HAITI : L’ARROGANCE DE L’IGNORANCE
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
27 AOUT 2018
J’ai beaucoup lu et beaucoup écrit. J’ai adapté
et créé beaucoup de concepts. Citons,
entre autres, Le concept approche participation-responsabilisation axé sur l’information,
la sensibilisation, la communication, la motivation directe, la motivation
indirecte, la formation, la structuration et la mise en réseau ; le
concept approche hexagonale axé sur l’humain, le social, l’environnemental, l’infrastructurel,
l’économique/le financier et la politique/gouvernance ; le concept
stratégie d’imbrication, d’articulation et d’intégration des actions (SIAAA)
applicable à n’importe quelle structure micro, meso et macro, et le dernier en
date, le concept « arrogance de l’ignorance ». C’est quoi l’arrogance de l’ignorance ? Comment
il m’est venu l’idée de créer ce nouveau concept ? En quoi peut-il être
utile à la situation actuelle de notre pays?
C’est quoi
l’arrogance de l’ignorance ?
C’est cette habitude de la plupart des haïtiens
d’aborder n’importe quel sujet dont ils ignorent l’ABC comme le pic de la Mirandole.
Plus ils ignorent le sujet, plus ils en parlent fort, plus ils en font des
affirmations avec cette arrogance qui caractérise les ignorants. Enfin,
c'est une combinaison de deux mots donnant naissance à une nouvelle expression
pour dire de façon plutôt élégante « taisez-vous quand vous ne savez pas de quoi vous parlez »
ou tout simplement « donnez-vous la peine de vous
informer de quelque chose avant d’en parler ».
Comment il m’est venu l’idée de créer ce
nouveau concept ?
Depuis la fin du 20e siècle et le
début du 21e siècle, je produis des articles suite à de nombreux
rapports produits pour des institutions étatiques, des ONGs, des organisations
internationales comme consultant. De 2004
à date, je produis de manière régulière des articles sur Haïti, au moins un
article par mois (Réf. www.jrjean-noel.blogspot.com
), parallèlement à mes activités professionnelles comme consultant et/ou
contractuel de l’Etat, sans compter les nombreux rapports, documents de
projets, manuels de formations sur de nombreuses thématiques. J’ai eu la chance
et l’opportunité de côtoyer tant en Haïti qu’à l’étranger des gens biens formés
et bien éduqués, des collègues et des amis dont la grande majorité a eu une
influence positive sur ma longue carrière et ma formation sur le tas.
J’ai pu aussi observer longuement mes frères
haïtiens de toutes catégories, la masse, les classes moyennes et la
bourgeoisie, les paysans, les techniciens, les politiciens ; car j’ai eu
la chance, durant ma longue carrière, de discuter et de travailler avec tous
ces gens qui m’ont beaucoup appris, mais il y en a parmi eux qui parlent de
choses qu’ils ne maitrisent pas avec une telle arrogance qu’ils m’ont inspiré
ce nouveau concept : l’arrogance de l’ignorance.
Parmi tous ces gens, une catégorie m’a le plus
inspiré ce concept. Ce sont les politiciens, certes pas tous, mais la grande
majorité. Cette attitude de tout savoir, de parler de n’importe quoi, de débiter
des bêtises sur n’importe quel sujet d’intérêt national, est vraiment
ahurissante. Je ne sais pas si vous vous donnez la peine de les écouter à la
radio, à la télévision.
J’ai collaboré directement ou indirectement à l’élaboration
de beaucoup de dossiers sur Haïti, le cadre de coopération intérimaire (CCI),
le document stratégique national pour la croissance et la réduction de la
pauvreté (DSNCRP), le Post-Desaster
Needs assesment (PDNA 2010) après le
tremblement de terre de 2010, le plan d’action pour le relèvement et le
développement national d’Haïti (PARDNH), le Plan de développement agricole (PDA 2010-2025),
le plan national de sécurité alimentaire (PNSAN 2010-2025), le plan stratégique
de développement d’Haïti (PSDH), le PDNA 2017 après le passage de Matthew en
octobre 2016, et plus récemment la stratégie caravane du changement et l’actualisation
du plan national de sécurité alimentaire (PNSAN 2018-2030).
Et à chaque fois qu’il y a un document sérieux sur Haïti, je me donne la peine de le lire pour avoir une bonne compréhension du dossier avant d’en parler ou d’y consacrer un ou plusieurs articles. Souvent, je suis sidéré d’entendre les gens parler de ces documents sans même se donner la peine d'y jeter un coup d'oeil et encore moins de lire le résumé exécutif, en particulier nos politiciens qui ont dirigé, dirigent et aspirent à diriger le pays.
