CARNAVAL NATIONAL AUX CAYES ET NOMINATION DU PREMIER MINISTRE, HAITI ATTEND
JOVENEL AU TOURNANT
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
10 MARS 2017
La situation haïtienne , depuis la proclamation
officielle des résultats de la présidentielle, le 3 janvier 2017, confirmant la
victoire de M. J. Moise et celle des résultats des sénatoriales et des
collectivités territoriales (CASECS et Délégués de ville) confirmant une fois
de plus la victoire de PHTK et alliés , le pays était plongé dans un suspens
sur la prestation de serment ou non du
Président à cause de cette accusation de blanchiment d’argent au niveau de
l’instruction.
Les sénateurs LAVALAS et alliés avaient menacé de boycotter la séance en Assemblée Nationale
(AN). L’élection de Youri Latortue (AAA) à la tête du Grand Corps, la
reconduction unanime de Cholzer Chancy (AAA) à la tête de la chambre basse et
la récupération par le CEP du Sénateur Gélin, accusé par le réseau des droits
humains (RNDDH), ont confirmé la mainmise de PHTK et alliés sur le
Parlement et ont favorisé la tenue de l’Assemblée Nationale et la prestation de
serment du Président J. Moise, en dépit du boycott des Sénateurs LAVALAS et la décision
du Parquet de Port-au-Prince, laissant des doutes sur le dossier de blanchiment
d’argent impliquant le président de la
République.
M. J. Moise a donc prêté serment et a prononcé
son discours d’investiture, qui n’a pas eu l’écho nécessaire, car la robe de sa
femme lui a volé la vedette. Que de choses on a dites sur cette robe ! Une
fois de plus, le superflu a pris le pas sur l’essentiel.
De même, lors de la réception offerte par le
Président à notre Raquel Pélissier nationale, classée première dauphine au
concours mondial Miss Univers à Manille aux Philippines, on s’est concentré sur
les boutons de veste du président et sur la manière dont le Président et sa
femme ont tenu leur verre de champagne.
Ces attaques tous azimuts traduisent un
malaise, une certaine non acceptation de
ce couple présidentiel d’origine paysanne dont la présence au Palais National
dérange les bien-pensants ; à ce
qu’il parait, ç’avait été le cas pour le président Estimé. J Moise pourra-t-il
refaire l’exploit d’Estimé ? Toujours est-il que ce couple, qui parait
très uni et soudé, semble planer au-dessus de ces petites choses et prendre très au sérieux leurs rôles et
responsabilités à la tête de l’Etat d’Haïti.
En
effet, le Président, qui a effectué son premier voyage à l’étranger, en Guyane,
a surpris tout le monde en décidant, en dépit des critiques, d’organiser aux Cayes le carnaval national et
en procédant à la nomination du premier
ministre, Dr Jack Guy Lafontant. Et la Première Dame est très active, en
particulier lors de la journée de la femme, le 8 Mars 2017. Elle s’affiche en
tant que telle, certes avec un peu d’hésitation mais lentement et surement,
appliquant la maxime, « ne laisse
pas à demain ce que tu peux faire aujourd’hui », car demain n’appartient
à personne, sauf à Dieu qui a le pouvoir de vie et de mort sur chacun de nous.
La disparition de 4 illustres haïtiens dont René
Préval, le père spirituel d’Haïti en matière politique
En attendant la ratification par le Parlement
du premier ministre nommé, Haïti a enregistré la disparition subite de Thierry
Gardère, le PDG de Rhum Barbancourt, de celle du Président René Garcia Préval,
la mort du Sénateur Julio Larosilière et celle de Joe Damas, le célèbre animateur
du Konpa direk à Radio Métropole.
Ce sont des hommes d’influence qui ont marqué
leur passage sur la terre d’Haïti, dans l’agro-industrie, la politique et la
culture. Ils se sont distingués dans leur sphère d’action et demeurent des
modèles à suivre, en particulier, René Préval. Ti René comme la plupart d’entre
nous le surnomme affectueusement est un grand homme, un homme très modeste d’une
très grande simplicité, plutôt honnête, un homme de dialogue et d’ouverture, un
fin politicien influençant la politique haïtienne depuis 1991 et ayant su « nagé
pou sôti » dans l’imbroglio politique de notre pays. Son départ laisse un
vide difficile à combler. Personnellement, je le considère comme le père
spirituel d’Haïti en matière politique. Un véritable modèle à suivre!
Ces hommes d’influence ont choisi de partir
après cette grande fête culturelle, où le barbancourt a coulé à flot avec son
lot de gouyad et de grivoiseries , et où la politique, en dépit de la
nomination du Premier Ministre, a été reléguée au second plan, comme pour nous
dire qu’ « apré dans tambou
lou ». De la joie à la tristesse pour ce peuple « qui chante et qui danse », en toutes circonstances, dans le bonheur,
dans le malheur, et même dans la misère la plus abjecte.
Carnaval national aux Cayes, Sweet Mickey s’en
est donné à cœur-joie
Cette année, le carnaval était aux Gonaïves, à
Croix-des-Bouquets, à Pétionville, à Port-au-Prince, à Carrefour, à Jacmel et
aux Cayes où a lieu le carnaval national, objet de débats, lieu de règlement de
comptes entre groupes musicaux (polémique), entre Sweet Micky et les
deux journalistes de renom[1]
qui ne lui ont pas fait de cadeau durant sa présidence. Le tout puissant Micky,
en tant que revanchard, s’en est donné à cœur-joie pendant quatre jours[2].
