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lundi 26 avril 2010

HAITI : COMBINAISON D’OPTIONS DE DÉVELOPPEMENT, LE DERNIER COMBAT DE L’INTELLIGENCE COLLECTIVE HAITIENNE

HAITI : COMBINAISON D’OPTIONS DE DÉVELOPPEMENT, LE DERNIER COMBAT DE L’INTELLIGENCE COLLECTIVE HAITIENNE

Jean Robert JEAN-NOEL

25 avril 2010

En 2003, j’avais développé une thèse un peu farfelue pour démontrer à mes amis découragés que notre chère Haïti ne pourra pas périr. Cette thèse était basée sur quatre options de développement : l’option haïtienne, l’option dominicaine, l’option régionale et l’option internationale. J’en avais fait un article qui a connu un certain succès à l’époque (avril 2004), « Combinaison d’options de développement, la porte de sortie pour Haïti ? » (Réf. Le Nouvelliste, et www.jrjean-noel.blogspot.com , avril 2008).

Depuis 2004, c’est la combinaison d’options de développement qui est en application avec la présence des troupes étrangères dans le pays. En témoignent le cadre de coopération intérimaire (CCI) sous les gouvernements de Latortue et d’Alexis, le document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP) sous les gouvernements d’Alexis, de Pierre-Louis et de Bellerive, et le plan d’action pour le relèvement et le développement national d’Haïti (PARDNH) sous le gouvernement de Bellerive et très certainement sous les gouvernements à venir jusqu’en 2030 où Haïti deviendra ce « pays émergeant » et « moderne » selon la vision de l’actuel Gouvernement.

La « souveraineté limitée » ou contrôlée

En effet, depuis 2004, la communauté internationale (CI), sous l’obédience de la Banque mondiale, s’est associée avec les gouvernements haïtiens pour produire les cadres de coopération en tenant compte de leurs points de vue. A ces exercices ont participé, à coté des experts étrangers, les cadres haïtiens de l’administration publique, de la société civile et du secteur privé, avec en prime un certain niveau de validation nationale dans certains cas. Il faut noter et souligner que ces documents sont produits selon les modèles conformes aux « exigences de la communauté internationale et surtout des bailleurs de fonds ». C’est ce que j’appelle la combinaison d’options de développement.

Alors que la combinaison d’options de développement se reflète dans ces cadres de coopération dont les projets/programme s’exécutent à travers des unités de coordination de projets (UCP) créées au sein des structures étatiques, des organisations non gouvernementales (ONG) et des agences de coopération internationale (ACI), les bailleurs de fonds ont mis en place toute une structure de contrôle interne et externe pour s’assurer de limiter la corruption et d’obtenir des résultats, tout ceci doublé d’un ensemble de conditionnalités les unes plus contraignantes que les autres. Ces conditionnalités sont très souvent à la base des retards enregistrés dans la mise en œuvre des projets et programmes et, dans certains cas, des échecs criants enregistrés. C’est l’ère de la « souveraineté limitée » pour répéter le mot du Président Boniface Alexandre.

L’arme de la corruption

Malgré le contrôle exercé par les bailleurs et les efforts du GOH pour la mise en place et le renforcement des structures haïtiennes de contrôle de la corruption, l’ULCC, l’UCREF, la commission nationale des marchés publics (CNMP), la Cours Supérieure des Comptes et des Contentieux administratifs (CSCCA), Haïti occupe toujours les dernières places dans les derniers classements de transparency international. A force de nous répéter que nous sommes corrompus et nous d’utiliser l’arme de corruption contre nos adversaires politiques, et le plus souvent sans preuve, la perception a fini par devenir réalité. J’ai sorti trois articles sur l’indice de perception de la corruption pour demander aux haïtiens de ne pas utiliser le mot corruption sans preuve. Au contraire, on ne fait que cela. Rappelez-vous les 197 M USD : c’est la remise sur pied du CNE, c’est en partie l’augmentation de la production agricole en 2009 de 45% à 53% (CNSA), soit un poids de 8% dans la croissance de 2.9% du PIB de 2009 (MEF). Pourtant, malgré le rapport illustré fourni au Parlement, ces 197 M USD ont été utilisés par le Senat pour renvoyer la Première Ministre, Mme Pierre-Louis. Les leaders politiques utilisent ces 197 M USD pour taxer le GOH de corrompu. Quant à la communauté internationale, elle sait très bien que son argent est plutôt « bien géré » par les UCP et les ACI. Le peu qui passe directement par le GOH a, depuis 2004, plutôt eu une gestion acceptable aux yeux de la CI qui, à travers le FMI, délivre des certificats de satisfécit au GOH, au point de procéder à l’annulation de plus d’un milliard de la dette d’Haïti en juin 2009. Pourtant, lors du voyage du Président Préval à Washington (mars 2010), il y a eu toute une orchestration autour de la corruption au sein du GOH au point qu’il a du se défendre du bec et des ongles par rapport à cette perception. Cette orchestration n’était pas innocente. Elle visait, à mon avis, à forcer la main au GOH pour accepter des mécanismes inédits dans le cadre du nouveau cadre de coopération exigé par la reconstruction, une sorte de grignotement sur la souveraineté déjà limitée de l’Etat d’Haïti.

