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mardi 2 novembre 2021

COVID-19, HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (20) ?, INSECURITE : LA CRISE DU CARBURANT OU LE 5E CHOC ET LE KIDNAPPING DES 17 ETRANGERS PAR 400 MAWOZO, LE 6E CHOC.

 

 COVID-19, HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (20) ?, INSECURITE : LA CRISE DU CARBURANT OU LE 5E CHOC ET LE KIDNAPPING DES 17 ETRANGERS PAR 400 MAWOZO, LE 6E CHOC.

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

1er  NOVEMBRE 2021

              Pour cette 20e chronique, consacrée à la thématique, « Covid-19, Haïti et le monde à la croisée des chemins », je pourrais me concentrer sur l’ouragan politique qui stagne sur notre pays depuis près de cinq (ans) et qui s’est intensifié depuis (i) l’assassinat crapuleux du président Moïse, (ii) le tremblement de terre du 14 août,(iii) le passage de la tempête Grace, et  (iv) la crise migratoire déclenchée par les 14,000 migrants  en septembre 21, à la frontière mexicano-américaine, à Del Rio, au Texas. Dans la 18e[1]  et la 19e[2] chronique , on a analysé les effets de ces quatre (4) chocs sur notre pays et proposé une prise de conscience tant au niveau national qu’international pour faire de la politique autrement dans le pays, orientée autour du capital humain comme tenant et aboutissant de tout processus de développement sérieux du pays et basée sur un nouveau système en équilibre parfait entre les trois (3) pouvoirs d’Etat, tournant autour de six (6) axes : l’humain, le socioculturel, l’environnemental, l’infrastructurel, l’économique et la politique/gouvernance. A une seule condition, une entente préalable entre nous autour des accords en circulation. Alors que le monde se penche sur la survie de notre planète, malheureusement, rien ne bouge du côté de nos politiciens et alliés, jusqu’à l’augmentation des cas de Covid-19 et surtout de l’insécurité qui se traduit, entre autres, en : (i) une crise de carburant considéré comme le 5e choc et (ii) le kidnapping des 17 étrangers par les 400 Mawozo, le 6e choc. Ce qui me pousse à une analyse conjoncturelle un peu plus large, avec un accent particulier sur les chocs 5 et 6 qui aggravent notre situation de peuple. D’où l’intitulé de cette 20e chronique : COVID-19, HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (20) ?, INSECURITE : LA CRISE DU CARBURANT OU LE 5E CHOC ET LE KIDNAPPING DES 17 ETRANGERS PAR 400 MAWOZO, LE 6E CHOC

Mais, avant de nous pencher sur les 5e et 6e  chocs qui continuent d’enfoncer notre pays dans l’abime, jetons un  coup d’œil sur l’actualité internationale, en particulier sur le Covid-19 tant au niveau international qu’en Haïti, et sur la COP26 en relation avec le changement climatique, qui se déroule en Ecosse du 31 octobre au 12 novembre 21. Et nous terminerons cette chronique sur des conclusions appropriées.

1.       L’Actualité Internationale

En ce mois d’octobre 2021, le monde bouge. Les camps se consolident. La Chine et la Russie et les alliés d’un côté, les USA et alliés de l’autre. Taïwan fait l’objet de menace de la part de la Chine, les USA, malgré les problèmes internes, semblent prêts à voler à son secours. Le vieux président américain, Joe Biden, tout en se penchant sur la vaccination des enfants américains, profite du 16e Sommet du G20 et  de la COP26, la conférence sur le climat, pour « se réconcilier» avec son allié, Emmanuel Macron de France, après avoir « piqué » le marché des sous-marins australiens à la France, et passer voir le souverain pontife, le Pape François, à Rome. Et avant la COP26 à Glasgow, en Ecosse, il a participé, du 30 au 31 octobre, au 16e Sommet du G20, à Rome, Italie, et en a profité pour envoyer des flèches à la Russie et à la Chine pour leur « manque d’engagement » vis-à-vis de la crise climatique qui secoue le monde.   

Covid-19 dans le monde et en Haïti[3]

Quant à notre pays, l’actualité politique haïtienne occulte tout, et nous empêche de nous pencher sur autre chose tant en Haïti qu’au niveau mondial, y inclus le covid-19. Pourtant, la pandémie est là et fait chaque jour des victimes, certainement moins que l’insécurité globale qui paralyse le pays et nous plonge dans une sorte de léthargie, une désespérance profonde, au point que tout le monde ou presque ne sait à quel saint se vouer. En tout cas, le Covid-19 est là. Au niveau mondial, on dénombre 246, 819,825 cas de contamination et 5, 001,932 cas de mortalité, tandis qu’en Haïti on dénombre 23,960 cas de contamination et 671 cas de mortalité, soit plus de 60 cas pour le mois d’octobre 2021.

