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mercredi 4 février 2015

UNE ECONOMIE A BOUT DE SOUFFLE DANS UNE CONJONCTURE POLITIQUE EXPLOSIVE


UNE ECONOMIE A BOUT DE SOUFFLE DANS UNE CONJONCTURE POLITIQUE EXPLOSIVE
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
4 FEVRIER 2015

Haïti a connu un début d’année mouvementé mais sans  « tsunami ni goudougoudou politique ». Nous avons su par une série de manœuvres faites de manifestations de rue, de démission du Président de la Cour des Cassations, Me Anel Alexis, de dysfonctionnement inexplicable  mais complice du Parlement, d’accord entre certains partis de l’opposition radicale et modérée avec l’administration Martelly, de mise en place d’un gouvernement de consensus (ou d’ouverture ?),  d’un nouveau Conseil Electoral Provisoire (CEP) selon l’esprit de l’article 289 de la Constitution,  de l’aggravation de la situation socioéconomique, de la pression internationale suite à la visite du Conseil de Sécurité des Nations Unies avec le cap vers les élections en 2015 promises avec force par le Président Martelly lors de sa participation à la rencontre des Chefs d’Etat et de Gouvernement du  CELAC ( Conseil Economique des Etats Latino-Américains et Caribéens) à Costa-Rica (27-28 janvier 2015). Ce qui nous amène, avec la poursuite des manifestations de rue par l’opposition radicale, avec le mouvement  de grève des professeurs tant au niveau public qu’au niveau universitaire et la grève des transporteurs publics pour la réduction du prix du carburant, (2 Février 2015) qui est naturellement appuyée par l’opposition radicale,  à titrer l’article de ce mois de janvier : «  Une économie à bout de souffle dans une conjoncture politique explosive »

La poursuite  des manifestations de rue
L’opposition radicale, même réduite au MOPOD, à la Plate forme « Pitit Desalin », à FANMI LAVALAS, n’a rien perdu de sa force de frappe. Elle a maintenu les manifestations de rue. Ces manifestions se sont même intensifiées à Port-au-Prince et ponctuées de violences. Face à cette flambée de violences décriées par la majorité des gens, elle n’a pas hésité à accuser le Premier Ministre Paul d’être le responsable de ces violences. Elle croit dur comme fer que les manifestations de rue finiront par emporter Martelly. Non à cours d’imagination, elle a inventé le concept « opposition band » pour rester mobilisée durant la période carnavalesque. C’est fantastique la capacité de cette opposition radicale à se muter pour rester en vie. Malheureusement, jusqu’à présent, elle n’a pas su exploiter toute cette énergie pour proposer une alternative sérieuse à l’administration Martelly considérée comme le mal absolu. L’accord du 11 Janvier 2015 de la plupart de ses membres avec l’administration Martelly ne l’a pas pour autant refroidie, d’autant que LAVALAS qui jouait sur les deux tableaux (Manifestations et négociation) a fini par opter pour les manifestations en vue de déchoucage pur et simple Martelly et Evans Paul.

L’accord du 11 janvier 2015
C’aurait été une bonne chose si  toute la classe politique avait adhéré à cet accord. Il porte en lui les éléments fondamentaux pour un consensus minimum en vue d’ « un vivre ensemble » pour reprendre le mot du Premier Ministre Paul. Mais la méfiance de l’opposition radicale par rapport à Martelly,  la volonté de le déchouquer, la haine d’une partie de la classe politique vis-à-vis de ce « vagabond », de cet « usurpateur » font que nous n’avons pas su nous élever à la hauteur de la conjoncture socio-économico-politique. Avec la réduction du Parlement à sa plus simple expression, comme l’a prédit, l’ex-président de l’Assemblée nationale, « le Parlement demeure » mais il est dysfonctionnel  avec seulement 10 Sénateurs.

Le dysfonctionnement du Parlement
Alors que l’administration Martelly négociait  l’Accord du 11 Janvier 2015 avec les partis politiques de l’opposition dont KONTRA PEP, INITE, FUSION, GROUPE 22 de Me Séant, le Parlement s’est arrangé pour se rendre dysfonctionnel. Toutes les parties représentées (Opposition au pluriel et Pouvoir) se sont mises d’accord pour aboutir à ce dysfonctionnement.  On dirait une entente dans le mal. Pourtant, toute une bataille rangée a été menée pour éviter que M. Martelly « dirige par décret ». Vraiment c’est à perdre son latin. L’un des Sénateurs opposant s’est enorgueilli  d’avoir contribué à cet état de fait pour ensuite accuser le Président de la République d’être un dictateur du fait même du dysfonctionnement du Parlement et du Pouvoir Judiciaire sans le Président  du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire dont le départ  a été exigé par l’opposition. Il en a été de même pour le Conseil Electoral Provisoire dont le départ a été exigé par l’opposition également, tout au moins avant sa reconstitution selon l’esprit  de l’article 289 de la Constitution. Heureusement, les neuf (9) membres de ce nouveau CEP, issus exclusivement  des institutions et organisations de la société civile, semblent obtenir l’aval de l’ensemble de la classe politique, opposition incluse. Il n’en est pas de même du Gouvernement de consensus.