« La tutelle consacrée »

Avec ce nouveau cadre de coopération d’environ 34 milliards d’USD, le PARDNH 2010-2030, pour lequel les bailleurs se sont engagés lors de la conférence de reconstruction de New York (31 mars 2010) à hauteur de 9.9 milliards d’USD sur 10 ans, les deux parties, le Gouvernement Haïtien (GOH) et la Communauté internationale (CI) se sont donnés deux outils inédits jusqu’ici en Haïti : la commission intérimaire de reconstruction d’Haïti (CIRH) coprésidée par l’ex-Président, Bill Clinton, l’Envoyé Spécial du Secrétaire Général de l’ONU, et le Premier Ministre, Jean Max Bellerive, et le fonds fiduciaire multi-bailleurs (FFMB) sous la responsabilité de la Banque Mondiale (BM). Cette fois-ci, les deux parties ne sont pas seulement liées par des accords internationaux ratifiés par le Parlement mais la combinaison d’options de développement est consacrée par la fameuse loi prolongeant l’état d’urgence de 18 mois et votée séparément par les deux chambres. C’est la « tutelle consacrée » selon certains. D’où les réactions nationalistes de l’opposition accusant le pouvoir de « vendre le pays » et les explications des gouvernants se défendant d’être sous tutelle. D’ailleurs, le Président n’a-t-il pas le droit de véto consacré par cette même loi ? Donc peut-être pas tutelle totale mais souveraineté encore plus limitée qu’avant.

En tout cas, de la « souveraineté limitée » à la « tutelle consacrée », il est clair que le pouvoir ne pouvait pas grand-chose face à cette puissance de la communauté internationale qui a promis 9.9 milliards d’USD et qui avec patience a tissé sa toile d’araignée pour nous amener à cette extrémité depuis des années. Rappelez-vous les divers accords d’ajustement structurel (Marc Bazin, in Le Nouvelliste). Au point que la plupart d’entre nous condamnant publiquement cette occupation, l’acceptent en privé ; il suffit d’écouter la réaction du peuple pour comprendre notre niveau de déchéance par rapport à certaines valeurs inculquées par nos pères fondateurs. De toute manière, à ce stade, être sous tutelle ou pas, cette reconstruction se fera avec ou sans nous, car la CI ne pourra plus se permettre d’échouer cette fois-ci. Faut-il laisser faire pareil ou se battre pour qu’elle ne soit pas que physique et/ou saupoudrage ?

