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dimanche 3 décembre 2017

HAITI, LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION VERS UNE REVOLUTION TRANQUILLE EXIGÉE PAR LA CONJONCTURE

HAITI, LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION VERS UNE REVOLUTION TRANQUILLE EXIGÉE PAR LA CONJONCTURE
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
3 DECEMBRE 2017

Je m’étais promis de ne plus revenir sur cette thématique de la corruption après mes quatre (4) articles sur le sujet, « Lutte contre la corruption, nécessité de protection spéciale pour le Président Préval » (Réf. Le Nouvelliste),« Indice de perceptions de la corruption et toi [1]», « Indice de perceptions de la corruption et projets[2] », « Indice de perceptions de la corruption et Institutions[3] ». J’avais promis à mon ami, Henriot Nader, qui m’a conseillé de laisser tomber cette thématique, de ne plus y revenir. Il se retourne peut-être dans sa tombe du fait que j’y reviens dans cet article. Il aurait compris car la conjoncture l’exige. Avant de s’y attarder, passons brièvement en revue les faits saillants du mois de Novembre 2017.

Faits saillants du mois de Novembre … voilà pour l’essentiel
Le mois de Novembre 2017 est riche en événements sensationnels. Ce sont (i) les réactions des indexés dans le rapport Beauplan sur PETROCARIBE de la Commission d’éthique et d’anti-corruption ; (ii) l’annonce du déploiement de la caravane du changement par le Président J. Moïse sur tous les départements à partir du 7 Février 2018, moyennant l’élaboration des plans d’action départementaux (PARD en cours) et la mise à disposition de moyens dont les matériels lourds commandés; (iii) l’incident survenu à l’école Maranatha, à Carrefour, et son lot de morts du côté de la police nationale d’Haïti (PNH) et des civils ; (iv) la remobilisation de l’armée d’Haïti le 18 Novembre 2017, et la désignation son commandant en chef, en la personne du Général Jodel Lesage ; (v) le rapport de la commission sur l’application de la loi sur les partis politiques qui  a recommandé un montant de  572 M HTG pour financer 58 partis politiques ; (vi) le retour au pays du principal leader de l’opposition, Jean-Charles Moïse, après des soins intensifs à Cuba ; (vii) le voyage éclair du Président Jovenel Moïse au Venezuela soldé par la renégociation de deux accords  de 97 M USD dont 82 M USD, dans un premier temps (12 mois) pour les infrastructures agricoles, l’énergie, des infrastructures routières, et, dans un second temps (horizon 12 mois), 15 M USD pour vendre au Venezuela des produits comme la farine, les pâtes alimentaires, les haricots, le riz et le café[4] ; (viii) le symbolisme du 29 Novembre 1987 ou « le massacre de Ruelle Vaillant » commémoré par l’opposition en termes de manifestations de rue et le pouvoir en place en termes de discours et dépôt de gerbe de fleurs du Chef de l’Etat sur les lieux, en présence du Président du Sénat, M. Y Latortue, et du Président du Conseil Supérieur du Pouvoir judiciaire (CSPJ), M. Cantave ; (ix) le lancement de la neuvaine de l’Eglise Catholique en préparation au 75e anniversaire de la consécration d’Haïti à Notre-Dame de l’Immaculée Conception, avec cette attente de l’église catholique par la voix du Cardinal Langlois de voir  « Une Haïti vivable. Une Haïti décidée à mener la guerre contre l’impunité, la corruption, la pauvreté… où chacun apprend à se responsabiliser ». Voilà pour l’essentiel.

La corruption, une vraie préoccupation pour le Président

Depuis son discours d’investiture, le Président de la République ne cesse de claironner qu’il va lutter contre la corruption. Il a récidivé en plusieurs occasions, il a même déclaré que le pays a cinq gros problèmes : corruption, corruption, corruption, corruption et corruption. A deux rencontres auxquelles j’ai pu assister, il est revenu sur cette thématique. J’ai donc déduit c’est une vraie préoccupation pour lui.

Le rapport de la commission sénatoriale sur PETROCARIBE « partial », « partiel », « partisan », « inconstitutionnel», quel que soit l’adjectif qu’on lui attribue, pose  la problématique de la corruption dans le pays. Le rapport de Paul Denis sous l’administration Alexandre-Latortue en a fait de même par rapport à l’administration Aristide. Le rapport de l’ULLCC sur l’ONA qu’on a qualifié de « l’ONAgate » a fait beaucoup de vagues à son époque. Ce rapport a épinglé à tort ou à raison certains parlementaires, certaines stations de radios et certaines  personnalités. 

Dans les trois cas cités, les indexés se sont défendus du bec et des ongles et ont qualifié ces rapports de fantaisistes, de persécutions politiques, de nuisance calculée, de règlements de compte, de méchancetés de la part de leurs auteurs. Il y a du vrai dans toutes ces réactions. Mais une chose est certaine, la corruption est là. Elle est endémique. Il faut l’éradiquer. Que les rapports sur la corruption indexent à tort ou à raison des personnes, des institutions, ce n’est pas la vraie question. Selon le Sénateur P. Dumond, est-on pour ou contre la corruption ? C’est la vraie question à se poser dans cette conjoncture.

Lutte contre la corruption et la conjoncture

La conjoncture actuelle s’y prête. Haïti a été classée 158e sur 168 pays par la Transparency International, le mercredi 27 janvier 2016, avec 17 points sur une échelle de 1 à 100, en perdant 2 points par rapport au classement précédent[5]. La représentante de l’ONU en Haïti, MINUJUSTH, dit « prendre au mot » l’administration actuelle qui ambitionne de combattre la corruption et elle attend de la voir à l’œuvre. Au niveau mondial, la lutte contre la corruption devient un thème majeur. La France parle de la « moralisation de la vie publique » eu égard à la corruption. Les manifestations de rue contre la corruption se font dans plusieurs pays dont la République Dominicaine. L’Ex-Présidente du Brésil a été destituée à cause de la corruption. L’actuel Président du Brésil est aussi indexé. En Haiti, le Collectif du 4 décembre prévoit de manifester le 5 décembre prochains contre la corruption et l’impunité. En effet selon une note signée de Jean Robert ARGANT : « Le Collectif du 4 décembre interpelle toutes les citoyennes et tous les citoyens engagés, pétris de l’amour de la patrie et aguerris pour l’accompagner dans son combat et les invite à rejoindre ses rangs pour crier haut et fort : CORRUPTION : NON ! IMPUNITÉ : NON ! TOLÉRANCE : 0 absolu ! »

Par rapport à la remobilisation de l’Armée d’Haïti caractérisée dans le passé par la corruption,  par rapport à la mise en application prochaine de la loi sur les partis politiques qui, en général, fonctionnent sans les règles de transparence, par rapport  à  l’annonce du déploiement de la caravane du changement sur l’ensemble du pays à partir du 7 février 2018, et pour éviter que le fléau  de la corruption ne s’installe au sein des forces armées, au niveau des partis politiques et  au niveau de la caravane du changement, qui auront des rayons d’action  au niveau de toute la République, il faudrait des normes clairement établies et des prévisions de mesures concrètes contre toutes éventualités, y incluse la corruption.

L’exemple de la  mise en œuvre  de la stratégie caravane du changement   
       
Un simple exemple par rapport à la mise en œuvre de la stratégie caravane du changement, il est prévu, comme il se fait dans la Péninsule Sud d’Haïti, que ce sont les directions déconcentrées des secteurs qui vont exécuter les actions sectorielles et gérer les fonds y relatifs. Chaque secteur aura à gérer ses affaires (imbrication intra-sectorielle) en les articulant à d’autres secteurs (articulation intersectorielle), et ces actions seront intégrées à l’action gouvernementale (coordination, gouvernance) pour maximiser leurs effets et impacts (transformation des rapports sociaux historiques) en vue d’aboutir au développement endogène et durable du pays (CASDA, Novembre 2017[6]) (scrutez bien le schéma explicatif  ci-dessous).

Une vraie révolution tranquille pour un développement intégral, endogène et durable

La conjoncture exige que chacun joue son rôle à la perfection selon les normes de transparence inhérentes à la bonne gouvernance. Le Président préside, le Premier Ministre gouverne, les ministres administrent et les autres entités des ministères et des organismes autonomes tant au niveau central, décentralisé et déconcentré exécutent. Les autres acteurs du développement sont assujettis aux mêmes règles et principes. Ces règles et principes de transparence devront être très clairs pour éviter toute forme de confusion et de collusion, afin que nul n’en prétexte ignorance. Les mesures de coercition prévues et à prévoir seront suivies et appliquées sans complaisance. Une vraie révolution tranquille issue des états généraux sectoriels de la nation ou de la conférence nationale ou de la grande concertation nationale. C’est à ce prix qu’Haïti amorcera son développement intégral, endogène et durable durant le mandat de cette administration et l’atteindra pleinement à l’horizon 2042!

lundi 5 février 2018

HAÏTI : ENTRE LA MERDE DE TRUMP ET LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION, UNE TENDANCE A L’ENTENTE NATIONALE ?

HAÏTI : ENTRE LA MERDE DE TRUMP ET LA LUTTE CONTRE LA CORRUPTION, UNE TENDANCE A L’ENTENTE NATIONALE ?
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
4 FEVRIER 2018

Le deuxième lundi  de Janvier 2018, tel que prévu par la Constitution, le Président de la République, M.J. MOISE,  le Premier Ministre Jack Guy LAFONTANT et son gouvernement se sont présentés, ce 8 janvier 2018, devant le Parlement pour un état des lieux de la nation. Le Président en a profité pour présenter les grandes priorités de son administration pour l’année 2018, entre autre, la lutte contre la corruption. « A cet effet, le Président de la République appelle à l’unité des pouvoirs de l’État et de toutes les forces vives du pays pour lutter efficacement contre le fléau de la corruption qui constitue un obstacle majeur au développement du pays. Une lutte nécessaire d’autant plus qu’elle vise à créer plus d’opportunités à la jeunesse du pays afin de réduire les flux migratoires vers les autres pays de la région.[1]» Du 1er Janvier aux Gonaïves, jour de l’Indépendance, jusqu’au 31 janvier, le pays a vécu une période d’accalmie, troublée par deux faits  majeurs, les propos du Président Américain, Donald Trump, traitant  les pays africains et Haïti de « shithole » (trou de cue) et le rapport PETROCARIBE sur la corruption mis en débat au Sénat par le nouveau Président du Sénat, M. Joseph LAMBERT. En ce début d’année, Haïti semble trouver un point d’entente entre la merde de Trump et la lutte contre la corruption. Avant d’y arriver, passons en revue les faits saillants du mois de janvier 2018.

