HAITI: RIO+20 - CE SOMMET PLANETAIRE TRES
PARTICIPATIF AU RESULTAT FINAL MITIGE AUGURE-T-IL LE RESULTAT DU BRESIL AU MONDIAL DE FOOTBALL
2014?
JEAN ROBERT JEAN-NOEL
LE 30 JUIN 2012
Au cours de ce mois de juin
2012, trois événements majeurs ont marqué notre pays. Ce sont la Coupe d’Europe
des nations et la passion soulevée, la publication de la constitution de 1987
amendée et les controverses déchainées, et la participation d’Haïti à la Conférence
des Nations Unies sur le développement durable (CDD), plus connue sous le label
RIO+20, organisée au Brésil du 13 au 22 Juin 2012, et son résultat final plutôt
mitigé. Malgré l’envie d’analyser ces événements de manière imbriquée,
articulée et intégrée par rapport au grand Ensemble Haïti, nous nous contenterons de
nous attarder sur RIO+20. Veut, veut pas, cette conférence va orienter notre
avenir de peuple vers cette « économie verte » à prédominance
financière au détriment du capital humain, du capital social, du capital
infrastructurel et du capital politique en terme de gouvernance. Cette
gouvernance mondiale, ce nouveau cadre international, ce nouvel ordre mondial
tourné vers le sauvetage de la planète et attendu désespérément n’est
finalement pas issu de RIO+20. En tout
cas, c’était, naïvement et en fonction de
mon coté positif, mon hypothèse de travail avant l’ouverture de la conférence.
Cette hypothèse était basée sur le thème de la conférence axé sur l’économie
verte et le cadre institutionnel et surtout sur ce fameux slogan de la
conférence :The future we want (L’Avenir que nous voulons).
La participation
d’Haïti à la Conférence de Rio
La participation de notre pays
s’est faite à plusieurs niveaux, (i) la société civile, (ii) la délégation
technique composée de 7 cadres de haut niveau, sélectionnés parmi la vingtaine
de cadres qui ont travaillé de novembre 2011 à juin 2012 sur le document de
positionnement d’Haïti et le dépliant de sensibilisation, et (iii) la délégation officielle, forte d’une
vingtaine de personnes dont l’épouse du Président, le Secrétaire d’Etat aux
affaires étrangères, le Ministre de l’environnement, et conduite par le
Président Martelly en personne. La délégation technique est arrivée une semaine
avant la délégation officielle pour (i) participer aux derniers rounds de
négociation à travers le G77 regroupant les pays moins avancés (PMA), les
petits Etats insulaires en développement (PEID)… en face des Etats Unis appuyés
par le Canada et l’Australie et de l’Europe, (ii) prendre part à certains de
ces 500 événements parallèles organisés par les Etats et les grandes
institutions internationales et qui concernent notre pays, (iii) préparer le
terrain pour la délégation officielle en planifiant avec l’Ambassade d’Haïti au
Brésil les rencontres bilatérales et en élaborant un dossier technique à
destination du Président Martelly pour ses prestations à la conférence et en
marge de la conférence .
La délégation officielle est
arrivée une journée avant l’ouverture officielle de la Conférence (20-22 juin).
Aussitôt, le Ministre de l’environnement, qui était arrivé quelques jours
auparavant et qui a finalisé avec la délégation technique le dossier à
soumettre au Président, a travaillé avec ce dernier sur la finalisation de son
discours qu’il a prononcé le lendemain de son arrivée au pavillon 5 réservé aux
Chefs de délégation. En plus des discussions bilatérales, le Chef de l’Etat a
présenté un discours sur l’énergie à l’ouverture d’un side event organisé par
l’OIF, l’ACP, où il a exposé la stratégie haïtienne sur la question. Il a donné
des interviews et rencontré certains haïtiens et haïtiennes qui travaillent au
centre de la Conférence. De son coté, la Première Dame a eu des activités
parallèles.
Malgré le manque d’articulation
entre la délégation officielle et la délégation technique pallié en quelque
sorte par le Ministre de l’environnement, l’équipe haïtienne, pour utiliser un
langage footballistique, a fait bonne figure à Rio, même si, à notre avis, il
devait y avoir un meilleur équilibre entre la délégation officielle (moins de
personnes) et la délégation technique et
plus de séances de travail (entrainement, planification et meilleure
compréhension des enjeux de Rio+20), et ce, depuis bien avant le départ d’Haïti
de l’équipe haïtienne. Des leçons à mettre en pratique à une prochaine occasion
pour une meilleure prestation de notre pays à des événements de même type !
Ce qui nous permettra d’avancer ensemble en pensant Haïti au détriment de nos
petites personnes et de mieux profiter de l’Après Rio+20 !
La conférence de Rio+20 s’est achevée
sur un document de consensus d’une cinquantaine de pages et de 283 articles et une
grandiose cérémonie de clôture organisée , à l’intention de nombreux chefs de
délégation, par la Présidente du Brésil, Madame Dilma Rousseff qui en a profité
pour en faire le bilan.