Et à chaque fois qu’il y a un document sérieux sur Haïti, je me donne la peine de le lire pour avoir une bonne compréhension du dossier avant d’en parler ou d’y consacrer un ou plusieurs articles. Souvent, je suis sidéré d’entendre les gens parler de ces documents sans même se donner la peine d'y jeter un coup d'oeil et encore moins de lire le résumé exécutif, en particulier nos politiciens qui ont dirigé, dirigent et aspirent à diriger le pays.
Un exemple flagrant, la caravane du changement.
J’ai entendu des gens et pas des moindres débiter des inepties sur cette stratégie
novatrice et globalisante. Ce serait « le projet/programme phare du
président », qui n’aurait pas de ligne budgétaire donc il y aurait
détournement de fonds pour toute activité réalisée dans le cadre de la caravane. On pourrait multiplier à l'infini d'autres affirmations et critiques par rapport à cette stratégie venant, en majeure partie, de la classe politique et aussi d'autres secteurs.
La caravane du changement, qui n’est qu’une stratégie de coordination et de gouvernance en lien avec l’ensemble des structures étatiques et visant le développement participatif du pays, en utilisant les compétences des structures déconcentrées et décentralisées de l’Etat et des collectivités territoriales dans la mise en œuvre des actions sectorielles sur l’ensemble du territoire, n’a pas besoin de budget propre, tout se fait à travers les secteurs et les collectivités territoriales et leur budget respectif.
Pourtant un député, qui est censé maitriser tout ce processus, a accusé récemment le Ministère de l’économie et des finances (MEF) de mettre à la disposition du Président de la République 11 millions de gourdes par semaine comme per diem pour la caravane. Cette déclaration farfelue a été reprise par les médias tandis que la note explicative et rectificative du MEF n’a pas eu le même écho.
La caravane du changement, qui n’est qu’une stratégie de coordination et de gouvernance en lien avec l’ensemble des structures étatiques et visant le développement participatif du pays, en utilisant les compétences des structures déconcentrées et décentralisées de l’Etat et des collectivités territoriales dans la mise en œuvre des actions sectorielles sur l’ensemble du territoire, n’a pas besoin de budget propre, tout se fait à travers les secteurs et les collectivités territoriales et leur budget respectif.
Pourtant un député, qui est censé maitriser tout ce processus, a accusé récemment le Ministère de l’économie et des finances (MEF) de mettre à la disposition du Président de la République 11 millions de gourdes par semaine comme per diem pour la caravane. Cette déclaration farfelue a été reprise par les médias tandis que la note explicative et rectificative du MEF n’a pas eu le même écho.
Un autre exemple, la nomination de Jean Henry
Céant comme premier ministre qui correspond plus ou moins au profil défini au
préalable (Réf. https://jrjean-noel.blogspot.com/2018/07/et-lapres-jack-guy-lafontant.html
), a donné lieu à un ensemble d’articles
acides et destructeurs sur ce monsieur que je ne connais pas personnellement ;
il en a été de même pour la première ministre Michèle Pierre-Louis en 2008. C’est
ahurissant cette capacité de destruction que nous avons. Ces gens qui ont osé écrire et dire de telles
choses connaissent-ils vraiment ce monsieur, ont-ils des preuves de leurs
accusations?
En quoi ce concept peut-il être utile à
la situation actuelle de notre pays?
L’arrogance de l’ignorance est notre mal
absolu. Nous ne nous donnons pas la peine de lire, de prendre connaissance des
dossiers avant d’en parler. Nous parlons de tout et de rien avec la même
arrogance. Quand nous voulons détruire quelqu’un, nous inventons n’importe quoi
sur la personne et nous avons une certaine presse et les réseaux sociaux pour
nous appuyer dans ce processus de destruction. Nous utilisons des dossiers que
nous ne maitrisons pour détruire, pour mener la lutte politique contre nos
adversaires, nous accusons sans preuve. Nous mentons impunément, au vu et au su
de tout le monde, sans nous soucier du mal que nous faisons à nos concitoyens
et à notre pays. Jusqu’à présent la bataille politique ne vise pas le
développement du pays, mais la prise du pouvoir par un ou des clans politiques
associés. Ôte-toi que je m’y mette.
