toutes les institutions et de toutes les activités économiques à Port-au-Prince a occasionné une perte d’environ 60% du PIB en moins d’une minute dans la zone métropolitaine et les 70 % du pays non touchés restent jusqu’à date paralysés. On ne peut donc plus reproduire le même modèle après le 12 janvier ; c’est un autre pays qu’il faut concevoir et bâtir.
Le tremblement de terre nous a montré le danger que représente cette concentration de population dans la zone métropolitaine ; il faut absolument faire quelque chose, non seulement pour stopper le mouvement de migration vers la capitale, mais même pour renverser le mouvement. Cela peut paraître utopique, pourtant c’est une réalité à laquelle nous devons faire face.
Pour cela il faut agir sur les deux principaux facteurs à l’origine de l’exode vers Port-au-Prince :
• L’absence d’infrastructures de base et de services,
• Le manque d’opportunité d’emplois (chômage).
Pour l’absence d’infrastructures adéquates et de services, il s’agit d’équiper les villes de province, en commençant par les chefs lieux d’arrondissement. Là, nous sommes en plein dans la décentralisation. Depuis des décennies qu’on en parle, le moment est venu de s’y mettre vraiment.



2. LA DECENTRALISATION PAR LE BIAIS DES 41 ARRONDISSEMENTS
La décentralisation est prévue par la Constitution de 1987. Selon certains experts, la décentralisation à l’haïtienne va plus loin dans sa conception que celle pratiquée en France. Pourtant, l’Etat Haïtien depuis 1987 est très réticent à la mise en œuvre de cette décentralisation à trois niveaux, départemental, communal et section communale. Avec ce tremblement de terre, il est évident que le salut du pays passe par la décentralisation. Alors, axons cette décentralisation autour des 41 arrondissements.
Il s’agit de doter ces 41 villes d’équipements dans les domaines :
• de l’éducation : écoles, lycées voire universités ;
• de la santé : centres de soins d’urgence, dispensaires, hôpitaux ;
• de l’approvisionnement en services de base : eau, énergie, communication ;
• de l’administration publique : complexes administratifs dignes de ce nom, de manière à ce qu’on ne soit pas obligé de se rendre à Port-au-Prince pour la moindre démarche ou à la nouvelle Capitale au centre du pays. En bref, il faut renforcer la déconcentration des services.

3. LA DECONCENTRATION ADMINISTRATIVE
La décentralisation va de pair avec la déconcentration administrative ; et celle-ci pourrait être entamée tout de suite. Le séisme, par sa violence en détruisant les infrastructures administratives, en forçant la plupart des cadres à rejoindre leur patelin, a d’un autre point de vue, fourni une opportunité à saisir. L’Etat Haïtien a intérêt à mettre en place une politique d’incitation en donnant des moyens à tous les cadres qui voudraient retourner travailler au niveau des structures déconcentrées de l’Etat, en équipant ces structures et en déplaçant la majorité des activités au niveau des chefs lieux d’arrondissement.
La déconcentration administrative implique le déplacement des cadres vers les structures de province des Ministères, établissement de campus universitaires dans les provinces en mettant le paquet sur la structuration des villes de province en vue de la reconstruction globale du pays. C’est la déconcentration au service de la décentralisation.
Il s'agit donc de Restructurer et de refonder l'Etat . En d’autres termes, ce mouvement REFORME DE L'ETAT ET DECENTRALISATION – suivant les orientations des prescrits constitutionnels – doit s'appuyer sur les pistes tracées par la Commission Nationale à la Réforme Administrative(CNRA) sur le concept d'Etat-Stratège organisé autour de:
1) une administration centrale avec pour mission essentielle de déterminer les stratégies d'intervention, les moyens de mise en œuvre, de suivi et de contrôle;
2) une administration déconcentrée (Délégations et vice-Délégations, Directions Départementales des Ministères) exécutant les stratégies élaborées par le pouvoir central ;
3) une administration décentralisée appuyée par l'administration déconcentrée pour offrir des services de proximité à la population à l'échelle du pays.

4. LE DEPLACEMENT DE LA CAPITALE AU CENTRE DU PAYS
La position géographique idéale de la Nouvelle Capitale d’Haïti, en se référant à la carte des failles pourrait être l’une des options suivantes ou une combinaison d’options : Marchand Dessalines (option qui semble faire l’unanimité), Savane Diane, la seule zone vierge du pays, c’est l’option proposée par l’actuel Ministre de l’Agriculture, Joanas Gué, Mirebalais ou l’Axe Capitale de l’Ingénieur Brunet Georges .
Cette proposition de Brunet Georges apparait très pertinente et innovatrice, l’Axe Capitale sera constitué de l’ancienne Capitale Impériale, Marchand Dessalines comme Capitale Politique et siège des grandes administrations publiques, Petite-Rivière comme Capitale Législative et Verrettes comme Capitale Judiciaire, Mirebalais pourrait être le siège des grandes institutions de services.
Cet Axe Capitale serait doté de tous les équipements nécessaires : de nouveaux axes routiers joueront un rôle important dans ce réaménagement, une autoroute à grande circulation sera construite reliant Belladère, Mirebalais, Verrettes, Petite-Rivière, Marchand-Dessalines et rencontrerait la Nationale No 1 au niveau de Barrière Bachou, de deux ports ouverts au commerce extérieur sur les rivières Artibonite et l’Estère au niveau de Pont Sondé et de Pont l’Estère à la manière de la Seine à Paris, d’un aéroport dans la partie haute de la Savane Désolée, d’une nouvelle centrale hydroélectrique susceptible d’alimenter les nouvelles installations, fournir de l’énergie pour l’eau potable, pour l’irrigation du haut plateau et/ou la Centrale Hydro-électrique de Péligre en augmentant sa capacité pour une meilleure exploitation énergétique.
A remarquer que quelle que soit l’option adoptée, la Nouvelle Capitale à la manière de Brasilia se retrouverait au centre du pays dans des endroits à l’abri des cyclones et des tremblements de terre et devrait rentrer dans un plan global d’aménagement du territoire bien pensé.



5. LA REALISATION DU PLAN D’AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ET LES PLANS DIRECTEURS DES 41 ARRONDISSEMENTS ET LA REORGANISATION DU PAYS EN TROIS REGIONS NORD, CENTRE ET SUD.
Dans le Document Stratégique National pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté (DSNCRP : 4.3 milliards d’USD), il était prévu de réaliser le plan d’aménagement du territoire. Ce travail était en cours au ministère de la planification, il serait intéressant de le reprendre et de l’adapter à la nouvelle donne créée par le séisme. Une « Autorité d’Aménagement Global d’Haïti » (réf.6) s’assurera de la finalisation de ce travail par la réalisation du plan d’aménagement du territoire, par l’élaboration des plans directeurs des arrondissements et par la réorganisation du pays en trois régions : la Région Nord (Nord, Nord-Est et Nord-Ouest), la Région Centrale (Artibonite et Centre) et la Région Sud (Ouest, Sud-Est, Nippes, Grande-Anse et Sud). Chaque région sera traitée selon sa vocation et ses potentiels comme un pôle de croissance et de développement. Elle sera dotée des équipements et ressources nécessaires pour son développement harmonieux en synergie et complémentarité avec la région voisine. Le tout sera la réplique exacte de la vision dégagée dans ce plaidoyer qui pourrait s’intituler : «Haïti, la perle des Antilles ou l’exception culturelle de la Caraïbe ».
On parle beaucoup du problème foncier et certaines personnes pourront réagir à la proposition de Brunet Georges, en exprimant la crainte que les gens ne viennent construire sur les terres agricoles le long de l’Artibonite.
Par ailleurs, avec l’effondrement de la DGI, on peut se demander ce que sont devenues les archives de la Direction du Domaine (terres de l’Etat) et de la Conservation Foncière (terres privées).
Une proposition est de refaire le geste de Dessalines. Toute la terre du pays est déclarée propriété de l’Etat ; le pays est « mis en quarantaine », comme on le dit de terres en conflit. Toute transaction est interdite. Au cas où cela pourrait paraître trop radical, on peut présenter cette décision comme une mesure transitoire, en attendant que les services soient mis en place, au niveau des arrondissements, qui auront pour fonction de :
• Vérifier les titres de propriété,
• Autoriser les transactions.
Une telle mesure facilitera également la mise en œuvre du plan d’aménagement du territoire qui aura à déterminer :
• Les zones propres à la construction et au développement urbain,
• Les zones réservées à l’agriculture,
• Les zones propres à une économie agro-sylvo-pastorale,
• Les zones réservées à la forêt.

