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mercredi 9 octobre 2024

HAÏTI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (46) : ANALYSE DES CONFLITS, DES CRISES POLITIQUES ET DES ENJEUX MONDIAUX ET HAITIENS

 

HAÏTI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (46) : ANALYSE DES CONFLITS, DES CRISES POLITIQUES ET DES ENJEUX MONDIAUX ET HAITIENS

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

9 OCTOBRE 2024

Le monde est en pleine ébullition, traversant une période marquée par des conflits militaires, des crises politiques et des élections décisives qui redéfiniront l'équilibre global. Pendant ce temps, Haïti, à l'ombre de ces bouleversements mondiaux, continue de faire face à une situation intérieure particulièrement instable. Cette 46e chronique examine les grandes questions internationales actuelles et leur impact sur la scène haïtienne.

 A-SITUATION AU NIVEAU MONDIAL

1.       Le Conflit en Ukraine et l’Occupation Partielle de Koursk

La guerre en Ukraine reste l’un des conflits les plus marquants sur la scène internationale. Après des mois de résistance, les Ukrainiens ont réussi à lancer une contre-offensive contre les forces russes, occupant partiellement la région de Koursk, un oblast clé à la frontière entre l’Ukraine et la Russie. Cette avancée représente un tournant majeur dans la guerre, en déstabilisant davantage les lignes de ravitaillement russes. L’occupation partielle de cette région par l’Ukraine montre que le conflit est loin d’être résolu, malgré les efforts diplomatiques internationaux pour parvenir à un cessez-le-feu.

Les répercussions de cette guerre s’étendent au-delà de l’Europe de l’Est, affectant les marchés mondiaux de l’énergie, les relations entre les grandes puissances et la stabilité de l’Europe, d’autant que l’occident, en particulier les USA, la Grande Bretagne et le France, fournit un appui substantiel à Israël   depuis le déclanchement de sa riposte contre le HAMAS, après le 7 octobre 2023.

2.       La Guerre Israélo-Hamas/Hezbollah/Iran et ses Proxys

Un an après le début de la guerre entre Israël et le Hamas le 7 octobre 2023, la région du Moyen-Orient reste plongée dans une situation extrêmement tendue. En Israël, des commémorations ont lieu tandis que le pays fait face à des attaques simultanées du Hamas à Gaza et du Hezbollah au Liban. Les pertes humaines sont considérables : plus de 41 000 Palestiniens et 1 200 Israéliens ont été tués. Gaza est dévastée, avec presque toute la population déplacée, et la crise humanitaire s’aggrave.

Au Moyen-Orient, la guerre entre Israël et le Hamas, avec l'implication indirecte du Hezbollah et des proxys iraniens, continue de se complexifier. Le soutien de l'Iran à ses alliés régionaux a intensifié les tensions, élargissant le conflit et menaçant de déstabiliser l’ensemble de la région. Israël mène des frappes aériennes contre les infrastructures du Hamas et Hezbollah à Gaza et au Liban et se prépare également à une potentielle intervention à la frontière sud du Liban pour continuer son travail de décapitation du Hezbollah après l’élimination physique de sa direction. Ce conflit récurrent a des implications non seulement pour les relations israélo-arabes, mais aussi pour l’équilibre des forces au Moyen-Orient, déjà marqué par les rivalités entre l'Iran, l'Arabie Saoudite et d'autres puissances régionales.

Le Hezbollah, soutenu par l'Iran, intensifie ses attaques contre Israël depuis le sud du Liban, créant un deuxième front. L'armée israélienne mène des frappes intensives pour limiter les menaces sur ses frontières nord. Des milliers de personnes ont été déplacées au Liban et des centaines de morts sont déjà à déplorer.

La situation au Yémen continue d'être marquée par une guerre civile dévastatrice entre les Houthis, soutenus par l'Iran, et les forces pro-gouvernementales appuyées par une coalition dirigée par l'Arabie saoudite. Ce conflit a exacerbé la crise humanitaire au Yémen, tandis que la situation géopolitique régionale rend les perspectives de paix encore plus difficiles.

L'Iran joue un rôle clé dans ces conflits, notamment par son soutien aux mouvements armés au Liban et en Palestine, en attaquant Israël à base de drones et de missiles de croisière. Les tensions avec Israël sont élevées, et la possibilité d'un élargissement du conflit à toute la région reste une menace imminente. L'escalade pourrait mener à une déstabilisation encore plus grande du Moyen-Orient, ce qui inquiète la communauté internationale, malgré son incapacité à enrayer la violence, et les USA qui, en pleine période électorale, sont obligés avec le reste de l’Occident, Grande Bretagne, France, etc.) d’aider Israël dans son conflit pratiquement ouvert et direct avec l’Iran.

3.       Les Élections Américaines : Trump vs Kamala Harris

Les élections américaines de 2024 promettent de redéfinir la trajectoire politique des États-Unis. Le retrait de Joe Biden de la course présidentielle a modifié le paysage électoral, laissant Kamala Harris, actuelle vice-présidente, en lice contre l’ancien président Donald Trump. Ce duel entre Harris et Trump cristallise les divisions profondes au sein de la société américaine. Trump, représentant une frange populiste et conservatrice, espère un retour en force après sa défaite de 2020, tandis que Harris mise sur la continuité des réformes progressistes et la mobilisation des minorités et des jeunes électeurs.

Les résultats de cette élection auront des implications mondiales, notamment en matière de politique étrangère, d'engagement militaire et de lutte contre le changement climatique, un élément clé de la 79e Assemblée de l’ONU.

4.       La 79e Assemblée Générale de l’ONU

Lors de la 79e Assemblée Générale des Nations Unies, les chefs d'État et de gouvernement du monde entier se sont réunis pour discuter des défis globaux, y compris les conflits, le changement climatique, les droits humains et les crises humanitaires. Le conflit en Ukraine, la situation au Moyen-Orient, et la montée de l’instabilité en Afrique ont dominé les débats. Pour Haïti, la participation à cette assemblée est cruciale, car elle offre une plateforme pour attirer l'attention internationale sur la crise sécuritaire et politique qui ronge le pays. Ce qu’Edgard Leblanc, alors président du Conseil Présidentiel de Transition (CTP), a exploité avec panache. Son discours a suscité la fierté Haïtienne à un moment où Donald Trump a accusé les Haïtiens de Springfield (OHIO) de « manger les chiens et les chats » des habitants de cette petite ville, alors que, en réalité, la présence haïtienne a grandement contribué à la relance économique de cette petite ville.

B. HAÏTI : LA CRISE POLITIQUE ET LA MENACE DES GANGS

Depuis la formation du Conseil Présidentiel de Transition en mai, la nomination de Garry Conille au poste de Premier ministre, et l'arrivée des forces kényanes en Haïti dans le cadre d’une mission internationale visant à rétablir l’ordre, la situation sociopolitique et économique du pays reste marquée par une instabilité profonde.

1.       Contexte Sociopolitique :

Malgré les efforts du gouvernement de transition, la violence des gangs persiste à un niveau alarmant. Depuis mai, les gangs continuent de défier ouvertement le gouvernement, opérant en toute impunité dans plusieurs régions du pays, notamment à Port-au-Prince et dans l'Artibonite. Ces groupes armés se livrent à des actes de banditisme, y compris des vols, kidnappings, et des violences sexuelles ciblant particulièrement les femmes et les filles. Les récits de viols, de meurtres et d'attaques brutales sont courants, et la population, déjà vulnérable, vit dans un climat de peur constant.

Le massacre dans l'Artibonite, où plus de 100 personnes innocentes ont été tuées, illustre l'incapacité du gouvernement à restaurer l’ordre. Malgré l’appui des forces kenyanes, les efforts de stabilisation sont encore loin d’aboutir à des résultats concrets. Les populations locales perdent confiance dans les autorités, tandis que les gangs élargissent leur contrôle sur des zones stratégiques, y compris des routes principales et des quartiers résidentiels.

Sur le plan politique, l’arrivée de Garry Conille a suscité quelques espoirs pour la réforme et la stabilisation, mais son administration est confrontée à des défis majeurs. La transition politique reste fragile, et le manque de dialogue entre les différentes forces politiques et la société civile empêche la mise en œuvre de réformes essentielles. La faiblesse des institutions publiques complique les efforts pour organiser de futures élections crédibles.

2.       Contexte Économique :

Sur le plan économique, Haïti continue de s'enfoncer dans une crise profonde. Depuis mai, l’économie reste toujours paralysée par l’insécurité, avec des secteurs clés comme l'agriculture, le commerce et les services en souffrance. Les gangs contrôlent certaines routes commerciales, imposant des "taxes" illégales et perturbant les chaînes d'approvisionnement. Cette situation aggrave l’inflation, déjà hors de contrôle, et conduit à des pénuries de biens essentiels, y compris de nourriture et de carburant.

Le taux de pauvreté continue d'augmenter, et la majorité des Haïtiens luttent pour survivre dans un contexte où les prix des denrées de base flambent. Le manque d'investissement, aussi bien local qu'international, et l'absence de programmes de relance économique pèsent lourdement sur le quotidien des Haïtiens. Le chômage atteint des niveaux critiques, et de plus en plus de familles sombrent dans une précarité extrême.

Sur le plan national, Haïti traverse une période de grande instabilité. Après la mise en place du Conseil présidentiel de transition (CPT), le remplacement d'Edgard Leblanc par Leslie Voltaire marque une nouvelle étape dans la tentative de stabilisation du pays. Le Premier ministre Garry Conille fait face à des défis titanesques, notamment la lutte contre les gangs armés qui sèment la terreur dans plusieurs régions, notamment dans l’Artibonite, où le massacre d'une centaine de personnes innocentes a récemment eu lieu.

La riposte du gouvernement haïtien, avec l’aide des forces kenyanes et d'autres partenaires internationaux, vise à reprendre le contrôle des zones dominées par les gangs. Le déploiement des troupes kényanes sous mandat des Nations Unies témoigne de la gravité de la situation et de la reconnaissance par la communauté internationale de la nécessité d’intervenir pour éviter une déstabilisation totale du pays.

CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

1.       Conclusions

À la lumière des événements mondiaux et de la situation haïtienne, plusieurs conclusions peuvent être tirées :

1. Le Conflit en Ukraine continue de redéfinir les relations géopolitiques en Europe, avec des répercussions économiques globales. La contre-offensive ukrainienne, bien que symbolique, montre que la guerre est loin d'être terminée et que la stabilité de la région reste fragile.

2. La guerre au Moyen-Orient, avec l'implication de l'Iran et de ses proxys, reste une menace pour la paix régionale et mondiale. L'intensification des conflits entre Israël, le Hamas et le Hezbollah pourrait entraîner une escalade difficile à contenir.

3. Les élections américaines de 2024 sont un tournant important pour la politique mondiale. L'issue de cette élection influencera non seulement la politique intérieure des États-Unis mais aussi leur rôle sur la scène internationale, en particulier dans la gestion des crises mondiales.

4. Pour Haïti, la lutte contre les gangs armés et la tentative de stabilisation politique nécessitent un soutien international accru. La transition politique en cours, symbolisée par le Conseil présidentiel et le rôle du Premier ministre Garry Conille, sera cruciale pour restaurer l’ordre et reconstruire l’État.

De mai à aujourd'hui, la situation sociopolitique et économique en Haïti demeure extrêmement préoccupante. Le Conseil Présidentiel de Transition et le Premier ministre Garry Conille peinent à restaurer l’autorité de l’État et à ramener la stabilité. Les forces kenyanes, bien que présentes, n’ont pas encore eu un impact décisif sur la sécurité. Les violences des gangs continuent d’échapper à tout contrôle, tandis que la crise économique exacerbe la misère de la population.

2.       Perspectives pour Haïti

Dans ce contexte, la situation en Haïti est à la croisée des chemins, et des actions plus robustes, tant sur le plan de la sécurité que des réformes politiques et économiques, sont nécessaires pour éviter un effondrement encore plus profond du pays.

Il est donc impératif pour Haïti de se concentrer sur plusieurs priorités : renforcer la sécurité en collaborant avec les partenaires internationaux, reconstruire les institutions politiques fragilisées, et engager un dialogue national inclusif pour restaurer la confiance et préparer des élections crédibles. Le succès de ces efforts déterminera en grande partie si le pays peut se relever de sa crise actuelle et éviter un effondrement total.

La conjonction des crises mondiales et des luttes internes place Haïti et le monde à un moment décisif. Il s'agit maintenant de savoir si les dirigeants, tant nationaux qu'internationaux, seront capables de trouver des solutions à ces défis complexes et interdépendants.

mercredi 8 mai 2024

HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (45) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ET GUERRE ISRAELO-HAMAS/IRAN ; HAITI : LE CONSEIL PRESIDENTIEL VS BANDITS

 

HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (45) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ET GUERRE ISRAELO-HAMAS/IRAN ; HAITI : LE CONSEIL PRESIDENTIEL VS BANDITS

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

7 MAI 2024

La 44e chronique sur l’interrogation « Haïti et le monde à la croisée des chemins (?), a analysé la situation mondiale et haïtienne, en se basant sur les guerres Russo-Ukrainienne, Israélo-Hamas, et sur la complexité de la saga haïtienne, dominée par les gains territoriaux des bandits et leur visée de la prise directe du pouvoir Haïti.

Dans cette 45e chronique, les mêmes thèmes persistent auxquels il faut ajouter l’Iran qui régionalise un peu plus le conflit Israélo-Hamas, tandis qu’en Haïti, l’installation du Conseil Présidentiel de Transition (CPT) semble faire pencher la balance du coté de la communauté internationale (CI) par rapport à la visée des bandits d’imposer leur solution ou tout simplement de faire partie de la solution.

Pourtant, rien n’est joué si l’on se base sur les déclarations des bandits et des luttes internes pour la présidence du CPT. On croirait que la situation épineuse d’Haïti n’affecte en rien les deux acteurs de terrain de la crise multiforme du pays, à savoir les bandits qui continuent avec leurs stratégies d’occupation de territoires et de rendre invivable la vie en Haïti, tandis que les membres du CPT se préoccupent de qui sera président du CPT, au point de se diviser en deux groupes dont celui majoritaire a fait le choix d’Edgard Leblanc. Et les pratiques de corruption semblent régner de plus belle au sein de ce CTP.

C’est pourquoi je titre cette 45e chronique : « HAITI ET LE MONDE A LA COISEE DES CHEMINS (?) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ET GUERRE ISRAÉLO-HAMAS/IRAN ; HAITI : LE CONSEIL PRESIDENTIEL VS BANDITS.

I.           SITUATION AU NIVEAU MOMDIAL

Avant de rentrer dans le vif du sujet en relation avec les grands points d’actualité internationale que nous allons analyser, parlons rapidement de l’élection présidentielle au Sénégal gagnée haut la main par Bassirou Diomaye Faye (44 ans), l’homme avec deux épouses officielles, qui, en moins d’une semaine après son investiture, a mis en place avec son Premier Ministre, Ousmane Sonko, un gouvernement de plus d’une vingtaine de ministres et arrêté des mesures en faveur du Sénégal par rapport à la Communauté Internationale. C’est un événement en soi, et dans un pays africain en plus. On pourrait se pencher sur la saga Trump qui occupe l’actualité aux USA. On y reviendra dans un article ultérieur.

Maintenant regardons ensemble les autres points saillants de l’actualité internationale : La guerre Russo-Ukrainienne, la Guerre Israélo-Palestinienne et l’engagement américain dans ses deux conflits et leurs répercutions sur la politique interne américaine.

1.1.     Guerre Russo-Ukrainienne, les Russes à l’offensive

Par rapport à notre dernière chronique, la situation a connu des avancées diverses de la part des Russes et des Ukrainiens. L’Ukraine qui perd du terrain dans le Donbass, se contente de défendre surtout les zones-clés de la ligne de front de 1200 Km et de toucher les sites stratégiques de la Russie (Usines Gaz, Pétrole, centres de production des armes et munitions, aérodromes). Sur le terrain, les Russes avancent avec beaucoup de pertes en vies humaines et en matériels militaires, mais en grignotant du terrain ukrainien, en étant actifs sur plusieurs zones névralgiques du front et en continuant à bombarder à distance les 7 grandes villes ukrainiennes avec des fortunes diverses.

Malgré les 61 Mrds d’USD votés par la Chambre Basse des USA, les Russes avancent inexorablement en attendant la concrétisation de cette aide sur le terrain, les Ukrainiens se battent à 1 contre 4 à 5 dans certaines zones. Avec un manque criant de munitions et d’hommes, c’est un véritable exploit de leur part. Ingénieux, avec les moyens du bord, ils arrivent à frapper la Russie en profondeur à partir de matériels adaptés et fabriqués en Ukraine pour la grande majorité, en détruisant des usines et des aérodromes et avions russes. Ils utilisent les matériels occidentaux (britanniques, français et autres), mis à disposition pour frapper la Russie, surtout dans les zones occupées. Les dégâts sont conséquents, 13% de l’économie russe liées au Gaz et au pétrole sont perdus. Les Américains ont demandé aux Ukrainiens de suspendre les bombardements sur le gaz et le pétrole, malheureusement sans succès. Il faut noter que l’effort de guerre de la Russie se base sur l’exportation de ces produits, tout en manœuvrant par alliés interposés dont l’Iran, pour nuire à l’approvisionnement de l’Ukraine en armes et en munitions.

1.2.     Guerre Israélo-Hamas, l’Iran s’implique davantage

En effet, Israël était un gros fournisseur de l’Ukraine  en armes et munitions. Sous l’instigation de l’Iran, allié de la Russie, le Hamas a déclenché, le 7 octobre 2023, la guerre Israélo-Hamas, privant par ainsi l’Ukraine de l’appui israélien. Israël est devenu trop occupé dans son offensive contre le Hamas dans la bande de Gaza, dans ses démêlés avec le Hezbollah libanais et les Houthis du Yémen, tous des proxis d’Iran, pour continuer à aider l’Ukraine.

Les alliés occidentaux d’Israël comme les USA, les Britanniques et les Français, ont dû prioriser leur allié par rapport à l’Ukraine. Les Israéliens, qui ont dû frapper un consulat Iranien en Syrie, tuant une quinzaine de personnes dont des généraux de l’Iran, ont eu comme réponse une attaque massive et directe de l’Iran de 300 drones et missiles supersoniques et balistiques dont 99% ont été interceptés par Israël et ses alliés occidentaux et arabes. Israël a dû répliquer en attaquant des bases iraniennes sans succès si l’on en croit la dérision avec laquelle le ministre des Affaires étrangères de l’Iran a ridiculisé cette attaque israélienne. Ceci a eu pour effet de désamorcer l’escalade au niveau de la région.

Entre temps, le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, maintient la pression sur la bande de Gaza malgré les injonctions américaines pour un cessez-le-feu, en continuant à raser les infrastructures (bâtiments et autres) et à tuer les Palestiniens de cette zone sous prétexte d’éradication des leaders du Hamas. Ce qui a provoqué une antipathie presque mondiale contre Israël, en particulier aux USA, où les étudiants propalestiniens protestent avec violence contre le génocide israélien. Comme l’a souligné un citoyen engagé haïtien, Dimitri Norris : « Israël à force de se croire au-dessus des lois et de toutes autres formes de considérations est peut-être en train de perdre la seule bataille qui vaille, celle de l'opinion publique américaine. »

1.3.     Les Américains s’engagent un peu plus

Le Gouvernement américain, malgré les protestations de la plupart des étudiants et d’une bonne partie de la population propalestinienne, a dû se battre pour le vote d’un bill de plus 100 Mrds d’USD pour venir en aide à l’Israël et à l’Ukraine. L’engagement américain du côté israélien a permis de faire face à l’attaque de l’Iran, et aussi à se défaire des attaques des Houthis pro-iraniens au niveau de la Mer Rouge et dans la protection des navires qui traversent le Canal de Suez. Malgré tout, plus de 35% du commerce mondial ont dû éviter cet itinéraire. Ce qui contribue à la situation d’inflation que vit le monde actuellement et en particulier les USA, en pleine année électorale.

J’emprunte ce constat de Dimitri Norris pour terminer la synthèse de l’actualité mondiale et faire la transition vers la situation haïtienne : « Enfin on ne saurait ne pas terminer cette synthèse de l’actualité mondiale sans mentionner l'intervention du représentant de la Fédération de Russie au Conseil de Sécurité sur le dossier haïtien. Définitivement le peuple haïtien et la nation haïtienne ont un champion et je parie que la question haïtienne est une des priorités de la diplomatie russe ». 

II.        SITUATION AU NIVEAU D’HAITI

Depuis la mise sur pied, le 29 février 2024, de ce mouvement « viv Asanm » par des bandits, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. Ariel Henry, « deyò, deyò nèt » a officiellement démissionné ; les bandits ont posé des actes répréhensibles malgré leurs promesses d’accompagner le peuple dans une forme de révolution contre ses bourreaux et de changer le système haïtien ; le Conseil Présidentiel de Transition (CPT) est mis en place et la division reprend le dessus comme d’habitude.

2.1.     Les bandits persistent et signent

Pendant tout le mois de mars et jusqu'à la fin d'avril 2024, la zone métropolitaine de Port-au-Prince a été ravagée par des actes criminels sans précédent. Les bandits ont ciblé une quinzaine de commissariats de police, assassinant des agents et s'emparant d'armes ; des prisons ont été attaquées, entraînant la libération de plus de 4000 détenus, renforçant ainsi leurs rangs ; plusieurs ministères ont été saccagés et leurs équipements et archives détruits ; des banques et des entreprises privées ont été cambriolées, avec des vols d'argent, de nourriture et d'autres biens ; des institutions gouvernementales ont été délibérément détruites, y compris les archives nationales et le journal Le Moniteur ; des établissements de santé et des pharmacies ont été pillés, avec des équipements détruits et des médicaments volés ; des écoles, tant publiques que privées, ont été dépouillées et vandalisées, y compris le Collège Saint Martial ; même les facultés d'État ont été attaquées, avec des dommages infligés aux installations de l'Agronomie, de la Médecine, de l'École Normale Supérieure, entre autres ; des domiciles privés ont été la cible de pillages, de vols, de viols et de violences meurtrières. Ce déchaînement de violence au nom de la révolution ne fait que perpétuer la souffrance du peuple depuis trop longtemps.

Donnons la parole à nouveau à notre ami Dimitri Norris : « Et parlant de mutilations ce qu'on retiendra du mois d'Avril 2024 c'est les destructions d'ouvrages marqueurs de l'identité haïtienne par la coalition de gangs "Viv ansamm". Elle dit vouloir faire la révolution… La mise à sac de la bibliothèque nationale, des Presses nationales, du Petit Séminaire Collège Saint Martial et de tant d'autres monuments marquant la mémoire nationale et surtout plus encore la destruction de l'école Élie Dubois montre que sous un narratif de révolution est en train d'avoir lieu un génocide civilisationnel et mémoriel. »

La zone métropolitaine de Port-au-Prince est pratiquement sous le contrôle des bandits, on estime à 10% l’espace sous le contrôle de l’Etat. La majorité des gens restant au niveau de la zone métropolitaine se concentre sur ces 10% de territoires. Plus de 150,000 personnes ont abandonné la zone métropolitaine en se réfugiant dans les zones de province. Une crise humanitaire est en train d’être vécue au niveau de la zone métropolitaine avec des répercutions sur les zones de province. Or il se trouve que cette zone représente environ 80% des activités économiques du pays et le point central de toutes les décisions politiques. Le pays est donc paralysé à l’heure actuelle, les communications avec les zones de provinces sont pratiquement inexistantes, les bandits contrôlant les entrées et les sorties de la zone métropolitaine. Que restera-t-il au conseil présidentiel de transition comme territoire à gérer au niveau de la zone métropolitaine de Port-au-Prince

2.2.     Le Conseil Présidentiel de Transition et les préoccupations politiciennes

Après maintes tractations de la communauté internationale à travers la CARICOM, une solution institutionnelle en dehors de la constitution a été trouvée avec les acteurs politiques pour la mise en place d’un Conseil Présidentiel de Transition (CPT) de 9 membres dont 2 observateurs. Ce CPT devra choisir un premier ministre, mettre en place avec le premier ministre un gouvernement, rétablir la sécurité, mettre en place un conseil électoral, réformer la constitution à valider par le peuple, organiser les élections générales et remettre le pouvoir aux élus en février 2026.

