HAITI : PETROCARIBE, 17 OCTOBRE 2018, LE
TOURNANT(?)
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
31 OCTOBRE 2018
PETROKARIBE n’a pas permis à CEANT d’avoir une période de grâce. Le
nouveau Premier Ministre, dont la première mission est de faire la lumière sur
ce dossier, est submergé dès le départ par le flot entrainé par ce dossier. De
petites manifestations de rue en petites manifestations de rue en relation avec
ce dossier, celle du 17 Octobre 2018 s’est soldée par des centaines de milliers
de personnes dans les rues au cri de « KOTE
KOB PETROKARIBE-A » et, à un degré moindre, de « ABA JOVENEL MOÏSE ». Cette grande manifestation a été plutôt
nationale, en ce sens qu’elle s’est réalisée à travers l’ensemble du pays. C’est
le réveil national contre la corruption avec PETROKARIBE comme symbole. Quand on sait que la corruption est une des
causes du sous-développement de notre pays, 17 Octobre 2018 est-ce le tournant
attendu après le 17 Octobre 1806?
Le 1er Janvier 1804 l’histoire mondiale a connu un tournant.
Haïti sonna le glas du système esclavagiste, une bande d’esclaves alliés aux
affranchis, après avoir battu la plus grande armée de l’époque, celle de
Napoléon Bonaparte de France, érigea le premier Etat nègre du monde sous le
label « Union fait la Force », hérité du « Congrès de l’Arcahaie du 18 Mai 1803 » où les noirs et
les mulâtres se sont jurés de « vivre
libres ou mourir ». Pourtant, deux ans plus tard, le 17 Octobre 1806,
les élites noires et mulâtres s’unirent pour commettre le parricide de notre
histoire en assassinant le principal héro de l’indépendance, l’Empereur Jean
Jacques Dessalines qui prônait une politique de justice
sociale : « Et les noirs dont les pères sont en Afrique n’auront-ils donc rien ? », s’interrogea l’Empereur. Depuis cet assassinat
crapuleux, Haïti a connu un autre tournant, la mise en place d’un système
étatique reproduisant le système esclavagiste qui s’est maintenu jusqu’à date.
Le système politique haïtien issu du 17 Octobre 1806 s’est reproduit de
gouvernement en gouvernement, de fausse révolution en fausse révolution,
de mouvement populaire en mouvement populaire,
avec les mêmes résultats : plus de corruption, plus d’inégalités sociales, plus de misère,
plus de sous-développement, plus de division entre les fils et filles du pays. Le système est à bout de
souffle, ne peut plus se reproduire et manifestement est en phase d’effondrement. C’est ce qui
explique, s’il en était besoin, la couleur du sang des principaux indicateurs du développement du
pays, malgré la présence de ressources naturelles et minières importantes
susceptibles de changer positivement la donne. L’une des causes de cette déchéance est la corruption
qui gangrène le pays à tous les niveaux.
Ce cri « Kotekob Petrokaribe-a » va au-delà de ce dossier.
C’est la nation qui demande des comptes à l’Etat. Mis à part les politiciens,
qui veulent récupérer le mouvement pour accéder au pouvoir à la place de
l’administration actuelle, les gens de tous acabits qui se protègent en criant
plus fort que les autres, et certains profiteurs du système qui ne veulent pas
du procès et font feu de tout bois pour
l’enterrer en faisant des amalgames pour
jeter la confusion, les vrais pétro-challengeurs sont des jeunes de toutes les
catégories sociales sur les réseaux sociaux et dans la rue, les vrais concernés
par ce système qui ne leur offrent plus d’opportunités et ne leur sont plus
d’aucune utilité. En ce sens, PETROKARIBE est porteur de révolution. C’est
pourquoi, il n’y a aucune chance pour bloquer le procès et, encore moins, pour enterrer ce dossier.