Au point de vue économique, Haïti pourrait redevenir un grand centre économique caribéen et émerger comme une place financière régionale, voire internationale. La nouvelle Haïti devra être dotée d’infrastructures urbaines, de voies de communication, de ports, et de marchés publics modernes et adéquats.
Ici nous touchons au deuxième grand facteur à l’origine de l’exode vers Port-au-Prince : le chômage. Nous attachons donc une grande importance à la création d’emplois en dehors de la capitale actuelle.
A la 2e partie de la phase humanitaire, nous avons un premier champ d’action pour les travaux HIMO sur les infrastructures endommagées, sur le modèle de ce qui a été fait suite aux cyclones de 2008. Un deuxième grand chantier sera celui de la construction et de l’équipement des villes de province qui auront été choisies. Une fois les infrastructures mises en place, il faudra doter les différents services de personnel. Ainsi, on va passer de l’HIMO pour les urgences à la création d’emplois permanents. Ici, nous insistons pour dire qu’on peut faire de l’HIMO dans le cadre du développement durable (réf. www.jrjean-noel.blogspot.com ), surtout avec l’abondante main d’œuvre dont dispose le pays qui pourrait être absorbée dans le cadre de création de centaines de milliers d’emplois dans l’irrigation, les routes tertiaires, l’environnement, l’assainissement, l’adoquinage de rues dans des villes et sections communales.
Mais, pour nous, l’important est le développement des filières agricoles. Sur ce point, la boussole est le PROGRAMME SPÉCIAL D`URGENCE ET D’APPUI A LA PRODUCTION ALIMENTAIRE EN HAITI EN RÉPONSE AUX QUATRE CYCLONES DE L’ÉTÉ 2008 ET AU TREMBLEMENT DE TERRE DU 12 JANVIER 2010 ET À L’INTÉGRATION DES POPULATIONS DÉPLACÉES. Et chaque ministère aurait dû élaborer un programme du genre pour mieux orienter son action et en profiter pour amorcer la déconcentration administrative du pays.
Au point de vue politique, nous pouvons visionner une Haïti qui abriterait des Institutions politiques régionales et où se tiendraient régulièrement, grâce à une diplomatie forte et à la stabilité du pays, des conférences internationales et régionales. D’où la nécessité pour l’Etat de commencer par mettre en place une autorité d’aménagement global d’Haïti.

6. LA PROPOSITION DE MISE EN PLACE D’UNE AUTORITE D’AMENAGEMENT GLOBAL D’HAÏTI APPUYEE PAR LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE
Dans ce chapitre, la FONHDILAC reprend la proposition de Daniel Altiné en remplaçant Grand Port-au-Prince par Haïti et en adaptant le texte. Dans cette perspective, un engagement majeur que les haïtiens doivent prendre est celui d’éviter l’improvisation et de penser systématiquement la reconstruction de leur pays, selon un plan d’aménagement global. La décision logique qui découle de cet engagement serait de mettre en place une autorité constituée qui présiderait à cette reconstruction. Aussi, proposons-nous la création, par l’État haïtien, d’une entité dénommée Autorité d’Aménagement Global d’Haïti, au moyen d’une loi votée par le Parlement.
Cette Institution publique, qui exercerait sa juridiction sur le territoire, serait :
• de nature partenariale, au sens où son Conseil d’Administration (de 13 membres au maximum) regrouperait des représentants du secteur public, des personnalités du secteur privé, de la société civile et de la diaspora, choisies sur la base de leurs compétences et réalisations professionnelles ;
• dotée des pouvoirs nécessaires pour décider des grandes orientations en matière d’aménagement de la nouvelle Haïti, après avoir pris soin, évidemment, de mener les consultations et audiences publiques (hearings) appropriées. En ce sens, l’Institution aurait une fonction exécutive, et non consultative.
Missions de l’Autorité d’Aménagement Global d’Haïti
En phase avec pareille vision, l’Autorité d’Aménagement Global d’Haïti aura pour mission principale de :
1. penser, faire des choix, décider des grandes orientations, concevoir et faire valider le plan global d’aménagement devant baliser la construction de la nouvelle capitale haïtienne, selon les règles et normes d’urbanisme ;
2. planifier, organiser, coordonner et contrôler l’expropriation d’espaces et prendre toutes autres mesures nécessaires à la mise en œuvre du plan d’aménagement global du pays;
3. s’assurer que la reconstruction de la nouvelle capitale haïtienne se fasse en tenant compte des normes de construction, des risques sismiques pour les villes se trouvant sur les failles ou tout près des failles comme Port-au-Prince, Cap-Haïtien, Léogane, Jacmel, Petit-Goâve, etc., des zones protégées et de l’impact environnemental et, à cet effet, délivrer les permis de construction et prendre toutes mesures de coercition nécessaires.
Organisation de l’Autorité d’Aménagement d’Haïti
L’Autorité d’Aménagement Global d’Haïti serait établie par une loi votée par le Parlement et constituée de :
1. un Conseil d’Administration (CA) de treize (13) membres composé du :
• Ministre de la Planification et de la Coopération Externe, Président
• Ministre de l’Économie et des Finances
• Ministre des Travaux Publics, Transports et Communications
• Ministre de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales
• Ministre du Commerce et de l’Industrie
• 3 personnalités du secteur privé issues chacune d’une des 3 régions proposées
• 3 personnalités de la société civile issues chacune d’une des 3 régions proposées
• 2 personnalités de la diaspora
2. un Conseil Consultatif Technique (CCT) qui se rapporterait directement au CA et aurait pour rôle principal de le conseiller sur les choix et orientations en matière d’aménagement. Organisé en comités sectoriels (infrastructures urbaines et transports, loisirs et culture, environnement, protection civile, conseil juridique, etc.), ce Conseil d’experts regrouperait des urbanistes, ingénieurs-architectes, géologues, spécialistes de gestion et de traitement de l’eau, spécialistes de gestion des déchets solides, économistes des transports, juristes, sociologues, spécialistes des loisirs et de la culture, spécialistes de la protection civile, etc. ;
3. une Direction Générale qui appliquerait les orientations et politiques du Conseil d’Administration et en assurerait le suivi.
Financement
L’Autorité d’Aménagement Global d’Haïti serait financée au commencement par une dotation budgétaire spéciale de l’État haïtien.

7. LA NECESSITE D’UNE GRANDE CONCERTATION NATIONALE
Pour relever le défi de refonder l’Etat d’Haïti, il parait plus que nécessaire de réaliser une grande concertation nationale. Pour y arriver, la FONHDILAC croit que les principes et orientations proposés par le Collectif des auteurs Haïtiens-Québécois peuvent servir de boussole.
- DEVOIR de la solidarité internationale pour la reconstruction, fondé sur le principe de la fraternité universelle et l'éthique de conviction que rien de ce qui est humain ne peut être étranger à un être humain.
- DROIT du peuple haïtien de définir en toute indépendance la politique de reconstruction, par l'intermédiaire de ses représentants politiques légitimes et de ses institutions et organisations sociales représentatives.
- OBLIGATION pratique de la cogestion dans la mise en œuvre de la politique de reconstruction, en raison du rôle de coproducteur que doivent jouer les autorités nationales et les délégations internationales.
- NÉCESSITÉ d'adopter une démarche inclusive, capable de réunir et de mobiliser toutes les catégories et tous les groupes sociaux, tous les groupes d'intérêts, selon la devise «L'union fait la force»!
- IMPORTANCE vitale d'en finir avec le système d'exclusion sociale qui produit sans cesse des « moun andeyò » — monde en dehors de l'attention de l'État — et d'opter résolument pour une politique d'intégration nationale.
- OCCASION exceptionnelle de réunir Haïtiens de l'intérieur et Haïtiens de la diaspora dans une même communauté nationale, par une citoyenneté de rang égal. La diaspora, réserve d'Haïti, doit être prise en compte pour la définition de la politique de reconstruction et la mise en œuvre de cette politique.

A cela il faut ajouter l’aspect culturel. Considérant le patrimoine historique d’Haïti, la créativité et la production culturelle haïtienne, Haïti peut et doit se voir, même se projeter comme l’exception culturelle de la Caraïbe et de l’hémisphère. Ce qui implique l’existence dans les nouvelles villes de salles de spectacles dignes de ce nom, de musées, de conservatoires et d’écoles d’art dramatique, d’écoles d’arts et métiers, de bibliothèques, etc. Ce qui implique également l’animation d’une vie culturelle, avec l’organisation d’événements culturels régionaux et internationaux et surtout la promotion du secteur touristique.
Cette grande concertation constituera les états généraux pour la refondation d’Haïti. Elle sera inclusive et ne visera qu’à mettre les parties prenantes d’accord sur la vision haïtienne de la nouvelle Haïti. Elle sera appuyée financièrement et techniquement par la communauté internationale selon un chiffrage beaucoup plus précis que la tentative suivante qui ne donne qu’un ordre de grandeur.

8. LA TENTATIVE DE CHIFFRAGE DE LA REFONDATION/RECONSTRUTION D’HAITI
La tentative de chiffrage demeure un exercice très difficile à ce stade. Leonel Fernandez avance le chiffre de 10 milliards de dollars américains pour la reconstruction du pays. Dans le même ordre d’idée, l’Union Européenne se dit déjà prêt à mettre sur la table 400 millions de dollars américains. Toujours au niveau de l’international les suggestions vont dans le sens de l’annulation de la dette haïtienne. Les pays membres du Club de Paris sont sur la voie de supprimer les 214 millions de dollars américains de créances haïtiennes. En somme, hormis l’estimation du président dominicain, les promesses de financement depuis le séisme du 12 janvier avoisinent le milliard de dollars américains.
Dans notre exercice de costing, nous nous inspirons sur des réflexions et estimations faites par des professionnels aussi bien haïtiens qu’étrangers. La proposition d’érection d’une ville universitaire de 50,000 habitants près de Ganthier se chiffre à 6 milliards de dollars américains. Le document d’orientation sur Gonaïves reste dans ces ordres de grandeur. Le DSNCRP prévoit pour sa part 4.3 milliards de dollars américains sur trois ans. Ainsi, compte tenu de tout ce qui précède nos projections pour la construction de cette nouvelle Haïti sont de 40 milliards de dollars américains sur une période de 10 années. Ce qui correspond à des investissements moyens de 4 milliards par an.

