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samedi 2 juillet 2016

HAITI : LE PRESIDENT PRIVERT PEUT NOUS SORTIR DE CET IMBROGLIO

HAITI : LE PRESIDENT PRIVERT PEUT NOUS SORTIR DE CET IMBROGLIO
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
30 JUIN 2016


Le 14 Juin 2016, comme le 14 Mai, n’a pas vu partir le Président Privert qui a remis son sort entre les mains du Parlement selon l’article 7 de l’accord du 6 Février 2016. Le Parlement s’est réuni difficilement en Assemblée Nationale, mais n’a su et pu arrêter une décision sur le sort du Président qui est devenu depuis cette date un « président de facto ». La raison évoquée, la majorité et la minorité n’ont pas su s’entendre sur la simple question de vote séparé ou non de la feuille de route et de la prorogation du mandat du Président Privert. Ce qui a conduit à la mise en continuation de la séance en Assemblée Nationale. Est-ce la seule explication à cette mise en continuation de l’Assemblée Nationale (AN)? Il faut aller chercher ailleurs la vraie explication à ce désaccord entre pouvoir et opposition. D’ailleurs, la lettre de la minorité au Sénat à l'officiel panaméen, Roberto Zuniga BRID, pour dénoncer la présence du Président Privert parmi ses pairs à l’inauguration de l'extension du canal de Panama préludait déjà ce qui allait se passer à cette séance en assemblée nationale, mainte fois convoquée et renvoyée.

Les mêmes causes produisent les mêmes effets dans les mêmes circonstances
L’actuel groupe minoritaire au Senat pro martelliste (Latortue, Cantave, Foucand, Jacques Sauveur Jean, Onondieu Louis, Zenny), agit comme le G6 (Moïse, Bien-Aimé, Polycarpe, Exius, John Joel Joseph, Jeanty ( ?) ), le groupe minoritaire, qui, sous l’administration Martelly, bloquait toutes les initiatives gouvernementales, en particulier le processus électoral, en infirmant le quorum, en s’absentant du parlement pour ne pas voter la loi électorale amendée (réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/03/haiti-le-dialogue-inter-haitien-lunion.html ).
Ce groupe à l’époque était qualifié d’extrémiste, de jusqu’au boutiste, de radical ainsi que ses alliés politiques (LAVALAS, le MOPOD), opposants farouches à Martelly. Voici ce que j’avais écrit au sujet du G6, le 31 Aout 2014: « En dépit de la mise en place  de ce CEP « acceptable » réclamé par la plupart des acteurs politiques, le Sénat n’a pas encore voté, plus de 158 jours depuis son vote par la Chambre Basse, la loi électorale amendée. La grande majorité des haïtiens y inclus certains anti-Martelly, attendent impatiemment  ce vote. A chaque fois, le Groupe des six Sénateurs radicaux (G6), qui réclame l’application de l’article 289 pour la mise en place d’un CEP constitutionnel, infirme le quorum pour empêcher ce vote" (Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/08/haiti-imbroglio-politique-desras.html .
Baton ki bat chien blan se li ki bat chien nwa. Les mêmes causes produisent les mêmes effets dans les mêmes circonstances. C’est ce que pensent nos politiciens de l’actuelle opposition, proche de Martelly. C’est l’explication à leur comportement. C’est notre perception de l’actuelle opposition. C’est le groupe minoritaire au Senat et ses alliés politiques, opposants farouches à Privert, qui veulent à tout prix le capoter. Le groupe minoritaire actuel du Senat se comporte de la même manière que le G6, il bloque la prolongation du mandat du Président Privert en infirmant le quorum. Eux qui taxaient de radical le G6 par rapport au boycott de l’administration Martelly, au refus de voter la loi électorale amendée, à la velléité de pousser Martelly à la démission, font  la même chose que le G6, pousser le Président, J. Privert à l’abandon de son poste de président provisoire, même si le groupe minoritaire actuel dispose de « quatre (4) ministres au sein du gouvernement actuel et en veut quatre (4) autres », selon le Sénateur Bien-Aimé. Ce qu’a catégoriquement nié le Sénateur Latortue. En tout cas, le Sénateur Bien-Aimé crie fort à ceux qui veulent l’entendre et persiste dans sa vérité. Il qualifie de tous les adjectifs l’actuel groupe minoritaire du Sénat présidé par le Sénateur Jacques Sauveur Jean, le rend responsable de tous nos malheurs actuels et l’accuse avec PHTK d’être à la base des actes de banditisme et de terrorisme enregistrés au pays ces derniers temps.