Le gouvernement de consensus
En effet,  ce gouvernement est très mal vu par l’opposition  radicale et même par l’opposition modérée qui n’étaient pas parties prenantes de l’accord du 11 janvier 2015. Il est perçu  beaucoup  plus comme un  gouvernement d’ouverture que de consensus. Les arguments avancés : on retrouve trop de ministres qui ont appartenu à l’administration Martely-Conille et Martelly-Lamothe.  C’est la continuité ont répliqué  les sympathisants du gouvernement. On ne pouvait pas tout chambarder. Toujours est-il que  sur 19 ministres, l’administration Martelly-Paul  a  gardé  douze (12) portefeuilles :(1) Wilson Laleau est muté  à l’Economie et aux Finances, (2) Jacques Rousseau est maintenu aux MTPTC, (3) Duly Brutus aux Affaires Etrangères, (4) Stéphanie Villedrouin au Tourisme et aux Industries Créatives, (5) Florence Duperval Guillaume à la Santé Publique, (6) Nesmy Manigat à l’Education Nationale ( il a été signalé le travail de qualité fourni par ces ministre dans mon bilan 2014, réf http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/12/haiti-bilan-2014-perspectives-2015-du.html ) , (7) Pierre Richard Casimir est revenu non aux Affaires Etrangères mais à la Justice et à la Sécurité Publique, (8) Yves Germain Joseph du secrétariat de la Présidence à la Planification et à la Coopération Externe , (9) Hervey Day est revenu  non à la Planification mais au Commerce et à l’Industrie, (10) l’ex-Secrétaire d’Etat  aux Collectivités Territoriales, M. Jean Fritz Jean-Louis, occupe un nouveau poste, Ministre délégué auprès du Premier Ministre chargé des Questions Electorales, (11) Jean François Thomas, à l’Agriculture ( difficulté de fonctionnement à cause du refus systématique des étudiants de la Faculté d’Agronomie), (12) Lener Renauld à la défense. Les nouveaux les plus connus sont :(1) Victor Benoit de la FUSION aux Affaires Sociales,  (2) Rotchild François Junior à la Communication, (3) Ariel Henry de l’INITE à l’Intérieur et aux Collectivités Territoriales, (4) Germain de l’INITE à l’Environnement, (5) Jimmy Albert à la jeunesse aux Sports et à l’Education Civique, (6) Dithny Joan Raton à la Culture,  (7)  Yves-Rose Morquette à la Condition féminine et aux droits de la Femme. « Dans les portefeuilles de secrétaires d’Etat, 9 anciens (dont 2 femmes) du gouvernement Lamothe sont maintenus : Marina Gourgue à la Formation professionnelle ; Gabrielle Hyacinthe à la jeunesse et à l’action civique ; Gérald Oriol à l’Intégration des personnes handicapées ; Henri Robert Sterlin aux Affaires étrangères ; Philippe Cinéas aux travaux publics, transports et communications ; Robert Labrousse à la Coopération externe ; Michel Présumé à la Planification ; Michel Chancy à la Production animale ; Fresner Dorcin à la Production végétale. Parmi les nouveaux secrétaires d’Etat, il convient de mentionner Fednel Monchéry, du parti Repons peyizan, nommé secrétaire d’Etat à la réforme agraire. » (Réf. http://www.alterpresse.org/spip.php?article17606#.VNDI4GjF9VI ), et Pierre André GEDEON à la relance agricole. Pour les autres noms des nouveaux secrétaires d’Etat, consulter  le site de Radio Métropole http://www.metropolehaiti.com/metropole/full_une_fr.php?id=25727. Effectivement, 12 ministres sur 19, et 10 secrétaires  d’Etat au moins sur 16, ça fait beaucoup. Le Pouvoir s’est taillé la part du lion.

Encore un gouvernement HIMO
D’un autre coté, dans une conjoncture marquée au coin de la misère, on aurait pu réduire le nombre de ministres  et de secrétaires d’Etat. L’opposition a raison en dénonçant la taille du gouvernement. C’est une forme de création d’emplois, encore un gouvernement HIMO (haute intensité de main d’œuvre) pourrait rétorquer l’administration Martelly ; de plus, il a fallu satisfaire les nouveaux alliés. Il faut noter quand même une réduction par rapport au Gouvernement Lamothe. Effectivement, " dans le dernier gouvernement Lamothe, constitué le 2 avril 2014, il y avait 23 ministres (dont 7 femmes) et 19 secrétaires d’Etat (dont une seule femme, la secrétaire d’Etat Gabrielle Hyacinthe, reconduite ce 19 janvier 2015 aux sports et à l’action civique)". Il  aurait été mieux de réduire encore plus la taille du gouvernement comme je l’avais suggéré et consacré l’argent économisé à faire des travaux à haute intensité de main d’œuvre  (HIMO) pour recapitaliser les plus nécessiteux facilement utilisables  pour des manifestations de rue aux fins de renversement définitif de l’administration Martelly, encore possible en référence à la situation socioéconomique du pays.

La situation socioéconomique
Le ministre Laleau, lors de son installation, a évoqué un concept qui a fait débat : « l’état d’urgence économique ». En effet, selon M. Jean Saint-Vil (Réf. La fin de l’économie haïtienne) : « L’économie haïtienne se trouve actuellement dans une situation très critique avec une balance commerciale accusant un déficit astronomique :2,4 milliards de dollars en 2013, soit 29% du PIB et un recul accéléré de la monnaie nationale qui a perdu plus de 7% de sa valeur en l’année 2014, passant de 44,15 en janvier 2014  à 47 gourdes pour un dollar au mois de décembre ». Face à la situation désastreuse  de  l’environnement physique haïtien, j’avais proposé que l’Etat déclare  « l’état d’urgence environnementale pour Haïti » (Réf http://jrjean-noel.blogspot.com/2012/11/haiti-les-trois-piliers-du.html ). Par analogie, j’avais vite compris que la situation économique du pays n’est pas du tout rose. Et c’est ce qu’a voulu exprimer le ministre Laleau lors de sa prise de fonction. Choquer les citoyens pour une prise de conscience citoyenne, en vue de sauvegarder le peu d’acquis  obtenu en matière économique et financière. Certes, ce concept, comme l’a fait ressortir Pharel, n’a pas sa place durant la dernière année d’un pouvoir dont la mission est essentiellement l’organisation des élections. Mais il est toujours bon de provoquer des  débats sur des sujets qui fâchent pour nous sortir de notre léthargie provoquée par une situation politique envahissante et sans issu.
D’ailleurs, ce débat sur l’état d’urgence économique a été vite rattrapé par la réalité économique  exploitée politiquement par l’opposition radicale très, très intelligente pour saisir la moindre occasion susceptible de l’aider à nuire à l’administration Martelly. La grève des transporteurs publics pour la réduction du prix du carburant arrive donc à point nommé pour cette opposition qui l’appuie de toutes ses forces. La réduction de 15 HTG sur le gallon annoncée ne semble pas ébranler les projeteurs de grève qui ont maintenu leur mot d’ordre. Ils veulent une réduction drastique de l’ordre de 100 HTG sur le gallon pour le ramener au même niveau moyen que les USA, soit autour 1.80 USD le gallon (84 HTG/gal). Il y en a même qui veulent aller jusqu’à 70 HTG/gal.