Faits saillants du mois de Janvier 2018

En plus de (I) la merde de Trump qui a fait un tollé mondial et (ii) le dossier PETROCARIBE, d’autres faits méritent d’être signalés : (iii) Les Elections au Parlement ont conduit au remplacement de Youri Latortue par Joseph Lambert au Sénat et  de Cholzer Chancy par Gary Bodeau à la chambre basse. (iv) Le Voyage du Président  J. Moïse en Italie où il a rencontré le  Président Italien et le Pape François ainsi que les agences de Rome, FIDA, FAO. Pour ce voyage en Italie, le Président était accompagné  de sa famille (femme et enfants), du ministre des affaires étrangères, de son chef de cabinet, des Présidents du Sénat et de la Chambre Basse. (v) la rencontre du Président avec la Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) au siège de cette institution a dissipé le malentendu entre ces deux pouvoirs d’Etat. Ainsi, au cours de ce mois de janvier 2018, les trois pouvoirs projettent une image d’entente. (vi) La campagne pour l’exclusion de  Sweet Micky aux parcours carnavalesques s’est soldée par sa non-participation officielle au carnaval de l’Indépendance des Gonaïves et à celui de Jacmel. La campagne continue pour son exclusion du carnaval national à Port-au-Prince, et Martelly prend son bâton de pèlerin pour s’expliquer au niveau de certains médias avec un clash de « joure mamman » à Caraïbes Matin avec un animateur de cette émission.  (vii) Dans le cadre de l’extension de la caravane du changement sur l’ensemble du pays à partir de 7 Février 2018, le Président Moïse a procédé à la remise de matériels lourds au niveau de certains départements comme le Centre, l’Artibonite, le Nord-Est, le Nord-Ouest et le Nord en ont reçu un certain nombre bien longtemps avant. Un calendrier prévoit la remise de ces matériels à l’ensemble des départements jusqu’au 11 Février 2018. A ce qu’il parait, à date 80% des 123 M USD de matériels sont déjà en Haïti, selon le Président. (viii) la jeune sélection féminine nationale de football, les Grenadières, s’est qualifiée pour le Mondial en France en battant le Canada par 1 but à 0, obtenant ainsi la 3e place qualificative après le Mexique et les USA. Compliments à ces jeunes  qui, au prix d’énormes sacrifices, ont fait honneur à notre pays meurtri!

La merde de Trump et la lutte contre la corruption

Maintenant concentrons-nous sur la merde de Trump et la  lutte contre la corruption. Lors d’une rencontre bipartite à la Maison Blanche, les démocrates ont rapporté aux médias les propos du président américain traitant Haïti et les pays africains de pays de merde. Ces propos ont été reprouvés mondialement. Les haïtiens ont organisé des manifestations à New-York, en Floride et en Haïti. Le Gouvernement Haïtien a convoqué le chargé d’affaire américain en Haïti. Certains partis politiques ont sorti des notes de presse assez musclés. LAVALAS et PITIT DESSALINES ont organisé des manifestations de rue. LAVALAS a instruit ses partisans de se concentrer uniquement sur les propos de Trump, tandis que PITIT DESSALINES a associé le déchoucage de Jovenel Moïse à la manifestation contre les propos de Trump. Lors de la préparation de cette manifestation, l’équipe de LAVALAS ainsi que l’avocat Michel André ont fait valoir qu’ils sont pour la conférence nationale souveraine pour régler leur différend avec le pouvoir en place qui, lui-même a parlé d’Etats Généraux Sectoriels de la nation et semble ne pas avoir trop de problème avec le concept Conférence Nationale, n’est-ce pas, Monsieur le Président ? La position jusqu’auboutiste  de déchoucage de J C MOISE semble l’affaiblir, puisque certains alliés l’ont abandonné pour cette raison.  Il n’en a cure.

Quant à la lutte contre la corruption, le Président l’a encore affirmé au Parlement, il en fait une affaire personnelle. Il veut avoir l’appui des autres pouvoirs pour lutter contre le fléau de la corruption, un obstacle majeur au développement du pays. Le rapport PETROCARIBE approfondi par trois sénateurs de l’opposition, Beauplan, Cassy et Pierre avec l’appui de Cheramy, ne plait pas au pouvoir, qui estime que le rapport est « biaisé ». L’opposition, dans sa lutte contre le pouvoir en place en fait son cheval de bataille. La grande majorité des indexés, estiment les allié du pouvoir, sont des anciens ministres de Martelly, des anciens directeurs de BMPAD liés à l’administration Martelly. La dernière résolution de PETROCARIBE engageant les anciens ministres et le directeur du BMPAD sous l’administration Privert n’a pas été analysée par la commission dirigée par Beauplan. Tous ces arguments restent très valables. La grande question, y –a-t-il corruption ou non ? Si oui, il faut sévir. Mais qui doit sévir, la justice, l’ULCC, la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux administratif (CSCCA), etc.? En tout cas, le Sénat a tranché, à travers uniquement les membres du PHTK et alliés fort tard dans la nuit du 1er  Février 2018 par une résolution, transférant le dossier à la CSCCA. Ce qui est qualifié d’opération « champwel » par l’opposition politique. « C’est la mafia totale qui est au niveau du Parlement. L’un des plus grands réseaux de mafia du pays se trouve au Parlement [2]», selon Beauplan. Le fait de ne pas classer le dossier sans suite, c’est déjà une bonne chose. Les Sénateurs liés au pouvoir auraient pu demander de passer au vote contre le rapport tel qu’il est et obtenir le rejet du rapport. Cela ferait un tollé pour quelques jours et peut-être quelques mois comme c’avait été le cas pour ce qu’on a qualifié d’ONAGATE, comme pour le rapport Paul Denis sur l’administration d’Aristide. Ces deux dossiers sont classés dans les tiroirs sans suite. Pour le rapport PETROCARIBE, c’est à la CSCCA et à la Justice de lui donner suite.

Il faut profiter du momentum
De ces deux dossiers le cas de la merde de Trump qui a soulevé l’indignation des haïtiens de toutes catégories, nous avons pour une fois fait l’unanimité par rapport à un dossier stigmatisant notre pays comme c’avait été le cas pour le 4H désigné plus tard par le sigle SIDA, même si, pour des raisons politiciennes, il y a eu divergence sur la manière de répondre  à  Trump. Pour le dossier de lutte contre la corruption, dossier PETROCARIBE mis à part, il y a consensus pour lutter contre le fléau de la corruption sans une utilisation politicienne  de tel ou tel dossier. Pour une autre fois, tout le monde veut lutter contre la corruption, le pouvoir en place, l’opposition, la société civile, la société haïtienne dans son ensemble. Il faut donc profiter du momentum pour mettre de l’ordre dans nos affaires.

Conférence nationale ou états généraux sectoriels de la nation, contenu et limites ?
La position de LAVALAS et d’autres groupes, qui ont passé du déchoucage à la conférence nationale souveraine et le pouvoir qui n’aurait pas de problème avec le mot conférence nationale, c’est un autre point de consensus entre nous. Maintenant, il faudra se mettre d’accord sur le contenu et les limites de la conférence. Si la conférence nationale sera souveraine[3] comme  en Afrique, elle devra en principe tout remettre en question, même  les élections qui viennent d’être organisées à tous les niveaux. Dans ce cas, sa réussite pourrait être compromise. C’est pourquoi, dès le départ, il faudrait se mettre d’accord sur le contenu et les limites de la conférence nationale ou états généraux sectoriels de la nation ou la grande concertation nationale. Peu importe le nom qu’on lui donnera, il faudra se mettre d’accord sur quelque chose sur Haïti sans arrière-pensée politicienne.

                    Conclusion : Haïti d’abord et avant tout ou la continuation de la bataille des clans ???

En guise de conclusion, les divers documents sectoriels sur Haïti, les plans de réponse aux catastrophes qui ont frappé Haïti, le dernier document de synthèse des plans d’action départementaux pour le relèvement et le développement  portent en eux les germes d’une nouvelle Haïti capables de mobiliser les forces vives du pays  pour transformer les rapports sociaux historiques et aboutir au développement intégral, endogène et durable du pays. Ces documents disposent d’éléments susceptibles de nous aider à nous asseoir ensemble dans le cadre d’une grande concertation nationale en vue d’aboutir à cette nouvelle Haïti. La réponse à la merde de Trump et la lutte contre la corruption qui ont fait l’unanimité chez tous les haïtiens ne peuvent-elles pas être les déclencheurs de cette tendance à l’entente nationale, la seule porte de sortie pour favoriser la mise en commun de nos forces vers le développement de notre Haïti Chérie? C’est possible, seulement si la bataille pour l’entente ne vise que le relèvement et le développement d’Haïti et non la prise de pouvoir d’un clan par rapport à un autre pour satisfaire les égos d’un clan par rapport à un autre selon le modèle établi depuis 1806. Faites vos jeux chers compatriotes, « Haïti d’abord et avant tout" ou la continuation de la bataille des clans ???

mercredi 1 avril 2009

HAITI: INDICE DE PERCEPTIONS DE LA CORRUPTION ET INSTITUTIONS

Dimanche 29 mars 2009


HAITI: INDICE DE PERCEPTIONS DE LA CORRUPTION ET INSTITUTIONS


Jean Robert JEAN-NOEL


Mon dernier texte de novembre 2008 sur la corruption faisait appel à la conscience citoyenne des haïtiens et haïtiennes. Je l’avais écrit à la faveur des gorges chaudes qui se faisaient autour des 197 M de USD décaissés par le Gouvernement haïtien suite au passage des quatre cyclones qui avaient saccagé Haïti en moins d’un mois (mi Aout-début septembre 2008). J’avais mis en garde contre cette manie haïtienne d’accusation sans preuve, d’anticipation négative, de critiques destructives qui ont pour effet d’augmenter l’indice de perceptions de la corruption de notre pays. Dans ce nouvel article, je m’adresse à nos institutions.


Le scandale de l’ONA et les institutions impliquées

En effet, depuis ces derniers jours, on ne parle que de corruption à la faveur du scandale de l’Office National d’Assurance Vieillesse qualifié d’ « ONAgate ». Le rapport de l’Unité de lutte contre la corruption (ULCC) sur cette affaire fait des vagues, en impliquant pêle-mêle la plupart des membres du Parlement pour des subventions reçues de l’ex-Directeur de l’ONA, actuellement en prison, certains médias comme Radio Kiskeya qui a protesté en remettant en question le « sérieux » du rapport. Certains articles en circulation sur le net donnent toute une liste de personnalités impliquées dans ce scandale. Gary Victor, dans un article sur Le Nouvelliste en relation avec le scandale de l’ONA, se questionne, comme pour nous faire prendre conscience de la profondeur du phénomène de corruption, sur le fonds de gestion et de développement des collectivités territoriales qui aurait dû à date accumuler des milliards de gourdes. Ce fonds, on le sait, est administré seul par le Gouvernement à travers le Ministère de l’Intérieur et des Collectivités Territoriales contrairement à ce qui a été prévu lors de la création de ce fonds par la loi du 26 mai 1996. Très peu de gens savent comment ce fonds est administré et à quoi il sert réellement. On pourrait multiplier à l’infini les exemples de fonds ou de taxes créés pour favoriser le développement de ce pays mais qui sont utilisés à d’autres fins. Ces valeurs sont détournées de leurs objectifs premiers sans aucune explication de la part des autorités en charge de leur gestion.


