COVID-19 : HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE
DES CHEMINS(21), L’EMBOURBEMENT CONTINUE
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
1er DECEMBRE 2021
A partir de cette 21e chronique consacrée à
la thématique : « Haïti et le Monde à la croisée des chemins (?),
j’ai envie de dire : « point final » et pas de réponse à cette
interrogation surtout pour Haïti. Heureusement, j’ai trop de respect pour mes
lecteurs pour me laisser gagner par le découragement. Cela fait quand même plus
de 21 ans que j’analyse mensuellement la situation politique et socioéconomique
haïtienne et parfois avec des incursions au niveau mondial, en particulier
depuis l’arrivée du Covid-19 en mars 2020 en Haïti, surtout durant ces derniers
21 mois où l’on enregistre des variants dont le dernier en date se nomme
« OMICRON » et vient de la région sud de l’Afrique, en particulier de
l’Afrique du Sud. Je me sens donc obligé de continuer d’informer autrement,
d’analyser notre situation avec ce souci d’objectivité qui caractérise
l’ensemble de mes textes, en évitant cette logique manichéenne de « pour
ou contre » qui vous force à prendre position politiquement (polarisation),
en me battant pour un « Etat Inclusif », et en essayant de rester au
milieu, objectif, sans être neutre, en dépit de l’embourbement de notre pays
lié à cet ouragan politique. D’où le titre de cette 21e
chronique : « COVID-19 :
HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS(21), L’EMBOURBEMENT CONTINUE. »
Cette chronique s’articule autour de la
situation au niveau mondial avec accent sur le nouveau variant omicron, et de
la situation au niveau d’Haïti avec accent sur l’ouragan politique, le remaniement
du cabinet ministériel par Ariel Henry, et se termine par des conclusions
appropriées, avec accent sur la nécessité d’une entente inter-haïtienne pour
éviter l’embourbement total.
1.
Situation au niveau mondial dominée
par le nouveau variant Omicron
Le Covid-19 rebondit. C’est normal.
On s’y attendait. A la saison froide, c’est toujours ainsi depuis son
apparition. La situation au niveau mondial[1]
se traduit par 262,955,708 cas de contamination et 5,218,935 cas de
mortalité, avec les USA en tête, viennent ensuite l’Inde, le Brésil et la
Grande Bretagne. Quant à Haïti, elle enregistre au 1er décembre 21,
25175 cas de contamination et 738 cas de mortalité. Par rapport au mois
dernier, Haïti dénombre 1215 cas de plus de contamination et 67 cas de
mortalité de plus, soit 7 cas de plus que le mois d’octobre. Y-a-t-il de quoi
être inquiet ? Quand on sait que les statistiques ne sont pas fiables
chez nous en Haïti, oui, il y a de quoi être inquiet. Avec l’apparition de ce
nouveau variant, Omicron, Haïti devrait être préoccupée quand les nations développées s’affolent.
L’Omicron affole les nations développées
et plusieurs Etats ferment leur frontière[2]
Selon France 24, « La
découverte récente, en Afrique australe du nouveau variant Omicron est, pour
une partie de la communauté scientifique, la conséquence de l’inégalité
vaccinale dans la lutte contre le Covid-19. La décision de plusieurs États de
fermer leur frontière est, pour certains épidémiologistes interrogés par
France 24, une preuve supplémentaire d’une vision "égoïste" de la lutte
contre la pandémie des pays dits développés.
Des cas ont été détectés au Portugal, en
Allemagne, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas ou encore en Italie. Le variant Omicron
du virus Sars-Cov-2, observé pour la première fois en Afrique du Sud, il y a
moins d'une semaine, poursuivait, lundi 29 novembre, sa migration du Sud,
sous-vacciné, vers le Nord où il est souvent déjà question de troisième dose.
En France, même s’il n’y a aucun cas déclaré à ce jour, Olivier Véran, le
ministre de la Santé, a jugé "probable" que cette souche
"circule déjà" sur le territoire.
Et Omicron affole ces nations qui
pensaient voir la lumière au bout du tunnel pandémique grâce à de vigoureuses
campagnes de vaccination qui ont permis à plus de 66 %
des Européens d’être entièrement vaccinés contre le Covid-19. Le nouveau
variant pourrait, en effet, contourner la protection des vaccins du fait des
très nombreuses mutations qu'il comporte.»