De telles baisses mettraient l’administration Martelly sur les genoux. C’est une situation très dangereuse pour le pays. Une baisse drastique mettrait en très grande difficulté le pouvoir en place et mettrait tout autre pouvoir issu du déchoucage ou d’élections libres en très grande difficulté de fonctionnement. Il ne faut pas oublier que  les taxes prélevées sur le carburant jouent un rôle capital et essentiel dans le fonctionnement de l’Etat haïtien. Une telle mesure provoquerait un manque à gagner énorme pour l’Etat et compromettrait les projections de croissance économique pour 2015 qui sont liées à des investissements prévus dans le budget 2014-2015, à moins que la Communauté Internationale dans un élan de générosité sans précédent (et j’en doute fort)  accepte de délier les cordons de la bourse.
La Communauté internationale est-elle prête  à rentrer dans ce jeu ? Surtout que, selon le Nouvelliste: « L’administration Martelly et le gouvernement Lamothe ont dépensé plus de deux milliards de dollars ces derniers mois…Le pays a plus de dettes que les Duvalier et Lavalas n’en avaient contracté en cinquante ans. En dépit de tout, le pays reste assoiffé. PetroCaribe c’est fini.   (Réf.http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/140991/Le-secteur-prive-doit-continuer-a-simpliquer). De quels deux milliards USD parle Frantz Duval? Si ce sont les deux milliards et poussière inscrits dans le budget rectificatif de mai 2014 (environ 118 Mrds HTG ou 2.5 Mrds USD), c’est normal, puisqu’il fallait les engager vite avant la fin de l’exercice 2013-2014, et entamer d’autres dépenses sur le budget 2014-2015 (122 Mrds HTG ou 2.6 Mrds USD), durant les trois premiers mois de l’exercice en cours. Selon l’énoncé de politique générale du PM Conille et repris par le PM Lamothe, le budget annuel de cette administration devrait tourner autour de 3 Mrds USD. Donc des dépenses de 2 Mrds USD par le Gouvernement  sont tout à fait normales. Pour avoir des taux de croissance du PIB plus élevés, il faudrait, selon la FONHDILAC, des dépenses de l’ordre de 4 Mrds  USD/an dont 70% dans les investissements.
Il faut souligner qu’à titre d’exemple, selon les informations fournies par Kesner PHAREL dans l’émission « Investir » du 31 janvier 2015, les dons (30 Mrds HTG), les prêts (22 Mrds HTG) et les financements internes (10 Mrds HTG) sont inscrits dans la loi de finances 2014-2015 (122 Mrds HTG), ainsi que les ressources locales provenant des taxes perçues (60 Mrds HTG dont 7 Mrds HTG sur les produits pétroliers) au niveau de la Douane et de la Direction Générale des impôts. Donc, dans le cas d’une baisse drastique du prix du carburant, le budget sera amputé d’une bonne partie des ressources prévues. Avec l’effondrement du cours du baril de pétrole sur le marché mondial, les fonds PETROCARIBE (22 Mrds HTG/an) ne seront plus disponibles non plus pour le budget, tout au moins en partie. Il faudrait donc revoir à la baisse le budget et réduire la taille des investissements, ou tout simplement, laisser tomber certains projets d’envergure et programmes sociaux ainsi qu’une partie des frais de fonctionnement de l’Etat (15 Mrds HTG), car l’administration Martelly ne pourrait pas se permettre, en plus, de ne pas payer les fonctionnaires de l’Etat (28 Mrds HTG).

Il faudrait donc un arbitrage très serré et très sérieux avant toute décision en relation avec la baisse du prix du carburant, si on voulait maintenir un taux de croissance positive et ne pas tomber dans un tourbillon d’inflation qui affecterait le pouvoir d’achat de chaque haïtien. Les grognes sociales pourraient s’amplifier et déboucher sur un chambardement incontrôlable. Ce qui certes arrangerait l’opposition radicale mais qui plongerait le pays dans un cycle infernal au niveau économique et financier. L’opposition s’en ficherait pas mal croyant pouvoir résoudre le problème une fois arrivée au pouvoir (mauvaise foi ou ignorance ?). C’est oublier que les faits économiques ont la dent dure.
Le prix à payer
En tout cas, après cette journée de grève réussie même ponctuée de violences et d’ « intimidations » (pneus enflammés, tirs sporadiques d’armes à feu, etc.), concluons avec Frantz Duval du Nouvelliste:« L’administration Martelly-Paul se doit après la grève de ce lundi de faire un geste supplémentaire, celui de vendredi étant visiblement insuffisant. Cette nouvelle baisse attendue va grever un peu plus les comptes du Trésor public, mais c’est le prix à payer pour s’être écarté du droit chemin de la bonne gouvernance » (Réf. http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/141117/Une-severe-correction ). Le gouvernement a pu négocier avec les grévistes 20 HTG en moins sur le gallon de gazoline, 20 HTG sur le gallon de gasoil  et 15 HTG sur le Kérosène. Cette baisse n’est pas du tout substantielle. Toutefois, elle a permis la reprise des activités à travers le pays, ce mardi 3 Février 2015, et particulièrement dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Espérons que le Gouvernement retiendra la leçon  et prendra les dispositions appropriées par rapport à la fluctuation du cours du carburant sur le marché international pour éviter ces genres d’étincelle dans une conjoncture politique explosive capable d’emporter n’importe quel gouvernement. 

mercredi 31 décembre 2014

HAITI: BILAN 2014, PERSPECTIVES 2015, DU DIALOGUE A L’ENTROPIE POLITIQUE VERS LES ELECTIONS AVEC OU SANS MARTELLY?


HAITI: BILAN 2014, PERSPECTIVES 2015, DU DIALOGUE  A L’ENTROPIE POLITIQUE VERS LES ELECTIONS AVEC OU SANS MARTELLY?
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
31 DECEMBRE 2014

En ce mois de Décembre 2014, les événements politiques se sont précipités. La commission consultative présidentielle a sorti son rapport et ses recommandations. Le Président de la République qui, selon ce rapport doit tout céder à l’opposition et à la rue sauf sa fonction, a, malgré tout, accepté le rapport dans son ensemble en signe de bonne volonté. Le Premier Ministre Lamothe a donné sa démission et remplacé ad intérim par la Ministre de la Santé Publique, Mme Duperval, conformément à l’article 165 de la Constitution 1987 amendée.  C'est la  nomination d’Evans Paul par arrêté présidentiel en date du 25 Décembre 2014 en accord avec les Présidents des deux chambres au poste de Premier Ministre de Consensus et après consultation avec l’opposition modérée et la plupart des partis de l’opposition radicale y inclus Lavalas (jouant sur les deux tableaux et choisissant enfin le déchoucage de Martelly) mais sans le MOPOD, la nouvelle plate forme « Pitit Desalin » sous le leadership du Sénateur JEAN-CHARLES et les groupes de base qui intensifient leurs manifestations de rue, sans trêve de Noël ni du Nouvel an, en exigeant le départ pur et simple du Président de la République . Les membres du Conseil Electoral Provisoire, issus de l’Accord Del Rancho, ont accepté de démissionner pour être remplacés selon l’esprit de l’article 289 de la Constitution de 1987. Les principaux prisonniers dits politiques sont relâchés. Un accord politique tripartite est trouvé , le 29 décembre, entre le Président de la République (Martelly),  les Présidents des deux chambres (Timoléon et Desras) et le Président de la Cour de Cassation (Arnel Alexis) sur la prolongation  du mandat des parlementaires au delà de 12 janvier 2015. Il ne reste que la démission  du Président de la Cour de Cassation, Me Arnel Alexis (enfin obtenue la premiere semaine de Janvier 2015). Mise à part la radicalisation de la situation politique en ce mois de décembre 2014 (poursuite de « l’Opération Burkina  Faso » ou démission de Martelly), tous les autres mois de l’année 2014, ont été ponctués de manifestations politiques anti gouvernementales avec une baisse significative en périodes carnavalesques et footballistique (Mundial 2014 au Brésil) et durant la période du « Dialogue del Rancho ». D’où le titre de ce dernier article  de 2014: « Haïti, Bilan 2014, Perspectives 2015, du Dialogue à l’Entropie politique vers les Elections avec ou sans Martelly. » Cet article s’attardera sur le Bilan 2013-2014 en matière sociopolitique, socioéconomique, dégagera les perspectives 2015 en matière sociopolitique et économique et se terminera sur des conclusions et recommandations appropriées.