              COP-26[4]

              La COP26 en relation avec le changement climatique s’ouvre à Glasgow, en Ecosse, sur fond de manifestations, le 31 octobre et se termine le 12 novembre. Cette conférence internationale sur le climat, le « dernier espoir » pour limiter la crise climatique, où « les différents Etats devront réfléchir à comment réduire davantage les émissions de gaz à effet de serre. Un moment décisif, selon les scientifiques, pour éviter un réchauffement catastrophique de la planète. »

« Cette Conférence internationale sur le climat est "le dernier et le meilleur espoir" de parvenir à limiter le réchauffement de la planète à +1,5 °C[5], objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris, a ainsi insisté son président, Alok Sharma, à son ouverture dimanche A rappeler que l’accord de Paris (COP21) avait prévu de « réduire les émissions de gaz à effet de serre pour limiter le réchauffement bien en-deçà de +2 °C par rapport à l'ère préindustrielle, si possible +1,5 °C. Mais avec les tendances actuelles, les experts climat de l'ONU (Giec) ont mis en garde contre le risque d'atteindre +1,5 °C autour de 2030 et les engagements climat des États mènent vers un réchauffement catastrophique de 2,7°C. …Avec +1 °C, la litanie des catastrophes est déjà en route, des incendies spectaculaires en Californie ou en Sibérie aux températures délirantes au Canada, en passant par les inondations destructrices en Chine ou en Europe de l'Ouest. »

 

Cette situation met l’humanité devant des « choix difficiles ». Mme Patricia Espinosa, la responsable Climat de l’ONU, a prévenu que  "L'humanité est face à des choix difficiles, mais clairs”. « Nous pouvons soit choisir de reconnaître que continuer les choses telles qu'elles sont ne vaut pas le prix dévastateur que nous devons payer et mettre en place la transition nécessaire, ou alors accepter de participer à notre propre extinction".

Après le Sommet du G20, Biden déplore le manque d’engagement de la Russie et de la Chine vis-à-vis de la crise climatique : "La Russie et la Chine ne se sont simplement pas montrées" quand il s'est agi de "prendre des engagements pour le climat", a déclaré Joe Biden au cours d'une conférence de presse à l'issue du sommet, auquel les présidents chinois Xi Jinping et russe Vladimir Poutine n'ont participé que par visioconférence. "Je trouve cela décevant moi-même", a-t-il dit, fustigeant également l'Arabie saoudite, alors qu'à ses yeux les autres grandes économies du G20 ont "pris des engagements à tous les niveaux", a rapporté le Journal Le Nouvelliste[6]

 

2.       Conjoncture haïtienne du mois d’octobre 2021

Alors que le monde analyse en profondeur les grandes questions de l’heure, en particulier la crise climatique, Haïti s’enfonce dans sa crise multiforme et multidimensionnelle liée principalement à l’ouragan politique qui nous détruit. Comme rappelé à l’introduction de cette chronique, nous avons proposé une nouvelle façon de faire de la politique dans notre pays meurtri. Cette nouvelle façon de faire de la politique devrait être précédée d’une entente entre nous, en fusionnant les divers accords  en un accord consensuel et inclusif, favorisant une gouvernance apaisée du pays en vue de répartir sur de nouvelles bases. Malheureusement, jusqu’à date, la bataille pour la prise du pouvoir d’un clan par rapport à un autre continue de faire rage. On dirait que c’est la seule préoccupation de nos politiciens et alliés socioéconomiques, même si, selon le Sénateur Lambert, certaines initiatives sont en cours en sous-main pour fusionner les accords.

En Tout cas, le Covid-19, la crise du carburant, l’insécurité et son corollaire, le kidnapping, sauf celui des étrangers, rentrent dans le décor haïtien comme des faits divers. Et les gangs, conscients de leur force, décident  du sort du pays et rythme la vie en Haïti à leur guise et à l’échelle de l’insécurité (niveau cruauté élevé), en inventant toutes sortes de stratégies, le contrôle des points stratégiques de la Capitale Haïtienne et/ou l’augmentation spectaculaire des cas de kidnappings.

 Pour ce mois d’octobre 2021, les gangs, « G9 et alliés » et « 400 Mawozo », ont décidé trois stratégies spectaculaires, (i) le blocage des points  stratégiques donnant accès aux stocks de carburant, d’où la crise du carburant (choc 5) ; le kidnapping de 17 étrangers dont 16 américains et 1 canadien (Choc 6), le 16 octobre, et (iii)  la prise d’assaut manu militari du site du Pont Rouge par le G9 pour empêcher le Premier Ministre Henry de s’y rendre le 17 octobre, et qui a dû s’enfuir à toute vitesse pour protéger sa vie. Cet incident a provoqué la démission du Directeur Général de la Police Nationale, Léon Charles, et son remplacement par Frantz ELBE.

              Dans cette 20e chronique, nous allons nous  concentrer sur la crise du carburant, le 5e choc provoqué par le G9 et le kidnapping des 17 étrangers, le 6e  choc, par 400 Mawozo, l’acte du 17 octobre par le G9 étant considéré, si l’on enlève la menace directe sur la vie du PM Henry, comme un fait divers ; en effet, depuis 2018, l’opposition plurielle avait toujours défié le président Moïse de se rendre au Pont Rouge pour commémorer l’assassinat crapuleux du premier chef d’Etat Haïtien, l’Empereur Jean Jacques Dessalines, et ce, jusqu’à  l’assassinat de Jovenel , lui-même, le 7 juillet 2021.

              Voyons ensemble, d’abord le 5e choc ou la crise du carburant et ensuite le 6e choc ou le kidnapping des 17 étrangers.

              Haïti : La  crise du carburant ou le 5e choc

              Cette crise du carburant, provoquée par le « G9 et Alliés » qui réclame le départ d’Ariel Henry pour sa complicité présumée (?) dans l’assassinat du président J. Moïse, paralyse toutes les principales activités du pays. Il faut noter que depuis bien avant l’assassinat de Jovenel Moïse, les Gangs de Martissant avaient l’habitude non seulement de kidnapper des passants au niveau de la zone mais aussi de paralyser la circulation des véhicules, en particulier les gros transporteurs, en kidnappant chauffeurs et passagers et en violant souvent les jeunes filles en plus. De même, au niveau des zones contrôlées par le « G9 et Alliés », plusieurs véhicules transportant des marchandises et du carburant avaient été séquestrés et même saisis par ce gang. Depuis l’assassinat de J. Moïse, en particulier au cours du mois d’octobre, on dirait qu’il existerait un mot d’ordre pour permettre à l’ensemble des gangs contrôlant la zone métropolitaine d’agir en même temps, Martissant où passe 40% du volume de carburant, Varreux où loge 60% du volume du carburant, desservant l’ensemble du pays, et le reste de la zone métropolitaine où se pratique le kidnapping (Croix des Bouquets, Tabarre, Delmas, Port-au-Prince, Pétionville…). On y reviendra.