Les actions à entreprendre

Le PARDNH renferme des éléments théoriques pour éviter cela : la refondation territoriale, la refondation économique, la refondation sociale et la refondation institutionnelle. Et puis, il y a ce document « Haïti Demain » produit par le comité interministériel à l’aménagement du territoire (CIAT) qui favoriserait une mise en œuvre harmonieuse du PARDNH. Il en est de même pour le document du secteur Privé, le plan stratégique de sauvetage national (PSSN), le document de la FONHDIIAC. Prenons l’exemple du plan d’investissement du ministère de l’agriculture (environ 800 M USD) qui est partie prenante du PARDNH mais qui demeure essentiellement haïtien et qui, du 22 au 24 avril 2010, a été l’objet de validation dans le cadre d’un débat national. Pour les grandes réalisations physiques, elles pourront être fournies clé en main au GOH selon le modèle de TAIWAN. En témoignent la route Cayes-Port-à-Piment, les stadium de Gonaïves, de St-Marc et du Cap-Haïtien, ce sont des réalisations clé en main de la Firme Taïwanaise, OECC. Cependant on peut penser les choses physiques, les concevoir avec l’étranger même s’il les exécute. Par contre, pour le soft, on peut influencer les choses à notre manière et déboucher sur l’essentiel, l’éducation, la santé, etc. A nous de jouer à l’intelligent! Il ne faut pas non plus l’accaparement de tout par un petit groupe, un petit clan. Nous parlons ici de cette intelligence collective qui nous avait permis d’arracher notre indépendance le 1er janvier 1804. C’est cet exploit qu’il faudra renouveler.

En guise de conclusion, je reprends, en y ajoutant quelques nuances, mes conclusions d’avril 2004. « C’est l’occasion pour nous autres haïtiens sans exclusive qui maîtrisons la question et le terrain et qui sommes conscients de la situation catastrophique héritée de nos deux cents (200) ans de manque de développement et de ce terrible tremblement de terre du 12 janvier 2010, de saisir cette opportunité en faisant taire nos intérêts mesquins, en plaçant la question nationale au centre des débats, en défendant nos points de vue face à l’international et en imposant de manière intelligente notre option de développement à la leur comme on a commencé à le faire dans le PDNA et le PARDNH.

Dans cette nouvelle conjoncture, c’est notre option de développement combinée avec celle de la communauté internationale qui nous ouvrira la porte du salut. Comme l’a dit George Michel, face à l’occupant, Haïti a toujours gagné la bataille politique. Faisons en sorte que cette fois-ci la victoire débouche sur le développement intégral de notre pays pour que le citoyen haïtien compétitif puisse évoluer correctement au sein de son organisation et dans son environnement naturel régénéré et équipé d’infrastructures indispensables avec des moyens économiques et financiers suffisants et grâce à une gouvernance politique responsable et incitatrice. Tout un programme, n’est-ce pas ? »

Ce programme pourrait intégrer le PARDNH lors de sa mise en œuvre durant ces 20 prochaines années et surtout durant les 18 prochains mois.

Alors, Haïtiennes et Haïtiens au sein de l’appareil étatique, de la société civile, du secteur privé et des collectivités territoriales, de la diaspora, conspirons pour une refondation d’Haïti à la mesure de nos ambitions et surtout des ambitions de nos pères fondateurs. Ne soyons pas seulement « intelligents individuellement », comme me disait un ami étranger, mais aussi et surtout collectivement. Cette intelligence collective haïtienne a été imbattable avec des analphabètes en 1803 face à l’adversité des puissances de l’époque, elle le sera encore plus en 2010 avec des haïtiens bien formés tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, et, cette fois-ci, avec l’appui de la communauté internationale. Avec la combinaison d’options de développement comme choix imposé et/ou accepté, la refondation de l’Etat d’Haïti passe nécessairement par l’intelligence collective haïtienne. C’est le passage obligé pour la réussite de ce dernier et long combat pour le développement durable d’Haïti. Etes-vous prêts ? Alors à l’assaut ! Sa Ki…

mercredi 31 mars 2010

HAITI : APRES LE SEISME, LA CONFERENCE DE RECONSTRUCTION DE NY

HAITI : APRES LE SEISME, LA CONFERENCE DE RECONSTRUCTION DE NY
Jean Robert JEAN-NOEL
31 MARS 2010

Le cadre de coopération intérimaire (CCI) 2004-2007 (1.4 mrds USD) avait provoqué son lot de conférences sur Haïti, de juillet 2004 à Washington à novembre 2006 à Madrid. Le document stratégique national pour la croissance et la réduction de la pauvreté (DSNCRP) 2008-2011 (4.3 mrds USD) n’a eu droit enfin de compte qu’à une seule conférence, celle de Washington d’avril 2009. Le plan d’action pour le relèvement et le développement national (PARDN) 2010-2030 (34.48 mrds USD) concocté après le 12 janvier 2010 par le Gouvernement Haïtien (GOH) avec l’appui de la communauté internationale (CI) connait sa première conférence, celle de New York, ce 31 mars 2010, au siège des Nations Unies, dont l’objectif est de trouver 3.8 mrds d’USD pour les 18 premiers mois de mise en œuvre du PARDN.