9. LE CALENDRIER DE MISE EN ŒUVRE DE LA REFONDATION
La mise en œuvre de la refondation se fera en trois phases : l’urgence sur 6 mois, le relèvement sur 18 mois et la reconstruction sur 8 ans. Dans la réalité, les trois phases ne sont jamais aussi séquentielles et rigides. En effet, à cause de la vulnérabilité du pays, durant au moins les dix premières années de la reconstruction, l’Etat aura à gérer les urgences annuelles liées aux intempéries, et même au-delà, il y aura toujours des urgences à gérer. C’est pourquoi, il faudra des phases parfaitement imbriquées, articulées et intégrées de façon à former un tout cohérent conduisant au développement durable de notre pays. Ce calendrier doit tenir compte des investissements prévus dans le cadre du DSNCRP. Une période de 5ans serait suffisante pour atteindre la vitesse de croisière, si nous arrivions à bien gérer les risques inhérents à une telle entreprise aussi ambitieuse de refonder un Etat, et pas n’importe lequel, le plus imprévisible de tous.

10. LES RISQUES ET GESTION DES RISQUES
Avec l’Etat, les risques en temps normal se retrouvent à chaque pas. Dans la situation actuelle, il faudra les multiplier par 4 sinon plus. Aussi allons-nous sélectionner quelques uns qui pourraient surgir à n’importe quelle phase du processus de refondation de l’Etat.
Tentation de refaire pareil
Dans le cas d'Haïti dévastée, il ne peut s'agir seulement, ni d'abord, de reconstruction technique d'infrastructures et de structures. Il s'agit fondamentalement de reconstruction politique et sociale orientant la reconstruction économique et technique. Ce serait gaspiller l'aide internationale et toute la solidarité citoyenne partout mobilisée à tous les niveaux, si l'on se contentait de refaire une copie neuve sur papier vélin de la société d'avant le séisme.
Dans cette perspective, il ne suffit point de déclarer dans des discours politiquement corrects qu'on reconnaît et respecte la souveraineté d'Haïti. Il faut le montrer dans la pratique et les formes d'aide. C'est d'autant plus nécessaire que l'État haïtien, fragilisé avant le séisme, s'est quasiment effondré après le séisme. Ainsi blessé presque à mort, il est devenu une proie facile pour tous les États forts tentés de se conduire en redresseurs d'États fragiles.
Les rapports avec la communauté internationale
L'extrême fragilisation du gouvernement et de l'État pourrait faire croire à certains qu'Haïti n'a plus les moyens de s'autogouverner dans le court terme. Tel n'est pas notre point de vue. Le peuple haïtien n'a besoin d'aucun «consortium» de pays amis pour gérer la crise à sa place, ce qui mettrait entre parenthèses provisoires la souveraineté sinistrée d'Haïti. Même si l’expertise technique ainsi que l’appui financier de ces pays demeure incontournable. Donc, ni protectorat déclaré, ni tutelle déguisée! Ni non plus gouvernement par décret présidentiel!
La lenteur de l’Etat à décider
Pour avoir une chance de réaliser ce rêve de refonder Haïti, l’Etat doit se départir de sa lenteur proverbiale. Il est impératif que l’Etat haïtien arrête immédiatement des dispositions pour sauvegarder l’intérêt collectif en mettant en place cette Autorité d’Aménagement global d’Haïti. Ce faisant, il éviterait que les haïtiens, individualistes invétérés, en l’absence de l’État, ne recommencent à construire n’importe comment, selon le « common sense » et en fonction purement de leurs intérêts égoïstes, il donnerait un signale fort à la CI sur son intention d’investir dans le durable. Dans le cas contraire, un travail de sensibilisation auprès des trois (3) pouvoirs de l’Etat devrait être entrepris par tous ceux qui se retrouvent un tant soit peu dans ce plaidoyer et qui y adhèrent même informellement.
La résurgence des vieux démons de division
Durant les premières heures après le séisme, la solidarité entre haïtiens a été vantée par les observateurs étrangers. Beaucoup de gens se sont sacrifiés pour sauver d’autres frères et sœurs. Avant l’arrivée des secours, on a partagé même un morceau de pain. Mais, depuis quelque temps, on sent venir la division. La bataille pour le pouvoir a déjà commencé d’autant qu’on annonce des milliards de dollars de promesses d’aide. Il faut à tout prix arriver à gérer cette montée de la division en nous concentrant sur l’essentiel, la reconstruction du pays.
La mainmise d’un petit groupe avec l’appui de la communauté internationale
La communauté internationale (CI) a sa clientèle en Haïti, un petit groupe d’opportunistes à courte vue, profitant de chaque occasion pour s’enrichir davantage au détriment de la collectivité. Il faut qu’il change sa façon d’opérer pour se mettre à la hauteur de l’évènement ou qu’il soit écarté. Les gens de bien qui veulent voir changer les choses pour de bon doivent se liguer contre ce petit groupe. Et la CI doit faire l’effort aussi de s’ouvrir à d’autres groupes qui, certes, ne maitrisent pas son jargon mais qui ont les compétences et l’honnêteté nécessaire pour accompagner cette refondation de l’Etat dans le sens de la collectivité.
La lutte hégémonique entre les grands pour des raisons économiques et géostratégiques
Ce séisme montre déjà la volonté des grands de se battre pour avoir le leadership de la refondation/reconstruction. Cette bataille entre les grands pourrait compromettre cette reconstruction ou la conduire dans des directions opposées à cette vision à l’haïtienne. Les haïtiens doivent faire preuve d’intelligence pour tirer la meilleure partie pour Haïti dans cette lutte des grands. Selon certains experts, notre sous sol disposerait de certaines matières assez rares et même du pétrole ; en tout cas, notre pays est placé dans une position stratégique par rapport au reste de la Caraïbe et de l’Amérique Latine. Il nous faudrait avoir une conscience informée de notre réalité pour bien négocier cette solidarité internationale conduite par les grands de ce monde ou tout moins la gérer pour le mieux.
La barrière constitutionnelle
La constitution de 1987 pourrait constituer une barrière sur certains aspects à la refondation de l’Etat suivant la vision dégagée. Il faut voir cette refondation au-delà du prisme de la Constitution de 1987. Il faudrait, si nécessaire, soit la modifier soit la changer.
La résistance au changement
La résistance au changement va être l’obstacle le plus difficile à gérer, selon Charles Cadet, l’ex-responsable de la fameuse Commission Nationale de la Réforme administrative (CNRA) qui avait des propositions pertinentes et innovantes pour la restructuration et la refondation de l’Etat, oubliées jusqu’à cette minute dans les tiroirs de l’administration de l’Etat. Il faudrait plus qu’un simple groupe comme la FONHDILAC mais l’adhésion de la Nation Haïtienne pour porter cette vision de la refondation/reconstruction/construction de l’Etat d’Haïti qui doit redevenir à terme, La perle des Antilles ou l’exception culturelle de la Caraïbe.

mercredi 30 décembre 2009

HAITI:BILAN 2009 DU SECTEUR AGRICOLE, UN BOND DE LA SECURITE ALIMENTAIRE

HAITI : BILAN 2009 DU SECTEUR AGRICOLE, UN BOND DE LA SECURITE AMENTAIRE
Jean Robert JEAN-NOEL
29 Décembre 2009

Contexte

En 2008, Haïti a été victime des conséquences de la crise liée à la flambée des prix alimentaires au niveau international liée elle-même à la question de spéculation. En effet, dès 2007, la FAO avait observé une augmentation des prix alimentaires de l’ordre de 50%. Cette flambée des prix alimentaires et pétroliers associée au crash financier mondial de 2008, est en grande partie responsable de l’ensemble des émeutes déclenchées au printemps 2008 dans les pays en développement, en particulier ceux à faible revenu comme Haïti. Cette crise aggravée par des causes conjoncturelles et structurelles internes à notre pays a fini par déboucher sur les émeutes d’avril 2008 dites de la faim en Haïti. Cette situation s’était aggravée par la crise gouvernementale qui en était résultée et par le passage de quatre (4) cyclones sur Haïti en août-septembre 2008. Cette combinaison d’événements avait mis à plat l’économie haïtienne (15% du PIB) avec des dégâts considérables dans le secteur agricole (229 M d’USD). C’est dans ce contexte qu’un nouveau Gouvernement dirigé par une femme, Mme Pierre-Louis, avait accédé au pouvoir et qu’une nouvelle équipe avait été placée à la tête du Ministère de l’Agriculture, des ressources naturelles et du développement rural (MARNDR). Alors quel est le bilan du secteur agricole pour 2009 et quelles perspectives?

La situation après les événements de 2008

La situation de l’agriculture, après les émeutes de la faim de 2008 et le passage des quatre cyclones sur Haïti, était tout simplement catastrophique. Diverses visite des lieux effectuées tout de suite après (septembre-octobre 2008) révélaient l’ampleur de la catastrophe et les nombreux défis à relever dans le secteur agricole.