A.     BILAN 2013-2014

Rappeler  la vision de Martelly
Avant de présenter le bilan, il y a lieu de rappeler la vision de Martelly avant sa prise de fonction. La vision de M. Martelly est exprimée dans ses prises de parole, celles de ses conseillers et dans son programme, « Le courage de changer ». Cette vision est axée sur : (i) La Relance de la production agricole nationale, (ii) la Sécurité des personnes et des biens, (iii) l’Education et la formation pour tous, (iv) Replacer Haïti sur la carte du monde, (v) Tourisme et culture, (vi) Santé préventive et soins pour tous, (vii) Dynamiser l’économie et le secteur privé. (Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2011/04/inite-et-martelly-ou-le-changement-dans.html ). Cette vision s’est exprimée dans l’énoncé de politique générale du Premier Ministre Conille et appliquée dans celui du Premier Ministre Lamothe dans son programme axé sur les cinq (E) : Education, Emploi, Etat de droit, Environnement, et Energie. Ce programme est lui-même ancré dans le Plan d’Action pour le Relèvement et le Développement National d’Haïti (PARDNH), transformé en Plan Stratégique de Développement d’Haïti (PSDH). Il faut noter que  le programme de Martelly était estimé à 15 Mrds USD, soit un montant annuel d’environ 3 Mrds USD. Il faut souligner que le budget annuel durant la période Martelly  s’est rapproché de ce montant et est toujours mis en œuvre en retard à cause des divergences politiques avec le Parlement. Il a été de même pour l’exercice 2013-2014 sous étude.

Le bilan 2013-2014 sera donc analysé à partir de la situation sociopolitique vécue tout le long de la période sous étude ainsi que la situation socioéconomique de la même période et insistera aussi sur les conséquences de la situation politique sur l’économie du pays avec des incursions remontant à la prise de pouvoir de l’administration Martelly en mai 2011.

1.       LA SITUATION SOCIO POLITIQUE

Comme signalé à l’introduction de ce chapitre, la situation politique vécue au cours de ce mois de Décembre 2014 n’est pas tellement différente de celle des autres mois de l’année si ce n’est le niveau de radicalisation de la situation politique débouchant sur la nomination d’un nouveau Premier Ministre en la personne d’Evans Paul.

Dialogue Raté
L’année 2014 a démarré avec le Dialogue del Rancho. Personnellement, j’ai fondé beaucoup d’espoir  sur ce processus. Malheureusement, ce Dialogue n’a pas été compris de la même manière par tout le monde, en particulier par l’opposition radicale qui a maintenu la pression jusqu’au départ de M. Lamothe du pouvoir en Décembre 2014.  C’était un dialogue raté. Toutefois, le document de base du dialogue reste à mon avis un modèle du genre. Dans le cadre d’une grande concertation nationale, il serait intéressant de nous inspirer de ce document pour arriver à bien jeter les bases de cette grande concertation nationale et ce document de base devrait avoir l'aval de l’ensemble des parties prenantes à cette concertation nationale pour terminer avec cette entropie politique caractérisant la politique depuis la création de l’Etat d’Haïti.

Entropie Politique
La situation sociopolitique du pays s’est caractérisée durant toute l’année écoulée par une bataille rangée entre le Parlement, en particulier, le Sénat, le MOPOD objectivement lié aux G6 du Sénat, et l’Exécutif. Cette bataille rangée a beaucoup influencé la situation globale du pays. On s’est retrouvé dans un véritable désordre politique, une entropie politique. Pas un mois s’est écoulé sans des interventions politiques au niveau des médias, des manifestations de rue antigouvernementales, des déclarations incendiaires, des accusations de corruption au sein de l’appareil gouvernemental. On a même surnommé le Premier Ministre, « Laurent Gagot’t ». La machine gouvernementale s’est défendue à coup de propagandes confondant information et propagande et jetant le peuple haïtien dans une véritable confusion qui ne lui a pas permis de se situer par rapport à ce flot de mensonges. La vérité a été travestie pour les besoins de la cause. Ce qui est sûr, dans les deux camps, on n’avait pas cette impression que, tant au niveau du pouvoir qu’au niveau de l’opposition, le pays était au centre des débats. En tout cas, si nos amis au pouvoir et ceux de l’opposition croient qu’ils se battent pour le pays, ce n’est pas l’impression qu’ils ont transmise à la majorité des haïtiens. La preuve c’est que ces querelles politiques ont des incidences malheureuses sur la situation économique et financière.

2.       LA SITUATION ECONOMIQUE ET FINANCIERE

La situation économique et financière de 2013-2014 sera analysée eu égard aux prévisions budgétaires et aux résultats en termes macroéconomique et microéconomique.

2.1.  Les prévisions financières 2013-2014

En termes de prévisions financières, les considérations ont été faites autour de deux aspects (i) la situation économique projetée et (ii) les secteurs soutenant la croissance

Situation économique projetée
Dans le cadre du projet de  loi de finances 2013-2014 non approuvé par le Senat, il était prévu  une  enveloppe budgétaire globale fixée à 126.4 Mrds de gourdes, en baisse de 5.2 Mrds de gourdes par rapport à l’exercice précédent, un taux de croissance de 4.5%, un taux d’inflation contenu à 6.5%, un déficit budgétaire cantonné à moins de 4% du PIB, un  taux de pression fiscale à 12.7% en ligne avec l’objectif de moyen terme fixé à 15%. Le taux de change sera maintenu stable. Enfin le niveau des réserves brutes devrait rester sous l’équivalent de 6 mois d’importation. Les recettes propres représentent 42.5% du total, le solde étant couvert par les dons pour 25.4%, par les emprunts extérieurs pour 20.9% et par des financements intérieurs à hauteur de 11.2%, dont un peu plus de la moitié sous la forme d’émissions de Bons du Trésor. Du côté des dépenses, les crédits de fonctionnement constituent 36.6% du total, contre 61.3% pour les dépenses en capital et 2.1% pour l’amortissement de la dette publique. (Réf. DISCOURS SUR LE BUDGET ENONCÉ DES MOTIFS du  ministre des Finances M. Wilson Laleau devant la Chambre des Députés le 27 juin 2013). Il est à souligner que ce budget a été revu à la baisse en avril 2014 à 118.7 Mrds HTG au retour de Mme Jean-Marie au Gouvernement  suite aux tractations liées à l’accord del Rancho, entrainant la réduction du taux de croissance du PIB (3.6%) et  des allocations par rapport aux secteurs y inclus les secteurs de la croissance.