Cette solution a été contestée par plusieurs groupes dont le groupe Viv ansanm. Certains voulaient utiliser l’article 149 de la constitution de 1987, d’autres comme « viv Ansanm veulent faire partie de la solution. Le CPT a eu toutes les peines du monde à être installé. Une fois installé, les divisions apparaissent au grand jour quant au choix du coordonnateur. Et Haïti continue de se péricliter au grand dam du peuple haïtien ne sachant à quel saint se vouer.

Quant à la communauté internationale, elle a applaudi et commence à prendre des dispositions pour l’arrivée de la Force Multinationale. Avec l’arrivée de certains matériels emmenés par les Américains, on sent une certaine panique parmi les bandits qui se traduit par un langage plus conciliant.  Et du côté du CPT et du côté des bandits, les deux principaux acteurs de terrain, Haïti reste le cadet de leurs préoccupations. Que va-t-il se passer ? L’avenir dira le reste.

2.3.     Haïti n’est toujours pas la priorité

Quand on regarde de plus près la situation d’Haïti, les deux groupes qui occupent le terrain n’ont rien à voir avec le bien-être du peuple haïtien. Les bandits se renforcent et veulent accéder directement au pouvoir pour consolider leur prédominance et leurs privilèges afin d'échapper à la justice. Pour les politiciens au niveau du CTP, ils veulent préserver leurs privilèges, ceux de leurs clans et de leurs patrons au niveau du secteur des affaires. Dans les deux camps Haïti n’est toujours pas la priorité. Car ce sont les mêmes qui ont conduit notre pays à cette extrémité et qui se battent maintenant pour accéder au pouvoir politique. Les bandits veulent y accéder pour se protéger, tandis les politiciens pour perpétuer le système ou tout au moins pour le renouveler.

III.      CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES 

La situation au niveau mondial reste très préoccupante. A côté de la guerre Russo-Ukrainienne qui voit l’offensive russe s’accentuer sur le terrain, au point déloger les Ukrainiens sur au moins une position occupée depuis 2014 dans le Donbass, la guerre Israélo-Hamas se régionalise avec les attaques israéliennes sur un Consulat iranien en Syrie, tuant une quinzaine de personnes dont des généraux iraniens. Les Iraniens ont dû directement répliquer. Ils ont envoyé   300 drones et missiles, interceptés par les Israéliens avec l’appui de ses alliés occidentaux, dont en premier lieu les Américains. Les Israéliens ont remis ça en attaquant des installations en Iran, sans succès à ce qu’il parait, puisque les Iraniens se sont moqués des Israéliens.

 Le Gouvernement américain qui a déconseillé les Israéliens de répliquer, puisque la massive attaque iranienne n’a tué personne et n’a pas fait trop de dégâts, a quand même forcé le Congrès à passer un bill de plus de 100 milliards d’USD, dont 61 milliards d’USD pour l’Ukraine promis depuis longtemps et bloqués au niveau de la Chambre basse pour des raisons de politiques politiciennes. En attendant l’arrivée de cet argent, les Russes profitent du manque en hommes et en munitions de l’Ukraine pour accaparer plus de territoire dans le Donbass et menacer la ville de kharkiv, la 2e ville du pays.

On comprend que, dans ces circonstances, la crise multiforme et multidimensionnelle haïtienne ne constitue qu’une simple épine dans les pieds de l’Occident, trop occupé avec les deux autres guerres citées plus haut. C’est vrai que la dimension humanitaire de la crise haïtienne force l’ONU à prendre des décisions pour l’atténuer. Cela reste au niveau des palabres. Les actions sur le terrain tardent à se concrétiser si l’on fait exception de quelques avions déversant leurs cargaisons sur le pays. Mais comment atteindre les populations quand les principales routes du pays, surtout à la sortie de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, sont sous le contrôle des bandits ? Il faut noter aussi quelques matériels militaires emmenés par les Américains, créant une forme de panique chez la plupart des bandits.

Ces politiciens, membres du CPT, qui, hier encore, faisaient partie, des groupes politiques qui armaient les bandits, et qui se battent actuellement pour coordonner le CPT, pourraient-ils prendre de la hauteur pour consacrer la première place à Haïti au détriment de leurs intérêts immédiats et personnels ? Le sort du peuple est le cadet des soucis de ces deux groupes qui se battent pour les broutilles de pouvoir. Haïti est vraiment à la croisée des chemins. Quand et comment trouver le vrai chemin à suivre ?

lundi 4 mars 2024

HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (44) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ; GUERRE ISRAELO-HAMAS ; HAITI : LE REGNE DES BANDITS.

 

HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (44) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ; GUERRE ISRAELO-HAMAS ; HAITI : LE REGNE DES BANDITS.

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

4 MARS 2024

Dans la 43e chronique[1], consacrée à l’année 2023 et aux 2 premiers mois de l’année 2024, on a analysé la situation sur le plan international, en nous appuyant, entre autres, sur la guerre en Ukraine, sur la guerre Israélo-Hamas et sur la saga Trump. Ce sont les 3 faits qui ont dominé l’actualité mondiale et qui continuent à date de la dominer, même si d’autres faits qui se passent en Afrique devraient nous préoccuper, surtout en ce qui a trait au nombre de morts enregistrés dans certains pays comme le Congo par exemple. Comme c’est un pays noir, la mort d’un noir n’est pas aussi importante que celle d’un blanc. Cette assertion est aussi valable pour Haïti où des milliers d’Haïtiens subissent toutes sortes de calamités sans une attention de la presse internationale.

Sur le plan national, après la tentative de Guy Philippe, en janvier et février 2024, en particulier le 7 février, de faire « sa révolution », qui a eu l’adhésion d’une grande partie de la population et même de certains leaders politiques, le PM Ariel Henry avait tenu bon en durcissant son régime, avait repris la main et s’est même permis un certain nombre de voyages à l’étranger. D’ailleurs, les événements de ces derniers jours lancés par les bandits l’ont surpris en dehors du pays, en particulier au Kenya. Il faut noter qu’il est soutenu fermement par l’ensemble de la communauté internationale (tout au moins jusqu'à date, faute d’alternatives sérieuses, tenant compte des intérêts haïtiens et de la communauté internationale occidentale (CIO).