Le détournement de fonds est-il toujours de la corruption ?

L’ONA n’a pas été créé pour subventionner les festivités carnavalesques encore moins à travers des députés et sénateurs. Il y a eu détournement de fonds. Par ignorance ou par souci de corrompre ? La plupart des responsables haïtiens n’ont jamais lu les lois, décrets, arrêtés et règlements intérieurs en relation avec les institutions qu’ils dirigent. Comme nul n’est sensé ignorer, encore moins les responsables. Donc, ils sont coupables de mauvaise gestion par détournement des fonds mis à leur disposition donc punissables mais sont-ils pour autant corrompus ? On peut détourner des fonds par ignorance mais en les dépensant pour des actions utiles à la société. Là pourrait-on parler de corruption ? Je ne pense, c’est mon avis. Mais en détournant les fonds et en les utilisant à des fins personnelles pour s’enrichir ou enrichir ses acolytes, on est tout simplement corrompu ou corrupteur. Dans le cas de Radio Kiskeya par rapport à l’ONA avec des contrats de publicité en bonne et due forme, si l’on en croit Marvel Dandin, Directeur Général de la Radio, on ne peut parler ni de détournement de fonds ni de corruption, à moins que les règlements internes de l’ONA, et la loi interdisent la publicité pour cette institution. Dans ce cas bien précis, c’est la responsabilité du Directeur Général de l’ONA et non celle de la Radio Kiskeya qui est une entreprise commerciale. Il en est de même pour les subventions aux parlementaires. Par contre, si les parlementaires ont utilisé la valeur mise à leur disposition par le Directeur de l’ONA à des fins personnelles, ils sont des corrompus et sont punissables par la loi pour corruption. Et l’ULCC a le devoir et le droit de pousser l’investigation jusqu’au bout. L’enquête une fois aboutie et révélant des cas flagrants d’utilisation de l’argent à des fins personnelles ou illicites, l’ULCC pourra parler de corruption et inciter la justice à agir.


Les Institutions ayant pour devoir de combattre la corruption

Pour combattre la corruption, l’Etat s’est donné des outils en termes d’institutions, de lois, de règlements, des structures de planification, d’exécution, de contrôle et de suivi/évaluation. Les trois pouvoirs de l’Etat sont organisés pour se contrôler mutuellement, tout au moins sur le papier. La Constitution de 1987 (22 ans aujourd’hui) donne les moyens de contrôle nécessaires à l’Etat pour tordre le cou à la corruption. En plus du contrôle mutuel des trois pouvoirs, la cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (CSCCA) peut intervenir et assurer un contrôle strict au niveau de l’ensemble des trois pouvoirs. En introduisant la participation dans la gouvernance du pays, la décentralisation avec la mise en place des collectivités territoriales du département à la section communale en passant par la commune et une structure délibérative et de contrôle à chaque niveau, elle oblige la transparence au sein de l’ensemble des institutions tant au niveau central que décentralisé. Ce mécanisme complexe qu’est le nouvel Etat d’Haïti prévu par la Constitution de 1987 n’a jamais été mis en place, parce que l’ancien Etat, basé sur des mécanismes centralisés de corruption, résiste de toutes ses forces et de sa longue expérience d’enrichissement illicite de groupuscules gravitant autour du symbole de l’Etat traditionnel, le Président, pour empêcher la mise en place de l’autre.

Remarquez que, malgré la mise en place de l’UCREF, de l’ULCC, le renforcement de la CSCCA, le décret sur la passation de marché et la mise en place de la commission nationale de passation de marché (CNPM), la corruption persiste et se fait visible de temps à autre par des scandales soit au niveau du Parlement, du Pouvoir Judiciaire, de l’Exécutif, et aussi dans le secteur privé et des ONG. Toutes les institutions évoluant dans le pays disposent de moyens de se contrôler et sont assujetties à des contrôles internes et externes périodiques. Les accords et conventions signés par l’Etat avec la Communauté Internationale (CI) lui donnent droit pour orienter, contrôler et superviser les actions menées par les ONG et le secteur privé dans le pays quelle qu’en soit la source de financement. Ces accords et conventions permettent à la CI d’exercer aussi en retour un droit de contrôle. Donc, les mécanismes pour combattre la corruption existent. Ce qui manque c’est la volonté de le faire. Tant au niveau de l’Etat qu’au niveau de la CI.


La manifestation de la corruption en Haïti : le clientélisme

L’Etat et la CI savent très bien que le pays ne dispose pas de beaucoup de cadres ayant le niveau maitrise ou doctorat. Ce n’est pas étonnant que dans les appels d’offres (AO), les critères de choix tournent autour de ces critères. Alors qu’il suffisait de mettre ces critères en y ajoutant les mots « ou équivalent » pour avoir beaucoup plus de gens à participer et à ne pas à déclarer l’AO infructueux ni à ne favoriser que le petit cercle restreint de ses amis parfois basés au pays, à l’extérieur ou fraichement revenus au pays sans aucune connaissance ou aucune expérience du pays ou des institutions pour lesquelles ils sont appelés à travailler et ne parlant parfois ni le français ni le créole. Ces recrutements sont certes faits sur la base d’appels d’offres mais souvent ils sont truqués. C’est une forme de clientélisme. Il faut mettre rapidement un bémol pour ne pas donner l’impression que tous les AO sont truqués.

Il en est de même fort souvent pour le recrutement des firmes, des ONG. Les critères choisis écartent le plus souvent les firmes et ONG haïtiennes même pour des travaux de moyenne importance. Quand ces critères permettent de recruter les firmes et ONG haïtiennes, ils visent le plus souvent la même catégorie ayant l’habitude de travailler avec l’Etat et la Communauté internationale. Fort souvent, ces critères ne favorisent pas l’émergence d’institutions haïtiennes même comme sous traitantes. A force de traiter avec les mêmes, on multiplie les risques de clientélisme et de corruption.

De toute manière, ces deux exemples sont nettement meilleurs que le choix direct des cadres techniques et des firmes sur la base d’amitié, de clientélismes politiques, claniques, de militantisme. Cette tendance à l’appel d’offre généralisé est déjà un pas décisif vers le combat contre la corruption. Elle prendrait son plein effet au moment où l’Etat et le CI comprendraient la nécessité d’avoir des critères qui favorisent tout le monde et surtout qui sont incitatifs à l’utilisation optimum des cadres haïtiens, des firmes haïtiennes, des ONG haïtiennes, ne serait-ce que comme sous-traitants dans un premier temps. Les règles de transparence devraient prévaloir en tout temps et devraient répondre aux besoins d’Haïti d’abord et non à ceux de la CI. Car si cette façon de faire n’évolue pas dans le sens du développement du pays haïtien, en favorisant l’émergence des cadres et institutions haïtiennes compétents jusqu’à atteindre la masse critique, Haïti ne se développera jamais et sera toujours sous la dépendance de la CI.


Autres formes de manifestation de la corruption : le vol, la duplication

Le développement d’Haïti passe aussi par le combat contre certaines formes de manifestation de la corruption comme le vol, la duplication. Le clientélisme favorise le vol. Certains responsables auraient exigé et exigeraient, selon les rumeurs, 10, 15, 20 et même 30% du coût global des actions. Dans le cas où cela se révélerait vrai, ce serait tout simplement du vol. A cela, il faudrait ajouter les vols orchestrés par les responsables directs des actions et les vols courants (les plus détectables) opérés par le personnel moyen et le petit personnel. Tous ces vols se situeraient autour de 40% des coûts globaux des actions. Avec de telles pertes comment pourrait-on parler de développement d’un pays ?

De plus, la duplication au niveau des zones d’intervention et de terrain est monnaie courante, surtout au niveau de l’humanitaire et des urgences. On a relevé plusieurs cas où des intervenants présentent comme leurs les travaux effectués par un ou d’autres intervenants. Cela s’est produit dans plusieurs endroits du pays, Gonaïves, Cabaret, Belladère, etc., parfois avec la complicité des responsables locaux de l’Etat ou des collectivités locales. Il faut noter aussi que certains intervenants, qui se respectent, font la démarcation entre ce qu’ils ont trouvé et ce qu’ils réalisent. En tout cas, la présentation des travaux des autres avec pièces justificatives et photos à l’appui n’est tout simplement que du vol.


L’augmentation de l’indice de perceptions de la corruption

Avec des institutions qui ne font pas correctement leur travail de combat contre la corruption et des manifestations de la corruption connues et dénoncées sous formes de rumeurs sans se donner la peine de bien les documenter, les institutions haïtiennes et celles de la communauté internationale favorisent l’augmentation de l’indice de perceptions de la corruption. On croirait même qu’Haïti et ses partenaires prennent un malin plaisir à voir le pays parmi les derniers dans le tableau de Transparency International. Quand on regarde de près les outils à la disposition de l’Etat et de la CI, on comprend très mal qu’il n’y ait pas un meilleur contrôle de la corruption en Haïti. Le combat contre la corruption devrait être mené sous tous les fronts au niveau des citoyens mais aussi et surtout au niveau des institutions. Pour cela il faudrait des hommes et des femmes dignes de ce nom à intégrer ces institutions pour appliquer les lois contre la corruption et en forger d’autres. Il y va du développement durable de ce coin de terre où il est encore possible de faire quelque chose de grandiose. C’est ta responsabilité, ma chère sœur ou mon cher frère, au sein de cette institution qui t’accueille ou que tu diriges. Ne te trouve pas d’excuse. N’oublie jamais que les institutions ne valent que par les personnes qui les intègrent !

samedi 9 février 2008

HAITI 2004-2007 : DU CCI (1.4) AU DSNCRP (3.86), LA VALSE DES MILLIARDS DE USD POUR « LE SAUT QUALITATIF » DE LA PERLE DES ANTILLES

Par Jean Robert JEAN-NOEL

1- Le contexte de ce bilan

Ce document, je l’ai écrit en pensant à ma benjamine de 12 ans, Jihanne, qui arrive difficilement à s’adapter à la vie américaine et qui insiste pour avoir les nouvelles du pays, même s’il est difficile maintenant pour une enfant de 12 ans de comprendre un tel papier. Qu’importe, elle comprendra plus tard. Par contre pour les gens plus âgés vivant en Haïti ou dans la diaspora, ils comprendront tout de suite après la lecture intégrale du document. Peut-être qu’ils reprendront espoir et apporteront leur pierre à la difficile reconstruction de l’édifice national, sous une forme ou une autre, et ce, en dehors de leur idéologie politique, leur appartenance sociale ou religieuse.