Après ces deux événements, c’était la désolation la plus totale : des arbres centenaires arrachés, des maisons éventrées, des ponts emportés, des routes coupées, des bananerais ravagées, des rizières, des villes et localités inondées, etc. Le ministère de l’agriculture avait évalué les dégâts dans le secteur agricole à 229 M d’USD. De plus, il faut noter que les dégâts à l’échelle du pays avaient été considérables et les pertes en vies humaines aussi, près d’un milliard d’USD de dégâts, soit environ 15% du PIB, et plus de 1000 morts et disparus,100000 sans abris, 27 702 maisons détruites et 84 625 partiellement endommagées (Bilan partiel Direction Protection Civile. 1er Oct.08).

Face à la lenteur de la Communauté internationale (CI) à réagir par rapport à cette situation catastrophique (seulement 14% des fonds recueillis en octobre 08 des 107 M d’USD sollicités par le PNUD), l’Etat Haïtien avait déclaré l’état d’urgence pour 15 jours et avait pris l’initiative d’utiliser les fonds PETROCARIBE. Heureusement que le Parlement ait accepté de débloquer en urgence les fameux 197 M USD de PETROCARIBE dont 36.75 M d’USD accordés au ministère de l’agriculture pour un programme d’urgence post-cyclone en trois phases : urgences (3%), relèvement (40%) et réhabilitation/reconstruction (57%).

La répartition des fonds a tenu compte des priorités du gouvernement et des secteurs les plus touchés par les catastrophes naturelles. Ainsi les ministères des Travaux Publics, de l’Agriculture et de l’Education ont bénéficié respectivement de 47%, 19% et 14% des montants disponibles, tout en sachant que ces montants ne pourraient pas réparer l’ensemble des dégâts subis par ces secteurs. (Rapport final Programme d’urgences, sept.2009)

Les domaines d’intervention/actions du MARNDR et ses Partenaires en 2009

Les domaines d’intervention du MARNDR étaient regroupés sous trois (3) grandes rubriques : la production végétale, la production animale et la restructuration du secteur transversale aux deux autres.

Actions
Ces actions ont concerné la recapitalisation des exploitations agricoles, la création d’emplois, la distribution de semences et d’outils aratoires, ainsi que des actions plus durables comme la réhabilitation des infrastructures d’irrigation et la construction de petites unités de transformation pouvant avoir un effet d’entrainement sur les filières de l’élevage. Les actions avaient pour objectifs : la redynamisation du secteur agricole et la relance de la production à travers la reconstitution de la capacité de production détruite par les cyclones; l’amélioration de la circulation monétaire pour stimuler la consommation et l’investissement; l’amélioration du niveau d’équipement en vue d’alléger le travail agricole ; l’atténuation de la fragilité de l’environnement par le curage et la protection des berges des rivières et la correction des ravines.

Les interventions dans le secteur agricole ont été structurées autour de six (6) composantes :(i) protection des berges et curage des rivières (30 KM aux Gonaïves, Cabaret, Léogane, Jacmel); (ii) entretien et réhabilitation des infrastructures hydro agricoles (106 périmètres irrigués pour 57000 ha); (iii) correction des ravines (460 Km); (iv) acquisition et distribution d’intrants agricoles (1000 TM de semences de haricot, de mais, de riz, 1450000 drageons de bananiers et boutures d’igname, d’outils aratoires (50000 Unités) et d’engrais chimiques subventionnés à 75% (450 TM) ; (v) acquisition d’équipements agricoles (217 tracteurs et 400 pompes d’irrigation); (vi) appui à l’élevage (mise en place de centres régionaux de production de poussins d’une capacité de production journalière de 1575 poussins, de 155 unités de production de poulets de chair d’une capacité journalière de 9000 kg de viande, d’une unité de production de 4000 pondeuses, de 60 incubateurs à kérosène d’une capacité de 500 œufs et de 24000 poussins tous les 21 jours, réhabilitation de la station avicole de Damien avec une capacité de production de 1300 pondeuses et 1500 pondeuses rustiques, la production et la distribution de 28000 pondeuses rustiques, de 90000 poussins, de 8000 chèvres, 2500000 poissons, l’installation de dispositifs de conservation de poissons à 5302 pêcheurs regroupés en 27 associations, la construction de 5 fromageries, la remise de ruchers à 200 apiculteurs, etc.)

A coté de ces actions menées dans le cadre du programme d’urgences, le ministère a entrepris d’autres actions dans le cadre des divers projets/programmes en cours au sein du ministère. Ces projets financés pour la plus grande majorité par la coopération externe ont été en complément aux actions décrites en détails précédemment. Il faut noter que ces projets restent l’épine dorsale du ministère en ce qui a trait aux résultats de moyens et de longs termes visés. Ce sont des projets de 5 à 7 ans avec des dépenses annuelles de 1 à 5 M d’USD par projet dont les plus gros totalisent une dizaine.

Restructuration interne
Parallèlement à ces actions liées à la production végétale et animale, le ministère de l’agriculture a mené et mène tout un processus de réforme de restructuration interne : (1) L’élimination des postes de directeurs généraux adjoints,(2) le recrutement par voie d’appels d’offres des nouveaux directeurs départementaux et directeurs départementaux adjoints avec juridiction de ces derniers sur les anciennes sous-directions départementales, sources de nombreux conflits d’autorité et de disfonctionnement, (3) l’amélioration du cadre de vie au niveau central (clôture de l’aire des bureaux du ministère, aménagements intérieurs de certaines directions comme l’administration, la programmation, le cabinet du Ministre, la section de communication, etc.), (4) le processus de réduction des directions centrales de 18 à 12 (réf. Nouvel organigramme), de rajeunissement des cadres par la mise en retraite des cadres ayant atteint la limite d’âge (en cours), (5) les réflexions sur des éléments de politique agricole, (6) la finalisation du document de politique de développement agricole 2010-2025, du plan national de sécurité alimentaire et nutritionnelle (PNSAN 2010-2025), (7) la relance des structures de concertation du secteur agricole tant au niveaux central que déconcentré, (8) l’amélioration de la communication au niveau du ministère (présence à la radio, à la TV, site WEB), de la sécurité interne au niveau central avec la présence remarquée d’agents de sécurité en uniforme dans des points d’accès au ministère, sur la cour et à l’intérieur des bâtiments, (9) le renforcement des liens de collaboration et de coopération avec la coopération externe et les bailleurs de fonds (USAID, ACDI, AFD, coopération cubaine, vénézuélienne, espagnole, taïwanaise, BID, UE, BM, etc.) (10) les négociations avec les bailleurs de fonds et agences de coopération comme le FIDA, la FAO et autres pour des programmes de moyen et long terme susceptibles de réduire l’insécurité alimentaire et la pauvreté du pays par l’amélioration des conditions de vie des ruraux.

Effets induits : un véritable bond
Ces interventions associées à celles des autres acteurs du secteur (ONG, agences de coopération) et de certains organismes autonomes de l’Etat comme le Bureau de Monétisation et le FAES, ont permis de redresser rapidement en 2009 la situation du secteur agricole. Pour l’année 2009 à titres d’exemples,(i) les travaux de curage et les semences distribuées ont permis une extension des superficies emblavées à 22 000 hectares cultivés en riz au niveau de l’aire de l’ODVA , soit une augmentation de 57% par rapport à l’année 2008 , la production de riz Paddy est passée de 42 000 tonnes à 66 000 tonnes ; (ii) on a enregistré à travers le pays une réduction significative du nombre de personnes en insécurité alimentaire de 3.3 M à 1.8 M et une augmentant de 25% de la production agricole en 2009 par rapport à 2008 (CNSA 2009) ; (iii) ces actions ont favorisé l’injection de plusieurs centaines de millions de gourdes directement dans les exploitations agricoles et dans le pays en général à travers la création de centaines de milliers d’emplois temporaires et durables durant toute la période sous étude et très certainement au-delà. Ce qui a conduit à ce succès un an seulement après ces malheureux événements de 2008, un véritable bond du secteur agricole en 2009 en matière de réduction de l’insécurité alimentaire.

Pourtant, ironie de l’histoire, l’architecte principale de ce succès, la Première Ministre Pierre-Louis, a été remerciée par le Senat sous prétexte de mauvaise gestion des 197 M d’USD. Pauvre Haïti, pays de défis mangeur de gens de bien !!!

Défis du secteur agricole

Les défis sont de deux ordres conjoncturel et structurel. Il faut maintenir les résultats obtenus en 2009 en continuant à financer les urgences, en consolidant les réparations effectuées, en mettant à disposition des paysans à prix subventionnés des intrants, des outils agricoles, du crédit, et en renforçant les capacités des agriculteurs et agricultrices. En outre, l’un des plus grands défis du secteur agricole demeure la question environnementale. Tous les efforts consentis en aval n’auront aucune garantie sans la protection en amont.

Parallèlement, il faut approfondir la réforme du secteur agricole et rural. Le plus grand défi c’est d’arriver à marier l’urgence au structurel pour déboucher sur le développement de ce secteur, l’un des piliers du DSNCRP. La leçon à tirer des catastrophes de 2008, c’est la nécessité de prioriser l’environnement haïtien sur une période relativement longue en vue de sécuriser les investissements, réduire la vulnérabilité du pays, déboucher sur la croissance et réduire la pauvreté.

D’autres défis à surmonter, c’est d’asseoir le leadership du MARNDR sur le secteur, assurer une coordination sérieuse de l’ensemble des actions au niveau du secteur, et mettre en œuvre la politique de développement agricole et le plan national de sécurité alimentaire et nutritionnelle après leur appropriation par les parties prenantes impliquées.