              Par rapport à cette situation, les forces de l’ordre sont dépassées. Le Gouvernement également. Le changement à la tête du haut commandement de la PNH ne change rien sinon quelques arrestations mineures de bandits sans envergure. Le discours plutôt musclé du PM Henry n’a pas apporté les résultats escomptés. La normalisation attendue dans la distribution du carburant se fait plutôt difficile. En effet, les transporteurs sont kidnappés à Martissant, au moins 5, et Varreux demeure non opérationnel, selon Le Nouvelliste[7]. En attendant, le pays périclite au grand dam de l’ensemble de la population saine et travailleuse.

              Face à cette désespérance liée, entre autres, à la crise du carburant où un gallon de carburant s’achète au marché parallèle jusqu’à 2000-2500 G (20-25 USD, soit 10 fois plus cher qu’aux USA), le 5e choc après les 4 autres qui ont secoué notre pays, nos « amis » de la communauté internationale, USA en tête, le Canada, la France, l’Espagne, République Dominicaine, instruisent leurs ressortissants à ne pas mettre les pieds en Haïti et à ceux vivant en Haïti de pratiquement se terrer chez eux. Les déclarations d’appuis pour nous aider à nous en sortir ne se concrétisent pas. Parallèlement, les expulsions  des migrants haïtiens s’accélèrent (USA, Saint Domingue, Bahamas). Même les kidnappés américains et canadiens entament leur troisième semaine de captivité, malgré la présence supposée de Delta Force américaine au niveau de la frontière dominicaine et la présence de 11000 soldats dominicains déployés de l’autre côté pour empêcher les gangs de traverser. On dirait un véritable complot pour anéantir définitivement cet Etat-Nègre qui n’arrive même pas à se gouverner, ce paria de l’humanité qui a osé défier le monde civilisé en s’instituant « berceau de la liberté » et en sonnant le glas du système esclavagiste mondial. Port-au-Prince se voit donc décerné le beau titre de « Capitale mondiale du Kidnapping », selon Haitian Public Media (HPM). Quelle tristesse!    

              Haïti : Le kidnapping de 17 étrangers par 400 Mawozo ou le 6e choc

              Si la crise du carburant peut être considérée comme le 5e choc pour notre pays depuis l’assassinat crapuleux du président Moïse, le kidnapping des 17 étrangers par  400 Mawozo, qui a défrayé la chronique au niveau mondial, est le 6e choc qui a frappé notre pays en moins de 4 mois depuis cet assassinat crapuleux du pesident. Ce gang qui avait défrayé la chronique par le kidnapping des ressortissants français, semble se spécialiser dans le kidnapping des étrangers. Ce groupe n’a vraiment pas froid aux yeux, il réclame 17 M USD pour libérer les otages ; dans le cas contraire, « 400 Mowozo » menace de les exécuter d’une balle à la tête de chacun d’eux, y inclus les enfants. Comme il n’est pas à son coup d’essai, rappelez-vous qu’il avait déjà exécuté un enfant et un policier dans un passé pas trop lointain. Quand on vient d’apprendre l’exécution d’un professeur d’université très connu, Patrice Michel Derenoncourt, quand on se rappelle l’exécution récemment  de l’entrepreneur Sylvain du secteur mangue à Croix-des-Bouquets, et du massacre des policiers à Village de Dieu, on sait de quoi ces gangs sont capables.  

A date, la situation n’a pas évolué, sinon des rumeurs d’interventions de la communauté internationale, en particulier des américains, des canadiens et des dominicains. C’est une vaste comédie qui se joue à mille actes pareils et se transforme en une tragédie quotidienne pour nous autres haïtiens. Et sur les cadavres liés à cette tragédie, nos politiciens et alliés se battent pour les broutilles du pouvoir. On dirait des vampires assoiffés de pouvoir comme du sang. La soif du pouvoir les pousse à nous enfoncer dans cette tragédie,où du sang innocent coule à flot et qui n’est autre que le résultat de la division qui nous ronge. « Ote-toi que je m’y mette », pour cela, tous les moyens sont bons, en particulier la gangstérisation totale du pays (« Chacun a son gang », n’est-ce pas Sénateur Sorel Jacinthe), qui se transforme en terrorisme là sous nos yeux, sans que nos amis, en particulier les américains, n’osent la qualifier ainsi. Ce qui est considéré comme du terrorisme par les américains pour d’autres pays ne l’est pas pour Haïti. Donc, il faut continuer avec la politique de F. D. Roosevelt vis-à-vis de notre pays, il faut encourager la division entre les haïtiens de toutes catégories socioéconomiques, c’est la seule façon de dominer ce peuple rebelle.

3.       En guise de conclusion

              Les deux (2) nouveaux chocs, la crise du carburant et le kidnapping des 17 étrangers qui viennent s’ajouter aux quatre (4) chocs précédents, l’assassinat crapuleux du président Moïse, le tremblement de terre du 14 août, le passage de la Tempête Grace, et la crise migratoire, plongent un peu plus notre pays dans l’abime. Il n’y a aucun signe encourageant de la part de nos politiciens et alliés pour arrêter la chute vertigineuse dans ce trou sans fond.

