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samedi 30 mai 2009

HAITI : INDICE DE PERCEPTIONS DE LA CORRUPTION ET PROJETS

HAITI : INDICE DE PERCEPTIONS DE LA CORRUPTION ET PROJETS

Jean Robert JEAN-NOEL

Port-au-Prince, le 22 mai 2009

Cet article sur la corruption constitue le quatrième d’une série qui a démarré en septembre 2007 (réf. Le Nouvelliste : Lutte contre la corruption, nécessité de protection spéciale pour le Président Préval, septembre 2007). Deux autres articles, l’un en novembre 2008 (indice de perceptions de la corruption et toi) et, l’autre en mars 2009, (indice de perceptions de la corruption et institutions, voir www.jrjean-noel.blogspot.com et « Haïti en Marche », avril 2009) ont été consacrés à cette thématique. Ces articles demeurent un véritable plaidoyer pour la lutte anti-corruption et la nécessité d’éviter d’augmenter l’indice de perceptions de la corruption, sachant que ces perceptions à la base de l’indice sont établies à partir des enquêtes menées surtout auprès de nous-autres Haïtiens. Ce dernier article de la série s’inscrit donc dans la même démarche. Il est écrit aussi à la faveur de la conférence de Washington du 14 avril 2009 où Haïti s’est engagée à mener à bien un certain nombre de programmes d’actions inscrits dans le document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP), dans le Post Desaster Need Assessment (PDNA) et dans le rapport Collier, à la faveur du discours du 18 mai 2009 du Président de la République, qui incite le pays à se battre pour asseoir son indépendance économique, suite à son indépendance politique acquise de haute lutte en 1804, actuellement fragilisée à cause de la forte dépendance économique du pays par rapport à l’aide externe à hauteur de 60% (2008-2009), et à la faveur de la nomination de Bill Clinton comme « Emissaire Spécial des Nations Unies pour Haïti », en dépit de la présence de la MINUSTHA et du « Représentant Spécial du Secrétaire Général de l’ONU », Mr Anabi. Car, à mon humble avis, tout ceci a un lien quelconque avec la réputation de corruption d’Haïti, en particulier avec la perspective de réduire au maximum ce fléau dans les projets en relation avec le DSNCRP.

Pour mieux appréhender le phénomène de corruption au sein des projets, essayons de passer en revue les projets à travers le temps en Haïti, en nous basant sur les modes d’exécution qui se sont modifiés au fur et à mesure jusqu’au mode actuel généralisé à travers les unités de coordination de projets (UCP), et cette tendance timide (Banque Mondiale, 2009) à le remplacer par l’appui budgétaire tout en conservant la gestion par résultat à travers des structures permanentes de l’Etat. Mais le phénomène de corruption perçu et/ou réel, qui constitue un obstacle sérieux à la mise en œuvre de cette nouvelle théorie, s’est révélé et se révèle l’une des principales contraintes au développement du pays basé, ces derniers temps, sur l’approche projets et son corollaire la gestion dirigiste et participative de projets.