Perspectives du secteur agricole

Pour relever ces défis, Haïti ne dispose certes pas de moyens suffisants, mais avec un plan de développement bien ficelé dont le DSNCRP contient l’essentiel des éléments, elle pourra sortir de cette situation. Ce serait un plan axé sur l’humain, le social, l’environnemental, l’infrastructurel, le financier et la gouvernance. Pour financer ce plan, il faut un combat sans merci contre la corruption, des investissements considérables de l’Etat (12-15% du PIB dans le secteur agricole), du Privé, des bailleurs de fonds, des investissements étrangers importants et de la diaspora haïtienne.

Quant au financement lié à l’agriculture, Haïti doit aussi faire preuve d’agressivité auprès des instances internationales de financement. Depuis les émeutes de la faim, la FAO se bat pour rehausser l’aide publique au développement (APD) au secteur agricole à son niveau de 1980, soit 17% au lieu de 3.8% actuellement. Certains mécanismes de financement sont mis en place depuis les émeutes de 2008, au niveau de la Banque Mondiale (BM), de l’Union Européenne (UE), du Fonds International de développement agricole (FIDA), de la Banque Interaméricaine de développement (BID), de la Banque Africaine de Développement (BAD), etc. Toutes ces institutions disposent désormais de fonds même en quantité insuffisante pour financer l’agriculture, les risques et désastres et autres domaines liés à la problématique de l’insécurité alimentaire (IA). Par exemple, le G8 a promis, en juillet 2009, 21 mds d’USD à l’Aquila, Italie, pour le financement du secteur agricole. Pour nourrir la planète d’ici 2050, il faudrait selon la FAO, des investissements annuels de l’ordre de 209 milliards d’USD. Haïti doit profiter de cette prise conscience mondiale par rapport à l’agriculture et à la sécurité alimentaire pour mieux se positionner et bénéficier du financement disponible, tout en continuant avec des efforts internes pour consacrer une part importante du budget national au secteur agricole jusqu’à atteindre le niveau de 15% sur une période plus ou moins longue de 10 à 15 ans.

Dans le cadre des 21 mds d’USD, le Ministre de l’agriculture a fait preuve d’agressivité en réclamant, lors de la 36e Conférence de la FAO, une part substantielle pour Haïti (Réf. Discours du Ministre). La réaction positive de la FAO qui moins d’une semaine après, a entamé des discussions sur une probable allocation de 500 M d’USD sur 3 ans à Haïti, témoigne du bien fondé d’une attitude agressive et proactive de la part de notre pays. La soumission d’une note conceptuelle à ce sujet par le ministère une semaine après les premières discussions exprime la volonté d’Haïti de sortir des sentiers battus (Réf. Programme agricole pour la réduction de l’insécurité alimentaire 10-13. PARIAH 10-13. Déc.2009).

Dans ce même ordre d’idées, le Ministre devra faire un plaidoyer auprès du Gouvernement pour l’augmentation de 6% (2009-10) à 15% la part du budget national consacrée au secteur agricole durant les 10 à 15 prochaines années pour lui permettre d’atteindre les objectifs fixés à l’horizon 2025, et dont a fait part le Ministre dans son discours de Rome (Nov.2009) pour justifier la réclamation de la part substantielle des 21 mds d’USD promis par le Sommet du G8 de l’Aquila en juillet 2009.

Conclusion

2009 a été une bonne année pour le secteur agricole, 25% d’augmentation de production agricole par rapport à 2008, réduction du nombre de personnes en insécurité alimentaire de 3.3 M à 1.8 M, création de centaines de milliers d’emplois temporaires et durables (6 emplois permanents par ha de terre irrigué), la reprise en main même timide du leadership du secteur par le ministère. C’est un bond en avant.

Le plus difficile, il faut garantir la relance du secteur. Avec 6% du budget pour l’exercice en cours, cet exploit est difficilement renouvelable. La saison cyclonique 2010, l’organisation des élections de 2010 (Parlement, Collectivités Territoriales, Président, élections indirectes) et des contraintes inhérentes au secteur agricole pourraient compromettre les efforts pour un nouvel exploit aussi spectaculaire.

Toutefois, avec une gestion rigoureuse du peu de fonds mis à disposition, un recentrage des actions du MARNDR autour des programmes et projets en cours, une agressivité proactive auprès des bailleurs, des agences de coopération, une meilleure coordination de l’ensemble des actions du secteur, un approfondissement du processus de reforme au niveau du ministère, les résultats pourront être au rendez-vous.

Le ministère devrait entre autres s’appuyer essentiellement sur le sous-secteur irrigué, sur les pistes rurales et la reprise en main de la plupart des fermes d’état et centres de formation. La mise en application de la politique de développement agricole 10-25, du PNSAN 10-25, et du programme d’actions prioritaires 10-12 moyennant disponibilité des fonds en phase de recherche par Bill Clinton dans le cadre de sa mission en Haïti pour le compte du Secrétaire Général de l’ONU, pourrait grandement aider à l’atteinte des objectifs fixés pour 2010.

Pour cela, les responsables du ministère devront faire preuve d’esprit d’initiatives, d’imagination et de créativité, tout en tenant compte des risques liés aux élections de 2010 et à la prochaine saison cyclonique 2010. Souhaitons que le Gouvernement en place ne subisse pas, et eux avec, le sort de Mme Pierre-Louis. 2010 et ses cohortes d’événements seront les seuls capables de prédire l’avenir immédiat du secteur agricole et du Pays Haïtien, l’imprévisible. A bon entendeur, salut !!!

samedi 13 juin 2009

HAITI: GONAIVES, DES SOLUTIONS A LA MESURE DU DEFI ENVIRONNEMENTAL HAITIEN

HAITI : GONAIVES, DES SOLUTIONS A LA MESURE DU DEFI ENVIRONNEMENTAL HAITIEN[1]

Jean Robert JEAN-NOEL

Port-au-Prince, le 4 mai 2009.

En l’espace de quatre ans (Jeanne en 2004, Hanna et Ike en 2008), la commune des Gonaïves a subi en deux fois les effets destructeurs des eaux en furie de la rivière La Quinte et de ses affluents La Branle, Bassin, Ennery et Bayonnais. Les crues exceptionnelles de Hanna et de Ike, bloquant momentanément l’accès au Grand Nord et isolant la Ville par voie terrestre durant plus d’une semaine, ont causé des dégâts matériels beaucoup plus importants que Jeanne (5441 maisons détruites, 22285 endommagées) chiffrés à plusieurs centaines de millions de dollars américains, des pertes considérables en vies humaines mais moins que Jeanne (Jeanne : 3000 morts, Hanna et Ike : 701 personnes mortes et disparues, 50000 familles affectées).

Dans les deux cas, Haïti a bénéficié de l’appui d’une multitude d’organisations de solidarités tant nationales qu’internationales, menant des actions humanitaires et de relèvement visant un tant soit peu le rétablissement du cadre de vie. Dans les deux cas, l’Etat Haïtien, par l’intermédiaire du Gouvernement en place, a promptement réagi. En 2004, par des actions d’urgence et la mise en place d’une unité pour la coordination et de reconstruction des Gonaïves (UCRG), qui a produit, avec l’aide de la communauté internationale, une stratégie de 100 M USD, appliquée partiellement et de manière non coordonnée. En 2008, par des actions d’urgence, humanitaires et de relèvement avec l’appui de la communauté internationale. Devant le constat de réponses pas tout à fait appropriées jusqu’ici, et, en prévision d’une période de retour de tels évènements rendue de plus en plus imprévisibles à cause du phénomène du changement climatique, le Gouvernement actuel, pour éviter toute répétition de ce drame et assurer le leadership des interventions, a décidé de mettre en place une Commission ad hoc Interministérielle[2] sur Gonaïves, coordonnée par le Ministère de l’Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement Rural (MARNDR).

MISSION DE LA COMMISSION, APPROCHES PHILOSOPHIQUES ET HYPOTHESE

La mission confiée à la commission a été de proposer au Gouvernement des pistes d’orientation et des actions concrètes chiffrées susceptibles de : (i) Favoriser la Protection de la ville Gonaïves contre les crues exceptionnelles de la Rivière La Quinte et de ses affluents, (2) Protéger le site de la ville des Gonaïves contre les crues normales de la Quinte, et (3) Rendre la ville des Gonaïves accessible en tout temps et la Route Nationale No 1 (RN1) toujours en état de fonctionnement.

Le tout devra contribuer à permettre au Gouvernement de monter un Programme de long terme de Reconstruction de la Ville des Gonaïves, en prenant en compte le bassin versant de la Rivière La Quinte et sa périphérie. D’où les deux approches guides du travail de la commission, l’approche bassin versant et l’approche périphérique.

L’hypothèse de départ est que tout investissement massif pour résoudre la problématique Gonaïvienne exigerait que l’on se concentre , durant au moins 25 ans, non seulement sur Gonaïves mais aussi sur l’ensemble du bassin versant avec tout ce qu’il y a à l’intérieur et sur sa périphérie. Car cet investissement, en plus de favoriser la résolution définitive du problème, attirerait un flot d’individus vers Gonaïves à la recherche de nouvelles opportunités et d’emplois. Il faudrait les arrêter au niveau de la périphérie, considérée comme zone tampon, en créant des opportunités pour absorber même partiellement ce flot et aussi pour fixer les populations locales.