Actuellement, il y a un réveil lié au dossier
PETROCARIBE. C’est une bonne chose qu’un dossier orienté politiquement finit
par déboucher sur un réveil citoyen contre la corruption en général. Il est
admis que la corruption est responsable de 40% des fonds alloués au
développement, si ce n’est un peu plus dans le cas de notre pays. J’ai déjà écrit
cinq articles sur la corruption en Haïti depuis 2008. Je suis content que le
dossier PETROCARIBE fasse prendre conscience à la majorité des haïtiens de ce
fléau qui a contrarié jusqu’ici le développement du pays.
Beaucoup de gens s’embarquent dans ce dossier
sans savoir de quoi il s’agit. Je ne vais pas y revenir puisque j’y ai déjà consacré
deux articles. Ce dossier traité par deux commissions sénatoriales orientées
politiquement souffrent des faiblesses de ses auteurs qui ne maitrisent pas les
procédures de fonctionnement de l’Etat en général et de la passation des
marchés publics haïtiens en particulier (l’arrogance de l’ignorance) et qui
mènent à visière levée une bataille politique à travers ce dossier. Ce qui a
provoqué les réactions négatives des indexés qui se retrouvent, pour la grande
majorité, dans un même camp politique; normal d’ailleurs c’est ce camp qui a eu
beaucoup plus de résolutions dans le cadre de la gestion des fonds PETROKARIBE par le BMPAD.
La saisine de ce dossier par la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) est en soi une bonne chose, en ce sens qu’elle lui a redonné son aspect technique au détriment de son aspect politique, avec beaucoup plus de chance de déboucher sur le procès souhaité par tout le monde.
Un autre élément important dans le cadre de ce dossier, il est inscrit dans la feuille de route du Président de la République au Premier Ministre nommé. Comme quoi, pour une fois, tout le monde est d’accord pour lutter contre la corruption à travers PETROCARIBE comme symbole de la lutte anti-corruption.
La saisine de ce dossier par la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) est en soi une bonne chose, en ce sens qu’elle lui a redonné son aspect technique au détriment de son aspect politique, avec beaucoup plus de chance de déboucher sur le procès souhaité par tout le monde.
Un autre élément important dans le cadre de ce dossier, il est inscrit dans la feuille de route du Président de la République au Premier Ministre nommé. Comme quoi, pour une fois, tout le monde est d’accord pour lutter contre la corruption à travers PETROCARIBE comme symbole de la lutte anti-corruption.
Une réflexion que je voudrais partager avec mes
lecteurs pour leur montrer que PETRCARIBE est un élément d’un ensemble plus
grand. De 2008 à 2018, les fonds engagés dans le cadre du PETROCARIBE seraient
de 3.8 milliards dollars américains. Sur cette même période avec un budget
annuel autour de 2 milliards d’USD en moyenne, ce qui ferait un montant global
de 20 milliards d’USD engagés. Si on enlevait les 70% environ liés au
fonctionnement de l’Etat (14 milliards d’USD), donc 30% (6 milliards d’USD) auraient été
investis dans le développement du pays pour les résultats que l’on sait.
A partir de cette réflexion, il faudrait demander des comptes pour 6 milliards d’USD et non pas seulement pour les 3.8 milliards d’USD de PETROKARIBE sur la base d’un audit sérieux, de préférence, international. A ce moment-là seuls les plus justes seront sauvés en cas de réalisation de ce procès tant attendu.
A partir de cette réflexion, il faudrait demander des comptes pour 6 milliards d’USD et non pas seulement pour les 3.8 milliards d’USD de PETROKARIBE sur la base d’un audit sérieux, de préférence, international. A ce moment-là seuls les plus justes seront sauvés en cas de réalisation de ce procès tant attendu.
En tout cas, pour finir, il y a nécessité d’une prise de conscience par
rapport à cette arrogance de l’ignorance pour nous aider à mieux nous informer
et nous former quand on aspire à quelque chose au lieu d’utiliser des coups bas
contre nos adversaires, nos concurrents, ou d’utiliser notre ignorance, nos peu
d’informations et de connaissances à des fins de destruction. Il serait
beaucoup plus profitable au pays que nos ignorants arrogants cessent d’intervenir
dans les médias pour donner une chance au pays de s’en sortir. Avec une
prévision de croissance économique de 1.8% pour 2017-2018 (Radio Vision 2000/CEPALC),
Haïti est loin de sortir de la pauvreté abjecte dans laquelle nous l’avons
plongée. Révolution tranquille versus révolution violente? A bon entendeur
salut!