Les résultats
de Rio+20
RIO+20, c’est la participation
massive de représentants des Etats, des membres de la société civile de ces
Etats à cette conférence sur le développement durable (CDD) organisée par les
Nations Unies avec l’appui du pays hôte, le Brésil, du 13 au 22 juin 2012.
Durant ces dix jours à Rio, les délégations gouvernementales ont conclu
les négociations sur le document final de Rio, intitulé «L’avenir que nous voulons ». Des
représentants de 191 Etats membres de l’ONU et des observateurs, dont 79 Chefs
d’Etat ou de gouvernement ont participé à la Partie officielle de la conférence.
44,000 badges d’accréditation ont été émis pour les réunions officielles. A
Riocentro, le lieu de la conférence, plus de 500 événements parallèles ont eu lieu.
Parallèlement aux événements officiels, environ 3.000
événements non officiels ont été organisés à travers Rio de Janeiro, au Brésil.
Les gouvernements et d’autres organisations ont profité de Rio
pour organiser des Conventions et des forums dans des Pavillons pour
présenter leurs expériences et leurs meilleures pratiques, tels : le Forum sur
la science, la technologie et l’Innovation pour le développement durable, un
Sommet des Peuples, le Congrès mondial sur la justice, la gouvernance et la loi
pour la durabilité de l'environnement. Des actions spontanées de rue étaient
quelques-uns des nombreux événements en relation avec l’historique
de la ville de Rio de Janeiro 20 ans plus tôt , en en profitant pour discuter des thèmes de Rio +20 et des
défis plus larges pour la mise en œuvre
du développement durable.
Engagements financiers de 513 Mrds USD
Les participants à Rio +20 ont
été encouragés à verser des contributions volontaires en termes d’engagements
pour les actions d’implémentation des objectifs de la conférence. Dans cette perspective, des engagements ont été pris par les gouvernements, les groupes du secteur
privé, de la société civile et d’autres
groupes pour une valeur correspondant à US $ 513 milliards de dollars. Parmi
les engagements financiers, la secrétaire d’Etat américain, Hillary Clinton, Chef de la
délégation américaine, a annoncé un partenariat entre les États-Unis et les
nations d'Afrique de US $ 20 millions de dollars pour des projets d'énergie
propre en Afrique. La présidente du Brésil, Dilma Rousseff, a promis US $ 6 de dollars au fonds du PNUE
visant les pays en développement, et US $ 10 millions sur les défis du
changement climatique en Afrique, les
pays les moins avancés (PMA), et les petits États insulaires en
Développement (PEID) dont fait partie Haïti. Un engagement similaire avait été
offert au début de la réunion par le Premier ministre chinois, Wen Jiabao. José
Manuel Barroso, Président de la Commission européenne (CE), a annoncé la
mobilisation de € 400 millions pour des projets
d’énergie durable. Koichiro
Gemba, ministre des Affaires étrangères du Japon, a annoncé un financement pour
un programme de trois ans visant la réduction
des risques et désastres (catastrophes). Et huit banques multilatérales de développement se sont
engagées d'investir US $ 175 milliards au cours des 10 prochaines années pour
appuyer la création de systèmes de transport durable.
L’Après RIO+20
L'accord adopté à Rio
appelle l'Assemblée générale des Nations
Unies (AGNU), à sa prochaine session, (i) à prendre des décisions sur,
notamment: la désignation d'un corps pour opérationnaliser durant les 10 prochaines années, un cadre de
programmes sur la consommation durable et la production, la détermination des
modalités de la troisième conférence internationale sur les petits États
insulaires en développement, à convoquer en 2014; (ii) identifier le format et
l'organisation des aspects du forum de haut niveau, qui consiste à remplacer la
Commission du développement durable, le renforcement du Programme Des Nations
Unies pour l'environnement (PNUE); (iii) constituer un groupe de travail chargé d'élaborer des objectifs mondiaux de
développement durable (OMDD) à approuver par l'AGNU; (iv) établir un processus
de mise en place d’une organisation intergouvernementale sous la supervision
de l'AGNU pour préparer un rapport
proposant des options sur une stratégie efficace de financement du
développement durable, et (v) envisager une série de recommandations du
Secrétaire Général pour un mécanisme de facilitation qui favorise le
développement, le transfert et la diffusion de technologies propres
écologiquement rationnelles.
En outre,
l'Assemblée générale est appelée à prendre une décision dans les deux ans sur le développement d'un
instrument international relatif à la
Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS) en ce qui concerne
la biodiversité marine dans les zones au-delà
de la compétence nationale. De plus, la Commission statistique du
système des Nations Unies est appelée à lancer un programme de travail sur des
mesures plus larges pour compléter le produit intérieur brut, et est
encouragée, le cas échéant, pour soutenir l'industrie, les gouvernements et les
parties prenantes intéressés dans l'élaboration de modèles pour les meilleures pratiques et faciliter
l'action pour l'intégration des rapports sur le développement durable. Le
document comprend également le texte sur les subventions sur le commerce, la
pêche, les combustibles fossiles.