Pour arriver à cette date, il a fallu entreprendre toute une série d’actions tant au niveau du GOH, de la CI et de la société civile haïtienne de l’intérieure et de la diaspora. Dans le cadre de cet article, nous allons essayer de manière objective de refaire le cheminement suivi par ces acteurs impliqués dans le processus de refondation de notre pays.

La catastrophe du 12 janvier 2010

Le séisme du 12 janvier 2010 a frappé Haïti au niveau de deux départements, l’Ouest et le Sud-est. Les villes les plus touchées sont la capitale Port-au-Prince, Léogane, Carrefour, Gressier, Petit Goâve, Grand Goâve, Delmas, Tabarre, etc. pour l’ouest, et Jacmel pour le sud-est. « Plus de 300 000 décès et autant de blessés selon les autorités nationales, 1,5 millions de sans abris et de déplacés, des familles brisées, des orphelins sans ressources ». (PARDN mars 2010). Les dommages et les pertes, dont on mesure chaque jour davantage l’ampleur, sont estimés à près de 8 milliards de $US (environ 120% du PIB de 2009) selon l’évaluation des pertes et des dommages produites au cours des dernières semaines. Selon la même étude, les besoins sont de l’ordre de 11, 5 milliards de $US. (PDNA, mars 2010).

Les actions

Le peuple
Certaines actions sont entreprises tout de suite après les premières secousses par le peuple haïtien lui-même dans le cadre d’une solidarité inter haïtienne extraordinaire permettant de sauver beaucoup plus de vies que toute la communauté internationale avec sa batterie de technologies de toutes sortes, de personnes et de chiens entrainés. Cette solidarité s’est aussi manifestée dans la récupération des cadavres. Selon Jacky Lumarque, recteur de l’Université Quisqueya, sur radio mélodie, un jeune de 15 ans a permis de sauver des vies et dégager des cadavres des décombres de l’université. De plus, on a constaté une grande solidarité dans le partage d’un morceau de pain, d’un récipient d’eau, d’une couche. Il faut signaler qu’actuellement cette solidarité a tendance à s’effriter.

La diaspora haïtienne

Elle va entrer en scène des les premières nouvelles du séisme en interagissant par la seule station qui émettait, Signal FM. Elle va se mobiliser comme elle ne l’a jamais fait au paravent. Et aussitôt les communications rétablies, les maisons de transfert et banques opérationnelles, elle va puiser dans ses réserves pour venir en aides aux parents et amis de l’intérieur. Son action combinée avec d’autres facteurs allait permettre une bonne appréciation de la gourde par rapport au dollar américain. Dans sa composante intellectuelle, elle fera des propositions formelles à la nation moins d’un mois après le séisme sans tenir des nombreuses réflexions émises sur le net. Actuellement, elle continue de peaufiner des plans pour la refondation d’Haïti.

Les politiciens

La plupart des politiciens tout en critiquant le GOH ont fait des propositions intéressantes et d’autres come Rébu ont entrepris des actions en apportant les premiers soins, en hébergeant des personnes, en les nourrissant. D’autres enfin ont gardé le silence. Durant ces dernières semaines, ils sont présents sur les ondes pour s’opposer aux « décisions unilatérales du GOH », au plan de reconstruction réalisé « sans concertation », à la proposition de la loi d’urgence du GOH. De même, quelques semaines auparavant, ils s’opposaient à l’idée du Président d’organiser les élections à la fin de cette année. Mis à part le Plan stratégique de sauvetage national (PSSN) auquel la plupart des politiciens ont collaboré, il n’y a pas à proprement parler de plan de refondation du pays proposé par les partis politiques. Il faut signaler aussi que le Parlement n’est pas resté inactif durant cette période sous étude. Il n’y pas eu de démarche dans le sens d’une proposition pour la refondation de l’Etat mais seulement un souci de mettre un GOH à la hauteur de la situation avec intégration de nouvelles personnalités.