Et, face à cet appui inconditionnel de la CIO, les bandits ont profité de l’annonce des élections fixées, de concert avec le PM Henry, par la CARICOM pour le 31 août 2025 et la remise du pouvoir par le PM, le 7 février 2026, aux élus issus de ces élections, et surtout de l’absence au pays du PM, pour lancer l’opération « Vivre Ensemble », dont le 1er objectif est le renversement du régime actuel. C’est dans ce contexte que j’ai titré la 44e chronique : « HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (44) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ; GUERRE ISRAELO-HAMAS ; HAITI : LE REGNE DES BANDITS ».

Comme le titre l’indique, cette 44e chronique sur cette interrogation Haïti et le Monde à la croisée des chemins (?) se déroulera, l’introduction mise à part, sur la guerre Russo-Ukrainienne et la contre-offensive russe sur le terrain, la guerre Israélo-Hamas et le dernier développement à date, et sur la saga Trump et ses derniers démêlés avec la justice américaine, s’attardera sur la situation haïtienne qui évolue, selon moi, dans le mauvais sens avec la mainmise des bandits sur ce qui reste de la zone métropolitaine de Port-au-Prince et  débouchera sur des conclusions et perspectives appropriées.

I.                    LA SITUATION AU NIVEAU MONDIALE

Comme pour la 43e chronique, les points forts de l’actualité mondiale demeurent (i) la guerre en Ukraine, (ii) la guerre israélo-Hamas et (iii) la saga Trump aux USA. On aurait pu parler du sommet organisé par E. Macron sur la guerre en Ukraine et aussi sur le sommet du G20 au Brésil où le « Dossier Haïti » a été au centre des débats. On préfère les intégrer comme éléments d’explication dans les dossiers ukrainien et haïtien traités plus bas dans cet article.

1.1. Guerre en Ukraine et contre-offensive russe

Après l’échec de la contre-offensive ukrainienne de l'été dernier, la Russie ne se contente plus de défendre. Elle passe à son tour à l’offensive dans le Donbass. Comme à Bakhmuth, elle a mis le parquet sur la ville d’Avdiivka. Elle a certes perdu beaucoup de soldats (17,000 morts). Au bout du compte, avec le poids du nombre, elle a fini par repousser les Ukrainiens. Ces derniers ont mis trop de temps à amorcer leur repli, ce qui leur a couté beaucoup d’hommes aguerris et un coup au moral. Et la Russie en profite pour poursuivre son offensive en vue d’atteindre la rive gauche de la rivière Nippo avec des moyens au sol et aériens dont ne dispose pas l’Ukraine. Cette dernière a dû se rabattre sur des missiles pour détruire certains avions  et dépôts de munitions pour forcer les Russes à calmer leur ardeur. En attendant, la Russie a continué sans les moyens aériens, et l’Ukraine, malgré son manque en hommes et en munitions, se défend tant bien que mal.

Zelensky, le président ukrainien, a entrepris une tournée dans plusieurs pays pour solliciter de l’aide. C’est dans ce contexte que le président Emmanuel Macron a convoqué un sommet de certains pays d’Europe en France sur le dossier Ukrainien. Il a fait une déclaration à la fin de ce sommet qui a choqué tout le monde, y inclus ses alliés, à savoir, pour empêcher la Russie de gagner, il serait prêt à lancer des troupes au sol en Ukraine en dernier ressort. Tous les participants à ce sommet ont fait des déclarations contraires. A ce qu’il parait, c’est quelque chose qui a été discuté en coulisse mais qui ne devait pas être rendu public. Toujours est-il que la Russie n’a pas hésité à menacer l’occident en leur faisant comprendre qu’il dispose des moyens de frapper n’importe où. Vladimir Poutine a donc brandi la menace nucléaire comme toujours en de pareils cas.

Malgré tout, l’Ukraine va avoir des armes, des munitions et de l’argent pour continuer à se défendre face à l’agresseur. Un accord bilatéral a été signé avec la France à ce sujet et aussi l’accord prévoit de la coopération à plus grande échelle. Et Macron effectuera une visite en Ukraine au printemps prochain. Les relations franco-Ukrainiennes se sont réchauffées. Le manque de munitions de l’Ukraine s’explique aussi, selon Xavier Tytelman, par  toute une stratégie de nuisance mise en place par la Russie, en favorisant l’allumage de feu à proximité de presque tous les fournisseurs d'armes de l’Ukraine, incident entre le Pakistan (fournisseur de l’Ukraine) et l’Iran ; la Corée du Nord, son allié, se met à envoyer des missiles à proximité de la Corée du Sud et du Japan, tous les deux fournisseurs de l’Ukraine, qui ont dû conserver leurs armes et munitions pour faire face à la menace de la Corée du Nord. Il en est de même pour Israël (fournisseur de l’Ukraine), qui est occupé avec sa guerre avec le Hamas équipé par l’Iran, allié de Poutine. Pour ne citer que ces exemples.

1.2. La guerre Israélo-Hamas et ses dizaines de milliers de morts

Cette guerre a beaucoup nui à l’Ukraine. Son principal fournisseur en tout, les USA, a dû donner la première place au conflit Israélo-Hamas, politique intérieur oblige, en pleine année électorale. Le Parlement américain, sous l’instigation de Donald Trump, fait des misères à Joe Biden pour voter les 61 Mrds d’USD promis à l’Ukraine. Comme Israël veut en finir avec le HAMAS, il a détruit plus de 50% de la bande et de Gaza et tuer environ 30,000 civiles palestiniens, selon le Hamas et repris par le journal français Libération. Cette opération dans la Bande de Gaza fait percevoir Israël comme un pays génocidaire vis-à vis des Palestiniens. 

Les communautés arabes et palestiniennes qui vivent aux USA reprochent à Joe Biden son appui inconditionnel à Israël. Ce qui pourrait nuire à sa réélection en novembre 2024. Certes il a gagné haut la main les primaires du Michigan, mais l’abstention du vote arabe a été plutôt élevée. Dans le cas de la présidentielle américaine, une telle abstention pourrait lui couter très cher. C’est pourquoi, il pousse Israël a un cessez-le-feu à l’approche du Ramadan, mais Netannyahou, le premier ministre israélien, n’y est pas du tout favorable. Tout cela fait l’affaire de Trump.