DEMARCHE

La démarche adoptée a été de type classique avec : (i) Visite diagnostic, (ii) Séances de travail avec les élus locaux (Maire et Député) et les cadres de terrain (Ingénieur Municipal et Ingénieur Départemental Agricole, Directeur Départemental Travaux Publics, autres Ingénieurs et agronomes résidant aux Gonaïves), (iii) Entrevues avec des riverains, (iv) Appui de certains cadres et institutions tant nationaux qu’internationaux en termes de discussions, de mise à disposition de la documentation nécessaire et de propositions, (v) Séances de travail au bureau, (vi) Discussions sur les points saillants relevés sur le terrain, (vii) Consultation des documents existants, (viii) Propositions de pistes de solution, (ix) Elaboration du document de présentation et du rapport de mission d’orientation.

DIAGTOSTIC DE LA SITUATION GONAIVIENNE

Gonaïves, situation géographique et climatique

Gonaïves (environ 200,000 habitants en 2004), située à 150 Km au nord de Port-au-Prince, est une ville très plate. Son altitude varie de 0.00 à 15.00 m au-dessus du niveau de la mer. Elle couvre une superficie directe de 10.00 km2 dominée par un bassin versant totalisant 700.00 km2. Ce vaste bassin versant, culminant à 1100 m et qui reçoit entre 550 mm au niveau de la plaine et 1500 mm au niveau du Massif du Nord et des Montagnes Noires est drainé par la rivière La Quinte et ses affluents et dispose d’un potentiel irrigable de 12500 ha à l’intérieur et de 15000 ha autour. En temps ordinaire, la rivière et ses affluents sont dérivés par une multitude de prises d’eau pour alimenter, à la faveur des crues localisées, des petits périmètres de production vivrière dans les vallons de Bayonnais, Passe-Reine, Dubédou, Badon Marchand, Deux-Barrières et la basse plaine des Gonaïves. Dans la partie haute de la plaine irriguée par pompage dans l’aquifère, l’épandage des crues de La Quinte est pratiqué depuis plus de quarante ans pour atténuer la salinité des sols.

Pour mémoire, à Ennery, il a été enregistré 261 mm de pluie au matin du 19 septembre 2004. Cette averse a duré cinq (5) heures de temps et provoqué une montée d’eau d’environ 3.00 m en moyenne au niveau de la ville. Pour comparaison, les précipitations enregistrées à l’occasion du cyclone Hazel, en 1954, étaient de 140 mm et avaient submergé la ville de 1.20 m. A l’échelle du bassin versant, cette précipitation de 261 mm en 5h de temps correspondrait à 10,150 m3/s.

Les observations faites sur le terrain suite au passage de Hanna, d’Ike et les différents témoignages des riverains autorisent à admettre une hauteur moyenne de submersion de 4.50 m de hauteur d’eau au niveau de la ville. Selon deux ingénieurs[3] basés aux Gonaïves, Hanna et Ike auraient, dans l’espace de cinq (5) jours, arrosé le bassin versant de La Quinte de 1180 à 1220 mm de pluie ; cette information est confirmée par The Economist[4] qui, dans un article daté du 12 février 2009, parle « d’un (1) mètre d’eau en une seule nuit », soit approximativement 12h de temps ; à l’échelle du bassin versant, cette précipitation de 1m en 12h de temps correspondrait à 16,203 m3/s. Par rapport aux hauteurs d’eau constatées en 2004 et en 2008 au niveau de la ville, les crues de Hanna et de Ike ont été beaucoup plus importantes que Jeanne.

Les ouvrages de drainage mis en place dans les années 1950, 1970[5] et 2006-2007 et les récents ouvrages inachevés (2006-2007) dans la ville des Gonaïves et sa périphérie n’ont pas été construits pour l’évacuation des crues maximales de cette envergure, il en est de même pour le drainage naturel que constitue la rivière La Quinte qui n’a pas cette capacité d’évacuation. Ces ouvrages ont donc subi des dégâts importants, favorisé des inondations, le remplissage du lac de Savane Jonc qui de 400 ha dans les années 1950 est passé à 2100 ha en février 09 avec un taux d’évaporation de 6 mm par jour, l’isolement de la ville par des dommages importants au niveau du réseau routier desservant la ville. Ce qui a obligé l’Etat à des gymnastiques de toutes sortes pour rétablir la circulation terrestre et à la population d’avoir accès à un minimum de services de base, même si elle a encore des difficultés au niveau sanitaire par insuffisance de service liée à l’état désastreux du principal centre hospitalier des Gonaïves, l’Hôpital la Providence.

Constats et informations sur Gonaïves et environs en février 2009

La population vaquait à ses occupations quotidiennes malgré la poussière aveuglante et permanente à tous les endroits de la ville. Cette situation résultait de la présence d’environ 500,000.00 m3 de boue au niveau de la ville et dans la plupart des ruelles difficiles à évacuer à cause de l‘effondrement de plusieurs ponceaux et dalots ; ce chiffre serait de l’ordre 2,600,000 m3 dont 40 à 60% auraient déjà été enlevés, selon les estimations des deux ingénieurs Gonaïviens, qui, eux, tiennent compte des zones irriguées et irrigables. L’urbanisation anarchique de la ville est en grande partie responsable de cette situation. En effet, « Déjà en 1997, le Dossier Urbain de Gonaïves et le Plan de Zonage de la ville[6] mettaient en avant cette situation comme un facteur pouvant déclencher un désastre dans la ville », selon l’UCRG[7]. Il faut noter aussi que la plupart des ouvrages étaient en plus d’être mal conçus mais obstrués donc non fonctionnels. Il s’agit de gués à lunettes, de ponts, de drains agricoles et urbains, de l’étroitesse du lit de la rivière La Quinte en aval du Pont Gaudin. Ces ouvrages ont favorisé les inondations même en cas de crues normales.

Toutefois, certaines actions ont permis de récupérer des infrastructures endommagées et faciliter la reprise des activités. Les deux centrales thermiques pouvant produire environ 16 MW sans compter l’apport éventuel de la Centrale Hydroélectrique de Drouet et de la centrale de Délugé, fonctionnent et fournissent de l’électricité 24/24. Les réservoirs de Desmurailles et de Biennac avec une capacité de plus de 3000 m3 facilitent, tant bien que mal, l’accès à l’eau potable aux habitants de la ville après des réparations effectuées aux réseaux de distribution. Sur les 39 pompes d’irrigation se trouvant dans l’aire de l’ODPG, 3 alimentent le réservoir de Biennac et de Desmurailles, 24 sont en état de fonctionnement après réparations et 12 sont hors d’usage. Environ cinq mille (5000) hectares de terre étaient emblavés en différentes cultures telles que haricot, tomate, aubergine, riz et petit mil. Beaucoup de têtes de bovin, porcin, caprin et équin sont remarquées dans la partie aval de la plaine et dans l’aire du drain D7.

Les interventions de la firme TECINA S. A. sur un tronçon de 400 mètres linéaires n’auront pas l’effet escompté si d’autres actions en amont et en aval ne viennent pas les compléter et consolider, selon l’étude de rectification de la Rivière La Quinte[8] financée par l’UE sur 14 km et les propositions de la mission sur Gonaïves.

La zone des Gonaïves, le berceau de l’indépendance haïtienne, dispose d’un certain nombre d’atouts comme une population dynamique et combative, de nombreux marais salants dont la plupart ont été inondés, des écoles primaires et secondaires, un embryon universitaire, des maisons de commerce, des temples du vodou les plus réputés de la République, un embryon de parc industriel transformé en dépôt, deux ports dont un de grande capacité, des minerais avec 2% de teneur en cuivre contenant en réserve plus de 8, 000,000 tonnes métriques, plus d’un million de m3 de calcaire marbrier à Périsse, Ravine à Couleuvre, Provence, Darang, et une multitude de localités contenant des carrières susceptibles d’être transformées en ciment. D’où possibilités d’installer des cimenteries au niveau de la zone Gonaïvienne.

En première considération, il va sans dire que Jeanne, Hanna, Ike sont des phénomènes extraordinaires dont les conséquences désastreuses n’auraient pu être évitées par aucun des aménagements et équipements de drainage existants. En effet, il a été constaté des hauteurs (> 0.50 m) et longueurs de submersion (180 m) sur le pont en construction à Savane Désolée, plus de 5m de hauteur à l’Avenue des Dattes sur au moins 1km, et plus d’1 m d’eau sur au moins 5 km au niveau de Mapou Chevalier en aval de la confluence des rivières La Branle et Ennery ; l’ensemble de ces constats et ces points relevés se trouvent sur la route nationale no 1 (RN1). Les hauteurs d’eau constatées et les volumes d’eau calculés confirment l’exceptionnalité des phénomènes enregistrés en 2004 et en 2008. S’il est donc impossible d’arrêter les précipitations cycloniques, cependant, les eaux qu’elles produisent et les crues qu’elles génèrent peuvent être contrôlées et maîtrisées.