USA et son plan
d’infrastructure de 1200 Mrds d’USD
C’est aussi une préoccupation pour
les USA. On craint un impact certain sur l’économie en pleine relance. En
témoignent les déclarations de la Secrétaire au Trésor et du Gouverneur de la
FED, la Banque Centrale américaine. C’est vrai que le programme infrastructure
de 1.2 Trillion USD (1200 Mrds d’USD) (nettement inférieur par rapport à la
proposition de départ : + 3000 Mrds) est approuvé de manière bipartisane.
Mais sa mise en application pourrait être perturbée par les mutations
successives du covid-19, en particulier par la dernière en date, l’Omicron.
L’essentiel c’est que ce plan est approuvé par les deux partis et le vieux Joe
est regaillardi. En témoigne le résumé de France 24 : « Joe Biden a
signé lundi, en grande pompe dans les jardins de la Maison Blanche, la loi –
adoptée péniblement par le Congrès il y a une dizaine de jours – sur
un plan de 1 200 milliards de dollars destiné à moderniser les routes, les
ponts, le réseau Internet à haut débit, et considéré comme l'un des plus
ambitieux de l'histoire moderne américaine.»
Et le vieux Joe de conclure : « Voilà
mon message aux Américains: l'Amérique va de nouveau aller de l'avant et votre vie
va changer pour le meilleur ».
La
mise en œuvre de ce vaste programme aura un impact certain sur l’économie
moribonde haïtienne grâce à sa diaspora aux USA. Et aussi sur la République
Dominicaine, notre voisine immédiate.
République Dominicaine et la persistance
d’Abinader
Abinader, le président de la
République Dominicaine qui a connu une croissance de 11% pour l’exercice en
cours, est très actif dans le dossier haïtien. Il fait feu de tout bois pour « pacifier Haïti », s’ingérant
sans vergogne dans la politique interne du pays haïtien, demandant et obtenant
le départ du ministre des affaires étrangères haïtiennes, Claude Joseph, qui
lui tenait tête dans sa rage de pacifier Haïti sans les Haïtiens. Ariel Henry,
le Premier ministre Haïtien, qui a envoyé Daniel Supplice en République
Dominicaine pour apaiser la situation
conflictuelle, découlant des tweets échangés entre Abinader et C. Joseph, a pu
obtenir un assouplissement de la part des dominicains, sans pour autant obtenir
une pause dans le renvoi des illégaux haïtiens. Et Abinader persiste et signe
dans sa stratégie de vouloir résoudre la crise haïtienne sans les Haïtiens en
convoquant une réunion de haut niveau, à Puerto Plata, avec les présidents du
Costa-Rica, Carlos Quesada, et du Panama, Lorentino Cortizo, pour les 10 et 11
décembre 21 prochains. Le thème de cette rencontre au sommet, la crise
haïtienne. Que cherche Abinader? En tout
cas, pas d’éclaircissement sur l’assassinat crapuleux du président Moïse qui
est venu aggraver la crise multiforme et multidimensionnelle du pays d’Haïti.
2.
Situation au niveau d’Haïti
La situation est toujours dominée par
l’ouragan politique assombrissant le ciel d’Haïti. De cet ouragan découle tout
le reste, l’insécurité globale, le kidnapping, la crise du carburant, la crise
économique, la dégringolade de la gourde par rapport au dollar américain (1
USD=99.73 à l’achat et 99.69 à la vente et + 110 G au marché parallèle), la vie
chère, l’insécurité alimentaire, etc.
2.1. L’ouragan politique perpétué par
les partenaires d’hier
Haïti s’enterre de plus en plus sous
le poids de cet ouragan politique. C’est le glissement continu dans l’abime.
Ses fils et filles, alliés d’hier, se battent pour la conquête du pouvoir
politique en dehors de tout processus électoral, à coup d’accords politiques
« déjovenélisants ». Comme si l’assassinat du président Moïse était
un simple fait divers.
La pomme de discorde, les deux
accords, celui d’Ariel Henry et celui de Montana
Après l’assassinat crapuleux du
président Moïse, on croirait naïvement à un dégel rapide de la situation
politique. L’opposition plurielle, ayant fait de Jovenel le problème par
excellence, aurait dû rapidement nous sortir de l’auberge une fois « ce
dictateur », ce « petit voleur », ce « petit menteur», ce « chef
de gangs» disparu. Malheureusement, il n’en est rien. C’est la polarisation
autour des deux principaux accords en circulation. Les deux camps continuent de
se battre entre les alliés d’hier face au feu président lâchement assassiné par
des étrangers avec de fortes complicités internes.