Ce bilan, qui se veut plus qualitatif, sélectif et objectif qu’exhaustif, est une actualisation du bilan 2004-2006[1]. Il passe en revue les trois (3) années du cadre de coopération (CCI) sous l’égide duquel la communauté internationale (CI) a collaboré avec Haïti. Le CCI a été le fil conducteur entre les gouvernements de Latortue/Alexandre[2], Préval/Alexis et la communauté Internationale (CI). Il a été le guide des deux GOH durant cette période, même si l’actuel GOH s’y réfère très rarement[3]. Ce GOH, comme on le verra tout au long de cet article, s’est référé à la déclaration de politique générale (DPG) du Premier Ministre, au document stratégique de réduction de la pauvreté version intérimaire (DSRPI) et version définitive, document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP) et parfois aux objectifs du millénaire pour le développement (OMD). De toute manière, le DSNCRP, qui a été validé en septembre 2007, finalisé en novembre 2007 et mis sur le site du Ministère de la planification et de la coopération externe (MPCE) (http://.www.mpce.gouv.ht), est l’actuel cadre de coopération d’Haïti avec la communauté internationale.

Ce document s’attardera donc sur le CCI, les conférences internationales liées au CCI et la stratégie du pays, mettra en exergue certains résultats obtenus par les deux gouvernements, jettera une lumière sur quelques faits saillants de 2007, insistera sur le rôle de la CI, analysera succinctement le fonctionnement des deux autres pouvoirs d’Etat par rapport à l’exécutif, fera un clin d’œil au média, campera le DSNCRP et dégagera les perspectives et conclusions qui y sont liées.

2- Haïti et le cadre de coopération intérimaire (CCI)

Haïti, petit pays de la Caraïbes avec 9.6 M d’habitants[4] pour 27,750 km², connaît, depuis sa création en 1804, une succession de crises socio-politiques et économiques. Les derniers épisodes du début de 2004, culminés avec le départ du Président Aristide, le 29 février 2004, ont conduit à la mise en place du Gouvernement Intérimaire de transition (Mars 2004- juin 2006), à l’élaboration du cadre de coopération intérimaire (CCI) qui se voulait inclusif, participatif et moderne, et à sa présentation aux bailleurs de fonds à la Conférence de Washington par le Gouvernement Haïtien (GOH) de transition en juillet 2004. L’enveloppe du CCI était de 1.4 milliard de dollars américains sur une période de 2 années avec une prorogation jusqu’en septembre 2007 depuis la Conférence de Bruxelles (20,21octobre 2005).

2.1 Les axes et les thématiques du CCI
Le CCI, qui a mobilisé l’appui de 250 experts nationaux et internationaux, s’articulait autour de quatre (4) axes et les thématiques suivantes :

(i) Assurer une meilleure gouvernance politique et promouvoir le dialogue national (Sécurité, Police et DDR, Justice, Prisons et Droits Humains, Processus Electoral et Dialogue National) ;
(ii) Renforcer la gouvernance économique et contribuer au développement institutionnel (Gouvernance Economique, Renforcement des Capacité Institutionnelles, Aménagement du Territoire, Développement Local, Décentralisation).
(iii) Favoriser la relance économique (Stabilité Macro-economique, Electricité, Création Rapide d'Emplois et Micro finance, Développement du Secteur Privé/PME/PMI, Agriculture, Routes et Transport, Protection et Réhabilitation de l'Environnement, Gestion des Déchets Solides) ;
(iv) Améliorer l’accès aux services de base (Aide Humanitaire d'Urgence, Eau et Assainissement, Santé et Nutrition, Education, Jeunesse et Sports, Culture, Médias et Communication, Sécurité Alimentaire, Développement Urbain/Amélioration des Bidonvilles, Filets de Sécurité et Protection Sociale).

2.2 La mise en œuvre du CCI et les Conférences internationales dans l’ère du GOH de transition
La mise en œuvre du CCI avec ses trois niveaux de coordination stratégique, opérationnelle et d’exécution, et en dépit des faiblesses relevées dans la coordination, a pu donner certains résultats assez significatifs. Mise à part la conférence de Washington avec des promesses de la communauté internationale (CI) de 1.4 milliards de USD, la Conférence de Cayenne (mars 2005), en Guyane, s’est soldée par 380 projets et 750 millions d’Euros de promesses. Une troisième conférence internationale des bailleurs a eu lieu les 16 et 17 juin 2005 à Montréal, autour de trois (3) thèmes : la sécurité, le processus électoral et l’avancement du CCI, et autour de quatre (4) Priorités : les besoins en matière de sécurité, les subventions pour la rentrée scolaire de septembre 05, l’électricité et la création d’emplois. Une quatrième conférence internationale sur Haïti a eu lieu à Bruxelles, en Belgique, sur quatre (4) thèmes : les élections, le sécurité, la mise en œuvre du CCI et l’économie, et deux catégories de priorités pré et post électorales axées, entre autres choses, sur le document stratégique de réduction de pauvreté intérimaire (DSRPI), la création d’emplois temporaires, le financement des partis politiques, l’appui budgétaire, l’accompagnement des nouveaux élus, le document stratégique de réduction de pauvreté définitif (DSRPD) ou programme de long terme appelé à remplacer le CCI. Il faut souligner que ces conférences n’ont pas donné tous les résultats escomptés[5] mais ont su maintenir l’attention sur Haïti.


2.3 Le CCI adapté, les conférences internationales dans l’ère de l’actuel GOH et la vision du GOH
La conférence de Brasilia sur Haïti, le 23 mai 2006, a évoqué la nécessité de modification du CCI pour l’adapter à la nouvelle donne introduite par la rentrée en fonction du Président, le 14 mai 2006, la ratification et la prise de fonction, le 9 juin 2006, du nouveau Premier Ministre et de son Gouvernement pluriel, et liée à leur vision de développement d’Haïti. Cette nouvelle vision a eu une réponse concrète de la part de la communauté internationale à la Conférence sur Haïti du 25 Juillet 2006 à Port-au-Prince. Sur un montant de 545 M USD sollicités par le GOH, la Communauté Internationale (CI) a promis pour les quatorze prochains mois 750 M USD[6]. « Ce qui permettrait d’améliorer les services essentiels dans les régions pauvres rurales et urbaines »[7]. La conférence du 25 juillet 06 sera suivie d’une autre conférence qui a lieu, le 30 novembre 06, à Madrid en Espagne, et qui s’est largement appuyée sur la déclaration de Paris pour introduire la notion de « co-responsabilité » ou de « responsabilité partagée » entre le GOH et la communauté internationale. A noter que cette conférence, qui est considérée comme la dernière en relation avec le CCI, a permis à Haïti de signer un accord de coopération « historique » avec l’Espagne.

La conférence internationale du 25 juillet 06 sur Haïti a permis au GOH d’associer les secteurs vitaux de la nation haïtienne en les encourageant à faire leur sa vision et de gagner à sa cause la solidarité internationale. Le document du GOH traduit parfaitement sa vision de court, moyen et long terme sur le développement d’Haïti. Sur le court terme, il a adapté le CCI à la déclaration de politique générale (DPG) en tenant compte en particulier de certaines urgences dont le PAS, sur le moyen terme le programme quinquennal de 7.1 milliards de USD, qui donne déjà un aperçu de ce que sera le programme de long terme (2006-2031), et qui est axé sur huit (8) grands chantiers.

Dans un article de JR JEAN-NOEL publié le 21 juillet 06 sur le net et envoyé à la CI basée en Haïti, il a été signalé que « Selon le document de travail préparé par le GOH et en circulation sur la Conférence du 25 juillet 06, les grands chantiers identifiés portent sur les travaux publics (1.5 milliards USD), l’apaisement social (120 M USD), la sécurité/justice (1.5 milliards USD), l’augmentation des revenus (150 M USD) le renforcement de l’Etat (850 M USD), l’éducation (930 M USD), la santé (1,2 milliards USD) et l’agriculture et environnement (850 M USD). »

2.4 La stratégie du Pays d’Haïti
La stratégie du Pays a porté, depuis la conférence de Bruxelles 20 et 21 octobre 05, et parallèlement à la mise en œuvre du cadre de coopération intérimaire (CCI), sur la préparation d’un programme de long terme qui a remplacé, en octobre 2007[8], le CCI. Elle s’est articulée aussi et surtout autour de la préparation du document stratégique de réduction de pauvreté intérimaire (DSRPI) qui, après validation et modification de l’actuel gouvernement en consultation avec la société civile (SC) et le secteur privé (SP), ouvrirait Haïti à des financements concessionnels des institutions financières internationales(IFI) dans le cadre de la « facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance »(FRPC) ainsi qu’à l’allègement de la dette dans le cadre du programme pour les pays pauvres les plus endettés (PPTE). Le DSRPI a été finalisé et approuvé par le Conseil des Ministres, selon le Premier Ministre Alexis lors de la présentation du Bilan des cents (100) premiers jours du GOH (sept 2006).

La stratégie du Pays a porté également une attention particulière sur la décentralisation et la déconcentration, le développement rural et local, le développement agricole, sur la gestion des terres irriguées et irrigables qui, dans un contexte de pénurie en terres, sont les plus aptes à assurer une augmentation soutenue de la production agricole à long terme et contribuer à la réduction de la pauvreté. Dans ce même ordre d’idées, le nouveau Président élu au 1er tour des élections du 7 février 2006 a insisté sur la nécessité d’un pacte de gouvernabilité et d’un programme consensuel de développement de 25 ans pour Haïti. Quant au Premier Ministre désigné, dans une interview à Radio Métropole le 22 mai 2006, il a évoqué la probabilité d’un gouvernement d’ouverture avec les meilleures compétences du pays. Les priorités s’articuleraient autour de la modernisation de l’Etat et la création de richesse. D’où nécessité d’un climat de paix et de sécurité dans le pays, qui ne s’est pas traduit dans le réel durant toute l’année 2006, à part certaines périodes d’accalmie mais qui a pu, grâce à des mesures drastiques et conjuguées du GOH et de la CI, donner des résultats tout au long de 2007[9]. Ce qui impliquerait la création de conditions pour un « vrai dialogue national » en vue de réconcilier le pays avec lui-même, et la mise en œuvre dans le plus bref délai d’un programme d’apaisement social (PAS) qui, selon une expression savoureuse et humoristique de la population, s’est retrouvé dans « l’impasse » durant les 18 mois de l’actuel GOH.

2.5 Résultats du GOH de transition et perspectives pour l’actuel GOH
Actuellement tous les bailleurs traditionnels d’Haïti sont à pied œuvre en Haïti et opèrent pour la grande majorité dans le cadre du CCI adapté. Les décaissements se chiffraient exactement au 30 juin 2006 à 1.2 milliards de USD[10]. En dépit de deux légers remaniements ministériels au sein du GOH en février et en juin 2005, du passage des cyclones, Jeanne en septembre 2004, Dennys, Emily en juillet 2005, Wilma et Alpha en octobre 2005, de la situation d’insécurité à Port-au-Prince, les résultats présentés (taux de croissance de 1.8% en octobre 2005, taux d’inflation ramené de 37% en 2003 à 14.7% en 2006) par le GOH de transition à l’occasion du premier anniversaire du CCI (juillet 05), à la Conférence de Bruxelles (octobre 2005) et dans le livre blanc publié fin 2006, où il est répertorié l’ensemble des actions menées et initiées par ce GOH, se sont révélés plus qu’encourageants.