Ce qui a enflammé les réseaux sociaux et fait ressortir notre hypocrisie par
rapport à ce malaise profond de la société haïtienne qu’incarne parfaitement
Sweet Micky décrit par Samy Janvier [3]
et qualifié de narcissique par le Dr Buteau à l’émission de RAMASE de Radio
Caraïbes du samedi 4 Mars 2017.
Cette grande fête culturelle a connu 0 mort et
quelques blessés légers. Les parties artistiques de ce grand bal populaire ont
été formidables, à mon humble avis. Les chorégraphies ont été exécutées à la
limite de la perfection par des jeunes des deux sexes, et surtout des jeunes femmes
qui se sont défoncées pour nous offrir des spectacles à couper le souffle. Que
c’étaient beaux ces habits inspirés de nos traditions!
Ce qui nous a fait oublier, l’espace de trois
jours, nos incertitudes, nos questionnements, ce redémarrage qui viendrait
arrêter la dégringolade de la gourde par
rapport au dollar (environ 70 G), combattre l’inflation (14.1%) qui grignote la
maigre économie familiale nous plongeant davantage dans cette insécurité
alimentaire. Ajouter à tout cela, les manifestations violentes de l’Arcahaie
pour cette affaire de délimitation de la commune de l’Arcahaie par rapport à
celle de Montrouis. Ces manifestions ont eu des conséquences désastreuses sur
l’économie, en particulier sur le Grand Nord : un seul exemple parmi tant
d’autres, Gonaïves est dans le noir depuis une semaine à cause du mazout qui
n’a pu être acheminé depuis le lancement de ces manifestations qui ont une
forte odeur de manipulations politiques. Ce qui nous ramène à la question politique.
La nomination du Premier Ministre, Dr Jack Guy
Lafontant
Durant la période carnavalesque, cette
nomination surprise n’a pas défrayé la chronique. On était plutôt surpris par la décision du Président Jovenel Moïse.
Tous les noms qui circulaient sur les médias n’ont pas « assisté
tirage » (un créolisme). Dr Lafontant a déposé ses pièces au Parlement.
Alors que le PHTK et alliés ont la majorité au
Parlement, on n’a pas cette impression que cette ratification se fera sans
problème comme c’a été le cas pour Enex Jean-Charles. A entendre nos
parlementaires, on a même l’impression que le choix du premier ministre en la
personne du Dr Lafontant dérange. Est-ce que ce qui s’est passé avec Dr Fritz
JEAN va se répéter ? Attendons voir.
Certes
M. Moïse a réuni les élus du PHTK sur la question. Mais les réponses des
élus aux journalistes ne sont pas claires et sont assez évasives. Et M. Moïse
lui-même semble s’occuper d’autres choses plus urgentes comme la situation à l’hôpital
général, la résolution du problème de passeports à la direction de
l’immigration. En tout cas, des
négociations en sous mains semblent en cours avec le parlement pour la
constitution du Gouvernement. Ce qui s’est passé sous le gouvernement de
Privert risque de se répéter sous l’administration Moïse : Le Parlement
devient partie prenante de l’Exécutif. Ce qui créerait une confusion dans les rôles et
responsabilités des institutions étatiques. Certes il est important que les
alliés se concertent pour choisir le personnel gouvernemental, mais il est
impératif qu’il n’y ait pas de confusion de rôles et responsabilités au niveau
de ces deux institutions étatiques.
La collusion entre le Parlement et l’Exécutif
Depuis la prise du pouvoir par notre ami
Privert, alors Président du Sénat, le Parlement veut continuer à mener la danse
au sein de l’Exécutif. Dans le passé, il y a eu collusion entre le Parlement et
l’Exécutif pour la gestion de la chose publique, sous l’administration
Aristide, sous l’administration Préval et même sous l’administration Martelly,
qui n’avait que trois (3) élus au Parlement. Mais sous l’administration
Privert, cette pratique de partage direct du pouvoir exécutif est devenue la norme.
En dépit de tout, les parlementaires n’ont pas fait de cadeau à Privert.
Celui-ci, qui était un des leurs, a su jongler pour arriver à accomplir sa
mission. M. Moïse, qui est novice en politique, aura-t-il cette capacité
d’évoluer en eau trouble et de pouvoir accomplir sa mission et délivrer la
marchandise ? On le dit super intelligent, lui qui a su se défaire de la
tutelle de Martelly pour émerger en tant que leader durant la longue campagne
électorale et construire un discours propre qui a séduit une bonne partie de
l’électorat, ce que ses compétiteurs immédiats n’ont pas su faire, sauf
Jean-Charles Moïse. Il serait, selon certaines personnes qui l’ont côtoyé, un
Soulouque démocrate. Il serait en mesure
de gérer les divers secteurs et forces qui ont favorisé son élection à la
présidence, de les neutraliser même, parmi lesquels les parlementaires. Tout
ceci reste à prouver. L’avenir dira le reste.
En attendant, le Président Jovenel Moïse doit
faire plus que d’organiser le carnaval national aux Cayes et désigner son
Premier Ministre en la personne du Dr Jack Guy LAFONTANT. Il doit s’assurer de
la ratification de sa déclaration de politique générale (DPG) et de son
gouvernement d’autant que le PHTK et alliés sont majoritaires au Parlement. En
tant que leader élu sous la bannière de PHTK, le Président ne peut se permettre
un échec à ce niveau sous peine de jeter des doutes sur sa capacité à gérer le
pays. Haïti, en proie à des doutes depuis le tremblement de terre et le passage
de Matthew, attend donc Jovenel au tournant.
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