Or, en politique l’évidence n’est pas forcément la vérité
A la faveur de cette crise politique sans fin, et malgré les intermèdes footballistiques, Copa America Centenario remporté aux tirs au but par le Chili au détriment de l’Argentine, la Coupe d’Europe au stade de quart de finale, les forces rétrogrades ont repris du service. Les bandits passent à l’attaque, le vol, le viol, le kidnapping, la raquette ; le terrorisme aussi : l’attaque contre les grandes entreprises étrangères et nationales, notamment l’hôtel Marriott, la Digicel, la Natcom, Bermahn Motors, Automeca, la Sogebank à Delmas 30; un mois plus tôt l’attaque du commissariat des Cayes, l’incendie des pompes à essence. Pour les partisans du pouvoir en place, c’est l’opposition politique qui opère à travers ses sbires. C’est tellement évident que dans de telles circonstances l’accusée devrait être automatiquement l’opposition. Et certains alliés du pouvoir, et non des moindres, ont vite fait d’accuser PHTK et alliés. Et le commun des mortels a tendance à sauter sur ces genres de conclusions trop évidentes à mon goût. Or, en politique, l’évidence n’est pas forcément la vérité. Qui est-ce qui veut entretenir  cette division entre nous ? Qui en a intérêt ? A qui profite le crime ? En tout cas, cette radicalisation de la situation politique qui favorise les actes de banditisme et de terrorisme pourrait être exploitée par les ennemis du pays pour nous enfoncer davantage, et, plus grave encore, pourrait attirer le terrorisme international dans le back yard américain pour mieux frapper « le Grand Satan » comme il  le fait déjà en Europe (France, Belgique, Turquie). Ce que ne comprennent pas nos politiciens qui s’accusent mutuellement sans une analyse approfondie et au second degré de ces actes apparemment sans liens.

Essayer de « Vivre ensemble »
Alors qu’en réalité, il aurait fallu d’abord penser pays des deux côtés au lieu de penser clans. Ce qui est en train de se passer je l’avais déjà prévu à la fin de mon bilan 2014-2015 sur Haïti, où j’avais fait un certain nombre de recommandations pour sortir de la crise ou, tout au moins, pour essayer de « vivre ensemble ».
Lisez plutôt : « Ces recommandations n’auraient de sens que dans le cas d’une entente entre Haïtiens pour Haïti. Dans le cas d’un déchoucage du clan de Martelly (« opération Boukina Faso »), le clan de l’opposition radicale jubilerait et aurait tout gagné sans aller aux élections. Mais il aurait toutes les difficultés du monde à (i) mettre en place un Gouvernement qui n’aurait d’autre choix que  de « diriger par décret », (ii) maintenir une trajectoire positive de la croissance économique et (iii) surtout organiser les élections inclusives à tous les niveaux en 2015 à moins d’un miracle. Haïti retombera tôt ou tard dans la même crise sous une forme ou une autre avec cette fois-ci le clan Martelly en face, n’est-ce pas le cas actuellement de Lavalas en souvenir de 2004 ? Alors pourquoi ne pas s’entendre maintenant avec un Martelly affaibli pour une Haïti forte et unie? Au lieu d’hériter  d’une Haïti faible, désunie et susceptible de retomber dans les mêmes antagonismes dans un avenir pas trop lointain ? Elections avec ou sans Martelly ? La balle est dans le camp du MOPOD et alliés » (Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/12/haiti-bilan-2014-perspectives-2015-du.html ).