La gestion de projets par l’Etat

Depuis plus de soixante (60) ans, l’Etat a fait le choix d’opérer par projets. Exécutés dans un premier temps à travers des structures étatiques normales, ministères, directions centrales, les projets vont bien vite se faire à travers des organismes de type ODVA (Organisme de développement de la Vallée de l’Artibonite). C’est ainsi que l’Etat, en référence à l’ODVA, va tenter de réaliser le développement du pays à travers des organismes régionaux de développement, d’où les nombreux OD, ODPG (Organisme de développement de la Plaine des Gonaïves), ODNO (organisme de développement du Nord-Ouest), ODN (Organisme de développement du Nord), et les nombreux DRI, DRIP (développement régional intégré de Petit-Goâve), etc. Parallèlement à ces organismes pratiquement autonomes, on a enregistré aussi des projets qui s’exécutaient à l’intérieur des structures permanentes des ministères dont les choix des Directeurs relevaient généralement des relations politiques, d’amitiés ou de circonstances. Ces projets ont utilisé principalement le mode d’exécution en régie et ont été plutôt dirigistes. Plus de cinquante (50) de projets de développement allaient être dénombrés, en 1999, par Jean André Victor. En dépit des résultats obtenus dans la plupart de ces programmes, on suppose que le phénomène de corruption ait été présent et ait été à la base des cuisants échecs enregistrés dans la plupart des cas. Toujours est-il que l’Etat, durant ces vingt dernières années et sous la pression des bailleurs de fonds (BF), a généralisé l’introduction des approches participatives et des Unités de coordination de projets (UCP) en son sein, en gardant ses prérogatives de choix des Directeurs dans un premier temps, et en acceptant de se courber aux conditionnalités d’appel à la concurrence par la suite.

La gestion des projets à travers des unités placées au sein des structures étatiques

La généralisation des UCP au sein des ministères n’est pas le fait du hasard. Elle résulte des nombreuses conditionnalités imposées à Haïti par les bailleurs de fonds pour respecter les règles de transparence et permettre à ces derniers de contrôler plus strictement les fonds mis à disposition. Parmi les conditionnalités, en plus de la généralisation des UCP et des approches participatives, on a relevé aussi la généralisation des manuels d’opération (MO), des règles de passation de marché, de l’assistance technique obligatoire soit de manière permanente, soit de manière ponctuelle, de quoi exercer un contrôle strict sur la gestion de l’ensemble et drainer une partie des fonds vers l’extérieur. Il faut noter que les UCP se retrouvent aussi au sein des ONG internationales particulièrement. Si au sein des projets de l’Etat, elles sont en général dirigées par les haïtiens, au sein des ONG et agences internationales, elles sont en général administrées par les étrangers avec l’apport bien sur de cadres haïtiens. De plus, elles utilisent principalement le mode d’exécution par appel d’offres (AO). Toutes ces informations sont fournies au grand public pour lui faire comprendre que le contrôle de la corruption au sein des projets n’est pas exclusivement une affaire haïtienne. Que le projet s’exécute au sein des structures étatiques, des ONG et/ou agences internationales, il est astreint aux mêmes règles de transparence. Alors pourquoi cette perception de corruption au sein des projets, surtout ceux exécutés par l’Etat ? Avant de tenter une explication par rapport à cette perception globale, attardons nous un peu sur les projets dans le DSNCRP.

Les projets en cours dans le cadre du DSNCRP

Les 1060 projets actuellement en cours dans le DSNCRP incluent les projets exécutés au sein des structures étatiques et les projets exécutés par les ONG et agences internationales. Ils s’exécutent pour la grande majorité par les UCP et, en terme pilote, on prévoit d’en réaliser à travers des structures étatiques avec une approche appui budgétaire et la gestion par résultats. Ils sont regroupés en six (6) programmes par le Ministère de la Planification et de la Coopération Externe (MPCE) dans le cadre d’un « plan d’investissements prioritaires du DSNCRP ». Les six programmes (Mai 2009) se déclinent comme suit :

(i) le programme d’infrastructures économiques (route, électricité, aéroport, agriculture, environnement, tourisme, commerce, industrie) regroupant 191 projets totatilisant 39 milliards de gourdes haïtiennes (39 Mrds de GHT) ;

(ii) le programme d’infrastructures sociales (éducation, santé, communication, sport) regroupant 96 projets totatilisant 4.8 Mrds de GHT ;

(iii) le programme d’infrastructures administratives (administrations centrale et territoriale) regroupant 72 projets totatilisant 2.9 Mrds de GHT ;

(iv) le programme de renforcement et de fonctionnement de l’Etat ( appui à l’investissement, aménagement du territoire, développement urbain, appui à l’Etat, mise en place de structures administratives, protection sociale, équipements, formation, encadrement et appui aux groupements et associations, études de plans, de programmes et projets) regroupant 649 projets totatilisant 72.26 Mrds de GHT ;