Et les perspectives pour le nouveau gouvernement issu des urnes (élections fév. et mai 06), avec des projets en cours pour 1.3 milliards de USD[11] (juillet 06) et des possibilités de financement de 2.55 milliards de USD jusqu’en septembre 2007, soit plus de 35% de ses besoins globaux en termes d’investissement pour le quinquennat (7.1 milliards de USD)[12], étaient nettement meilleures par rapport au gouvernement de transition à sa prise de fonction en mars 2004. Ce qui est de bon augure pour le pays haïtien. « D’un autre coté, en consacrant près de 12% de la valeur totale des grands chantiers à l’agriculture et à l’environnement, près de 12% au renforcement de l’Etat, 21% aux travaux publics , 21% aux questions de justice et de sécurité, et près de 17% au secteur santé et 13 % à l’éducation et en tenant compte des problématiques liées à l’apaisement social et à l’augmentation de revenus au niveau de la Douane et de la direction générale des impôts (DGI), le GOH s’est donné, tout au moins sur le papier, les moyens de sa politique et pourrait contempler un début de décollage du pays à la fin de son mandat en 2011, toutes choses étant égales par ailleurs. »[13]

2.6 Résultats du GOH actuel
Depuis la Conférence du 25 juillet 06 à Port-au-Prince, le GOH s’est mis au travail dans la discrétion[14]. Il a procédé, entre autres, à la nomination d’un Secrétaire d’Etat à la Sécurité publique pour se colleter à la question d’insécurité et à la nomination d’un Secrétaire à l’Agriculture pour aider le Ministre actuel de l’Agriculture, Mr Severin qui a eu des problèmes de santé mais aussi et surtout pour renforcer le secteur agricole qui demeure une priorité pour l’actuel GOH si l’on compare le budget alloué par ce GOH par rapport aux GOH antérieurs. En plus de ces aspects de renforcement institutionnel, le GOH s’est attelé à gérer les urgences[15] : l’insécurité, la question d’électricité, la gestion des déchets, des risques et des désastres, à diagnostiquer la problématique globale du pays et à proposer des solutions à travers les programmes sectoriels en cours d’élaboration, d’où le bilan des 100 jours du GOH par le Premier Ministre et le budget pour l’exercice fiscal 2006-2007. Le Bilan a présenté la situation du pays d’une manière positive contrairement à la perception générale (persistance du déficit de communication). Le taux de croissance pour l’exercice 2005-2006 était de 2.3% dont seulement 1.7 % du secteur agricole inférieur au 2.7 % de l’exercice précédent pour ce même secteur. Le budget 2006-2007 de 64.5 milliards de gourdes haïtiennes (GHT), soit environ 1.6 milliards de USD, reflétait plus ou moins les préoccupations nationales et a été voté à temps[16] par le Parlement Haïtien avec quelques légères modifications. Il est à noter toutefois que le Budget 2006-2007 n’a accordé qu’environ 7% au secteur agricole, qui correspond selon le SEARNDR[17] à 10% du budget d’investissement soit un déficit de 2 points par rapport aux prévisions quinquennales d’environ 12%. Le taux d’inflation en 2007 a été ramené en deçà de 9%, le taux de croissance avoisine 3.3% et le GOH a pu avoir des rentrées fiscales avoisinant 24 milliards de GHT. « Dans le domaine des investissements, selon K.Pharel[18], les dépenses en capital effectués dans le secteur public – plus de 200 % en termes réels – ont grandement contribué à la croissance du PIB en 2007 ». « Pour l’exercice écoulé, les dépenses de fonctionnement ont été évaluées à quelque 22 milliards de gourdes, tandis que les dépenses d’investissement, soutenues en grande partie par les bailleurs de fonds internationaux, étaient estimées à quelque 42 milliards de gourdes ».
3 Les faits saillants du GOH en 2007

En plus des aspects macro économiques et financiers, le GOH a à son actif, en 2007, un certain nombre de faits marquants comme la lutte contre l’insécurité, la lutte contre la corruption, le débat sur la révision constitutionnelle, les travaux d’infrastructures, la gestion des risques et désastres, l’organisation de cinq (5) conférences internationales[19] en Haïti, la nomination de Wiclef Jean comme Ambassadeur, etc. Attardons-nous sur certains d’entre eux.

3.1 La Lutte contre l’insécurité, la base du démarrage du pays
On se souvient qu’en décembre 2006, l’école a dû précipitamment fermer ses portes à cause de l’insécurité, de l’augmentation et de l’audace des cas de kidnapping. Ce qui a contraint des haïtiens de l’intérieur à s’expatrier, ou à se terrer chez eux, et des haïtiens de la diaspora à ne pas venir en grand nombre dans le pays à l’occasion des fêtes de fin d’année. Le GOH a dû prendre des mesures drastiques pour faire face à cette insécurité, en donnant le feu vert à la Police Nationale (PNH) et à la MINUSTAH d’agir contre les contrevenants, en prenant d’assaut des « zones de non droit », en procédant à l’arrestation de centaines de bandits connus et inconnus et en poussant la plupart à gagner le maquis. Et la vie a presque repris son cours normal durant toute l’année 2007 avec l’espoir d’une bonne reprise de l’économie si l’on se réfère aux prévisions du DSNCRP.

Malgré tout, il faut constater avec notre ami Yves Bastien[20] que « Pour des raisons qu’il nous serait difficile d’énumérer ici, le secteur privé haïtien a investi pour l’exercice fiscal 2006/2007 l’équivalent de 1,0 milliard de dollars US en République Dominicaine ». Il nous faudrait trouver en 2008 la formule idéale pour inciter les Haïtiens à investir chez eux et arrêter la fuite considérable de nos cerveaux (80% en provenance d’Haïti selon la CNUCED). L’intensification de la lutte contre l’insécurité, entre autre, pourrait grandement aider.

3.2 La lutte contre la corruption, nécessitée rééquilibrage
Le 18 mai 2007, le Président Préval a déclaré la guerre à la corruption. Les réactions ne se sont pas fait attendre[21], création de nouvelles préoccupations pour le Président, rumeurs, tentatives de recrudescences de manifestations de rue pour toutes sortes de raisons, des actes de kidnapping, même le Parlement a réagi à sa façon. Mais, il faut dire que jusqu’à présent, on garde cette impression que la lutte reste partisane et viserait des secteurs jugés, à tort ou à raison, hostiles au GOH. Pour preuve, les dossiers de corruption laissés par le GOH de transition sont encore dans les tiroirs. Malgré tout, le GOH a tenu bon. L’Unité de lutte contre la corruption (ULCC) a sorti une étude sur la perception de la corruption en Haïti en aout 2007 et organisé un atelier sur une « stratégie nationale de lutte contre la corruption ». Les communications et débats ont été largement diffusés par les médias, en particulier la Télévision nationale d’Haïti (TNH). Les informations en relation avec la lutte contre la corruption sont disponibles sur le site du Ministère des Finances et de l’Economie (MEF). Une autre pièce maitresse de cette lutte contre la corruption est le Parquet de Port-au-Prince avec le Commissaire Gassant, un élément conflictuel, qui, selon certains observateurs avisés, fait un travail remarquable. Comme je l’ai écrit dans l’article sur la corruption cité plus haut, il faudrait mener cette lutte contre la corruption dans le cadre de la mise en œuvre de la constitution de 1987.

3.3 Le débat sur la révision constitutionnelle, un recul ?
Malheureusement, le 17 octobre 2007, le Président a fait une sortie contre la constitution de 1987 (perception générale). Il s’en est suivi un débat très enrichissant montrant un grand attachement de la majorité des Haïtiens, qui se sont prononcés, à la Constitution de 1987 qu’ils voudraient certes voir amendée mais selon les modalités prévues par Elle. On est à ce stade encore aujourd’hui. On se demande même si le fait de remplacer, en décembre 2007, le CEP par un autre CEP provisoire avec pour mandat d’organiser les sénatoriales partielles et de réaliser conditionnellement[22] les élections indirectes qui, en principe, permettraient la mise en place du CEP permanent et complèteraient les collectivités territoriales, ne serait pas une tentative de la part du pouvoir actuel de reculer un peu plus la mise en œuvre totale de la constitution de 1987. On dira que cette hypothèse s’apparente à un procès d’intention du pouvoir actuel. C’est vrai certes mais il faudrait des hypothèses de travail réalistes pour avoir des scénarios plausibles d’avenir. De toute manière, l’avenir se chargera de démentir tout le monde.

3.4 Les Travaux d’infrastructures, continuité de l’Etat
Le CCI oblige, le GOH a continué avec les travaux d’infrastructures initiées par le GOH de transition, les travaux sur la Nationale No 1 avec ce pont « le plus long de la Caraïbe », la Nationale No 2, la Nationale No3, la Rte Cap-Ouanaminthe, la réhabilitation de la Rte Gonaives-Gros Morne, certains ouvrages importants sur la Rte Gros morne-Port de Paix avec la réalisation du « fameux »Pont Pendu[23], etc. En outre, le GOH a entrepris des études, le maillage routier national, sur Cayes-Jérémie, Hinche-Cap-Haitien, Port-au-Prince-St Marc, mais aussi des travaux sont en cours au niveau des villes, drainage, adoquinage, assainissement, etc. Au niveau des zones rurales également des travaux sont en cours avec les ministères des TPTC et d’Agriculture, avec le PL480, le FAES. Il faudrait mentionner de plus la réhabilitation des systèmes d’irrigation, d’écoles, de bâtiments publics. « Le secteur de la construction a cru à un rythme de 4,5 %[24], il a été grandement soutenu par les dépenses réalisées dans le secteur des Travaux publics ». Pour une raison ou une autre, ce GOH comme le précédent n’a pas une politique de communication ou du moins pas assez soutenue. Et les gens restent avec cette impression que rien ne se fasse. Mais aussi parce que le GOH a privilégié l’approche Haute intensité d’équipement (HIEQ) par rapport à l’approche Haute intensité de main d’œuvre (HIMO) susceptible d’absorber la masse de chômeurs (plus de 50% de la population active) qu’il y a dans ce pays. Question de choix de politiques publiques, d’approches méthodologiques et de modes d’exécution de travaux.

3.5 La gestion des risques et désastres (DEAN, NOEL et OLGA), une note positive
Par contre en matière de gestion des risques et désastres, le GOH a fait preuve d’une bonne capacité de gestion et de communication. Le Ministre de l’intérieur et son équipe ont été remarquables dans leurs interventions fournissant des informations de première main au grand public. On peut toujours dire qu’il manque encore de coordination dans ce domaine. Mais il faut reconnaitre que le travail réalisé sort de l’ordinaire et qu’il y ait une constance dans le suivi des actions. Les tempêtes DEAN (aout 07), NOEL (octobre 2007), OLGA (déc.-07) et les fortes averses avant, pendant et après leur passage, ont laissé derrière elles plus d’une centaine de morts et des milliers de familles sinistrées. Des dégâts matériels tant au niveau des villes et des zones rurales ont été considérables et ont des répercussions sur la croissance du PIB.