Dans cette bataille pour accéder au pouvoir politique et continuer la capture de l’Etat, nos politiciens et alliés socioéconomiques, ont pollué l’atmosphère du pays de fumée de pneus enflammés, de militants sociopolitiques, de gangs qui ont fini par s’automiser, non pas en se retournant contre leurs mentors mais contre de paisibles citoyens sans défense que nous sommes. Comme l’a fait remarquer un jeune collègue, aucun politicien n’a été victime de kidnapping jusqu’ici. Quant à nous autres, nous sommes à la merci de ces gangs qui ont droit de vie et de mort sur chacun de nous, sans exception.

Ces gangs décident de la marche du pays. Comme leurs décisions ne vont pas dans le sens du bien-être de la majorité, c’est le pays entier qui en subit les conséquences : une économie en totale déconfiture, taux de change autour de 100 G. pour 1 USD, taux de croissance négatif pour la 3e année consécutive et oscillant entre (-0.9 à -2.3%), selon l’économiste Thomas Lalime[8]. Ce qui porterait le taux cumulé pour les trois années autour de -6 à -7%. C’est une situation désastreuse pour Haïti. Alors   que la République Dominicaine à côté enregistre +10% de croissance pour l’année 2021, selon T. Lalime.

Tout le monde est décapitalisé un peu plus chaque jour. Pour ceux-là qui sont victimes de kidnapping, c’est l’économie de toute une vie qui part en fumée, c’est la perte de leur dignité pour certaines personnes et c’est la mort pour d’autres, malgré le paiement des rançons faramineuses exigées.

Nos responsables au pouvoir et leurs opposants se regardent en silence ou en chiens de faïence, au lieu de fusionner les accords dans le cadre d'une entente inclusive ou d’un deal gagnant-gagnant pour eux-autres et pour le pays. « L’ôte-toi que je m’y mette » ne mène à rien. On a l’exemple de l’assassinat de J. Moïse. A quoi cela a servi? Je sais que, pour la plupart d’entre nous, « yo mal touye’l men li byen mouri », (« on l’a mal tué mais c’est bien qu’il soit mort »). Epi anyen !

Nos chers politiciens de tous bords et alliés,  vous ne comprenez rien à rien, le blanc est bien content de nous voir divisés, de nous voir continuer à nous battre pour des broutilles du pouvoir dans ce pays exsangue. Comment des gens qui ont un si grand niveau de savoir n’arrivent-ils pas à comprendre une chose aussi simple ? Mettez-vous ensemble pour sauver ce pays. Il n’y a pas d’autres alternatives. Bon sang ! A bon entendeur salut !!!



[1] https://jrjean-noel.blogspot.com/2021/09/haiti-et-le-monde-la-croisee-des.html

[2] https://jrjean-noel.blogspot.com/2021/10/haiti-et-le-monde-la-croisee-des.html

vendredi 1 octobre 2021

HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (19), CRISE MIGRATOIRE A LA FRONTIERE DU TEXAS, LE 4E CHOC OU LA FASCINATION HAITIENNE POUR « L’ELDORADO AMERICAIN »

 

HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (19), CRISE MIGRATOIRE A LA FRONTIERE DU TEXAS, LE 4E CHOC OU LA FASCINATION HAITIENNE POUR « L’ELDORADO AMERICAIN »

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

1er  OCTOBRE 2021. REVU LE 5 OCTOBRE 2021

Dans la chronique du mois d’août 21, la 18e  sous le même thème depuis mars 2020, Haïti et le monde à la croisée des chemins[1] (?), nous avons analysé les trois chocs qui ont secoué Haïti du 7 Juillet 21 au 17 août 21, à savoir (i) l’assassinat crapuleux du président Moïse, (ii) le tremblement de terre du 14 août, et (iii) le passage de la tempête Grace, le 17 août, et nous  avons aussi passé en revue certains éléments de l’accord de Montana du 30 août et autres. Malgré la signature de l’accord du PM Henry, le 11 août 21,  par l’aile la plus radicale de l’opposition politique à Jovenel Moïse, la situation sociopolitique haïtienne continue de se détériorer beaucoup plus qu’elle était durant  les 4 ans et plus de la présidence de Jovenel Moïse, à cause de son corolaire le kidnapping[2] qui a monté d’un cran ces deux dernières semaines, à cause du Covid-19 toujours présent mais ignoré par la majorité des haïtiens, trop occupés à survivre dans l’enfer haïtien dominé par les gangs qui contrôlent la zone métropolitaine de Port-au-Prince. En outre, le pays vient de connaitre une crise migratoire, avec l’arrivée d’une quinzaine de milliers d’haïtiens en provenance de l’Amérique du Sud (Chili, Brésil) sous le Pont Del Rio, à la Frontière mexicano-américaine au niveau de l’Etat du Texas. Cette crise migratoire constitue un 4e choc pour Haïti depuis l’assassinat du président Moïse. D’où le titre de cette 19e chronique consacrée à la conjoncture du mois de septembre 2021: « COVID-19, HAITI ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS ? (19), CRISE MIGRATOIRE A LA FRONTIERE DU TEXAS, LE 4E CHOC OU LA FASCINATION HAITIENNE POUR « L’ELDORADO AMERICAIN ».

Dans la chronique consacrée à la conjoncture du mois de septembre 2021, on jettera un coup d’œil rapide sur la situation haïtienne après les trois premiers chocs, on insistera sur le 4e choc, ses causes et conséquences sur  un pays en ruine après trois années consécutives de décroissance (PIB=-7%), et on utilisera quelques éléments de cette crise multiforme et multidimensionnelle, pour dégager des perspectives en vue de nous redonner de l’espoir.