Les politiciens, qui réclament le départ de l’administration actuelle,
en utilisant tous les types d’argumentation[1]
et espérant, pour la plupart, accéder au pouvoir pour replâtrer et perpétuer le
système, pourront arriver à leur fin, mais n’arriveront jamais à enterrer le
dossier Petro karibe. Il en est de même pour les profiteurs de l’ombre qui
veulent maintenir le système. L’administration actuelle, si elle veut se
maintenir au pouvoir, doit vraiment faire preuve de leadership, d’imagination
et de créativité pour non seulement donner suite à Petrokaribe, mais aussi et
surtout favoriser une révolution tranquille en lieu et place de la révolution
violente déjà en marche. La révolution violente débouchera sans doute sur le
chaos. Il faut à tout prix l’éviter. On ne peut l’éviter que par la grande
concertation nationale inclusive pour changer le système.
Sur mon blog, il y a plus d’une dizaine d’articles en lien avec la
grande concertation nationale, l’entente nationale, le dialogue national, la
conférence nationale. Il suffit de taper ces mots pour y avoir accès. Toute
cette démarche n’a d’autre objectif que d’éviter le chaos, la révolution
violente, le déchoucage, etc. Car je suis fondamentalement contre la violence
qui, avec la corruption, est responsable de la situation de sous-développement
du pays.
Le 17 Octobre 2018 est clair. Il faut changer radicalement notre manière
d’agir. PETROCARIBE est le catalyseur pour changer les choses. Nos politiciens
au pouvoir et dans l’opposition doivent le comprendre de cette manière et non
comme un accident de parcours et agir en conséquence. Ce n’est pas le départ
d’une administration et son remplacement par une autre qui va apporter la
solution à ce tournant qu’est le 17 Octobre 2018.
C’est vrai que le slogan est « KOTE KOB PETROKARIBE-A » pour
les petro-challengeurs, et « ABA JOVENEL MOISE » pour les politiciens
radicaux qui, d’ailleurs, n’avaient jamais accepté l’élection de Jovenel Moïse
à la présidence. Comme on l’a démontré dans cet article, la demande réelle et
profonde c’est le changement du système. Changer le système ce n’est pas
changer les individus. Si c’avait été le cas, Haïti aurait été, de 1806 à
aujourd’hui, la championne du développement. Admettons que l’administration actuelle soit écartée du
pouvoir, comme Jovenel MOISE et son équipe sont considérés comme « le mal
absolu », la tentation de faire tout sans eux et contre eux fera retomber tôt
ou tard le pays dans les mêmes travers. Or personne ne
pourra enterrer le dossier PETROKARIBE, ni faire pencher la balance d’un côté
ou d’un autre dans le cadre du procès y relatif. En outre, 17 Octobre 2018
marque un tournant : c’est le changement du système actuel en place depuis
1806 qui est en cause. L’opposition à elle seule ne peut se charger de cette
immense tache. L’administration actuelle non plus. Le pays soupire après cette
entente entre nous, cette grande concertation nationale, cette révolution
tranquille au prix de sacrifices de part et d’autre, en lieu et place de cette
grimaçante révolution violente.
Pour y parvenir, il nous faut donc
nous mettre ensemble pour changer le système dans le cadre d’une grande
concertation nationale à partir d’une révolution tranquille, en passant par la
gestion des actions d’urgence (création d’emplois, apaisement social, sécurité,
le procès), la continuation des actions durables dans le cadre des programmes
de développement en cours, en attendant de les coupler avec les résultats de la
grande concertation nationale[2].
[1] Selon eux, (i) 2 M de personnes auraient participé à cette grande
manifestation du 17 octobre 2018, c’est beaucoup plus que les électeurs qui ont élu J. Moïse. C’est
une sorte de désaveu de la politique menée par l’administration Moïse. Donc, ce dernier, qui « est le mal absolu »
doit partir. (ii) La présence de Jovenel Moïse, qui est indexé dans un des rapports sénatorial, serait un obstacle à
la réalisation du procès.
[2] samedi 19 avril 2008 -LES ACTIONS A PRENDRE APRES LA SORTIE DE LA CRISE
HAITIENNE- Rédigé le 1er
Mars 2004
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire