HAITI :
BUDGET 2012, DEMARRAGE RECONSTRUCTION OU
DEBUT PROCESSUS DE DESTITUTION ?
JEAN
ROBERT JEAN-NOEL
29
JANVIER 2012
D’un côté le
Gouvernement s’agite présentant son bilan devant l’assemblée nationale et, par
la suite, dégageant des perspectives pour l’exercice en cours à partir d’un
budget de 121.00 Mrds de Gourdes (3 Mrds USD environ). Le 12 janvier 2012, Haïti
a reçu ce beau bâtiment universitaire de Lyonel Fernandez d’une capacité de
10,000 étudiants et localisé à Limonade dans le Nord d’Haïti. La Présidence a
présenté son programme « ABA GRANGOU » en s’appuyant sur l’ensemble
des programmes ayant une incidence sur la sécurité alimentaire, en particulier
sur le plan national de sécurité alimentaire et nutritionnelle (PNSAN
2010-2025). Le Ministre des affaires étrangères, accompagné des Ministres du
Commerce, du Plan et du Tourisme, a visité la France et est reçu avec honneur
au Quai d’Orsay . Le Président a été au Forum de Davos pour promouvoir Haïti
dans le cadre de sa politique de « diplomatie des affaires et du
développement » et parler de cette armée en soutien au développement dont
le rôle principal s’articulerait autour de la protection des investissements et
qui aurait reçu l’appui de La France.
D’un autre coté, le
Parlement a ouvert sa session du 2e lundi de janvier 2012 avec la
participation du Président et du Premier Ministre et en procédant aux élections
au niveau des deux chambres avec des victoires du Groupe GPR renforçant par
ainsi sa position au Parlement et ses moyens de négociation avec le
gouvernement. Le Senat, sur fond d’un scandale financier (questure), mène une
enquête sur la nationalité du Président et de certains ministres avec
possibilité de destitution du Président
en cas de véracité des révélations. La Chambre des députés enquête sur
« l’affaire Bélisaire » avec convocation de ministres qui pourraient
être destitués et peut-être le Président. Qu’en est-il des membres du Parlement
qui auraient la double nationalité ? La question n’est même pas agitée. Et
puis, quand bien même cela serait, qui oserait agiter une telle question ? En
tout cas pas l’Exécutif qui a le dos au mur et qui n’aimerait pas entrer en
conflit avec un Parlement si fort et si puissant drapé dans son immunité et
capable, si se sentant menacé, de tout chambarder y inclus le budget!
Le budget 2012 non idéal mais acceptable
Avec près de 3 Mrds
d’USD de budget pour l'exercice en cours, le Gouvernement Conille respecte la déclaration de
politique générale du Premier Ministre. La croissance du PIB prévue est autour
de 8% au lieu de 9% prévue par la politique générale. Les autres éléments
macroéconomiques restent les mêmes (réf. http://www.jrjean-noel.blogspot.com/2011/12/haiti-bilan-2011-et-perspectives-2012.html
et http://www.jrjean-noel.blogspot.com/2011/10/haiti-politique-generale-du-dr-conille.html).
Ce budget a été présenté au grand public grâce à l’initiative du Group
Croissance. L’initiative est historique. Bravo Kesner Pharel et Bravo Monsieur
le Ministre de l’Economie et des Finances qui s’est prêté au jeu de bon cœur !
Le budget devient l’affaire de tout le monde et on peut se positionner par
rapport aux orientations données dans ce projet de loi budgétaire. Il y a
beaucoup de critiques et pas des moindres. L’important c’est que le
Gouvernement s’est donné les moyens de sa politique, tout au moins pour
certains secteurs comme l’éducation avec environ 15% du budget. L’agriculture,
l’un des piliers de la croissance, n’a pas reçu les 10% souhaités globalement,
mais on n’ y est pas trop loin si on se réfère à la composante investissement
du budget ; en tout cas, c’est nettement meilleur par rapport aux budgets
précédents. Il faut continuer à sensibiliser les Dirigeants par rapport à cette
problématique : 10 à 15% du budget national par rapport à un secteur qui
représente 25% du PIB, c’est plutôt acceptable et un petit peu équitable !
La balle est maintenant dans le camp du Parlement qui aura à faire de ce budget
une loi.
Les grands dossiers du Parlement et l’urgence du budget
2012
Le Parlement est
tellement occupé dans l’agitation de grands dossiers, de grandes questions
comme l’affaire Bélisaire, la double nationalité de certains membres du
Gouvernement, la triple nationalité du Président. On se demande s’il aura le
temps de se pencher sur ce petit dossier
de budget national ! Trêve d’ironie ! Nous pensons que le budget est
l’urgence des urgences pour Haïti actuellement. Le Gouvernement a fait son
travail c’est au Parlement de faire le sien et de donner une réponse urgente à
ce dossier. Il y va du développement de notre pays, de cette révolution de
croissance à la mesure de nos ambitions avec une bonne répartition des fruits
de cette révolution de croissance (Réf. http://www.jrjean-noel.blogspot.com/2011/05/haiti-necessite-dune-revolution-de.html),
et, ce, indépendamment de la nationalité
réelle ou supposée de nos dirigeants tant au niveau du Gouvernement qu’au
niveau du Parlement. Au moins avec cette loi budgétaire, l’Etat se donnera les moyens d’une certaine
politique qui pourrait amorcer une politique certaine tournée vers le
développement durable de notre pays si on s’y mettait tous sans exclusive.