Les secteurs soutenant la croissance
Les grandes enveloppes sectorielles du projet de Budget se répartissent comme suit : (i) le secteur économique avec près de la moitié des crédits, soit 49% réduit à 48.1% du montant global révisé de 118.7 Mrds HTG, à commencer par le Ministère des Travaux Publics, Transports et Communications avec 20.7% des 126.4 Mrds HTG du budget de départ et réduit à 17.9% du montant révisé. Le secteur agricole dont les investissements de départ étaient de 6.4 milliards de gourdes, soit 5% du montant global, a vu réduire son niveau d’investissement à 5.9 Mrds de gourdes, soit 5.8% du montant révisé.  (ii) Le secteur social qui devait recevoir une dotation importante, de l’ordre de 21.7%, dont 12.8% au profit de l’Education nationale et de la formation professionnelle, ce qui représentait un total de 16.1 milliards de gourdes équitablement répartis entre dépenses de fonctionnement et d’investissement, a vu augmenter  le niveau de fonctionnement et d’investissement à 27.33 Mrds de gourdes, soit 23 % du montant révisé avec accent particulier sur l’Education  (16.24 Mrds ou 13.7%) et la Santé (6.96 Mrds ou 5.9%). (iii) Le secteur politique, qui se voyait réserver 15.4% des crédits, dont plus de la moitié (8.2%) au bénéfice du Ministère de la Justice, en charge de la sécurité nationale, s’est vu attribuer 17.41 Mrds (14.7%). (Réf. MEF/ Group Croissance, Observatoire du Système Financier Haïtien, Budget révisé avril 2014). Avec de telles réductions, baisse et les retards enregistrés dans la mise en œuvre du budget, on ne pourrait pas s’attendre  à des résultats spectaculaires tant du point de vue macroéconomique que microéconomique.

2.2. Les résultats en termes macroéconomique

« L'économie haïtienne n'a pas pu atteindre l'objectif de 3.6% de croissance qui a été fixé pour l'exercice fiscal 2013-2014. Selon les estimations préliminaires, le Produit Intérieur Brut (PIB), en volume, a crû de 2.8%, soit une décélération par rapport à l'année dernière où l'économie avait franchi la barre de 4% de croissance. Ce ralentissement peut être imputé à plusieurs goulots d'étranglement auxquels l'économie nationale a dû faire face en 2014. On peut citer, entre autres: i) les difficultés relatives au vote de la loi de finances de 2013-2014 qui ont empêché ou retardé l'exécution à temps de certains projets d'infrastructure, porteurs de croissance et de création d'emplois ; ii) l'incertitude créée par une situation politique, pour le moins nébuleuse, qui a un peu affecté le dynamisme dont les agents économiques avaient fait montre l'année dernière; iii) les conditions climatologiques n'ont pas été tout à fait clémentes, car certaines régions du pays ont connu une rude sécheresse qui a mis à mal la performance de la branche agricole; iv) la réduction de l'aide externe a eu aussi des impacts négatifs sur le financement de certaines activités. » (Réf. http://www.ihsi.ht/pdf/comptes_economiques_en_2014.pdf)

Selon les comptes économiques de l’IHSI, « En ce qui concerne l'évolution de l'inflation, les prix à la consommation ont été maintenus à un niveau relativement acceptable qui ne nuit pas trop au bon fonctionnement de l'économie. L'inflation, à la fin de l'année fiscale, s'est chiffrée à 5.3% contre 4.5% en septembre 2013, soit une hausse de 0.8 point de pourcentage. Ces résultats ont été obtenus, en dépit de la décote de la gourde, grâce à la relative stabilité macroéconomique sur le plan interne et à la baisse des cours mondiaux sur le plan externe ». Pour ce même exercice, le taux de change oscille entre 46 et 47 HTG pour 1 USD. Alors qu’est-il de la situation microéconomique?

2.3. Les résultats en terme microéconomique

Selon les comptes économiques, « Du point de vue sectoriel, hormis l'Agriculture, la croissance de 2.8% du PIB en 2014 est soutenue par les principales branches d'activité qui ont affiché une tendance haussière, toutefois, moins élevée qu'en 2013, pour la plupart. En effet, contrairement à l’exercice précédent, les estimations provisoires du Ministère de l'Agriculture des Ressources Naturelles et du Développement Rural (MARNDR) indiquent un déclin du secteur agricole en 2014, notamment pour les cultures céréalières et vivrières. Il en est résulté une chute de 1.5% de sa valeur ajoutée à prix constants. Par contre, boostées par les fabrications de produits alimentaires, de boissons et de tabac, les industries manufacturières s'en sont relativement bien tirées avec une croissance, en volume, de 2.1%. La branche Bâtiments et Travaux Publics, en hausse depuis 2011, a maintenu sa progression induite par la poursuite des travaux de reconstruction et autres initiatives du secteur privé avec un accroissement de 7.9%. Le secteur tertiaire a aussi contribué à la hausse du PIB en 2014, particulièrement avec les branches Commerce, Restaurants et Hôtels (4.2%), Transports et Communications (3.7%) et Autres Services Marchands (5.1%) ».

Plus loin, les comptes économiques fournissent les explications suivantes en relation avec la demande globale : « l'analyse des résultats montre que la croissance du PIB a été tirée par toutes ses composantes (demandes interne et externe), mais avec des hausses moins élevées qu'en 2013: la Consommation finale, en volume, a progressé de 2.3% contre 2.7% en 2013; l'investissement, en termes réels, s'est accru de 2.0% contre 6.1% précédemment; et l'exportation, à prix constants, a augmenté de 4.5% contre 5% l'année dernière ».

Une analyse qualitative au regard de la vision de Martelly
En fonction de la  vision rappelée plus haut et axée sur : (i) La Relance de la production agricole nationale, (ii) la Sécurité des personnes et des biens, (iii) l’Education et la formation pour tous, (iv) Replacer Haïti sur la carte du monde, (v) Tourisme et culture, (vi) Santé préventive et soins pour tous, (vii) Dynamiser l’économie et le secteur privé, on pourrait tenter d’analyser à partir de ses 7 axes. Malheureusement, les données quantitatives nous manquent. Par contre, on pourrait tenter une analyse qualitative, en attendant la collecte des données chiffrées par secteur.