DES PROPOSITIONS A LA MESURE DU DEFI ENVIRONNEMENTAL CONFRONTE

Sur la base des informations glanées, des constats effectués, des discussions et réflexions menées, la Commission a proposé des interventions suivantes à court, moyen et long termes touchant les composantes relatives aux objectifs fixés par le Gouvernement,

(i) Aménagement et Gestion de bassin-versant,

(ii) Relance de l’agriculture,

(iii) Transport terrestre et maritime, et

(iv) Coordination et gestion des interventions aux Gonaïves et environs

Il faut souligner que ces actions proposées et d’autres qui seront identifiées seront mises en œuvre, pour la plupart, après des études sérieuses et approfondies, par des partenaires tant locaux qu’internationaux sous la coordination d’une structure permanente de coordination et de reconstruction de la Région Gonaïvienne (SPC2RG) à mettre en place le plus rapidement possible par le Gouvernement Haïtien.

A- Protection de la ville des Gonaïves contre les crues exceptionnelles

1- Mise en place d’une digue de 18 km sur la rive droite de la Rivière La Quinte en prolongement de la rive droite de la Rivière La Branle,

2- Erection de quatre grands barrages (volume > 10, 000,000.00 m3) de retenue (régulation) totalisant 155 millions m3 d’eau au niveau des rivières d’Ennery, Labranle, Rivière Bassin et Ravine Parisse, soit plus de 25% du volume d’eau reçu en une nuit (voir l’annexe 4 du document d’orientation pour les coordonnés de ces barrages);

3- Erection de 20 micro barrages de retenue (<5,>3) et de 10 moyens barrages de retenue (5, 000,000.00 m3 <>3) sur l’ensemble du bassin versant, soit approximativement la capacité de stockage de 150 à 200 millions de m3 d’eau ; soit plus de 28% du volume d’eau reçu en une nuit ;

4- La construction de 600 citernes familiales de 5000 gallons chacune, de 100 citernes collectives de 30000 gallons chacune, de 10 impluviums et 10 réservoirs de 1000 m3 pour faciliter le regroupement des populations, 300 bassins piscicoles individuels ou familiaux et près de 800 puisards pour recharger les aquifères ;

5- Traitement de 100 km de ravine avec des seuils en pierres sèches,

6- Mise en place de dispositifs mécaniques et biologiques sur 45,000 ha des 70,000 ha du bassin versant de La Quinte, et de 6 pépinières pour la production des plantules.

7- La mise en place d’un système performant d’alerte précoce et la mise en route d’une campagne de sensibilisation permanente visant l’ensemble du bassin versant et sa périphérie en utilisant toutes formes de media.

B- Protection de la ville contre les crues normales

1- Rectification et curage de la Rivière La Quinte sur une longueur de 20 km, de l’embouchure jusqu’à la gorge André-Duquenay (Morne Joli), en se basant sur l’étude de l’UE ;

2- Rectification et curage de la Rivière La Branle sur une longueur de 10 km jusqu’au point prévu pour le barrage de régulation, en aval du village du même nom ;

3- Rectification et curage de la Rivière Bayonnais sur 5 km à partir de son point de confluence avec la Rivière La Quinte ;

4- Mise en place de 20 ouvrages de prise au niveau de l’ensemble des canaux d’irrigation en y introduisant près de 200 petits ouvrages de distribution, de régulation, de traversée, de tronçons en dur, ou mise en place de deux (2) barrages de dérivation ;

5- Augmentation du gabarit des Pont Gaudin et Pont Bigot et remplacement du Pont Mapou,

6- Elimination des 2 gués à lunettes sur les rivières La Quinte et Bayonnais et leur remplacement par des ponts ;

7- Enlèvement et stockage des 500 mille à 1 million de mètres cubes de sédiments qui obstruent la plupart des endroits de la ville ;

8- Remise en état de fonctionnement de l’ensemble des drains artificiels et naturels de la ville et de ses environs sur une longueur de 100 km environ, soit 60 km de secondaires et 40 km de primaires ;

9- Achèvement des travaux de drainage de la ville entamés en 2006 et dont la plupart ont été suspendus pour des raisons diverses ;

10- Dragage des points critiques de la Baie des Gonaïves.

C- Accessibilité de la ville et de la RN1 en tout temps

1- Maintien du tracé actuel par Savane Désolée (9 km), moyennant l’achèvement du « Pont le plus long de la Caraïbe » et la régulation du Lac de Savane Jonc par la mise en place d’un canal d’évacuation ou de décharge en val et d’un canal d’alimentation au niveau de La Quinte- Bayonnais, ou

2- Réalisation d’un autre tracé à flanc de coteau au Morne Bayonnais (25 km) en franchissant la Rivière Bayonnais au moyen d’un pont pour accéder à la RN1 en un point non inondable bien en amont du Pont Mapou dans la zone de Poteau ;

3- Réalisation d’un nouveau tracé à flanc de coteau du Morne Granmont (22 km) en contournant le lac actuel par le sud et en franchissant la Quinte par un ouvrage de traversée important,

4- Consolidation et réaménagement du tracé actuel aménagé (17 km) en 2004 après le passage de Jeanne et repris depuis le passage de Hanna et Ike;

5- Réaménagement et mise en place d’ouvrages de traversée adéquats au niveau de Pont Gaudin (agrandissement), de Pont Mapou (remplacement), de Pont d’Ennery (remplacement)

6- Traitement de 200 km de pistes agricoles, de tertiaires et de secondaires tant au niveau de la plaine qu’au niveau du bassin versant, en y incluant le tronçon Gves-Anse Rouge, et ce, quelle que soit la variante choisie ;

7- Encouragement à la mise en place d’une flotte maritime pour relier les villes côtières dont Gonaïves (Réf. Annexe 3 du rapport d’orientation).

SEQUENCES ET DEROULEMENT DES ACTIONS PROPOSEES

La situation actuelle aux Gonaïves peut se révéler très difficile à la prochaine saison pluvieuse et surtout cyclonique si rien n’est fait en urgence. Il est clair que les travaux déjà réalisés ont grandement amélioré la situation, mais on est encore loin de l’optimum souhaité. Aussi est-il souhaitable d’arrêter un certain nombre de mesures de court, moyen et long termes qui tiennent compte des aspects humain, social, environnemental, infrastructurel, économique et de gouvernance. Le programme d’urgence pré cyclonique 2009 de plus de 600 millions de gourdes conçu par le Gouvernement et actuellement en cours d’exécution, devrait, en principe et en partie, apaiser les inquiétudes dans le très court terme. Pour les actions de court, moyen et long termes, elles seront séquencées de manière telle qu’elles se dérouleront en parfaite harmonie, en s’imbriquant les unes aux autres sous la houlette de la SPC2RG, pour produire des résultats à la mesure des attentes et des moyens mis en œuvre.

BUDGET ET CHRONOGRAMME DES ACTIONS PROPOSÉES

Le budget des actions proposées ainsi que le Chronogramme des actions se retrouvent en annexe1 et 2 du document d’orientation. La majorité des actions sont chiffrées séparément, d’autres, comme les études et les appuis à la mise en place de groupes d’intérêts économiques, sont pris en compte dans des actions plus globales comme la mise en valeur agricole par exemple. Il faut noter que le chiffrage se base sur les coûts à l’entreprise pratiqués en Haïti, sur les coûts exprimés dans l’étude de l’UE pour la rectification de la Rivière La Quinte, sur les coûts du MTPTC et sur la grande expérience de l’ensemble des membres de la Commission ad Hoc.

Pour faciliter une meilleure compréhension de la problématique Gonaïvienne en relation avec la mission de la commission ad hoc à savoir : la protection de la ville des Gonaïves contre les crues exceptionnelles, contre les crues normales et son accessibilité en tout temps, les actions proposées y relatives sont regroupées dans quatre (4) composantes et le budget est articulé autour de ces composantes :

Tableau résume de la répartition du Budget en fonction des branches d’activités

Désignation

Montant

%

Aménagement et gestion BV

542,877,500

58%

Relance de l'agriculture

239,925,892

25%

Transport terrestre et maritime

114,109,000

12%

Coordination et gestion

44,845,620

5%

TOTAL GENERAL

941,758,012

100%


Quant au chronogramme, il est décliné en des actions à court, moyen et long termes qui s’étendent sur une période globale de 25 ans.

IMPACT

Un investissement de cet ordre sur 25 ans devrait permettre, avec une gestion saine, intelligente et proactive, de résoudre définitivement la problématique Gonaïvienne, surtout en ce qui a trait à ces inondations monstres. Les multiples opportunités qui seront offertes tant pendant le période de mise en œuvre de ces propositions et autres qui viendront compléter celles faites dans ce dossier et après cette période, devraient faire de la région Gonaïvienne, qui se trouve en plein centre du pays, un pôle attractif de croissance et développement

Création d’emplois

En combinant savamment les approches haute intensité d’équipement (HIEQ) et haute intensité de main d’œuvre (HIMO) pour absorber l’abondante main d’œuvre non qualifiée du pays, il est possible de créer des millions d’emplois (2,500,000 P-M de travail, soit en moyenne 100,000 emplois l’an) au moment de l’exécution des actions. Des emplois encore plus durables seront créés au moment de l’exploitation des investissements consentis. Sans faire des calculs savants, d’ailleurs non nécessaires à ce stade, et, en nous référant aux exploitations agricoles, agro forestières et forestières, et, ce uniquement à l’intérieur du bassin versant sans prendre en compte la périphérie, on arriverait aisément à 300,000 emplois l’an. Sans parler d’emplois dans les exploitations minières, les usines avec le potentiel électrique actuel sous exploité et future avec les barrages de retenues sur les lesquels on pourrait greffer des unités hydroélectriques, l’exploitation du solaire et de l’éolienne, les secteurs santé, éducation, transport avec les deux ports, la RN 1, et la possibilité de mettre en place un Aéroport international au niveau du bassin versant, etc.