RIO+20, un sommet à forte participation et au résultat
mitigé
Alors que beaucoup
d’espoir avait été placé sur Rio +20 pour
la relance de nouveaux processus et
modifier de manière significative le cadre international[1],
le résultat du document CDD a été beaucoup plus modeste et très en deçà des
espérances. Mais tandis que certains ont critiqué le document pour son souci de
recherche d’unanimité au détriment d’engagements mondiaux concrets avec de
nouvelles orientations tournées hardiment vers la route du développement
durable, d’autres se sont concentrés sur les opportunités d’avenir en
s’appuyant sur l'Assemblée Générale et
d'autres instances en vue de façonner le vrai héritage de Rio +20.
Dans son discours de clôture de
la CDD, le Président Rousseff du Brésil
a également déclaré que Rio +20 a démontré que le multilatéralisme est une voie
légitime pour construire des solutions aux problèmes mondiaux. Les négociations
sur le texte ont eu lieu au cours des deux dernières années et ont abouti à un
document final plus de 200 pages avec des paragraphes en discussion montrant
qu’il serait difficile sinon impossible de déboucher sur un texte de consensus. On avait prévu que les
dix jours à Rio seraient remplis de longues nuits et la corde raide qui ont
caractérisé les dernières négociations
multilatérales sur l'environnement. À la
fin de la réunion, les délégués du Brésil usant
de leur leadership au cours des consultations
informelles pré-conférence, au cours de laquelle l'organisation de pays a élaboré un projet
révisé, ont animé trois jours de discussions, ont encouragé les délégués à
suggérer des changements dans le projet, et ont facilité l'accord final avant
l'ouverture de Rio+20 elle-même. Les délégués à la CDD ont adopté le document
final de Rio+20, le 22 Juin 2012, et la
séance est levée à 20h41. Brésil a reçu
beaucoup de louage pour avoir accueilli et mené à bien le Sommet le plus
participatif de l’histoire à une conclusion satisfaisante même si les opinions
sur le principal résultat politique restent assez mitigées.
Considérations
finales
Observation
Générale de la délégation haïtienne en ce qui concerne les résultats et les
produits de la conférence
La délégation haïtienne accueille favorablement les références
qui ont été faites par rapport aux engagements vis-à-vis des Petits Etats
Insulaires en Développement et aux Pays Moins Avancés en ce qui concerne la
mise en œuvre du Programme d’Action de la Barbade, de la Stratégie de l’Ile
Maurice et du Programme d’Action d’Istanbul. Il s’agit d’un bon point pour le
gouvernement haïtien compte tenu de son engagement à jeter les bases pour
combattre la pauvreté et œuvrer pour le développement durable à travers les 5
E.
La délégation haïtienne apprécie aussi le fait que le
document ait permis de déblayer le terrain en matière d’économie verte et de
cadre institutionnel pour le développement durable. Cependant l’appréciation
générale de la délégation est que la conférence n’a pas abouti à des résultats
tangibles auxquels on devrait s’attendre surtout en matière d’engagements
financiers formels (ressources nouvelles, additionnelles et prévisibles)
puisque ces engagements ne sont pas allés plus loin que la recommandation d’un
processus intergouvernemental à mettre en place pour la mobilisation des
ressources.
En clôture de la conférence,
(CDD), la présidente du Brésil, Dilma Rousseff , a souligné que Rio +20 a été
la plus participative conférence de l’histoire et était « une expression globale de la
démocratie ». Elle en a profité pour inviter ses pairs à la Coupe du Monde
de 2014 qui aura lieu au Brésil. Cette conférence mondiale au résultat mitigé
augure peut-être le résultat du Brésil au Mondial de football de 2014, surtout
avec la présence probable des deux finalistes de la coupe d’Europe 2012, Espagne-Italie (4-0),
les deux derniers champions des 2 dernières coupes du monde. « Mauvaise
comparaison, la planète terre est dominée financièrement par les USA alors que
la planète football est dominée par le Brésil », m’a rappelé un ami,
fanatique fou du Brésil, qui croit dur comme fer que ce sera l’occasion pour le
Brésil de gagner sa 6e coupe du monde. Une mise en garde tout de
même pour les fans du Brésil : 1950.
[1] On s’attendait à l'établissement d'un nouveau Haut Commissaire pour
l'avenir Des générations, à la transformation du Programme des Nations Unies
pour l'environnement (PNUE) en une institution spécialisée dotée de moyens
significatifs de mise en œuvre pour l’atteinte
d'objectifs concrets à partir d’une «feuille de route" pour
l'économie verte.
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