    A.    La Situation Politique haïtienne  Par Rapport Aux Trois Chocs :

Avant de nous étendre sur l’omniprésence du sacrosaint aspect politique, voyons ce qui se passe avec le Covid-19. Au niveau mondial[3], on relève 233,833,601 cas  de contamination, 4,784,678 cas de mortalité; tandis qu’en Haïti, la situation se présente ainsi : 21,647  cas de contamination, 610 cas de mortalité. On est trop occupé ici en Haïti à fouetter d’autres chats, pour nous pencher sur le Covid-19, en particulier le cyclone  politique, qui demeure notre sport favori.

Par rapport aux 3 chocs, Assassinat De J. Moïse, Tremblement De Terre Du 14 Aout 21, Tempête Grace 17 Aout 21, la situation du cyclone politique, concentrée au niveau de la zone métropolitaine avec des conséquences socioéconomiques de plus en plus graves sur l’ensemble du pays, s’envenime. La macrocéphalie de la zone métropolitaine, où tout se concentre, empêche à nos politiciens et alliés de prendre conscience de la souffrance infligée au pays par la polarisation clanique et la défense d’intérêts mesquins des clans au détriment de ceux du pays. On dirait qu’ils ne sentent même le danger interne et externe qui nous guette. En tout cas, s’ils le sentent, ils s’en fichent au grand dam de la majorité silencieuse qui se terre ou s’expatrie (ceux qui en ont les moyens).

   Depuis l’assassinat de Jovenel Moïse, tous les chantiers d’irrigation, de transport, d’électricité sont suspendus. Les projets sous financements internationaux également. Actuellement, seule la péninsule Sud a un semblant de fonctionnement lié aux chocs 2 et 3. Les premiers éléments liés au PDNA 2021 consacré au grand sud, se traduisent, en termes de  pertes et dommages, en une valeur de 1.5 milliards d’USD,  soit 10% du PIB, estimé en USD courant à 15 Mrds. J’estime que les coûts des dégâts sont sous-estimés. Avec près de 138,000 maisons effondrées et gravement endommagées, des écoles, hôpitaux, églises, hôtels, systèmes d’irrigations, réseaux routiers et ouvrages d’art endommagés, des jardins pentus endommagés, des jardins en plaine inondés et des récoltes perdues ainsi que des pans entiers de forêts, d’arbres fruitiers éboulés, etc., j’estimerais à 20% du  PIB de 15 Mrds d’USD, la valeur des dégâts, soit un montant de 3 Mrds d’USD. De toute manière, j’adopterai le montant final des pertes et dommages décidé par le PDNA officiel, malgré mes réserves.

    Je voudrais signaler  à l’attention des autorités centrales et locales du pays, une proposition du GRANH, rapportée par le Dr Samuel Pierre lors d’une interview avec le Dr Jean Fils Aimé[4], pour la construction de 140,000 maisons à raison de 8,000 USD/Unité, pour la péninsule sud d’Haïti. Au lieu de répéter les erreurs du passé et reconstruire pareil, il serait bon pour le gouvernement d’adopter ces modèles parasismiques et para cycloniques, qui éviteraient, avec une supervision sérieuse lors de la reconstruction, les pertes et dommages aux passages des prochains cyclones et du prochain tremblement de terre. Même si le montant de 8,000 USD/U ne vise, à mon avis, que la grande masse nécessiteuse et non les catégories les plus huppées, qui, elles, pourraient profiter des facilités offertes par la Banque de la République d’Haïti, la Banque Centrale, pour reconstruire leurs maisons.

Espérons que nos dirigeants actuels, alliés et adversaires, au lieu de mettre en avant la prédominance de la lutte pour le pouvoir, de continuer avec la « déjovenélisation », se concentreront sur la reconstruction de la péninsule sud d’Haïti, sur le combat contre l’insécurité et le kidnapping (priorité absolue) et contre la domination des gangs au niveau de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, et assureront une gestion plus sérieuse de la crise migratoire par des politiques publiques axées principalement sur la capital humain haïtien.

B.    Le 4e Choc : Crise Migratoire A La Frontière Du Texas Ou La Fascination Haïtienne Pour L’eldorado Américain

Dans cette partie de la chronique, on parlera des faits liés à cette crise migratoire, les réactions provoquées aux USA, en Haïti et au niveau mondial, l’espoir que suscitent deux interviews réalisées par des confrères avec une fille de 10 ans et un garçon de 9 ans, et on jettera un coup d’œil un peu plus approfondi sur la question migratoire vers Haïti et vers l’extérieur du pays du 19e siècle à date.

2.1        Les faits, de l’Amérique du Sud à l’Amérique du Nord

Depuis quelque temps, il a été signalé le voyage périlleux effectué par des haïtiens de l’Amérique du Sud à l’Amérique du Nord, avec un seul objectif : atteindre l’Eldorado Américain. On a eu des reportages sur des groupes d’haïtiens en difficulté sur ce long parcours soldé dans certains cas par des disparitions. Malheureusement, à cause de la crise politique, l’administration Moïse ne s’est pas vraiment penchée sur la question.