Il est à souligner, selon le DSNCRP, que durant le 20ème siècle, Haïti a été touchée par 34 tempêtes, coups de vents, orages ou cyclones. Environ 80 % d’entre eux ont eu lieu après 1954 et 44% ont été enregistrés 64 dans les années 90. Une catastrophe majeure affecte le pays tous les 5 à 7 ans et une catastrophe internationalement reconnue tous les 2 ans. De par la répétition des impacts et de la dégradation de l’environnement, une catastrophe majeure n’est plus nécessaire pour causer des dégâts importants. La situation est appelée à s’aggraver à l’avenir à cause de l’augmentation et de la concentration des biens exposés, des changements climatiques, de l’avancée de la désertification, de la réactivation des foyers sismiques, etc.

Cumulées, les catastrophes majeures du siècle dernier ont fait plus de 20 000 victimes et plus de 6 millions de sinistrés. Récemment, les événements catastrophiques résultant d’inondations en mai 2004 et de la tempête tropicale Jeanne en septembre 2004, ont provoqué la mort de plus de 5,400 personnes. Dans son ensemble les effets de la tempête Jeanne ont affecté 4% de la population haïtienne (298 000 personnes). Les dégâts se sont chiffrés à plus de 10 Milliards de gourdes (265 millions de dollars) soit 7% du PIB. Les pertes directes (70% du total) sur le patrimoine construit sont considérables : infrastructure urbaines et logements, pertes agricole en termes de production, sols et outils ainsi que dans les infrastructures routières et des communications.

Pour diminuer l’impact des risques et désastres, il est impératif de Positionner la gestion des risques dans les axes stratégiques prioritaires de développement. C’est ce que fait le document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP). Espérons que le GOH en tiendra effectivement compte dans les différentes lois budgétaires (à venir) de la République.




4- Les actions de la communauté Internationale

Les actions de la communauté internationale devraient être vues sous deux angles, la MINUSTAH pour les questions essentiellement sécuritaires et les bailleurs de fonds/ agences de coopération pour les questions essentiellement humanitaires, d’assistance technique, de financement et de développement.

4.1 La MINUSTAH non désirée mais indispensable
La présence de la MINSUTAH, même non désirée par la majorité des Haïtiens[25], est indispensable dans la conjoncture actuelle et est très dissuasive en ce qui a trait aux bandits de toutes sortes et de toutes catégories. La MINUSTAH a beaucoup aidé le GOH et la police nationale dans leur lutte contre l’insécurité, contre la drogue et dans le maintien d’un niveau de paix acceptable dans le pays. Certes le coût annuel de cette opération (500 M USD) permettrait à Haïti de se doter d’une force nationale susceptible de stabiliser le pays comme notre voisin de l’Est, mais voudrait-on se doter d’une telle force nationale, non partisane et consacrée au maintien d’un climat de sécurité permanent en Haïti ? En tout cas, la résolution 1780 de l’ONU prend en compte les sollicitations du Président de la République, pour des taches de développement, de renforcement de la police nationale et un meilleur contrôle du territoire comme le déploiement des forces au niveau des frontières terrestre et maritime d’Haïti avec renforcement des quatre points principaux de passage, Malpasse, Anse à Pitre, Belladère et Ouanaminthe, et déploiement de frégates rapides tout le long des 1500 km de frontière maritime avec la possibilité d’avoir une tous les 100km. En se dotant d’une trentaine de frégates, la frontière maritime serait mieux contrôlée et le rayon d’action de chaque frégate se réduirait à 50 km. Juste un point de vue de profane ! Mais très certainement, les anciens de la marine haïtienne réputés bien formés (selon H Rébu) trouveraient où se caser ou tout moins utiliser leurs compétences.

4.2 Les bailleurs de fonds et les agences de coopération : une présence incontournable
Les bailleurs de fond/agences de coopération appuient le GOH financièrement et techniquement dans l’humanitaire, le relèvement et le développement. Le système des Nations Unies se retrouve dans toutes les branches d’activités qu’elles soient urgentes ou durables. Avec ses multiples agences spécialisées, il influence les moindres faits et gestes du GOH. Aidé par la BID, l’UE, les agences bilatérales et multilatérales, il est partie prenante des moindres politiques et éléments de politiques du GOH. Parfois même, la communauté internationale agit à la place du GOH, même si elle s’en défend vigoureusement. En tout cas, elle s’arrange pour aider le GOH à s’orienter dans la même direction qu’elle. En tout cas, avec environ 80% du financement du budget d’investissement d’Haïti, elle reste et demeure pour longtemps encore un interlocuteur de poids susceptible de faire pencher la balance et capable de faire entendre sa voix. Avec sa présence dans le pays, le GOH ne peut se permettre de ne respecter les engagements pris vis-à-vis d’elle. C’est une donnée qui a toute son importance dans la bataille pour la démocratisation et le développement du pays. Tous les gros programmes en cours dans le pays sont financés par cette communauté internationale, le PRODEP par la Banque Mondiale à hauteur de 40 M USD, le KATA avec CHF financé par USAID à hauteur de 81 M USD, les programmes agricoles du PAIP, PICV2 et PPI2 et d’autres petites actions dans le secteur agricole sont financés à hauteur de 76 M USD par le FIDA et Consorts. Bref, les milliards de USD de projets en cours et à venir seront pris en charge à plus de 80% par la CI. C’est la réalité haïtienne actuelle. Cette donnée, aucun Haïtien digne de ce nom, en particulier les personnes au pouvoir (Exécutif, Parlementaire et Judiciaire), ne devrait l’ignorer.

5- Les efforts du Parlement

5.1 Un bon démarrage en 2006, la volonté d’indépendance
Parallèlement, le Parlement fait un travail remarquable de contrôle du GOH actuel et de lutte contre la corruption tournée en particulier vers la gestion du GOH de transition, et suit de près, ces derniers temps, la question d’insécurité qui s’était considérablement détériorée dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince en novembre et décembre 2006. Tout ceci se fait dans une sorte de cacophonie liée à l’inexpérience, au manque de formation, au manque d’objectivité lié à l’appartenance idéologique et, dans de rares cas, à la mauvaise foi de la plupart des parlementaires. Mais ce qui est louable, c’est la volonté affichée de faire bien le job en toute indépendance par rapport à l’Exécutif.

5.2 Une perception négative du grand public en 2008
Par contre en 2007, le Parlement a perdu un peu de son aura. Son image est ternie par quelques cas de corruption non prouvés. Mais le verni est jeté sur l’institution dans son ensemble et l’a un peu paralysée dans son action. La perception du grand public reste négative par rapport au Parlement contrairement à 2006, et ce, malgré les efforts de certains d’entre eux. Il faut noter aussi les suspicions en relation avec la drogue et autres n’ont pas arrangé les choses. Une impression de conflit latent avec l’exécutif, le renvoi du Ministre de la Culture, un honnête homme, selon l’enquête par l’instance préposée à cet effet, et confirmé par les lettres du Président Préval à l’intéressé et au Parlement en septembre 2007, laissent à l’observateur avisé cet arrière goût amer d’un pays pas au centre des préoccupations nationales. Puisse le Parlement se ressaisir en 2008 et se concentrer sur son travail de contrôle de l’exécutif, en ayant soin de mettre de l’ordre en son sein.

6- La léthargie du Pouvoir Judiciaire

Quant au Pouvoir Judiciaire en cette année 2006, il est tout simplement léthargique. De tout temps, il s’est toujours comporté comme un dépendant du pouvoir exécutif. Le poids de la tradition prime encore aujourd’hui. Malgré la situation d’insécurité liée en grande partie à l’impunité, le pouvoir judiciaire ne réagit pas en conséquence. Le décret pris par le GOH de transition condamnant à perpétuité et aux travaux forcés toute personne impliquée dans des actes de kidnapping n’est jamais appliqué par le pouvoir judiciaire dans les vingt cas de kidnapping déjà jugés depuis 2005. Aucun des condamnés ne l’est à perpétuité et aux travaux forcés malgré leur implication prouvée dans des cas de kidnapping. Les timides réformes entamées par le GOH de transition ont été plutôt maladroites et n’ont pas initié le processus d’indépendance du pouvoir judiciaire par rapport au pouvoir exécutif et en particulier au Ministère de la justice. La nomination de deux Secrétaires d’Etat à la sécurité publique et à la réforme judiciaire par l’actuel GOH et non la mise sur pied de deux Secrétairies d’Etat n’arrange pas les choses. La léthargie du pouvoir judiciaire, les querelles médiatiques entre certains Hauts Gradés de la police et certains Juges du pouvoir judiciaire, la promptitude de l’association des juges à prendre faits et causes pour tous les juges honnêtes ou corrompus, le silence « complice » de cette association par rapport aux cas de corruption dénoncés au sein de la justice , la dénonciation par la population de certains juges et policiers corrompus, la litanie des listes hebdomadaires de présumés kidnappeurs arrêtés dont des récidivistes lâchés par la justice, la confusion entretenue entre le ministère de la justice et le pouvoir judiciaire, etc., sont les principaux faits marquants de l’année 2006 en relation avec la justice. D’où nécessité de se pencher très sérieusement et prioritairement en 2007 sur les structures et les questions liées à la justice au niveau de l’Etat. Et le GOH a pour devoir d’en faire réellement une priorité au cours de l’année 2007. D’autant plus qu’il dispose de moyens budgétaires pour cela.


Les timides premiers pas de 2007
« Ce Pouvoir franchit en 2007 un pas sur le long et difficile parcours conduisant à son indépendance et à sa séparation de l’Exécutif. Trois (3) projets de loi: un sur le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire, un deuxième sur le statut de la Magistrature et le troisième sur le statut de l’École de la Magistrature, sont votés par le Parlement. Parallèlement, l’Exécutif multiplie des gestes en faveur de l’amélioration des conditions matérielles de travail des Magistrats. Après avoir commandité la formation d’une Commission sur la réforme de la justice et une sur la détention préventive prolongée, le Président de la République a visité deux fois en un mois le Palais de Justice ». Bilan 2007.Michel Soukar. Journal Le Matin du 28 déc. 07

En effet, en 2007, une place importante a été accordée par le Pouvoir Exécutif au Pouvoir Judiciaire. On sent aussi une certaine harmonie entre les représentants principaux des deux pouvoirs, le Président de la République et le Président de la Cour de Cassation. La réhabilitation des locaux de la Cour et de certains tribunaux en témoigne. On a parlé de la corruption au sein de la justice, qui est d’ailleurs endémique en Haïti, mais la perception générale, c’est qu’il y a une petite amélioration, même si l’étude publiée par l’ULCC prouve le contraire. Mais là encore, il faudrait noter que les enquêtes ont été menées en 2005, ce sont les résultats qui ont été publiés en août 2007. En tout cas, beaucoup restent à faire au niveau du Pouvoir judiciaire pour permettre à Haïti de contempler cet Etat de droit en remplacement de cet Etat prédateur à la base de tous nos malheurs. Il y va de l’avenir de ce coin de terre. Le GOH a donc intérêt à maintenir la priorité sur la réforme du Pouvoir Judiciaire en 2008 en utilisant effectivement les moyens budgétaires disponibles.