La sécurité alimentaire

Les actions proposées agiraient directement sur la problématique sécurité alimentaire en favorisant la résolution du problème dans ses trois composantes essentielles, la disponibilité, l’accès et la qualité des aliments. En agissant sur l’environnement, l’agriculture et le transport, les actions proposées sont en droite ligne par rapport au plan national de sécurité alimentaire et nutritionnelle (PNSAN) et sont en harmonie avec le document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP) et les objectifs du millénaire pour le développement (OMD).

Les six capitaux

On pourrait pousser l’analyse de l’impact sur d’autres aspects comme le capital humain, le capital social, le capital économique et financier, le capital politique (gouvernance), les deux autres capitaux, l’environnemental et l’infrastructurel étant directement pris en compte dans les propositions en relation à la mission d’orientation. Il faudrait dire tout de suite que les actions, qui se feront en s’appuyant sur des approches participatives, holistique, auront des impacts sur l’ensemble des six capitaux. On laisserait, pour éviter d’alourdir cet article, au plan global, qui sortira des études à faire sur la Région Gonaïvienne, le soin de les analyser en détails.

CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

Les propositions faites dans ce dossier sont susceptible de résoudre le problème de la ville de manière globale. Le contrôle des crues exceptionnelles et des crues normales pourront se faire sur une période plus ou moins longue (10-25 ans) avec des ouvrages de retenues susceptibles de stocker plus de 50% du volume d’eau reçu en une nuit. Quant à l’accessibilité à la ville en tout temps, elle est étroitement au contrôle des crues.

Avec des volumes d’eau de l’ordre de 10,000 à 20,000 m3/s versés par Jeanne, Hanna et Ike, les drains actuels artificiels et naturels n’étaient pas en mesure de répondre, même remis en pleine capacité d’écoulement. Par rapport à Jeanne, et à Hanna et Ike, respectivement 2004 et 2008, la période de retour de telles catastrophes se situent autour de 4 ans, soit une probabilité annuelle de 25%. Or les mesures proposées demandent beaucoup de temps et beaucoup d’argent ; toutefois, il est possible, comme on l’a proposé dans ce dossier, d’étaler les actions à prendre sur les court, moyen et long termes et de les coupler à d’autres actions qui dépassent le mandat octroyé à la commission interministérielle ad hoc.

Les actions à court terme permettront de faire face à des crues normales et d’en faire un usage productif comme l’alimentation correcte des systèmes d’irrigation et la mise en valeur agricole de près de 6000 ha de terre, de tester certaines pratiques au niveau des versants et des ravines, de remettre en pleine capacités les ouvrages existants ainsi que la rivière La Quinte et ses affluents, de sensibiliser la population et de collecter le maximum d’informations pour affiner les propositions, tout en permettant une accessibilité acceptable à la ville des Gonaïves.

La mise en place parallèlement d’une structure permanente de coordination et reconstruction de la Région des Gonaïves (SPC2RG) et les multiples études qui se feront durant cette période permettront de se fixer sur des alternatives les plus viables et les plus fiables avec des coûts optimums pour résoudre définitivement les nombreux problèmes qui se posent au pays vis-à-vis de la ville des Gonaïves et de ses environs.

Les actions de moyen et de long termes, qui répondront de manière définitive à la problématique Gonaïvienne, tout au moins aux aspects en relation à la mission de la commission interministérielle, se feront sur des bases plus sérieuses (SPC2RG en place, études achevées, plan global et cadre stratégique global de la coordination et de la reconstruction de la ville validé et appuyé par l’Etat, financement disponible), et faciliteront la réhabilitation et la construction de systèmes d’irrigation couvrant 12500 ha à l’intérieur du bassin versant et 15000 ha dans sa périphérie, le traitement de 45,000 ha en agro foresterie, en vergers et en forets, la mise en place de citernes, d’impluviums, le regroupement des communautés, la mise en place et la consolidation d’organisations paysannes de base, etc., en essayant dans la mesure du possible de respecter le triptyque de la performance globale, la gestion du temps, la gestion de l’argent et la réalisation des activités de qualité.

Ces propositions, qui exigeront un consensus et des appuis politiques importants, ne pourront s’appliquer sans des coûts socioéconomiques considérables. La plupart nécessiteraient des déplacements de populations vers des endroits plus sûrs, des pertes de centaines d’ha de terres irrigués et irrigables, des dédommagements de la part de l’Etat, des risques d’inondations sur la rive gauche de La Quinte donc inondation périodique des Temples de Souvenance, de Soucri et d’autres hauts lieux du vodou, et l’augmentation du Lac de Savane Jonc, tout au moins avant la construction des grands barrages de retenues, et l’augmentation des risques d’inondation dans la zone de Grammont et de Terre Salée jusque là partiellement inondées périodiquement. En outre, la gestion des marais salants exigera des précautions particulières pour éviter leur inondation par de l’eau douce comme cela s’est produit en deux fois en 2004 et en 2008. Enfin, l’arbitrage à faire par rapport à certaines solutions techniques proposées exigera un grand courage politique et une grande vision de l’avenir d’Haïti.

Recommandations

Pour atteindre de tels résultats, il faudrait au préalable :

S’assurer, par l’intermédiaire de la structure permanente de coordination et de reconstruction de la Région des Gonaïves, de la mise en œuvre correcte du plan global de développement de la ville incluant l’ensemble du BV et de sa périphérie (Plateau continental, Anse Rouge, Terre Neuve, Gros Morne, Marmelade, St Michel, Marchand, l’Estère et Petites Desdunes sur une période plus ou moins longue (25 ans environ) ;

Exiger l’ensemble des intervenants au niveau des Gonaïves, du bassin versant et dans la périphérie à observer strictement les grandes lignes du plan global et du cadre stratégique pour la reconstruction de cette Région. Toutes les actions devront y être conformes. En attendant l’élaboration de ce fameux plan global, les intervenants devraient essayer de baser leurs interventions, dans la mesure du possible, sur les documents existants tels le cadre stratégique pour la coordination et la reconstruction des Gonaïves, document de synthèse, le plan local d’urbanisme, l’étude de la BID sur le BV (PIA), et le « Plan d’aménagement et étude détaillée de la rectification de la rivière La Quinte-Haïti » ;

S’assurer que la Structure mise en place ne devrait pas être à la merci des aléas politiques et susceptibles d’être orientée politiquement dans un camp ou dans un autre, elle devrait bénéficier d’une grande autonomie et d’une grande marge de manœuvres pour lui permettre de transcender les querelles intestines et politiciennes, elle devrait être munie de moyens substantiels et de suffisamment d’autorité pour favoriser la mise en application du plan et du cadre stratégique global pour la coordination et la reconstruction de la Région Gonaïvienne ;

Favoriser l’intégration dans la structure des cadres de haut niveau qui ont les capacités suivantes : (i) maitrise de la problématique haïtienne dans sa globalité et la problématique Gonaïvienne de manière spécifique ;(ii) ayant l’habitude de fonctionner avec les structures étatiques, privées, des collectivités territoriales, de la société civile, et des bailleurs de fonds ;(iii) maîtrise des langues française et créole et ayant une grande capacité d’analyse et de synthèse et une grande capacité de communication, de travail en équipe et de leadership. Ces cadres devraient avoir des contrats de moyen terme (3 ans) renouvelables indéfiniment sur la base de performances ;

S’assurer de la réplicabilité, dans la mesure du possible, des mesures adoptées pour la coordination et la reconstruction de la ville des Gonaïves dans d’autres endroits du pays qui font face aux mêmes aléas comme Cabaret, Léogane, Jacmel et en faire des pôles de croissance dans le cadre du développement durable du pays haïtien.



[1] Cet article est inspiré du rapport de la mission d’orientation pour la protection et la réhabilitation de la ville des Gonaïves conduite par la Commission interministérielle ad hoc sur Gonaïves coordonnée par le ministère de l’agriculture. L’auteur de cet article en a été le coordonnateur principal.

[2] Le Ministère de l’Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement Rural (MARNDR) avec trois membres , le Ministère des Travaux Publics, Transports et Communications (MTPTC) avec trois membres, le Ministère de l’Environnement (MDE) avec un membre et le Ministère de l’Intérieur avec un membre.

[3] Gary Dupiton et Herold St Pierre

[4] The Economist print edition .Weighed down by disasters. Feb 12th 2009 | GONAÏVES
A modest success for the United Nations is threatened by nature and lassitude

[6] Mairie de Gonaïves, DOSSIER FONDAMENTAL URBAIN, Beta Ingenieurs-Conseils, Juin 1997 (Financement BID, Supervision PNUD-HABITAT)

Mairie de Gonaïves. PLAN D’URBANISME DIRECTEUR ET PLAN DE ZONAGE, Beta Ingenieurs-Conseils, Juin 1997 (Financement BID, Supervision PNUD-HABITAT)

[7] L’Unité pour la coordination et la reconstruction des Gonaïves (UCRG). Cadre Stratégique pour la Réhabilitation des Gonaïves et de ses environs. Rapport de synthèse. Avril 2005.

[8] Plan d’aménagement et étude détaillée de la rectification de la rivière La Quinte-Haïti. Juin 2008.