Vint la campagne électorale pour la présidentielle américaine de 2020, où, contrairement à Donald Trump qui avait entamé la construction d’un mur le long de la frontière avec le Mexique, le candidat Biden avait promis un assouplissement dans la politique migratoire des USA. Les Haïtiens, qui rêvent de l’Eldorado Américain, une fois Joe Biden élu, ont pris la décision de rentrer aux USA, quoi qu’il en coute. A l’assassinat de Jovenel Moïse, Joe Biden a, dans un souci de faire un geste, promis le TPS à tout Haïtien qui se retrouve sur le sol américain à la date du 29 Juillet 2021. Malheureusement, cette information a été déformée par certains acteurs impliqués dans l’organisation des voyages. C’est ainsi que des Haïtiens, en général minoritaires au niveau de la frontière américaine, se retrouvent en majorité sous le pont à Del Rio. Ils étaient au nombre 14,000 migrants haïtiens, selon des sources concordantes.

La police américaine à la frontière de l’Etat du Texas a essayé de les contenir, mais, malheureusement, ils ont dû utiliser les chevaux et les rennes pour les contenir. Les images sont choquantes et rappellent un passé encore dans la mémoire des américains noirs des Etats du Sud des USA. L’administration Biden a agi dans la précipitation, pour refouler des milliers d’Haïtiens sans respect de leurs droits d’asile. 5405 migrants haïtiens ont été déportés du 19 au 29 septembre 21[5] dans l’enfer haïtien dominé par des gangs armés, des kidnappeurs et des politiciens véreux,  sans aucune autre forme de procès, soit une quantité largement supérieure aux 2248 personnes péries dans le tremblement du 14 aout 21. Et cela continue malgré une certaine sourdine pour cacher le pot aux roses, car, selon des sources dignes de foi, 30,000 autres Haïtiens seraient en route vers l’Eldorado Américains et Fox News parle de 85,000 Haïtiens en route vers les USA. Un véritable défi à gérer dans les prochaines semaines par l’administration Biden.  Les réactions ne se sont pas fait attendre tant aux USA qu’au niveau mondial.

2.2.       Les réactions par rapport aux traitements des migrants haïtiens

L’administration Biden, qui venait d’essuyer un échec cuisant au niveau de l’Afghanistan, et qui a eu un traitement particulier pour les 80,000-95,000 Afghans admis aux USA pour leur collaboration avec les administrations américaines durant 20 ans, est clouée au pilori pour la déportation  des Haïtiens. Deux poids deux mesures pour un pays nègre, Haïti, qui est sous l’influence américaine depuis 1915, et qui a sonné le glas du système esclavagiste mondial en se déclarant indépendant après une guerre acharnée contre l’empire colonial français.

L’envoyé Spécial en Haïti par l’administration Biden, Daniel Foote, a donné sa démission avec fracas à cause du traitement infligé à nos compatriotes. Il a dénoncé la politique américaine en Haïti, il a acculé l’ambassade américaine, dénoncé le Core group, composé de la Représentante de l’ONU en Haïti, Madame Lalime, et des principaux ambassadeurs accrédités dans le pays, dans la gestion du dossier Haïti, et passé un savon au gouvernement corrompu d’Haïti. Cette démission fracassante du diplomate américain a jeté de l’huile sur le feu. Il en a été de même un peu plus tard pour celle d'un autre haut fonctionnaire du département d'Eta américain, Harold KOH.  Le Président Biden a dû assumer seul toute la responsabilité de ce qui s’est passé à Del Rio. 

Ce dossier a causé beaucoup d’émoi au niveau mondial et a beaucoup affaibli l’administration Biden à l’intérieur, ce qui l’a poussé à envoyer deux émissaires de haut niveau en Haïti, le 30 septembre 21. Que veulent les américains pour Haïti[6] ? S’est questionné Le Nouvelliste. Le parti Républicain s’est, entre temps, emparé du dossier et profite de chaque information (vraie ou fabriquée) pour critiquer la politique migratoire de Biden, et étendre ses critiques sur tout ce que fait Biden, pour arriver à mettre l’opinion américaine de son côté en vue des élections de 2022, pour regagner la majorité au niveau du Congrès et au niveau du Sénat. Pour cela, les républicains profitent de la division au sein du parti Démocrate (l’aile gauche vs l’aile modérée), pour remettre en question toute l’action de l’administration Biden.

Le Gouvernement Haïtien a réagi par l’intermédiaire de son Ambassadeur à Washington, Edmond Bocchit, son représentant à l’ONU, et par l’intermédiaire de son Premier Ministre, Ariel Henry, lors de sa prise de parole à la 76e Assemblée Générale, à New York. Au niveau interne en Haïti, c’est l’émotion en de pareils cas. Les réseaux sociaux s’enflamment, le simple citoyen et la plupart de nos politiciens condamnent l’administration Biden et les démocrates.

Quant aux  dominicains, ils prennent le dossier à bras le corps, par l’intermédiaire de leur Président Abinader[7] qui  constitue un groupe de trois pays, victimes de la migration haïtienne, le Costa-Rica et le Panama, pour porter le dossier Haïti devant les instances internationales concernées pour une intervention en Haïti pour « pacifier la nation voisine ». « Cette « Alliance pour le renforcement de l'institutionnalité démocratique » a été signée à New York par le président du Costa Rica, Carlos Alvarado ; celui du Panama, Laurentino Cortizo, et celui de la République dominicaine, Luis Abinader, au bureau de la Mission permanente de la République dominicaine auprès des Nations unies". Rapporte le quotidien Haïtien Le Nouvelliste.

A remarquer que Haïti n’a pas été consultée. En tant que "pays failli", le voisin décide et propose à notre place. A ce qu’il parait un avion dominicain survole déjà cinq départements pour « photographier » le pays, selon ce qui est rapporté dans la presse haïtienne. Certains parlent même d’une intervention militaire probable des dominicains. Ce qui reste au stade de rumeur et n’est pas non plus à l’avantage des dominicains avec tous les risques que cela comporte. En tout cas, cette rumeur devrait interpeller les dirigeants actuels du pays. De toute manière, deux enfants nous font comprendre que, contrairement à tout ce qui se passe, tout n’est pas perdu pour notre chère Haïti.   