Concluons cette partie avec Michel Soukar : « En 2007, la République d’Haïti compte 18 juridictions de justice avec la mise en fonctionnement de juridictions de Miragoâne et de la Croix-des-Bouquets. Il importe que ces juridictions soient bien pourvues en ressources humaines, matérielles et financières. Il importe également de mettre en place un inspectorat général indépendant pour superviser le travail des magistrats et évaluer leur performance annuelle, en termes de régularité au tribunal, de rédaction de jugement dans les délais requis, de nombre et de qualité et de décisions rendues et infirmées ».
7- Le travail des médias

Ce clin d’œil au média a-t-il sa raison d’être dans un bilan consacré essentiellement à l’action gouvernementale ? S’interrogent certains lecteurs de ce document. C’est oublier le rôle essentiel des médias dans tout processus de démocratisation. Dans le cas d’Haïti, les médias jouent un rôle plus qu’indispensable depuis plus d’une trentaine d’années, surtout la presse parlée, écrite et télévisée. L’intrusion de l’internet et des nouvelles technologies de la communication a provoqué des changements dans notre façon de penser et d’agir. Mais dans le cadre de ce bilan, malgré l’importance des NTIC (cellulaires, fixes environ 3 M d’abonnés[26], Internet, etc.), on se contentera de se concentrer sur la presse parlée, écrite et télévisée.

7.1 La presse écrite
Si l’on fait exception des journaux de province, des magasines, la presse écrite se réduirait aux deux grands quotidiens d’Haïti, Le Matin et le Nouvelliste et aux trois hebdomadaires de la diaspora, Haïti en Marche, Haïti Observateur et Haïti Progrès. Dans ce document, l’intention n’est pas de parler du travail remarquable effectué par la presse écrite durant ces trois dernières années, ni de nous attarder sur les éditoriaux de Marcus Garcia, de Claude Moise, deux fleurons de la Diaspora revenus s’installer en Haïti depuis plus d’une dizaine d’années, mais de signaler deux faits très importants en 2007, les rubriques hebdomadaires de Marc Bazin et de George Anglade dans le journal Le Nouvelliste. Voici des exemples à suivre par nos grandes compétences du troisième âge qui, par peur ou par dégoût, préfèrent emporter avec elles, le moment venu, les masses de connaissances acquises grâce à Haïti. Il y en a qui de temps à autre font des communications sporadiques, on aimerait beaucoup plus d’audace de leur part pour aider leur pays d’une manière ou d’une autre, à l’exemple de ces deux-là, mais aussi et surtout à l’exemple de Ernest Bennett toujours dans Le Nouvelliste.

7.2 La presse parlée
C’est la plus rependue tant en Haïti que dans la diaspora haïtienne. Elle est partout et touche une grande partie de la population, surtout les pauvres en milieu rural (82%). En plus des stations au niveau des grandes villes, les radios communautaires font un travail intéressant en relayant les grandes stations de la Capitale et en diffusant des émissions propres à destination de leur public. Au niveau de la Capitale Port-au-Prince, certaines stations sont très écoutées comme Radio Métropole, Radio Quisqueya, Radio Caraïbes, Radio Vision 2000, Radio Mélodie, Radio Signal FM, en particulier les journaux du matin ou du soir et certaines émissions spéciales, telles celles de Garry Pierre Paul Charles, de Marvel Dandin, de Roro Pharel, les émissions sur Métropole, Vision 2000 tous les matins et hebdomadaires sur Caraïbes, Métropole, Vision 2000, Mélodie et Quisqueya, etc. Au cours de ces dernières années, ces émissions ont beaucoup aidé à la formation et l’information de plus d’un. La presse parlée reste le moteur de la démocratisation. Il faudrait noter aussi la présence de la plupart de ces stations de radio sur le net et qui permettent à tout Haïtien d’être informé sur ce qui se passe dans le pays partout où il se trouve sur la planète terre.

7.3 La télévision
Quant à la télévision, elle est surtout présente dans les grandes villes. A cause de la question d’électricité, elle est très peu présente en milieu rural haïtien, sauf au niveau de certaines maisons ou de certaines représentations d’ONG, de projets, de l’Etat, etc. Il faut noter aussi une bonne pénétration de l’Internet dans ces représentations et des cybers cafés dans le milieu rural, surtout pour des appels à destination de l’étranger. L’effort devrait porter sur la pénétration de ces médias dans le Milieu Rural jusqu’à atteindre un certain niveau de masse critique pour permettre à la majorité de la population d’être mieux informée et mieux formée pour des décisions plus réfléchies et moins instinctives.

8- Le DSNCRP
8.1 L’origine et la définition de ce document
Généralement, « Les Documents de Stratégie pour la Réduction de la Pauvreté (DSRP) sont des instruments mis au point par la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International à la fin des années 1990 pour stimuler la lutte contre la pauvreté et pour encourager les efforts de croissance, en donnant la responsabilité ultime aux gouvernements. Ils représentent une des conditionnalités pour qu’un pays comme Haïti puisse bénéficier de l’initiative d’effacement par la communauté internationale de sa dette externe. En revanche, contrairement aux anciens Programmes d’Ajustement Structurel (les PAS) des années 1980 et 1990, ils partent des réalités spécifiques et des contraintes de chaque pays » réf. Version provisoire du DSNCRP, Octobre 2007.

8.2 Le Processus d’élaboration
Le Processus d’élaboration du DSRP a démarré sous la Présidence d’Aristide. Stoppé en 2004 pour être remplacé par le CCI, il a été repris en 2005 sous le GOH de transition, modifié en DSRPI ou « fenêtre d’opportunité », en septembre 2006, et transformé en DSNCRP selon un processus participatif et inclusif plus large et plus approfondi durant l’année 2007 pour être validé, en septembre 2007, et finalisé, en novembre 2007, jusqu’à sa publication, le 3 décembre 2007, sur le site du Ministère de la Planification et de la coopération externe (MPCE) (http://www.mpce.gouv.ht).

8.3 Les quatre grands défis à relever
Le DSNCRP s’attaquera de manière résolue à quatre grands défis :1) impulser une dynamique forte de rattrapage des Objectifs du Millénaire pour le développement, 2) doter le pays d’une économie moderne, 3) moderniser l’État dans toutes ses composantes institutionnelles, et 4) mettre la créativité et le patrimoine culturel haïtiens au service du développement du pays.


8.4 Les étapes à franchir
Pour répondre à ces défis, le DSNCRP prévoit deux étapes :
(i) Une première étape 2007/2009 avec une croissance lente et modeste (4 %), en respectant les engagements économiques et financiers vis-à-vis du FMI et le maintien du cadre macroéconomique actuel axé sur une gestion saine de l’économie avec des politiques budgétaires et monétaires prudentes pour résorber significativement les grands déséquilibres conjoncturels internes et externes. Selon les prévisions du MEF l’inflation devrait continuer à baisser jusqu’à atteindre 7 % pour 2008/2009.
(ii) Une deuxième étape 2009/2011 visant une croissance accélérée (7.5%)[27] et une plus grande maîtrise du développement social. Cette étape sera marquée par une réorientation du cadre macroéconomique pour le rendre plus incitatif dans les secteurs économiques dont les potentialités pourront être plus facilement exploitées comme : les branches à fort potentiel du secteur agricole, l’agro-industrie, le tourisme et les filières textiles de l’industrie manufacturière qui bénéficieront d’une priorité. Par exemple, la politique de la Banque Centrale ne devrait plus se concentrer uniquement sur la réduction de l’inflation. Elle devrait au cours de cette deuxième étape de la stratégie de développement économique et social cibler également la croissance et la création d’emploi. Ce qui débouchera par conséquent sur une réduction à la fois de la pauvreté monétaire et de la pauvreté humaine.

8.5 Les trois piliers d’une stratégie de croissance et de réduction de la pauvreté
Le Pilier 1 est axé sur les vecteurs de la croissance : l’agriculture et le développement rural, le tourisme, la modernisation des infrastructures, la science, la technologie et l’innovation. Le Pilier 2 est axé sur le développement humain avec l’amélioration significative de la disponibilité des opportunités, dont les services sociaux, offertes aux gens afin qu’ils puissent développer au mieux leurs capacités, en matières d’éducation et formation, de santé, d’eau et assainissement, en accentuant les actions sur les handicapés(800000 personnes), les enfants pauvres(2.7 M), la jeunesse (plus de 50% de la population), le VIH/SIDA (103,669 séropositifs en 2005), l’équité de genre (femmes 52% de la population). Et le Pilier 3 est axé sur la gouvernance démocratique avec le cap sur le nouvel État haïtien, la modernisation de l’État, l’établissement d’un État de droit, plus particulièrement au niveau de la Justice et de la Sécurité, l’aménagement du territoire, le cadre macroéconomique[28]. Tout cela pour arriver à la mise en place des conditions essentielles pour la croissance et la réduction de la pauvreté.

8.6 Le financement, la mise en œuvre et le suivi de la stratégie
La Stratégie Nationale pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté (SNCRP) nécessite pour son opérationnalisation sur la période 2007-2010 un montant de Cent Cinquante Quatre Milliards Cinq Cent Soixante Millions de Gourdes (154, 560, 000, 000.00 gourdes), soit Trois Milliards Huit Cent Soixante Quatre Millions de dollars américains (US$ 3,864,000,000.00). Les coûts de sa mise en œuvre traduisent les besoins de ressources requises. La démarche a consisté à prioriser des actions cibles en vue de créer des conditions propices pour maintenir le pays sur le chemin de la croissance économique et d’atteindre les groupes les plus vulnérables touchés par la pauvreté.

La structure de mise en œuvre et de suivi du DSNCRP comprend deux niveaux : l’un, stratégique, sous le patronage du Président de la République et l’arbitrage du Premier Ministre, l’autre, opérationnel, animé par le Ministère de la Planification et de la Coopération Externe et le Ministère de l’Économie et des Finances. Ces niveaux intègrent les partenaires principaux du développement, à savoir, le secteur privé, les collectivités territoriales, et le secteur de la coopération, incluant les agences internationales et les ONG.