(i)                   La Relance de la production agricole nationale fait l’objet d’un document élaboré par le ministère de l’agriculture, « le programme triennal  de relance agricole (2013-2016). Des actions intéressantes sont menées en matière de réforme institutionnelle, la création de nouvelles directions au sein du ministère de l’agriculture, la mise à la retraite de certains anciens, le recrutement de jeunes cadres ; en matière de mise en valeur agricole, des efforts sont consentis tant du point de vue de l’agriculture familiale ( subvention engrais, crédit, voucher, assurance), que de l’agriculture à caractère commercial ( accompagnement des entrepreneurs agricoles, processus de création de la banque de développement  agricole (BNDA), incitation financière, 129.5 M USD dans le secteur par le secteur privé, discussion pour des investissements additionnels de 273 M USD au cours de l’exercice 2014-2015 ;  et en matière de la mise en place des infrastructures rurales et de l’aménagement des bassins versants, des milliers d’ha sont réhabilités et/ou construits. Depuis 2011, le secteur agricole a obtenu des résultats en dent de Cie en relation avec la situation politique et les catastrophes naturelles (cyclones, sécheresse, changement climatique). C’est un secteur en pleine mutation.
(ii)                 La Sécurité des personnes et des biens. Tout le long de la durée de cette administration, il y a eu des efforts soutenus pour sécuriser les personnes et les biens. Malheureusement, les résultats ont été en dents de Cie. En période de manifestations de rue, le taux d’insécurité (morts par balles, biens saccagés, voitures incendiées) suit la courbe ascendante. La Police Nationale a fait de son mieux cette année même si, parfois, on enregistre des dérapages mais pas beaucoup. Certes, on est encore loin de la sécurité totale, mais on ne se sent pas non plus agressé en Haïti. De temps à autre, il y a au niveau des routes nationales et des routes secondaires des manifestations non annoncées qui dérangent les passants dont moi-même qui vis de consultations, ce qui m’oblige souvent à être sur les routes.
(iii)              L’Education et la formation pour tous. On peut reprocher beaucoup de choses à cette administration. Mais on ne peut pas dire qu’elle n’a pas accordé de l’importance à l’éducation et à la formation professionnelle. Tous les ministres qui se sont succédé à ce poste ont fait des efforts pour améliorer la situation. Pour le dernier en date, M. Nesmy Manigat, il m’a personnellement impressionné par son ouverture d’esprit et son courage. Non seulement, il a continué le travail de ses prédécesseurs, mais il l’a grandement amélioré en posant la problématique de la qualité de l’Education. On a accusé ce gouvernement d’utiliser les fonds de la Diaspora  à des fins d’enrichissement illicite. Mais personne n’a pu prouver jusqu’ici ces faits. L’avenir justifiera si oui ou non, les fonds de la Diaspora ont été dilapidés par cette administration ou mal utilisés.
(iv)               Replacer Haïti sur la carte du monde. Les divers voyages effectués par les hautes autorités du pays, les fonctions occupées au niveau régional, les démarches effectuées au niveau des gouvernements étrangers, le slogan « Haïti is open for business », autant d’actions de cette administration qui témoignent des efforts consentis pour replacer Haïti sur la carte du monde. Il faut noter aussi, les diverses activités internationales organisées en Haïti depuis l’arrivée de cette administration. Il en a été de même pour le Tourisme. La réhabilitation de l’Aéroport International de Port-au-Prince, la mise en service de l’aéroport international du Cap, l’initiation de la construction de l’aéroport international des Cayes, de l’Ile à Vache, de l’aéroport de Jérémie, d’autres actions achevées et en cours pour replacer notre pays sur la carte du monde.
(v)                Tourisme et culture. Si cette administration peut s’enorgueillir de quelque chose, ce seront le Tourisme et la Culture. En trois ans, ils ont organisé six (6) carnavals. Ce sont des moments extraordinaires de communion et de démonstration de notre riche culture en dépit des critiques de l’opposition politique. Ces moments ont favorisé grandement le tourisme intérieur et la venue de touristes étrangers et de la Diaspora haïtienne. Le travail au niveau de ce secteur est tout simplement fantastique tant au niveau de la grande terre qu’au niveau des îles. Mme Stéphanie Villedrouin, ministre du Tourisme, fait l’unanimité par son travail, sa compétence et sa détermination. Selon les observateurs avertis, le nombre des chambres d’hôtel a plus que doublé sous cette administration. En tout cas, cette administration a  vu l’ouverture de l’hôtel Oasis, de Servotel, de Best Western, l’agrandissement de Caribe Convention Center, la rénovation de Kinam, la construction d’un hôtel Mariott en Haïti. Sans compter les divers investissements privés dans les villes de province dans l’hôtellerie.
(vi)              Santé préventive et soins pour tous. Là encore, c’est un des secteurs où l’on peut parler de réussite, tout au moins en matière de construction d’hôpitaux, de centres de santé, de dispensaires. Certes en matière de santé préventive et de soins pour tous, on est encore loin. Mais les éléments de base sont là. Il suffit de bien les agencer, les renforcer et de les étendre. L’opposition politique peut reprocher à Mme Duperval son accointance avec la Première Dame, Sophia Martelly, on ne peut dire qu’elle n’a pas bien fait son travail. Ceci explique peut-être cela.
(vii)            Dynamiser l’économie et le secteur privé. Le secteur économique, constitué des ministères de l’Economie, de la Planification, du Commerce et de l’Industrie, des Travaux publics, de l’Agriculture, de l’Environnement,  et du Tourisme, a comme par le passé toujours une partie importante du budget national (45-50%). Donc l’administration Martelly a poursuivi cette politique budgétaire des administrations passées. D’un autre coté, si cette administration a échoué sur le plan environnemental, elle a redynamisé le ministère du commerce en accordant une place prépondérante à l’entreprenariat, l’initiation de la mise en place des « Micro Parcs », a donné des résultats en dents de Cie en agriculture, acceptables en matière touristique etc. Les mesures prises au niveau de la plupart de ces ministères du secteur économique ont incité le secteur privé à investir dans l’économie haïtienne. Quant au MTPTC, durant cette année et les quatre (4) ans de cette administration et malgré les difficultés de toutes sortes, il a plutôt bien tiré son épingle du jeu si l’on excepte le cas de l’énergie électrique. Ces résultats sont dus aussi à la présence de l’Ing. J. Rousseau à la tête du ministère des Travaux publics. En général, c’est le premier secteur contribuant à la croissance et à l’emploi. Il faut noter que depuis la prise de pouvoir de cette administration Martelly, si l’emploi n’a pas été l’objet de politique systématique (non documenté et même négligé), la croissance économique a toujours été au rendez-vous, très certainement en deçà des prévisions et pas suffisante pour nous sortir de la pauvreté puisque trop proche du taux de croissance de la population (2%). Rappelons les taux de croissance du PIB des 4 dernières années : 2011 (5.5%) avec un apport de l’administration Préval, 2012 (2.9%) une année de catastrophes naturelles, 2013 (4.2%) et 2014 (2.8%) une année de catastrophe politique. Ces résultats sont, à mon humble avis, plutôt acceptables quand on se réfère à la vulnérabilité du pays en matière environnementale (changement climatique et autres) et surtout à cette crise politique qui a été une constante de l’administration Martelly.