A noter que Trump aurait appuyé encore plus les Israéliens. C’est l’administration de Trump qui a reconnu Jérusalem comme la Capitale d’Israël. Mais, comme ce n’est pas lui qui dirige, il garde le profil bas dans ce dossier, profite des retombées anti Biden y relatives, et se concentre sur ses primaires pour l’investiture républicaine (Super Tuesday) et ses démêlés judiciaires.

1.3.  La saga Trump aux USA et ses démêlés judiciaires

Plus Trump se débat dans ses multiples démêlés, plus il est populaire. Il est en train de gagner haut la main l’investiture républicaine. Dans les sondages, il renverse la tendance par rapport à Joe Biden. De plus, il vient de gagner son action en justice au niveau de la Cour Suprême par sa plainte contre la Cour Suprême de Colorado qui l’aurait empêché, selon une interprétation du 14e amendement de la Constitution Américaine par cette cour, de concourir dans cet état. Cette décision au niveau de l’Etat du Colorado n’a pas fait tache d’huile comme on le craignait. Malgré tout, il y a d’autres affaires avec la justice américaine, dont la dernière en date, dans l’Etat de New-York, l'oblige à payer des indemnités s’élevant à 454 M. d’USD pour fraude fiscale. De plus il y a l’affaire de Georgia pour tentative de fraude électorale et l’insurrection du 6 janvier 2021 au Capitol.  Tout cela ne nous empêchera pas d’avoir un nouveau duel Biden/Trump, avec des répercussions très sérieuses sur Haïti.

II.                  LA SITUATION AU NIVEAU D’HAITI

Avant de parler de politique, rendons hommage à l’agronome Leger. Il faut noter que l’AGR Leger, après avoir tout tenté et réussi dans le domaine du développement agroindustriel pour montrer un autre visage de notre pays, a tiré sa révérence à l’âge de 77 ans pour un repos éternel bien mérité, nous laissant dans nos démêlés politiciens partisans sans réel souci de développement de notre pays. Profitons de l’occasion pour souhaiter prompt rétablissement à Mgr Dumas, Evêque des Nippes, après l’attentat chez lui, à Pétionville, qui a failli lui coûter la vie et a laissé les traces indélébiles dans sa chair.

Maintenant attardons-nous sur Haïti. La situation haïtienne est très complexe. Elle n’est pas facilement analysable. Il y beaucoup de rumeurs, beaucoup de spéculations et beaucoup de théories qui ne collent pas. C’est pourquoi que tout observateur sérieux doit prendre du recul avant de s’aventurer dans cet imbroglio. On va essayer de démêler tout cela en trois points tels que déclinés plus bas.

2.1.  Le contexte du mouvement de ce 29 février 24

Guy Philippe avait lancé un mouvement révolutionnaire depuis décembre 2023. Ce mouvement a séduit beaucoup de gens habitués aux méthodes de M. Philippe, qui armes à la main, avait forcé en 2004 le départ du président Aristide. Même s’il a utilisé le mot pacifique après le mot révolution, personne, cette fois-ci, ne croyait à un mouvement pacifique de sa part, d’autant que le BSAP, la force qui a défié les Dominicains sur la zone du Canal Massacre, s’est montré très favorable à l’idée de Guy Philippe. Le gouvernement a rapidement réagi en révoquant le directeur général des aires protégées et responsable du BSAP et en interdisant à cette force de porter les armes durant une certaine période. 

L’ex-sénateur Guy Philippe, qui était rentré à Port-au-Prince pour participer aux manifestations à l’approche du 7 février, a vu un contingent du BSAP attaqué par la police nationale et 5 membres de cette force ont été tués. Il a eu la vie sauve grâce à des stratégies pour sortir du piège tendu par le pouvoir et certains membres de la communauté internationale, selon ses dires. Il s’est replié sur sa ville natale de Pestel au niveau de la Grande-Anse et a promis d’utiliser d’autres stratégies pour renverser le pouvoir et le système actuels.

Entre temps, Moïse Jean-Charles et Claude Joseph, qui avaient participé au mouvement pour renverser Ariel Henry, ont dû, eux-aussi, changer de stratégies. M. Jean Charles en recommençant avec les manifestations et le Krazebrize, tandis que Claude Joseph, entre temps inculpé dans le dossier d’assassinat de Jovenel Moïse par le juge d’instruction, a pris les ondes de la radio pour se défendre contre les accusations du juge. Léon Charles, ex-directeur général de la police national également inculpé par le juge ainsi que Martine Moïse, la femme du président assassiné, a dû démissionner de son poste de représentant d’Haïti à l’OEA pour mieux se défendre des accusations du juge d’instruction.

 L’actualité s’est emparée de ce dossier au détriment de tout le reste: (i) les gangs qui pillent, kidnappent, violent, et tuent , tout en se battant entre eux pour de nouveaux territoires au niveau de la zone métropolitaine; (ii) Ariel Henry qui voyage pour finaliser le dossier du déploiement de la Force Multinationale, portée  de réunion en réunion par l'administration des USA, qui a profité du sommet du G20 au Brésil pour mettre ce dossier en avant et a obtenu la moitié des 600 M d’USD nécessaires pour ce déploiement et l’adhésion de 11 pays susceptibles de participer dont 2000 hommes en provenance du Bénin, Afrique noire francophone. 

Alors qu’on croyait que la « révolution » était hors-jeu, le chef de gang bien connu, Jimmy Chérisier, plus connu sous le sobriquet BARBECUE, est apparu sur les réseaux sociaux pour annoncer une entente entre les gangs pour renverser Ariel Henry dans un premier temps, et changer le système par la suite.

2.2.  L’entente vs l’entente entre les politiciens

En ce matin du 29 février 2024, personne ne s’attendait à ce mouvement des bandits. Personnellement, j’ai été surpris par cette annonce de « Barbecue » de ce mouvement de « vivre ensemble » dont il est le porte-parole. Vu les contentieux qui les séparent pour des questions de territoires et autres comme les tueries commises par les uns sur les autres. Pourtant le mouvement lancé au bas de Delmas allait embraser l’ensemble de la zone métropolitaine. Selon une coordination de type militaire, ils ont attaqué en plusieurs points, mettant en déroute la police nationale, s’emparant des sous-commissariats, tuant 5 policiers et blessant d’autres; ils ont pris le ministère de l’agriculture, la faculté d’agronomie; ils se sont emparés de l’OAVCT, détruisant les archives, la douane et assaillent l’Aéroport de Port-au-Prince, touchant un avion de ligne au sol, etc. 