(v) le programme d’appui direct à la production (intensification agricole, appui à la production, transformation et commercialisation des produits agricoles, appui au développement économique des filières, et transfert de technologie) regroupant 82 projets totatilisant 5.1 Mrds de GHT, et

(vi) le programme de reconstruction de l’économie haïtienne (interventions spécifiques et urgentes, réparation des dommages causés par les intempéries, ressources nécessaires à la restauration des services de base à la population) regroupant 58 projets totatilisant 48.7 Mrds de GHT.

Ces programmes totalisent 172.75 Mrds de GHT ou 4.32 Mrds de USD, ce qui dépasse le montant prévu (3.86 Mrds USD) pour la mise en œuvre du DSNCRP originel, très certainement à causes des actions liées aux intempéries qui y sont incluses. Une fois mis au courant de ces informations, les gens du grand public, qui ne peuvent que très partiellement vérifier les résultats de ces investissements, ont tendance à verser dans des commentaires négatifs, parce que ne sentant pas les effets directs de ces investissements sur eux-mêmes et, de plus, parce que encouragés par la plupart des élites politiques, économiques et intellectuelles, qui se révèlent, le plus souvent, irresponsables en la matière.

La perception de la corruption du public par rapport aux projets

Cette perception négative du grand public finit par nuire à l’image du pays. Encouragée par nos élites qui ont pris cette mauvaise habitude d’accusation sans preuve, la perception du grand public par rapport aux projets n’est pas fondée. Le niveau de corruption dans les projets est forcément faible, surtout dans les projets dits durables financés par la communauté internationale (CI). Ces projets subissent les contre coups des projets d’urgence où, en général, le niveau de corruption est plus élevé, à cause de la gestion de l’urgence en tant que telle, de la faiblesse des dossiers d’exécution, du manque de contrôle et de supervision, de l’allègement des procédures d’octroi des marchés. Cette perception est due aussi au manque de communication et de transparence dans les projets principalement. L’information politique prédomine dans tous les pays du monde ; mais, en Haïti, on est littéralement submergé d’informations politiques. Depuis le départ de Mario Dupuy, on a comme l’impression que le pays souffre du « syndrome de Mario Dupuy ». Les gouvernements, qui se sont succédé au pouvoir depuis le 29 février 2004, souffrent d’un criant déficit de communication. Ils n’osent pas parler de leurs réalisations et encore moins des réalisations des agences et ONG internationales qui n’interviennent en Haïti qu’avec l’aval de l’Etat et en regard des accords signés entre l’Etat et la communauté internationale. Le grand public a tendance à dissocier les actions de l’Etat par rapport aux actions des ONG qui sont généralement bien perçues. Or les actions sont, en principe, complémentaires et s’exécutent dans un cadre défini par l’Etat, en l’occurrence, le DSNCRP. Un seul exemple suffit à illustrer cette perception, le PRODEP. En effet, le PRODEP est un projet de l’Etat financé par la Banque Mondiale (BM) à travers le Bureau de Monétisation, mais exécuté par le CECI et la PADF. Pour le grand public, c’est un bon projet du CECI ou de la PADF où le phénomène de corruption est très, très faible, car impliquant directement les populations concernées dans la gestion directe des fonds. La réalité au sein de ce programme est travestie parce que les gens ignorent le contrôle exercé par l’Etat et le bailleur, en l’occurrence la BM, et le perçoivent comme un projet non étatique.