Alors, évitons coûte que coûte de lier ces dossiers. Nous insistons auprès du
Parlement pour l’inciter à se pencher sur le budget toutes affaires cessantes.
Il y va des moyens de notre politique.
Les moyens de notre politique
L’exercice
précédent, la loi budgétaire prévoyait 8.9% de croissance. Malgré nos
turpitudes, des querelles sans grandeur, des luttes de chapelle, nous avons
atteint 5.5% de croissance avec des dégâts électoraux dépassant 100 M USD selon
nos économistes. Cette année 2012, il est possible de faire mieux et même de
nous rapprocher de la prévision de 7.8% de croissance si nous acceptons de nous battre pour Haïti et
non pour nos petits intérêts mesquins, en commençant par voter la loi
budgétaire certes avec quelques légères modifications allant dans le sens de sa
bonification mais rapidement. Ainsi nous nous donnons les moyens de notre
politique, malgré notre éducation.
Les traits dominants de l’Haïtien liés à son éducation
Et, si malgré tout,
nous accordons plus d’importance au dossier de destitution ? En Haïti, les
questions économiques sont toujours tributaires de la politique. C’est lié à notre
éducation. Cela explique en partie notre sous développement. Nous aimons trop
les débats creux, les phrases bien tournées qui ne veulent rien dire. Nous
préférons étudier, réétudier les choses, 3 à 4 fois par peur d’affronter la
réalité. Nous gaspillons du temps et de l’argent. Et, quand, enfin, nous nous décidons à agir, nous constatons que, malgré tout, les résultats ne traduisent
que 50 à 65% des études effectuées. Souvent, nous mettons les études de coté
pour mieux gargoter. De toute manière, pour réaliser de grandes choses, il faut
bien les étudier, bien les exécuter avec les moyens disponibles et dans les
délais impartis. L’improvisation ne mène qu’à de piètres résultats à moins
d’être des génies. Or les génies ne courent plus les rues. D’où nos malheurs.
Le principal responsable de nos malheurs, les faiblesses institutionnelles
Bref, si l’Etat était
bien organisé, bien structuré et muni de tous ses instruments de contrôle ,
aucune personne n’oserait violer la loi impunément. Ce qu’on vit actuellement
en termes de doute, d’incertitude, de révélations (?) ne permettrait pas de
parler de destitution de nos dirigeants. La loi aurait sévi contre les
contrevenants. Ils n’auraient pas passé
le cap car ils auraient été stoppés à un niveau ou à un autre. Malheureusement,
les faiblesses institutionnelles nous ont contraient à valider l’invalidable.
Dans l’état actuel des choses, on ne peut se permettre d’aller jusqu’au bout de
nos questionnements sous peine de déboucher sur des situations ingérables et préjudiciables
à l’ordre public haïtien. Aussi serait-il sage de considérer tous les haïtiens
comme des haïtiens d’origine et leur permettre d’accéder à n’importe quelles
fonctions eu égard à leurs qualifications et expériences. Ce qui conduirait
Haïti et ses fils à une forme d’entente
non suicidaire.
L’entente pour éviter le suicide
La reconstruction
ne pourra se réaliser dans le désordre. Aussi prions-nous le Parlement de faire
son travail d’enquêtes sur l’Exécutif dans la discrétion et l’efficacité en
évitant de donner cette impression de régler son compte a l’Exécutif. Et
puis au cas où les révélations se seraient vérifiées, il faudrait mettre en
place le processus de destitution qui nécessiterait du temps, des négociations,
des dispositions légales, etc. Nous ne pouvons pas nous payer le luxe de tout arrêter sous
prétexte de destituer. La reconstruction ne peut donc être suspendue au rythme
indolent d’un hypothétique processus de destitution. Alors, essayons de trouver
un consensus autour de la notion d’Haïtien d’origine sans limitation de fonction.
Et la Constitution dans tout ça ? Changeons-la ou amendons-la dans le
cadre d’une grande concertation nationale semi-souveraine dont les résultats
seraient d’application immédiate. Comme aurait dit mon feu père, « une
mauvaise entente vaut mieux qu’un bon procès » !Trouvons donc une
mauvaise entente pour sauver Haïti au lieu de continuer à nous chamailler. Ne
voyez-vous pas qu’on est vraiment au bord de l’abime ? Ne soyons donc pas
suicidaires !!!