Le Gouvernement

Quant au GOH, malgré une grande hébétitude durant les premières heures après le séisme, il a su réagir en apportant des secours, en procédant aux enlèvements des cadavres qui jonchaient les rues, en dégageant les espaces de circulation, en assurant une certaine coordination par l’utilisation de ce qui reste de l’appareil gouvernemental et par la mise en place de certaines commissions, en assurant une certaine gestion de l’aide internationale avec l’appui de la CI, les USA en tête, en déclarant un peu tardivement l’état d’urgence. Le Ministère de l’agriculture a sorti un programme post-sismique et le GOH a lancé quelques jours plus tard le processus PDNA tout en continuant à gérer les urgences humanitaires. Le Premier ministre, le Président et les ministres ont reçu de nombreuses délégations et personnalités étrangères et ont effectué des voyages à l’étranger pour plaider la cause de la reconstruction. Il faut noter que le GOH a posé, à mon avis, quatre actions importantes : (i) la gestion des urgences humanitaires avec l’appui de la CI,(ii) la préparation de la phase de relèvement immédiat avec la réalisation d’un manuel d’opération pour harmoniser les travaux de création d’emplois ou HIMO en vue de faire face à la prochaine saison pluvieuse et/ou cyclonique et de favoriser l’autonomisation des victime du séisme et des familles en insécurité alimentaire, (iii) l’élaboration du PDNA et du PARDN, l’élaboration par le CIAT du plan d’aménagement du territoire publié sous le titre Haïti Demain, et (iv) l’organisation avec ses amis de la CI de cette conférence du 31 mars à NY.

La société civile

Quant à la SC organisée, elle a mis du temps à réagir. La Fondation Haïtienne pour le développement intégrale latino-américain et caribéen (FONHDILAC) a sorti son plan de refondation le dimanche 7 février 2010, le plan stratégique de sauvetage national est sorti à la même époque. D’autres propositions allaient suivre dont celles du secteur privé très récemment. C’est à cette époque que va être lancé le processus d’élaboration du PDNA avec l’appui de la communauté internationale et de certains cadres de la SC. Près de deux cents cadres haïtiens allaient participer à cet exercice qui, selon les TDR, devaient déboucher sur 3 extrants dont un plan stratégique de développement national. Ce plan stratégique est actuellement connu sous le vocable PARDN et est l’objet de cette conférence de reconstruction d’Haïti du 31 mars. Le secteur privé haïtien, qui a présenté tardivement son plan , participe à cette conférence, assurément sur la promesse du GOH de prendre en compte ses recommandations et de les intégrer dans le PARDN. En tout cas, avant son départ pour cette conférence, le Président a fait savoir à la nation que le plan qui va être présenté est celui de tous les haïtiens.

La communauté internationale

Dès le lendemain du séisme, elle commençait à se manifester par l’intermédiaire de ses représentants sur place en dépit des pertes énormes subies. Le Président Fernandez de la République Dominicaine s’est invité lui-même. Il était accompagné de toute l’armada humanitaire dominicaine. Ces dominicains ont mis la main à la pate à la manière des cubains qui étaient déjà sur place. Avec l’arrivée massive des autres, on a eu tendance à oublier ces actions de nos voisins immédiats. Cette solidarité internationale s’est manifestée et se manifeste encore dans toutes les actions entreprises par Haïti. La CI était haïtienne durant les premiers jours de la catastrophe. Ella n’a jamais cessé son appui depuis les urgences humanitaires, l’élaboration des dossiers, la préparation de la phase de relèvement jusqu’à la phase de reconstruction. Elle s’est investie sans relâche dans le PDNA, le PARDN, est omniprésente dans cette conférence, et sera partie prenante de la mise en œuvre de ce PARDN.

Plan d’action pour le relèvement et le développement national (PARDN)

C’est un des résultats de l’évaluation conjointe des besoins post-désastre qui, à la demande et sous la direction du Gouvernement de la République d’Haïti, a été conduite du 18 février au 24 mars en Haïti, avec le soutien technique de l’ONU, la BID, la CEPAL, la Banque Mondiale et la Commission Européenne.