La réalité au sein des projets et le contrôle exercé par l’Etat et les bailleurs de fonds

Il est clair que la perception du grand public par rapport au phénomène de corruption au sein des projets est erronée. En effet, dans les projets dits durables, les règles de transparence sont suffisamment rigides pour tordre le cou aux velléités de corruption. Les nombreuses procédures en vigueur, les nombreuses conditionnalités de départ, le contrôle interne et externe, la supervision, sont autant d’éléments non à la portée du grand public et qui réduisent le phénomène de corruption au sein des projets. L’Etat et les BF se sont mis d’accord pour exercer un contrôle strict des fonds mis à disposition des projets, et les UCP ont pour obligation de se faire auditer chaque année et d’exercer un contrôle interne journalier des fonds mis à leur disposition. A noter que les fonds sont débloqués au fur et à mesure de l’état d’avancement des activités et après soumission et vérification des pièces justificatives, mais jamais d’un seul coup comme on a tendance à le croire. Ce qui est ignoré du grand public.

La nécessité d’éviter d’augmenter l’indice de perceptions de la corruption par ignorance

Il faut noter qu’actuellement toute l’ossature du développement d’Haïti se base sur le DSNCRP avec les 1060 projets qui totalisent 4.32 milliards d’USD et qui s’exécutent essentiellement à travers les UCP. Le passage à l’appui budgétaire pour l’exécution des actions à travers les structures permanentes de l’Etat avec en prime le renforcement de celui-ci n’est pas pour demain, justement à cause de la persistance de cette perception négative liée à la corruption. A partir de ces considérations, il est du devoir des institutions, des citoyens informés et des responsables de projets d’expliquer, encore et toujours, au grand public les mesures en vigueur pour combattre la corruption au sein des projets. Car c’est à ces personnes du grand public qu’on s’adresse quand on veut mener des sondages pour établir l’indice de perceptions de la corruption en Haïti. Il est donc de la responsabilité des élites de ce pays, qui est nôtre, et surtout de la Presse d’éviter de colporter des informations non vérifiées et susceptibles de nuire à l’image de notre pays et de chaque Haïtien en particulier. En agissant ainsi, nous contribuons tous à offrir une meilleure image de nous-mêmes et de notre chère Haïti. Agir mal par ignorance est pardonnable, agir mal en connaissance de cause est malhonnête donc condamnable !

jeudi 6 novembre 2008

HAITI:INDICE DE PERCEPTIONS DE LA CORRUPTION ET TOI

Port-au-Prince, le 1er novembre 2008

HAITI : L’INDICE DE PERCEPTIONS DE LA CORRUPTION ET TOI

Jean Robert JEAN-NOEL

Haïti est un pays corrompu. Quand on pense Haïti, on pense corruption. Depuis la naissance de ce pays dans la douleur, la corruption est la seule constante qui a traversé toute son histoire. Le père fondateur d’Haïti fut victime de la corruption car il voulut une certaine équité pour ce pays, répartir mieux la richesse de ce pays exsangue après la terrible guerre de l’indépendance. Après sa mort, la corruption s’est installée en maitre. Malgré certaines éclaircies tout le long de notre histoire de peuple, le système mis en place en 1806 se perpétue en se renouvelant. Certes, on a eu de présidents honnêtes, mais ils ont du tolérer la corruption autour d’eux et pactiser avec le système pour gouverner. Ce qui se traduit aujourd’hui par une forme de culture de la corruption et explique en grande partie notre sous développement actuel. Et ce n’est pas étonnant que, lorsque le monde s’est donné cet outil, « l’indice de perceptions de la corruption », pour mesurer ce phénomène, notre pays se soit classé le plus corrompu ou parmi les plus corrompus de la terre. Alors, qu’en est-il exactement ? Et pourquoi Haïti se retrouve-t-elle parmi les derniers.

Depuis 1995, l'ONG Transparency International publie chaque année un indice de perceptions de la corruption[1] (CPI) classant les pays selon le degré de corruption perçu dans un pays. L'indice est élaboré à l'aide d'enquêtes réalisées auprès d'hommes d'affaires, d'analystes de risques et d'universitaires résidant dans le pays ou à l'étranger.