Dans son ensemble, cette structure de mise en œuvre est sous le contrôle ultime du président de la République qui patronne, pour y arriver, une Commission nationale des investissements dont le but est de rechercher la compétitivité des ressources haïtiennes ainsi que la performance des investissements publics, dont ceux concernant les Grands Chantiers. Au sein de cette Commission, le Bureau du Premier Ministre opère un Comité d’arbitrage des priorités dont la tâche centrale est de bien orienter les investissements publics. De même le Ministère de la Planification et de la Coopération Externe et le Ministère de l’Economie et des Finances à travers leurs structures techniques respectives s’assureront de la coordination de l’opérationnalisation, de l’exécution et du suivi des actions retenues de concert avec les Ministères sectoriels à travers les Unités d’Etudes et de Programmation

9- Les perspectives et conclusions pour l’actuel Gouvernement et Haïti

En terme de perspectives, le GOH, en dépit de certaines faiblesses liées en particulier à une grande tolérance vis-à-vis de certains groupes à la base des manifestations de rues et faisant des déclarations incendiaires profitant aux fauteurs de troubles traditionnels (Secteurs drogue, banditisme, politiciens véreux, etc.), au manque de cohérence de l’action gouvernementale, à une léthargie apparente de l’appareil gouvernemental, à la trop grande visibilité de la Présidence par rapport au GOH, dispose encore de sérieux atouts pour atteindre ses objectifs. Le DSNCRP est, en principe, en application. Les programmes sectoriels sont en train d’être finalisés et partiellement en application, des routes et systèmes d’irrigation en construction, l’amélioration de la distribution de l’électricité[29] avec promesse du Ministre des travaux publics de solutionner définitivement ce problème d’ici 2008, etc. Deux bailleurs de fonds (BID et BM) ont finalisé leur processus d’annulation partielle de la dette d’Haïti. Le FIDA a placé Haïti en 2007 dans la catégorie de pays éligibles pour des dons. Bien avant le FIDA, d’autres bailleurs l’avaient déjà fait comme l’UE, l’AFD, etc. Les élections des collectivités territoriales et les élections complémentaires du Parlement Haïtien sont réalisées le 3 décembre 06 et les résultats proclamés, d’où un pas de plus vers la décentralisation. La mise en place d’un autre CEP provisoire en 2007 laisse présager de nouvelles élections en 2008 pour le tiers du Senat. Le Budget 2007-2008 est en application et prévoit un taux de croissance de 4%, un taux d’inflation de 7% en rythme annuel et des réserves de change substantielles. Or, selon l’économiste Kesner PHAREL « Ces réserves sont ainsi passées de près de 70 millions en octobre 2005 à plus de 125 millions en septembre 2006. Elles n’ont pas cessé de croître durant les deux premiers mois du nouvel exercice fiscal (2006-2007) pour atteindre le niveau de 165,5 millions de dollars américains. » Très certainement, elles ont continué à croître durant tout l’exercice 2006-2007 (290 M USD[30]) et durant les trois premiers mois de 2007-2008 pour atteindre ce niveau de trois mois d’importation mentionné dans le DSNCRP.

Et cette conclusion de PHAREL en 2006 reste encore valable aujourd’hui : « En plus d’une lutte farouche contre le phénomène d’insécurité, le gouvernement aura à lancer ses « grands chantiers » consistant à mettre en place les infrastructures nécessaires pour assurer une relance de l’économie réelle et garantir un taux de croissance soutenu de plus de 5 % sur une période assez longue. Un tel défi nécessiterait la participation de différents groupes de la société pour que les fruits de la croissance soient bien partagés, ce qui permettrait de briser le cercle vicieux de la pauvreté dans lequel le pays se retrouve depuis déjà trop longtemps. »[31]

Concluons avec le DSNCRP, le GOH et le Premier Ministre lui-même : « La stabilité politique retrouvée après les élections générales de 2006, la mise en place réussie d’un cadre macro-économique, la diminution de l’insécurité et une croissance économique modeste mais continue depuis quatre ans représentent des acquis importants. Mais, ils sont insuffisants pour faire face à l’ensemble des défis qui interpellent le pays. Le Document de Stratégie Nationale pour la Croissance et pour la Réduction de la Pauvreté (DSNCRP) a été préparé pour affronter ces défis et pour apporter des réponses satisfaisantes aux aspirations de la population haïtienne ».

« Ce document marque un nouveau départ, autant pour le gouvernement de la République que pour l’ensemble de la société haïtienne et nos partenaires de la communauté internationale. Je vous exhorte tous, acteurs étatiques et non étatiques, à vous en approprier pour qu’ensemble, nous puissions espérer réussir le saut qualitatif qui nous fera sortir de la catégorie des pays les moins avancés et qui, par enchaînement, nous donnera les forces nécessaires pour nous propulser au rang des nations émergentes du sous continent américain ».

« Réussir le saut qualitatif », telle est la tâche qui est la nôtre. Il nous faut avoir l’ambition de saisir la fenêtre d’opportunité créée par le retour à la constitutionnalité, la mise en place des Institutions de l’État et la mobilisation des Haïtiens et Haïtiennes pour marquer, de manière irréversible, l’histoire de notre pays ». Et l’ex Premier Ministre D’Haïti aurait dit « à l’impossible nous sommes tenus ».

Notre conclusion, le rêve de tout patriote haïtien
Du cadre de coopération intérimaire (CCI) avec ses 1.4 milliards de USD au document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP) avec ses 3.86 milliards de USD, et surtout les presque 2 milliards annuels de la diaspora haïtienne, le principal bailleur inconditionnel d’Haïti, la valse de ses milliards dans une nouvelle symphonie à l’haïtienne dépouillée des notes discordantes de l’insécurité, de la corruption, et issue de la grande concertation nationale sur la vision harmonisée pour les 25 prochaines années, propulsera la « Perle des Antilles » vers ce « saut qualitatif » dans le concert des nations du monde, étonnées, admiratives et, cette fois-ci, non hostiles[32].


[1] Journal Le Matin du 4 janvier 2007. « Haïti 2004-2006 : bilan et perspectives 2007 ». JR JEAN-NOEL.
[2] La prédominance de l’action gouvernementale sur la présidence contrairement à la situation actuelle où la présidence domine la scène politique et fait ombrage au GOH.
[3] En Haïti, il n’est pas politiquement correct d’avoir les mêmes références que ces prédécesseurs.
[4] En juin 2007, selon UNFPA et information reprise dans le DSNCRP.
[5] Le GOH a pu bénéficier de l’appui budgétaire, financer partiellement les partis politiques dont la majorité n’ont fourni jusqu’à date aucune justification, créer un certain nombre d’emplois assez substantiels.
[6] On n’est pas en mesure de confirmer si le GOH actuel a reçu cet argent ou une partie. En tout cas, le GOH s’est plaint en plusieurs occasions de la lenteur de la CI à honorer ses promesses.
[7] Communiqué conjoint de la Réunion internationale de haut niveau sur Haïti Brasilia, Brésil - 23 mai 2006
[8] Le DSRPD serait prêt à cette date selon le calendrier prévu par le GOH dans le DSRPI, et a été effectivement validé sous le nom du DSNCRP en septembre 2007.
[9] Même si on constate en novembre 2007 une remontée du kidnapping par rapport à l’ensemble des mois de l’année.
[10] Rapport officiel de la cellule de coordination du CCI (19/05/06) par H. Sylvain.
[11] Annexe 2 du document du GOH présenté à la conférence de juillet 2006.
[12] Conférence des bailleurs du 25 juillet 06 et la capacité d’absorption d’Haïti, article signé JR JEAN-NOEL et publié dans le journal le Nouvelliste du 2 Août 06. Ce chiffre est revu à la baisse dans le DSNCRP version novembre 2007.
[13] Conférence des bailleurs du 25 juillet 06, 545 M USD sollicités par le GOH, Article signé JR JEAN-NOEL et publié sur le net le 21 juillet 06.
[14] Même si ces derniers mois on sent un certain réveil de la part du GOH en matière de communication (PRIMA INFO, interventions des membres du GOH à la radio, à la TV, etc.)
[15] Certaines urgences comme l’insécurité, les déchets, l’électricité se font sentir de temps à autre ces deux derniers mois à cause de la gestion à l’haïtienne caractérisée par l’inconstance.
[16] Le vote de budget à temps n’était plus une habitude haïtienne. Ceci a été restauré par le GOH de transition qui, il faut le rappeler, a fonctionné sans parlement. Dans ce cas, c’est le Conseil des Ministres qui se chargeait de voter le budget.
[17] Discours prononcé à l’occasion du 16 octobre 06 par le Secrétaire d’Etat à l’Agriculture, aux ressources naturelles et au développement (SEARNDR), journée mondiale de l’alimentation.
[18] Journal Le Matin du 21 décembre 2007.
[19] La conférence de l’association des Etats du caraïbe (AEC) sur les phénomènes climatiques (nov.2007) et la 23 e conférence mondiale des maires (nov.2007), Réunion ministérielle (octobre 2007), Dialogue international sur la pauvreté et les inégalités (nov.2007) et Festival Étonnants Voyageurs (décembre 2007).
[20] Journal Le Matin du 28/12/07. « Pourquoi faut-il espérer ? ».
[21]Voir article JR JEAN-NOEL publié par Le Nouvelliste « Lutte contre la corruption, nécessité de protection spéciale pour le Président Préval »
[22] Le Parlement étant appelé à se prononcer par une loi, ce qui prendrait un à deux ans au rythme de fonctionnement actuel. La décentralisation effective devrait attendre quelques bonnes années encore.
[23] Cette rivière a été récemment encore le cauchemar des gens de la zone du Nord-Ouest.
[24] Selon Kesner Pharel, Le Matin du 21 décembre 2007.
[25] Selon Firmin rapporté par Daniel Rouzier dans le « Pouvoir des Idées », « l’Etranger n’est pas toujours l’ennemi mais il est toujours l’intrus ». A noter que depuis 1804, les Haïtiens développent une hostilité par rapport à n’importe quelle situation qui ressemblerait à une privation même partielle de sa souveraineté.
[26] Ainsi, selon le CONATEL, le taux de pénétration des lignes en Haïti (nombre de ligne/population) est de 35 %.
[27] Tendance à maintenir jusqu’en 2015 selon le DSNCRP.
[28] L’inflation est contrôlée, de même que le déficit budgétaire; le taux de change pour sa part est aujourd’hui globalement stable. Les évolutions favorables de la balance des paiements, notamment, l’augmentation des transferts privés en provenance de la diaspora haïtienne, l’importance des investissements directs dans le secteur des télécommunications, et la reprise des décaissements de l’aide externe, ont favorisé l’accumulation de réserves de change au cours des 3 dernières années. L’objectif du gouvernement est de faire passer la pression fiscale à 14% en 2011.
[29] Les mois de novembre et décembre 06 ont connu de sérieux problèmes d’électricité avec une certaine amélioration à la fin de décembre 06.
[30] Kesner Pharel, Le Matin du 21 décembre 2007
[31] Journal Le Matin du 29 décembre 06
[32] En 1804, elles se liguaient contre cette nation rebelle de nègres érigée à l’encontre de l’ordre mondial établi, l’esclavagisme. Cette fois-ci, elles l’accompagneront parce qu’elle se conformera par rapport à l’ordre mondial établi, la démocratisation, la régionalisation et la mondialisation.