2.3.       L’espoir venu de deux enfants haïtiens de conditions modestes 

Ma petite chirurgienne en Herbe

Naïka 10 ans, qui vient de faire le parcours Chili-Amérique du Nord avec son père, sa mère et sa petite sœur, a été interviewée par Guy Wewe[8] sur sa chaine You Tube. Elle a laissé Haïti à 8 ans pour le chili. Elle est contente de « n’être pas déportée » contrairement à d’autres, mais si ç’avait été le contraire, elle aurait accepté et continuerait à se battre. Comme elle a cette chance d’être acceptée dans ce « pays de luxe », elle va se battre (lutter) pour en profiter et travailler pour réaliser ses rêves et aider sa famille. Elle veut être « chirurgienne » pour aider les démunis. C’est ma petite chirurgienne en Herbe.

Mon « petit entrepreneur de la rue de 9 ans, vendeur de Kokiyol»

Quant au petit garçon de 9 ans, Son, c’est un entrepreneur né. Il vend des kokiyol tous les jours. Il fait 100 pour 100 de bénéfice. Il paie ses déplacements en camionnette. Il met de l’argent de côté pour payer son écolage. Il a profité de la présence des déportés dans la zone de l’Aéroport International Toussaint Louverture, pour venir vendre ses Kokiyol. Il vit avec un ami et sa maman est en province. Quand il sera grand, il voudrait être policier pour régler leur compte aux vagabonds qui font du désordre.   C’est mon « petit entrepreneur de la rue de 9 ans, vendeur de Kokiyol».

N’y-a-t-il pas de quoi cultiver de l’espoir  pour cette Haïti de demain ?

2.4.       Bref coup d’œil  sur la question migratoire en Haïti

Savez-vous qu’au 19e siècle, la migration se faisait essentiellement vers Haïti ? Sous le long règne de Boyer (1818-1843), on recevait les américains noirs fuyant l’esclavage aux USA et d’autres personnes souffrant de l’oppression esclavagiste au niveau de la région. Le commerce de gros était dominé par des Francais, des Allemands, qui en profitaient, contrairement a la loi, pour se mettre au détail aussi. Ce qui a révolté les commercants haïtiens, selon Vernet Larose. Plus tard, à partir de la signature du Concordat en 1860 avec le Vatican, les religieux étaient revenus s’installer  en Haïti pour évangéliser et éduquer les Haïtiens. Un peu plus tard et même avant, sous les règnes de F. Soulouque (1847-1859), de F. Géffrard (1859-1867), de N. Saget (1970-1974) et L. Salomon(1879-1988) où Haïti était un « pays prospère » selon le Journaliste/historien Ady Jean Gardy, il a été relevé la présence de beaucoup d’étrangers, dont des français, des Allemands et des Arabes en provenance du Liban, de la Syrie à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle. Et durant la 2e guerre mondiale (1939-1945), Haïti a ouvert ses portes à des juifs, objets de persécutions en Europe par le Reich allemand et ses alliés.

Durant tout le 19e siècle, seuls nos chefs d’Etat et quelques membres de leur famille et de leur entourage partaient pour l’exil lorsqu’ils étaient destitués à coup de « révolutions ». Cela a commencé avec Boyer. Il faut noter que, durant la période d’occupation de l’Est par Boyer, il y avait un va-et-vient d’un côté comme de  l’autre de l’Ile d’Haïti. A part ces cas, les migrants haïtiens vers l’extérieur étaient constitués surtout d’étudiants (une constante dans l’histoire de notre pays), de cadres qui allaient parfaire leur formation en Europe, surtout en France, et plus tard (20e et 21e siècles) dans tous les autres continents, en particulier en Amérique du Nord.

La grande migration haïtienne de masse vers l’étranger remonte à un siècle, en particulier durant la période d’occupation américaine 1915-1934. Les masses rurales haïtiennes étaient encouragées, à partir de 1919, à aller travailler à Cuba et en République Dominicaine, par les américains qui étaient associés dans les usines sucrières de ces deux pays. Il ne faut pas oublier que les masses rurales étaient des réservoirs où puisaient les gens (politiciens) qui voulaient assauter le pouvoir à Port-au-Prince et aussi des patriotes  qui ont combattu les américains dans les premiers moments de l’occupation, avec Charlemagne Péralte et Benoit Batraville. Cette habitude est restée et se perpétue jusqu’à Duvalier.

Dans les années 1960, avec les balbutiements de la dictature, les élites ont vraiment laissé le pays en masse pour l’Afrique, le Canada, l’Amérique du Nord, pour les Antilles aussi et l’Amérique du Sud. Sous les  Duvalier, le phénomène allait prendre de l’ampleur et se maintenir jusqu’à date avec des vagues successives liées aux cyclones politiques et aux phénomènes naturels. Par exemple, après le tremblement de terre de 2010, ç’a été la ruée vers le Brésil et après le passage de Matthew  en 2016, ç’a été le tour du chili. Valéry Numa a immortalisé tout cela dans des documentaires sérieux, « Destination Brésil », « Chili à tout prix » et «  TPS ». On a donc connu le phénomène de « Fly People », de « Boat people ».