Sur la base des enquêtes menées depuis 2002 jusqu’en 2007 par cette ONG, Haïti s’est retrouvée à la 89e place sur 102 pays enquêtés en 2002, à la 131e place sur 133 pays en 2003, à la 155e place sur 159 pays en 2005, à la 163e sur 163 pays en 2006 et à la 177e sur 179 pays enquêtés en 2007. Les places occupées par notre pays sont établies sur la base de perceptions et rien d’autre.

Le lecteur doit souligner le mot perceptions. Cet indice est donc établi à partir des perceptions de la corruption de diverses catégories enquêtées. Ces perceptions sont fonction d’une certaine réalité. La perception n’est pas forcement la réalité vraie si je peux me permettre ce pléonasme. Le Président Préval parlant de la corruption en septembre 2008, a essayé de l’expliquer ainsi. Certaines personnes étaient d’accord avec lui et d’autres non. Ce qui est sur, c’est que nous tous nous sommes responsables de la perception générale que les autres se font de notre pays, en particulier de l’insécurité, du kidnapping et de la corruption. Certes, il est établi que notre pays est corrompu ; on en prend pour preuves, « le procès de la consolidation » sous le gouvernement de Nord Alexis au début du 20e siècle, « le procès des timbres » sous le gouvernement de Jean Claude Duvalier dans les années 1970, les enquêtes menées sous le gouvernement d’Alexandre/Latortue (2004/2006). Mais la place occupée par Haïti aujourd’hui est beaucoup plus liée à l’image projetée par nous autres, haïtiens, à notre façon d’opérer et à nos pratiques quotidiennes de gestion.

Haïti s’est donnée de bons outils de gestion ; elle dispose d’un arsenal législatif assez intéressant dans tous les domaines mais les gouvernements successifs ne l’appliquent. La Constitution de 1987 est venue avec des innovations, pourtant on ne se donne pas la peine de prendre des lois d’application. Et quand on s’est donné la peine d’en rédiger quelques unes, on les met au rencart. Où est-ce qu’on peut aller avec de pareilles pratiques. De plus, nous avons une perception très négative de nous-mêmes. Nous dénigrons tout le temps nos frères et sœurs. Nous les écartons parce qu’ils sont sérieux et compétents. Nous les critiquons négativement aussi pour les mêmes raisons. Nous sommes en admiration pour les gens qui ont acquis leur fortune de manière douteuse. Mais nous inventons des histoires vraisemblables pour faire passer nos frères et sœurs honnêtes, sérieux, compétents pour des vagabonds, des corrompus, des dilapideurs. Qui pis est, les vrais corrompus et les corrupteurs sont heureux de voir leurs frères et sœurs honnêtes et compétents pris pour cibles à leur place et se moquent d’eux en sourdine. Voilà notre réalité.

Cette réalité là est encore plus triste quand nous nous faisons complices de l’étranger, en inventant des histoires abracadabrantes sur nos frères et sœurs sans preuves sérieuses juste en faisant travailler notre imagination et en amalgamant. Nous agissons par jalousie, par méchanceté et surtout par souci de destruction. Prenons l’exemple des dernières mesures annoncées par le nouveau gouvernement Préval/Pierre-Louis. Après le passage sur Haïti des cyclones FAY, Gustav, Hanna et Ike, qui ont achevé de mettre à plat notre économie, le gouvernement, face à l’hésitation et à la lenteur de la communauté internationale et face à l’ampleur de la catastrophe, a décidé de déclarer l’état d’urgence pour une quinzaine de jours et a décaissé dans la foulée environ 200 M USD.