3.       LES CONSEQUENCES DE LA SITUATION POLITIQUE SUR L’ECONOMIE

Comme pour l’exercice passé (2012-2013), l’Exécutif a fait l’effort de soumettre au Parlement le projet de loi de finances du 2013-2014 comme l’exige la Constitution. Malheureusement, une fois de plus, une fois de trop, les querelles politiques entre la Présidence et le Parlement n’ont pas permis le vote de la loi de finances à temps. Ce qui a poussé l’Exécutif à reconduire le budget de l’exercice précédent durant les sept (7) premiers de l’exercice 2013-2014. Les décaissements ont plus ou moins suivi le même rythme, faibles durant ces premiers mois avec une accélération durant les cinq (5) derniers mois avec les résultats que l’on sait. En plus de ce retard dans le votre du budget, tout l’exercice a été traversé par des manifestations de rue, des périodes de dialogue de sourds entre les politiciens, de réjouissances carnavalesques et footballistiques, de déclarations et actions dérangeantes qui envoient de mauvais signaux aux investisseurs haïtiens et étrangers. A cause du changement climatique, le pays a connu une période de sécheresse qui a affecté le secteur agricole, un des piliers de la croissance, qui a lui-même fait l’objet d’un sérieux problème de retard dans les décaissements.  C’est une situation d’incertitude jusqu’à la fin de l’exercice qui s’est radicalisée, surtout sur le plan politique, durant les trois (3) premiers mois de l’exercice 2014-2015 en passant par des inondations dans le Nord du pays (Novembre 2014 avec des pertes dans le secteur agricole estimées à environ 7 M. USD par la CNSA !  Heureusement, la mise en application des recommandations du rapport de la Commission consultative semble vouloir déboucher sur un dégel de la situation politique. Attendons avant de crier victoire ! Car il ne faut pas oublier que le MOPOD ne jure que par la tête du Président ! Démission ou rien!

Le vote de la loi de finances presque toujours en retard par le Parlement depuis la prise de pouvoir par l’administration Martelly y inclus pour cet exercice 2014-2015 qui a poussé l’Exécutif à mettre en application la loi de finances en vertu d’un article du décret de 2005, a toujours été une pierre d’achoppement dans la mise en œuvre de la politique économique de l’administration Martelly. Ce retard est toujours dû à des querelles politiques entre le Parlement et l’Exécutif et par extension entre l’administration Martelly et l’opposition radicale. Les manifestations de rue ont eu des effets négatifs sur le fonctionnement global du pays. La situation de vulnérabilité du pays, sa position sur la route des cyclones, le manque d’intérêt de nos politiciens pour les questions économiques (leur ignorance fort souvent) sont autant de défis non pris en compte dans leur calcul politique le plus souvent clanique et visant la prise du pouvoir sans se soucier du développement réel du pays.  L’exacerbation de la bataille des clans durant cette administration nous cause énormément du tort. Très certainement, en dépit de la lueur d’espoir qui pointe à l’horizon, de ce dégel (?), cette situation politique aura des répercutions sur l’année 2015.

B.     PERSPECTIVES 2014-2015

Les perspectives 2014-2015 s’articuleront autour du projet de loi de finances, mettra l’emphase sur l’agriculture, sur une plus grande autonomie budgétaire du pays, sur la situation socioéconomique et politique à venir au cours de l’exercice 2014-2015 avec la nouvelle donne découlée des événement de Décembre 2014.

Situation Socioéconomique


 Le projet de loi de finances 2014-2015, non voté par le Sénat comme pour l’exercice précédent mais mis en œuvre par le GOH à partir du 1er Octobre 2014, fixe le montant global du budget à 122.7 milliards de gourdes (122.7 Mrds HTG ou 2.7 Mrds USD). Le budget se répartit comme suit : le secteur économique (44.3%), le secteur politique (18.8%), le secteur socioculturel (27.8%), et autres dépenses (9.1%) dont 4.1% pour le service de la dette externe. Les hypothèses de départ visent un taux de croissance du PIB de 4.6%, un taux d’échange en adéquation avec le taux de croissance, un taux d’inflation de 7.5%. Le taux de croissance de 4,6% du PIB, « sera supporté par les secteurs de l’agriculture +2,5%, de l’industrie +6 % et de la construction +8% » (Réf. Le Nouvelliste du 22/07/2014).

Actions de développement

« L’emphase a été mise sur l’agriculture »
Comme l’a exigé le Président Martelly à Damien  (Réf.  http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/05/haiti-de-la-turbulence-politique-la.html ), l’Education, l’Environnement et l’Agriculture ont subi une hausse budgétaire par rapport à l’exercice écoulé mais n’ont pas crevé le plafond comme on s’y attendait. Pour ce qui concerne l’agriculture, voici l’explication fournie par la Ministre de l’Economie, Mme Jean-Marie : « Le ministère des Travaux publics a été privilégié parce qu’il y a beaucoup de projets en cours. Vous n’allez pas voir forcément de nouveaux chantiers. Il importe de continuer avec les projets en cours. Quant au ministère de l’Agriculture, c’est parce que tout l’effort déployé dans le cadre des partenariats public-privé, l’emphase a été mise sur l’agriculture et la transformation des produits agricoles. Le secteur agricole emploie jusqu’à présent 40% de la population active. Cela ferait un grand bond si nous arrivons à améliorer les revenus de cette tranche de la population ». Cet effort sur le secteur agricole vise aussi à une augmentation de l’offre des produits alimentaires et à diminuer les importations ». Selon ce qu’a rapporté  Le Nouvelliste du 22 juillet 2014. Il faut noter que les 6.1%  du budget alloués au secteur agricole (7.49 Mrds HTG) sont loin des 10%  du budget de l’Etat souhaités par notre groupe, la FONHDILAC, pour permettre au secteur de bien booster l’économie haïtienne.

« Une plus grande autonomie budgétaire »
La précision de Mme Jean-Marie :« Avec le recul constaté du financement externe des projets d’investissement, le poids des recettes internes dans le budget est passé de 40% dans le budget 2012-2013, à 43% dans celui de 2013-2014 et pour le projet de loi de finances déposé au Parlement dernièrement à 49%. Donc, nous maintenons l’effort dans le sens d’une plus grande autonomie budgétaire et cela commence à porter ses fruits » … « Progressivement, nous essayons de nous affranchir de l’aide internationale. Dans la loi de finances 2014-2015, la part financée par les ressources domestiques augmente progressivement par rapport à celle financée par les dons et les prêts des bailleurs internationaux ». Concernant la fiscalité : « Il n’y a aucune disposition fiscale prévue pour augmenter les taxes, que ce soit les droits de douane ou les autres taxes. A l’exception d’une disposition relative aux droits de douane concernant les produits pétroliers. Une disposition qui vise à alléger le poids de la taxation pesant uniquement sur la gazoline. On va répartir la taxation sur la gazoline, sur le kérosène et le diesel », a révélé Madame Jean-Marie. Ce qu’elle a mis en œuvre en octobre 2014 avec la hausse du prix du carburant sur le marché local.