Cela étant, ils se sont arrangés pour intimider le Palais National à l’aide de drones, survolant certains édifices publics et surveillant les déplacements de la police nationale. Dans la nuit du 1er au 2 mars 2024, ils ont attaqué les prisons de Croix-des-Bouquets et du Pénitencier National, libérant la majorité des prisonniers (+ 4000) et aussi leurs acolytes condamnés pour des crimes. Par ce geste ils se sont renforcés en nombre de criminels. Ils ont attaqué la base de la Marine Haïtienne. Sont-ils en train de renverser le PM ou de se renforcer pour quelque chose d’autre ? On est donc en présence de quelque chose d’inconnu jusqu’ici en Haïti. Va-t-on vers la prise de pouvoir par les bandits ?

En tout cas, ils donnent une bonne leçon à nos politiciens qui n’arrivent pas jusqu’ici à s’entendre depuis l’assassinat du président Moïse. Les politiciens au pouvoir ne veulent pas le lâcher et les politiciens en face veulent y accéder à tout prix et même au détriment du pays et du peuple haïtien. Personne au niveau politique ne s’intéresse au sort du pays et du peuple. Il suffit de constater leur silence par rapport aux actes des bandits vis-à-vis du peuple haïtien et ces derniers jours vis-à-vis du pays. C’est cette mésentente entre nos politiciens qui a favorisé la montée en puissance des bandits au point de leur permettre de frôler la prise directe du pouvoir. En réalité, ce sont les bandits qui règnent et qui régulent la vie en Haïti depuis quelque temps, en particulier ces derniers jours.

Le règne des bandits, conséquences immédiates et Ariel Henry ?

A cause des attaques sur l’Aéroport international, les avions n’atterrissent plus ni ne volent. Si le PM doit revenir au pays, du train où ça va, il ne pourra pas atterrir à Port-au-Prince. Car les bandits règnent en maitre.  Ils ont pris d’assaut le ministère de la communication par peuple interposé.  La police nationale n’est pas en mesure de contre-attaquer, elle se contente de protéger certains endroits encore sous son contrôle. Quant à l’Armée d’Haïti, on n’en a pas entendu parler. Un peu quand même, on a signalé sa présence au niveau de l’ancienne base de la MINUSTHA à l’Aéroport International.

En tout cas, ce qui se passe est assez triste. Et une bonne partie de la population semble prendre fait et cause pour ces bandits qui, hier encore, la torturent et qui ne libèrent pas encore les otages, les kidnappés en leur possession et qui sont issus de cette population. Pourtant, ils ont libéré plus de 4000 criminels dans les prisons de Port-au-Prince et de la Croix-des-bouquets C’est le chaos total.  Admettons que le PM A. Henry ne revienne plus (deyò deyò nèt), que se passera-t-il? La force multinationale viendra-elle toujours en Haïti, si oui, quand ? Le temps presse et Haïti s’enfonce de plus en plus dans l’abime ? Où sont passés nos politiciens ? Sont-ils en train de se concerter par visioconférence et pour faire quoi ? Attendons voir !

 

III.                CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

Plus ça change, plus c’est la même chose ou pire encore. Le monde se lance dans une frénésie guerrière. Le leader mondial, les USA, se déchire. La France avec Macron prend une posture de va-t-en-guerre. Vladimir Poutine menace l’occident et continue d’avancer en Ukraine malgré des pertes énormes en hommes et en matériels militaires. Il fait tourner à fond ses usines de matériels militaires. L’économie russe est désormais une économie de guerre.

L’occident, en particulier l’Europe, commence à se préparer en cas d’un éventuel retour au pouvoir de Trump, à s’affranchir, à terme, de la tutelle américaine, c’est du moins pour l’instant la position de la France. L’Allemagne se perd un peu, car son économie a payé les contrecoups de la guerre en Ukraine. Elle était trop dépendante de la Russie pour certains aspects stratégiques (Gaz et autres). Les pays baltes ont peur, car en première ligne en cas d’un éventuel conflit entre l’occident et la Russie.  

La Chine, la 2e puissance économique mondiale, regarde très sérieusement du coté de Taïwan. Les USA font des alliances en indopacifique en cas d’un éventuel conflit avec la Chine et essaient d’intimider l’Iran qui, à travers les Houthis du Yémen, le Hezbollah libanais, et d’autres groupes à sa solde, crée des nuisances  aux américains qui appuient à fond les Israéliens, perturbe le jeu au Moyen Orient et aussi le commerce international dans la Mer Rouge. En bref, le monde est au bord de l’explosion.

Haïti s’implose sous des influences internes et externes et s’enfonce de plus en plus dans sa crise multiforme et multidimensionnelle, aggravée par son statut de territoire de transit de toutes sortes de trafics. Les bandits, pour ne pas dire des terroristes, contrôlent la zone métropolitaine de Port-au-Prince. Le pouvoir est dans la rue à portée de main de n’importe qui, en particulier des bandits.

La peur s’installe dans les familles. Tout le monde vit dans l’incertitude la plus totale.  La durée de vie de l’Haïtien ne tient qu’à un fil. Aujourd’hui, il réagit avec fracas contre ses bourreaux immédiats (BWAKALE), demain il l’applaudit (operasyon viv ansanm). Car il cherche une sortie, un petit trou de souris pour sortir de cette galère, de cet imbroglio. Il s’enfonce, toutes les branches, même les plus épineuses, sont bonnes à tenir pour sortir la tête de l’eau. Sans quoi c’est la mort assurée.

Les bandits promettent de renverser Ariel et le système. L’international va intervenir pour mettre le pays sur les rails démocratiques, en s’appuyant sur nos congénères d’Afrique, caribéens et autres. Les bandits ont pris les devants. Face à tout cela, que se passera-t-il ? Le règne des bandits ou une autre 1915 ? Des deux côtés, le mal est infini ! Pauvre Haïti ?