Pour engager cette somme durant une quinzaine de jours, il a fallu utiliser des procédures célères comme les contrats de gré à gré. Nous commençons par douter de notre capacité à l’engager, puisque nos chers amis de la communauté internationale parlent tout le temps de notre manque de capacité d’absorption, sans jamais évoquer les multiples conditionnalités et les procédures de plus en plus contraignantes et non harmonisées d’un bailleurs à un autre (JEAN-NOEL, 2004, 2006, in Le Nouvelliste). La somme une fois engagée, au lieu d’attendre les résultats dans les prochains mois, nous critiquons le processus au lieu de féliciter le gouvernement pour avoir engagé à temps l’argent. En outre, nous spéculons sur les noms des personnes qui vont s’enrichir, nous parlons de magouilles. Comme il est de mise en de pareils cas, nous faisons des amalgames. Si un tel est l’ami d’un tel et que ce dernier a eu un contrat de gré à gré, l’autre va faire son beurre, car c’est un prête-nom. Naturellement, nous profitons de la circonstance pour salir la réputation d’honnêtes gens. Et qui pis est, nous augmentons par le fait même l’indice de perceptions de la corruption par rapport à notre pays et ne nous étonnons pas si, en 2008 et en 2009, il se retrouvera à la dernière place.

Cet article, je l’ai écrit pour toi, mon frère haïtien, ma sœur haïtienne. Ne détruis pas l’image de ton pays, n’accuse pas ton frère ou ta sœur sans preuve. Si tu veux participer à la lutte contre la corruption, commence par éviter d’opiner sur ce phénomène sans bien le connaitre. Sais-tu que, par exemple, quand tu ne paies pas tes impôts, quand tu profites de ta position dans l’appareil étatique ou dans le secteur privé, la société civile ou même au niveau de la communauté internationale, pour obtenir des contrats incompatibles à ta fonction surtout quand tu es à la fois juge et partie, tu es un corrompu ? Toi aussi, ma sœur ? Que tu sois fonctionnaire, employé, cadre, parlementaire, ministre, président, la corruption, dépendant de son ampleur et ses conséquences, est un délit et/ou un crime. Lutter contre elle est d’abord une question d’étique et aussi un devoir de citoyen. Ah ! Tu ne savais pas. Eh bien, commençons la lutte maintenant, en remettant en question notre façon d’agir par rapport à nous-mêmes et par rapport à notre pays. Et Haïti en bénéficiera très largement : la corruption va reculer, l’indice de perceptions va baisser drastiquement, l’investissement va augmenter et le développement va se mettre en route.

Ne te sens pas visé personnellement, mon cher, même si tu es frappé en pleine poitrine. Tu dois noter et retenir que quand je parle de toi, je parle aussi de moi, n’est-ce pas? Pour paraphraser à l’envers l’autre, ce grand auteur du siècle de la lumière, celui de Louis XIV. Sans rancune, mon ami (e)!
[1] http://fr.wikipedia.org/wiki/Indice_de_perceptions_de_la_corruption

dimanche 3 décembre 2017

HAITI, LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION VERS UNE REVOLUTION TRANQUILLE EXIGÉE PAR LA CONJONCTURE

HAITI, LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION VERS UNE REVOLUTION TRANQUILLE EXIGÉE PAR LA CONJONCTURE
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
3 DECEMBRE 2017

Je m’étais promis de ne plus revenir sur cette thématique de la corruption après mes quatre (4) articles sur le sujet, « Lutte contre la corruption, nécessité de protection spéciale pour le Président Préval » (Réf. Le Nouvelliste),« Indice de perceptions de la corruption et toi [1]», « Indice de perceptions de la corruption et projets[2] », « Indice de perceptions de la corruption et Institutions[3] ». J’avais promis à mon ami, Henriot Nader, qui m’a conseillé de laisser tomber cette thématique, de ne plus y revenir. Il se retourne peut-être dans sa tombe du fait que j’y reviens dans cet article. Il aurait compris car la conjoncture l’exige. Avant de s’y attarder, passons brièvement en revue les faits saillants du mois de Novembre 2017.