Accord d’Ariel Henry du 11 septembre 21. Ceux-là qui héritent le pouvoir ne veulent
pas revendiquer l’assassinat crapuleux de J. Moïse tout en revendiquant la mise
à pied des « Jovenélistes » au sein du gouvernement en place, et l’application
de la plupart de leurs revendications
charriées lors de la bataille pour le déchoucage de ce dernier des 6 et 7
juillet 2018 jusqu’à son assassinat crapuleux dans la nuit du 6 au 7 juillet
2021. Ce qui est fait selon leurs exigences, tout au moins pour certaines
revendications. Actuellement, ils mènent la danse et partagent le pouvoir avec
un PM de leur camp, Ariel Henry, nommé par J. Moïse juste avant son assassinat,
quelques alliés de PHTK et un seul ministre nommé par le feu président. André
Michel s’enorgueillît d’un « gouvernement plus équilibré » et d’un
« score de 5 à 0 » jusqu’à date obtenu par son équipe. Contre
qui ? En tout cas, pas contre Jovenel Moïse, mort, enterré et
presqu’oublié.
Accord de Montana du 30 août 21. Pour ceux qui revendiquent le pouvoir selon « un
processus plus proche de la Constitution de 1987 », l’Accord de Montana, ils n’ont mentionné le
nom du président assassiné qu’une seule fois dans un ajout fait à l’article 22
de l’accord après sa date de publication du 30 août 21. Cet accord, dont la
rédaction a commencé bien longtemps avant l’assassinat crapuleux du président dans
une ambiance anti-Jovenel, n’a pas jugé nécessaire de faire de cet assassinat un élément-clé, un
carrefour, une croisée des chemins. C’est comme si, selon eux, le mandat de J. Moïse
ayant touché à sa fin, le 7 février 2021, son assassinat crapuleux, le 7
juillet 21, par un commando colombien n’aurait été que l’aboutissement logique
d’un régime honni ( Yo mal touyel men li byen mouri, donc en quelque sorte bon
débarras ). Il faut remarquer que la grande majorité des signataires de cet
accord (regroupements politiques, religieux et entités de la société civile)
n’étaient pas en odeur de sainteté avec le feu président accusé de tous les
maux de la République et de tous les péchés d’Israël. C’est donc logique qu’ils
mettent en place une stratégie de choix du président de la République et du
Premier Ministre basée exclusivement sur les signataires de l’accord ;
d’autant que tous les regroupements politiques auraient droit à plusieurs voix,
tandis que PHTK et Alliés (en principe proches du défunt) n’auraient droit qu’à
une seule voix. Ainsi tout candidat pro-Jovenel et pro-PHTK serait
automatiquement battu.
Une ambiance vraiment délétère, un
enfer
Cette bataille pour accéder au
pouvoir à travers des accords ne se fait plus dans la rue à coup de
manifestations violentes, de pays lock, de rébellion policière, de sorties
tumultueuses de FANTOM 509 tuant des policiers, attaquant des commissariats de
police, brulant des biens de l’Etat en particulier, et, parfois des biens
privés. C’est toujours la même polarisation politique entre anciens alliés
anti-Jovenel pour la grande majorité, à coup d’accords, de visites d’émissaires
américains qui nous recommandent la même chose de gérer nos problèmes
nous-mêmes et de nous promettre de venir nous aider à faire face à l’insécurité
en mettant à notre disposition des moyens non appropriés (17 véhicules
ordinaires pour la PNH), en nous empêchant d’équiper correctement notre embryon
d’armée, et à coup de menace de notre voisin de l’Est, la République
dominicaine. Entre temps, toute la zone métropolitaine de Port-au-Prince est
sous le contrôle des groupes armés qui tuent, kidnappent, violent, rançonnent à
coup de centaines de milliers de dollars américains par tête de kidnappé
haïtien, et de million d’USD par tête de kidnappé étranger. Une sorte de « retour à l’esclavage », selon
l’éminent professeur Haïtien à la Sorbonne Jean Marie Théodat. La crise du
carburant est toujours là en dépit des efforts pour amener l’or noir dans les
stations de vente (marché noir). Et nos voisins, le grand-frère américain, l’hostile
dominicain, nous renvoient presque journellement nos migrants illégaux, nos
déportés (anciens prisonniers), par voies aérienne, terrestre et maritime, sans
aucune considération humanitaire ; tandis que nos « amis » de la
communauté internationale déconseillent à leurs ressortissants de mettre les
pieds chez nous et conseillent à ceux sur place de se planquer chez eux ou, au
mieux, de laisser cette galère au plus vite. Une ambiance vraiment délétère, un
enfer, où survient un remaniement ministériel à l’avantage des anciens
partisans de « la transition de rupture ».
2.2 Remaniement
du cabinet ministériel
A partir du dernier remaniement du
cabinet ministériel du 25 Novembre 21 par Ariel Henry, avec l’introduction de 8
ministres en provenance des partis et entités totalement opposés à Jovenel
Moïse, et la conservations des 9 autres déjà en place depuis le 21 juillet,
Ariel Henry occupant le poste de ministre de la culture en attendant de le confier
à un signataire de l’accord du 11 septembre[3],
les carottes sont cuites, plus de possibilités d’entente entre les
protagonistes et anciens partenaires anti-Jovenel. Au lieu de fusionner les
accords et d’en sortir un plus inclusif, on continue la bataille pour les
broutilles du pouvoir politique sous prétexte qu’on se bat pour Haïti. Tous les
pêcheurs en eau trouble, les ennemis du pays, en profitent pour semer la
pagaille et embourber davantage notre pays. Par exemple, les kidnappeurs
reprennent du service en dépit du fait d’avoir encore en leur possession 15
étrangers.
Dans son discours de circonstance,
le PM Henry a évoqué, entre autres, la question de subvention du carburant qui
coûte à l’Etat 30 Mrds de gourdes pour l’exercice écoulé sur 96 Mrds de gourdes de recette. Sans le dire, mais on
comprend qu’il faudrait coûte que coûte augmenter les prix à la pompe. Dans cette ambiance explosive de vie
chère, comment procéder ? L’avenir dira le reste.
Quant à la mission de ce gouvernement,
elle se résume ainsi : "L'une des tâches
principales de ce gouvernement est de créer un environnement sûr et
stable", a annoncé le Premier
ministre, afin d'organiser "des consultations populaires pour
l'adoption d'une nouvelle Constitution et le choix de nouveaux élus qui auront
à gérer notre pays tant au niveau national qu'au niveau local". France 24[4].
3.
En Guise de Conclusion
La situation de notre pays durant ce
mois de novembre 2021 a été loin d’être rose ; qui pis est, notre pays
continue sa dégringolade dans l’abime sans fond à cause de l’ouragan politique
qui y stagne depuis belle lurette et qui mute à chaque fois, surtout depuis l’assassinat
de Jovenel, entre anciens alliés de l’opposition plurielle comme le covid-19 en
variant Omicron.
La crainte du Variant Omicron
« Le variant Omicron et la réaction
du monde à son émergence illustrent à quel point les pays dits développés n'ont
pas compris que "la planète ne sera pas en sécurité tant qu’il n’y aura
pas de stratégie globale de vaccination", affirme le chercheur
britannique. Car peut-être qu'Omicron ne sera pas, au final, résistant aux
vaccins disponibles. Mais le soupir de soulagement qui en résulterait ne serait
que de courte durée, pour Michael Head, car "sans changement de mentalité,
le risque est grand que dans six mois un autre variant qui serait, lui,
résistant aux vaccins fasse son apparition ».France 24.
En plus du variant omicron, la
persistance de la RD à agir pour Haïti sans Haïti est un autre signe d’inquiétude
pour notre pays. La détérioration de
la situation politique ne facilite pas les choses et nous conduit à une
augmentation des cas de covid-19, à une nette augmentation des cas de kidnapping ;
il est dénombré 803 cas de kidnapping
dont 54 étrangers de 4 pays, de janvier à octobre 21, selon Me Gédéon Jean. Le
mois de novembre était plutôt fertile en cas de kidnappings spectaculaires. D’où
la nécessité de nous entendre pour Haïti pour éviter l’embourbement total de
notre cher pays.
Au risque de me répéter, seule une
entente inter-haïtienne nous permettra de sortir de cette galère et d’entamer
ensemble la construction de cet « Etat inclusif », rêve de la
majorité des Haïtiens et basé sur un nouveau système équilatéral, avec un
équilibre parfait entre les trois pouvoirs d’Etat. Espwa fè viv.
[1] https://infographics.channelnewsasia.com/covid-19/map.html cna.asia/covid19.1er décembre 21 au matin. Cela évolue d’heure
en heure.
[2] https://www.france24.com/fr/afrique/20211129-le-variant-omicron-cons%C3%A9quence-directe-de-l-in%C3%A9galit%C3%A9-vaccinale
[3] Le Nouvelliste: La
composition du cabinet ministériel d’Ariel Henry après le remaniement
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