Risques
La mise en application de cette loi de finances 2014-2015 ne sera pas évidente à partir des événements de décembre 2014, la nomination du Premier Ministre Evans Paul et l’accord tripartite entre les trois (3) pouvoirs de l’Etat. Cet accord prévoit un certain nombre de choses qu’il faudra mettre en application. Ce sera une année essentiellement politique, une année électorale. Le budget doit refléter cette nouvelle donne. Or, pour organiser des élections dans un climat serein, il faudra d’abord créer des emplois pour améliorer les conditions de vie des plus défavorisés. Sans quoi, ils seront utilisés à des fins politiciennes pour déstabiliser le pays et le jeter dans le chaos. Le gouvernement de Consensus, au cas où l’accord tripartite arriverait à être mis en application, devrait avoir un budget en harmonie avec sa mission d’apaisement social et politique.

Situation Sociopolitique 2015
La mise en application de l’accord tripartite fera face à un problème de délais. En effet, il sera très difficile de respecter les délais car l’opposition a les bras longs au niveau du Parlement. La position de l’ensemble de l’opposition par rapport à la nomination du Premier Ministre Paul (la manière) pourrait les pousser à la position de l’opposition radicale qui réclame la démission du Président Martelly. Evans Paul devrait jouer serrer et essayer de convaincre ses pairs de l’opposition. Il serait certes difficile, si ce n’est impossible, pour lui de convaincre l’opposition radicale qui ne veut que la tête de Martelly. La majorité des Sénateurs radicaux sont sur la même longueur d’onde. Ne vous étonnez pas de voir ces Sénateurs radicaux sacrifier la prolongation de leur mandat dans l’espoir que la rue finirait par obtenir la tête de Martelly. Dans ce cas précis, la crise pourrait se radicaliser davantage, à moins d’un retournement de la situation en faveur de Martelly et d’Evans Paul. Espérons que les dieux tutélaires de la Nation et le Dieu Tout Puissant poussent nos politiciens à sacrifier leurs intérêts au profit de celui d’Haïti.

C.      CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS

Haïti est une fois de plus à la croisée des chemins. La radicalisation politique au cours de cette année 2014 n’a pas été une bonne chose pour Haïti. Nous avons pu survivre économiquement avec difficultés. Le taux de croissance de l’économie avoisine 2.8% au lieu des 4.5% prévus au départ et même des 3.6% révisés. Comme en 2012, c’est une contre performance de l’économie en comparaison avec l’année dernière (4.2%). Toutefois, en nous référant à la situation sociopolitique, c’est plutôt une performance normale de l’économie. La situation politique a été telle, c’est comme si nous avions eu affaire à une catastrophe naturelle. D’ailleurs, sur le plan microéconomique, Haïti n’a jamais senti autant la misère. La pauvreté ne s’est jamais fait autant sentir. Le manque d’emploi, la décapitalisation de la population, en particulier les plus défavorisés, nécessitent  des actions urgentes pour apaiser la population, alléger sa misère et lui permettre de survivre.

La tournure des événements politiques à partir d’octobre 2014 m’avait surpris et aurait pu emporter Martelly. La nomination d’Evans Paul et l’accord tripartite qui est plutôt controversé (position du Sénateur Exius, des partis politiques de l’opposition, etc.), semblent ouvrir des lueurs d’espoir mais paradoxalement soulèvent des inquiétudes et nous jettent dans l’incertitude. Du 1er au 12 janvier 2015, Haïti va vivre un moment de suspens extraordinaire dans la mise en application de cet accord tripartite. Et l’opposition radicale et les Sénateurs radicaux mettront le paquet pour obtenir le départ du Président Martelly. Comme je l’ai déjà écrit, tant qu’il y a une possibilité, même très mince, de capoter Martelly, l’opposition radicale ne cédera pas un pouce de terrain et continuera de réclamer le départ pur et simple de Martelly. En tout cas, au  nouveau Premier Ministre PAUL d’ « agir plus et de parler moins » comme promis.

 « Enfin, selon IHSI, la nouvelle année fiscale s’annonce plutôt morose avec l’incertitude politique qui perdure. Cette situation est de nature à provoquer chez les agents économiques une sorte d’attentisme qui serait plutôt néfaste pour le dynamisme de l’économie. Ainsi, pour sauvegarder les acquis des années antérieures et maintenir Haïti sur une trajectoire de croissance, les maitres mots restent et demeurent l’esprit de discernement et le dépassement de soi qui permettront de transformer la morosité annoncée de 2015 en une année de grandes opportunités pour l’économie haïtienne.»

Recommandations

Pour cela,
1)       Le  Premier Ministre devrait agir vite et bien pour rester dans les délais imposés par l’Accord Tripartite ;
2)       Le Président du Sénat devrait bien expliquer au Sénat, en particulier aux radicaux, le bien fondé de sa signature et essayer de convaincre ces Sénateurs sur la nécessité de faire taire leurs intérêts de clan au profit de ceux du pays ;
3)       Le Parlement devrait voter la loi électorale, ratifier le Premier ministre, respecter l’agenda législatif lié à la convocation à l’extraordinaire  du Parlement par l’Exécutif prévue par l’Accord Tripartite, un agenda inspiré de la proposition du Sénateur  Privert ;
4)       Dans le cas où l’Accord Tripartite arriverait à être appliqué avec ou sans difficultés, le Gouvernement de Consensus devrait rapidement mettre sur pied un programme gouvernemental à la dimension de la situation politique et de la crise électorale, tout en atténuant la souffrance de la population avec un volet Création d’emplois à  Haute Intensité de Main d’œuvre (HIMO) susceptible de mettre au travail 100,000 personnes/mois durant toute la durée du Gouvernement de Consensus, et en maintenant les multiples programmes sociaux de l’administration Martelly  ;
5)       Le Gouvernement de Consensus devrait non seulement organiser les élections à tous les niveaux, mais aussi jeter les bases d’un Dialogue Politique pour aboutir à un plan de développement consensuel de 20 ans pour une Haïti émergente à l’horizon 2035.


Ces recommandations n’auraient de sens que dans le cas d’une entente entre Haïtiens pour Haïti. Dans le cas d’un déchoucage du clan de Martelly (« opération Boukina Faso »), le clan de l’opposition radicale jubilerait et aurait tout gagné sans aller aux élections. Mais il aurait toutes les difficultés du monde à (i) mettre en place un Gouvernement qui n’aurait d’autre choix que  de « diriger par décret », (ii) maintenir une trajectoire positive de la croissance économique et (iii) surtout organiser les élections inclusives à tous les niveaux en 2015 à moins d’un miracle. Haïti retombera tôt ou tard dans la même crise sous une forme ou une autre avec cette fois-ci le clan Martelly en face, n’est-ce pas le cas actuellement de Lavalas en souvenir de 2004 ? Alors pourquoi ne pas s’entendre maintenant avec un Martelly affaibli pour une Haïti forte et unie? Au lieu d’hériter  d’une Haïti faible, désunie et susceptible de retomber dans les mêmes antagonismes dans un avenir pas trop lointain ? Elections avec ou sans Martelly ? La balle est dans le camp du MOPOD et alliés.