Faits saillants du mois de Novembre … voilà pour l’essentiel
Le mois de Novembre 2017 est riche en événements sensationnels. Ce sont (i) les réactions des indexés dans le rapport Beauplan sur PETROCARIBE de la Commission d’éthique et d’anti-corruption ; (ii) l’annonce du déploiement de la caravane du changement par le Président J. Moïse sur tous les départements à partir du 7 Février 2018, moyennant l’élaboration des plans d’action départementaux (PARD en cours) et la mise à disposition de moyens dont les matériels lourds commandés; (iii) l’incident survenu à l’école Maranatha, à Carrefour, et son lot de morts du côté de la police nationale d’Haïti (PNH) et des civils ; (iv) la remobilisation de l’armée d’Haïti le 18 Novembre 2017, et la désignation son commandant en chef, en la personne du Général Jodel Lesage ; (v) le rapport de la commission sur l’application de la loi sur les partis politiques qui  a recommandé un montant de  572 M HTG pour financer 58 partis politiques ; (vi) le retour au pays du principal leader de l’opposition, Jean-Charles Moïse, après des soins intensifs à Cuba ; (vii) le voyage éclair du Président Jovenel Moïse au Venezuela soldé par la renégociation de deux accords  de 97 M USD dont 82 M USD, dans un premier temps (12 mois) pour les infrastructures agricoles, l’énergie, des infrastructures routières, et, dans un second temps (horizon 12 mois), 15 M USD pour vendre au Venezuela des produits comme la farine, les pâtes alimentaires, les haricots, le riz et le café[4] ; (viii) le symbolisme du 29 Novembre 1987 ou « le massacre de Ruelle Vaillant » commémoré par l’opposition en termes de manifestations de rue et le pouvoir en place en termes de discours et dépôt de gerbe de fleurs du Chef de l’Etat sur les lieux, en présence du Président du Sénat, M. Y Latortue, et du Président du Conseil Supérieur du Pouvoir judiciaire (CSPJ), M. Cantave ; (ix) le lancement de la neuvaine de l’Eglise Catholique en préparation au 75e anniversaire de la consécration d’Haïti à Notre-Dame de l’Immaculée Conception, avec cette attente de l’église catholique par la voix du Cardinal Langlois de voir  « Une Haïti vivable. Une Haïti décidée à mener la guerre contre l’impunité, la corruption, la pauvreté… où chacun apprend à se responsabiliser ». Voilà pour l’essentiel.

La corruption, une vraie préoccupation pour le Président

Depuis son discours d’investiture, le Président de la République ne cesse de claironner qu’il va lutter contre la corruption. Il a récidivé en plusieurs occasions, il a même déclaré que le pays a cinq gros problèmes : corruption, corruption, corruption, corruption et corruption. A deux rencontres auxquelles j’ai pu assister, il est revenu sur cette thématique. J’ai donc déduit c’est une vraie préoccupation pour lui.

Le rapport de la commission sénatoriale sur PETROCARIBE « partial », « partiel », « partisan », « inconstitutionnel», quel que soit l’adjectif qu’on lui attribue, pose  la problématique de la corruption dans le pays. Le rapport de Paul Denis sous l’administration Alexandre-Latortue en a fait de même par rapport à l’administration Aristide. Le rapport de l’ULLCC sur l’ONA qu’on a qualifié de « l’ONAgate » a fait beaucoup de vagues à son époque. Ce rapport a épinglé à tort ou à raison certains parlementaires, certaines stations de radios et certaines  personnalités. 

Dans les trois cas cités, les indexés se sont défendus du bec et des ongles et ont qualifié ces rapports de fantaisistes, de persécutions politiques, de nuisance calculée, de règlements de compte, de méchancetés de la part de leurs auteurs. Il y a du vrai dans toutes ces réactions. Mais une chose est certaine, la corruption est là. Elle est endémique. Il faut l’éradiquer. Que les rapports sur la corruption indexent à tort ou à raison des personnes, des institutions, ce n’est pas la vraie question. Selon le Sénateur P. Dumond, est-on pour ou contre la corruption ? C’est la vraie question à se poser dans cette conjoncture.