Voici la vision telle qu’exprimée par le Premier Ministre lors de lancement du processus d’élaboration du PDNA : voir Haïti comme un pays émergeant d’ici 2030, société de la simplicité, équitable, juste et solidaire, vivant en harmonie avec son environnement, sa culture et une modernité maîtrisée où l’État de droit, la liberté d’association et d’expression et l’aménagement du territoire sont établis, dotée d’une économie moderne, forte, dynamique, compétitive, ouverte et à large base territoriale, où l’ensemble des besoins de base de la population sont satisfaits et géré par un État unitaire, fort, garant de l’intérêt général, fortement déconcentré et décentralisé.

Les priorités du Plan d’Action Post Séisme, qui s’articulera autour de vingt (20) chantiers et qui nécessitent 34, 481, 000,000.00 USD, sont de faire face à l’urgence dans l’immédiat, redémarrer les activités économiques gouvernementales et sociales, réduire la vulnérabilité du pays face aux catastrophes naturelles et relancer Haïti sur la voie du développement.
Plus spécifiquement : (i) Assurer la préparation de la saison cyclonique et des pluies 2010, particulièrement pour les populations déplacées ; (ii) Inscrire systématiquement les aspects environnementaux dans toutes les décisions liées au processus de redressement et de développement ; (iii) Assurer l’intégration de la gestion des risques et des désastres dans toutes les activités de reconstruction pour tous les secteurs ; (iv) Mettre en place une politique active de l’emploi en appuyant les micro-entreprises, en renforçant la formation professionnelle, en intégrant les principes de haute intensité de main d’œuvre (HIMO) et en associant l’entreprenariat haïtien, la main d’œuvre locale ainsi que les communautés ; (v) Placer de façon accrue l’État comme prestataire de services de base déconcentrés et décentralisés, tout en assurant un renforcement substantiel de son autorité auprès des entités non étatiques. A cet égard, amorcer la création d’un filet de protection sociale pour les plus démunis ; (vi) Décongestionner la zone métropolitaine de Port-au-Prince par une politique de déconcentration et de décentralisation en mettant en place des incitations pour la sédentarisation de la population autour de pôles de croissance ; (vii) Continuer d’apporter assistance et soutien à 1.3 million d’haïtiens qui ont tout perdu et à 3 millions de personnes affectées par le désastre, tout en accélérant le processus de relèvement pour éviter une dépendance vis-à-vis de l’aide extérieure.

Ce plan se décline en deux temps. Soit l’immédiat qui porte sur une période d’une année et qui constitue la période de transition avant que tout le mécanisme de la refondation de l’État ne soit opérationnel. Le second temps s’ouvre sur une perspective temporelle de dix ans, permettant ainsi de tenir compte de trois cycles de programmation des Stratégies Nationales de Croissance et de Réduction de la Pauvreté.

C’est pourquoi le Plan propose la mise en place d’une Commission intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti (CIRH) et d’une Agence pour le Développement d’Haïti (ADH) ainsi qu’un Fonds Fiduciaire Multi-Bailleurs (FFMB) qui permettront l’instruction des dossiers, la formulation des programmes et projets, leurs financements et leurs exécutions, tout cela dans une approche coordonnée et cohérente.

Le Plan cible prioritairement les activités financées par l’aide publique au développement (APD) puisqu’il s’agit d’une conférence de donateurs. Il laisse cependant une large place aux autres intervenants du secteur des affaires, du secteur privé et des ONG qui sont des opérateurs incontournables du renouveau d’Haïti. Il propose un cadre macro-économique axé sur la croissance et un train de mesures qui faciliteront la création de richesses par le secteur privé.

En guise de conclusion, le PARDN contient une série de thématiques qui feraient partie de n’importe quel plan haïtien. Le document d’aménagement du territoire intitulé Haïti Demain qui indique, entre autre, le processus de mise en œuvre du PARDN pourrait plaire à l’ensemble des haïtiens avec quelques nuances à modifier ou à adapter. En parcourant les divers plans, les différences ne sont pas énormes, questions de nuances et de formulations. Il y a donc lieu de les fusionner après cette première conférence pour en faire un plan haïtien. Les premiers engagements obtenus (10 milliards de dollars) de la communauté internationale témoignent de leur approbation par rapport à ce plan dit du gouvernement. Alors, forçons la main au GOH pour son amélioration et pour une mise en œuvre non partisane de ce plan devenu enfin haïtien. Ce minimum de consensus, on le doit bien à nos milliers de morts et disparus. Un petit effort, mesdames et messieurs !!!