On estime actuellement la diaspora haïtienne à 3-4 millions de personnes à travers le monde, dont la grande majorité se retrouve dans l’Eldorado Américain (1.2 à 1.5 M, selon certaines sources), tandis que la République Dominicaine héberge 800 mille à 1 million de migrants haïtiens, et le reste éparpillé sur plusieurs continents. Selon la Banque Mondiale, 84% des cerveaux haïtiens sont à l’extérieur du pays (fuite des cerveaux). Le côté négatif de cette histoire, le pays manque cruellement de cadres pour réaliser son développement. Le côté positif, c’est la diaspora haïtienne qui permet à ce pays de tenir avec des transferts en nette progression (2 à 3.5 Mrds d’USD) d’année en année, surtout en période de catastrophes naturelles, tectoniques,  anthropiques (cyclones politiques) et pandémiques (Covid-19).

C’est vrai que, depuis plus de 70 ans, l’haïtien se comporte comme quelqu’un en transit, à la recherche d’opportunités n’importe où sur la planète terre. Son point d’attache préférentiel reste les USA. C’est son Eldorado. On comprend très bien le pourquoi des gens qui ont une résidence au Chili et au Brésil pour la plupart, risquent leurs vies et celles des enfants pour atteindre cet eldorado. C’est la fascination de l’haïtien pour l’Eldorado Américain, « ce pays de luxe » où l’argent se ramasserait à la pelle. Et pourtant !

C.          Conclusion et perspectives         

Le 4e choc décrit plus haut, ce phénomène migratoire de nos frères et sœurs au niveau de la frontière du Texas, à Del Rio, a , une fois de plus, une fois de trop en moins de trois mois, fixé les projecteurs du monde entier sur notre pays. Nous projetons une image négative de notre pays à la face du monde. Mais le traitement infligé à nos compatriotes qui se retrouvent à la frontière américaine, dans cette situation  dégradante, est  en partie la faute des américains qui, depuis l’occupation américaine, ne cessent de s’ingérer de manière grossière dans la gestion interne de l’action gouvernementale en Haïti. C’est aussi notre faute à nous qui ne cessons depuis belle lurette de courber l’échine devant les américains et appliquons à la lettre leurs diktats, sans  mettre en place de manière constante des politiques publiques tournées vers la grande majorité de nos compatriotes.

En ce sens,  la lettre  de démission de Daniel Foote et surtout la démission fracassante de Harold Koh, un haut fonctionnaire du Département d'Etat, pourraient faire prendre conscience aux américains de leurs approches politiques néfastes en Haïti, en contribuant à cette désespérance haïtienne les poussant à émigrer vers les rives inhospitalières américaines, cette grande puissance vendue comme un Eldorado à nos compatriotes, et faire prendre conscience au Core Group d’éviter d’imposer leurs points de vue aux responsables haïtiens.

Les réflexions  et  actions d’Abinader ainsi que les démissions francassantes de Foote et de Koh pourraient pousser les acteurs politiques haïtiens, la société civile et le secteur privé,  à trouver un terrain d’entente inclusive pour Haïti,  en fusionnant l’accord de Montana du 30 Août et celui du PM Henry du 11 Septembre 21 et les deux autres, malgré le processus de déjovenélisation inscrit dans ces accords et mis partiellement en application par le PM Henry dans la plupart de ses actes, démission du Secrétaire général du Conseil des Ministres, Renald Lubérice, révocation du Ministre de la Justice, Rockfeller Vincent et du Commissaire du Gouvernement de Port-au-Prince (insubordination), l’élimination du CEP controversé, la mise en veilleuse des actions en cours. Certains actes posés par le PM sont revendiqués par le secteur démocratique et populaire (SDP) par la voix d’André Michel, qui a précisé avoir exigé tout cela du PM, et que Jovenel Moïse n’a rien à voir avec la nomination du PM Henry. C’est l’œuvre des américains et du Core Group.

Espérons que le séjour en Haïti, du 30 septembre au 1er octobre, de Brian A Nichols et de Juan Gonzalez, les deux émissaires du Gouvernement Américain, après leurs rencontres avec des groupes de la Société Civile et des acteurs politiques, et la présence de Martine Moïse, venue au pays pour repondre aux questions du juge d'instruction en charge du dossier d'assassinat de son mari, ainsi que sa tournée triomphale dans le grand sud du pays,  finiront par pousser ces acteurs haïtiens à s’entendre pour enfin s’occuper de choses sérieuses, (i) la question sécuritaire, (ii) la reconstruction suite au tremblement de terre du 14 août, (iii) la mise en branle d’un programme d’apaisement social, (iv) la continuation des actions en cours, (v) la reprise du processus de révision de la constitution et du processus électoral, (vi) l’organisation des consultations populaires pour l’approbation de la nouvelle constitution ou non et (vii) la réalisation des élections inclusives pour le choix des autorités légitimes qui prendront en charge les destinées du pays.

Ainsi, ces deux enfants, qui nous redonnent de l’espoir par leurs réflexions et actions (Réf. 2.3), trouveront une Haïti nouvelle pour vivre, évoluer et assurer la relève dans cette Haïti régénérée. Cette Haïti connaitra un développement harmonieux grâce à un nouveau système en parfait équilibre, basé sur un triangle équilatéral caractérisant les trois pouvoirs d’Etat et axé (i) sur un Capital Humain en parfaite santé et bien éduqué comme tenant et aboutissant du processus de développement ; (ii) sur un Capital Social et Culturel très bien organisé ; (iii) sur un Capital Environnemental totalement régénéré ; (iv) sur un Capital Infrastructurel très bien zoné, normé, supervisé, contrôlé et entretenu ; (v) sur un Capital Economique et Financier inclusif, et (vi) sur un Capital Politique orienté vers une gouvernance responsable, efficace, efficiente et redevable vis-à-vis de la nation.