Lutte contre la corruption et la conjoncture

La conjoncture actuelle s’y prête. Haïti a été classée 158e sur 168 pays par la Transparency International, le mercredi 27 janvier 2016, avec 17 points sur une échelle de 1 à 100, en perdant 2 points par rapport au classement précédent[5]. La représentante de l’ONU en Haïti, MINUJUSTH, dit « prendre au mot » l’administration actuelle qui ambitionne de combattre la corruption et elle attend de la voir à l’œuvre. Au niveau mondial, la lutte contre la corruption devient un thème majeur. La France parle de la « moralisation de la vie publique » eu égard à la corruption. Les manifestations de rue contre la corruption se font dans plusieurs pays dont la République Dominicaine. L’Ex-Présidente du Brésil a été destituée à cause de la corruption. L’actuel Président du Brésil est aussi indexé. En Haiti, le Collectif du 4 décembre prévoit de manifester le 5 décembre prochains contre la corruption et l’impunité. En effet selon une note signée de Jean Robert ARGANT : « Le Collectif du 4 décembre interpelle toutes les citoyennes et tous les citoyens engagés, pétris de l’amour de la patrie et aguerris pour l’accompagner dans son combat et les invite à rejoindre ses rangs pour crier haut et fort : CORRUPTION : NON ! IMPUNITÉ : NON ! TOLÉRANCE : 0 absolu ! »

Par rapport à la remobilisation de l’Armée d’Haïti caractérisée dans le passé par la corruption,  par rapport à la mise en application prochaine de la loi sur les partis politiques qui, en général, fonctionnent sans les règles de transparence, par rapport  à  l’annonce du déploiement de la caravane du changement sur l’ensemble du pays à partir du 7 février 2018, et pour éviter que le fléau  de la corruption ne s’installe au sein des forces armées, au niveau des partis politiques et  au niveau de la caravane du changement, qui auront des rayons d’action  au niveau de toute la République, il faudrait des normes clairement établies et des prévisions de mesures concrètes contre toutes éventualités, y incluse la corruption.

L’exemple de la  mise en œuvre  de la stratégie caravane du changement   
       
Un simple exemple par rapport à la mise en œuvre de la stratégie caravane du changement, il est prévu, comme il se fait dans la Péninsule Sud d’Haïti, que ce sont les directions déconcentrées des secteurs qui vont exécuter les actions sectorielles et gérer les fonds y relatifs. Chaque secteur aura à gérer ses affaires (imbrication intra-sectorielle) en les articulant à d’autres secteurs (articulation intersectorielle), et ces actions seront intégrées à l’action gouvernementale (coordination, gouvernance) pour maximiser leurs effets et impacts (transformation des rapports sociaux historiques) en vue d’aboutir au développement endogène et durable du pays (CASDA, Novembre 2017[6]) (scrutez bien le schéma explicatif  ci-dessous).

Une vraie révolution tranquille pour un développement intégral, endogène et durable

La conjoncture exige que chacun joue son rôle à la perfection selon les normes de transparence inhérentes à la bonne gouvernance. Le Président préside, le Premier Ministre gouverne, les ministres administrent et les autres entités des ministères et des organismes autonomes tant au niveau central, décentralisé et déconcentré exécutent. Les autres acteurs du développement sont assujettis aux mêmes règles et principes. Ces règles et principes de transparence devront être très clairs pour éviter toute forme de confusion et de collusion, afin que nul n’en prétexte ignorance. Les mesures de coercition prévues et à prévoir seront suivies et appliquées sans complaisance. Une vraie révolution tranquille issue des états généraux sectoriels de la nation ou de la conférence nationale ou de la grande concertation nationale. C’est à ce prix qu’Haïti amorcera son développement intégral, endogène et durable durant le mandat de cette administration et l’atteindra pleinement à l’horizon 2042!