Se démarquer du lot pour proposer…un accord politique, la voie proposée et indiquée aux décideurs politiques
A cette phase de radicalisation de la crise comme aujourd’hui qui a des répercussions sur la situation économique du pays (inflation et taux de change à la hausse, budget rectifié non voté, non élaboration du nouveau budget au mois de Juin 2016, le Sénateur Privert avait su, face à une situation similaire en Novembre 2014, se démarquer du lot pour proposer.
Lisez avec attention ce que j’avais écrit  à l’époque  à propos de la prise de position du Sénateur Privert :
« Face à cette radicalisation politique, notre ami, le Sénateur Privert, propose une sorte de sortie de crise même s’il s’en défend : « Face à cet imbroglio politique et l’imminence du vide institutionnel qui s’annonce à partir du deuxième lundi de janvier 2015, seul un accord politique, avec les partis et regroupements politiques de l’opposition et sous l’œil vigilent des secteurs organisés de la société, est capable d’éviter au pays de sombrer dans l’inconstitutionnalité, l’incertitude et le chaos avec toutes ses conséquences pour les acquis démocratiques, la stabilité politique, la croissance économique et la paix sociale ». Le Sénateur s’est servi de l’expérience de M. Préval en 2010 tout de suite après le tremblement de terre, pour faire la proposition d’éviter le vide institutionnel. Dans cette proposition axée en grande partie sur la Constitution, on sent l’Homme d’Etat qui veut à tout prix éviter le chaos. Mais, du côté du G6 au Parlement, du G6+ partis politiques de l’opposition radicale, voient-ils les choses de la même manière ? De plus, M. Préval avait la majorité au Parlement donc il pouvait compter sur le Parlement, ce qui n’est pas le cas pour M. Martelly. De toute manière, pour éviter le vide institutionnel et… le chaos, aucun sacrifice ne devrait répugner les vrais Hommes d’Etat. Il a conclu sa proposition ainsi : « Ce n’est pas une proposition de sortie de crise. C’est uniquement la voie proposée et indiquée aux décideurs politiques pour éviter, au pays, ce vide institutionnel et évacuer le spectre grimaçant de l’instabilité et du chaos qui se profile à l’horizon ». Port-au-Prince, le 20 novembre 2014 ». (Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2014/11/haiti-se-conjugue-en-tion-une-lueur.html ).

Sortez nous de cet imbroglio, Monsieur Le Président !

Qu’est-ce qui empêche à notre ami et condisciple, une fois au pouvoir, de se souvenir de cette magnifique proposition  pour sortir le pays de l’imbroglio actuel ? Est-ce que, comme disait souvent mon papa, « l’homme aux abords du pouvoir n’est pas l’homme au pouvoir » ? En tant que Président Provisoire, mon ami a-t-il oublié son profil de sénateur « homme d’Etat » ? Ou encore n’a-t-il-pas le temps de se relire ? Ou est-il tout simplement sous l’influence des groupes et des clans politiques qui l’empêchent de penser pays ? Mon ami, on est en pleine « instabilité…, le chaos se profile à l’horizon ». Mon cher Président, ne me dites pas que vous ne pouvez pas choisir cette « voie proposée et indiquée aux décideurs politiques » au plus fort de la crise. Cessez de projeter l’image d’un président trop liée à l’ancienne opposition à Martelly, trouvez un accord politique ou , tout au moins, une entente avec votre « ami » Martelly et alliés (Evans Paul, Latortue) pour et au nom du pays, et passer des instructions au CEP pour introduire le vote électronique dans le processus électoral, en demandant aux pays comme le Brésil, le Venezuela de nous aider (ils en ont l’expertise) ; et pourquoi pas la République Dominicaine toute proche ? Pour répéter Ricardo Seitenfus, il ne s’agit en fin de compte que de 13,000 bureaux de vote à équiper d’appareils électroniques (une bagatelle pour un pays comme le Brésil). Cette décision réduirait les possibilités de fraudes et donnerait plus de confiance aux 27 candidats qui ont reconfirmé leur candidature à la présidence, dont Jovenel Moïse du PHTK, ainsi que les candidats pour le renouvellement du tiers du Sénat au processus électoral. Rappelons que le vote électronique est une des recommandations de la Commission Indépendante d’Évaluation et de Vérification Electorale (CIEVE). Alors faites cet accord politique ou cette entente et sortez nous de cet imbroglio, Mr Le Président ! C’est votre responsabilité de  Président et d’Homme d’Etat.

jeudi 2 juin 2016

PROCESSUS ELECTORAL A REPRENDRE A ZERO, CHAOS OU REVOLUTION TRANQUILLE EN HAITI ?



PROCESSUS ELECTORAL  A REPRENDRE A ZERO, CHAOS OU  REVOLUTION TRANQUILLE EN HAITI ?

JEAN-ROBERT JEAN-NOEL

1er JUIN 2016, revu et corrigé le 4 juin 2016


Le 14 Mai 2016 n’a pas vu partir le Président Privert (départ différé au 14 Juin 2016 ? selon PHTK et alliés) ; seulement des palabres et une manifestation de PHTK, le parti de l’ex-Président Martelly, soldée par des jets de pierres sur Radio Caraïbes. Entre temps, la Commission indépendante d’évaluation et de vérification électorale (CIEVE)  a continué avec ses travaux jusqu’au verdict du 30 Mai 2016 au Palais National : Il faut reprendre à zéro le processus électoral, tout au moins au niveau présidentiel. En principe, ce résultat surprenant est loin de faire l’unanimité et pourrait exacerber la crise. C’est à se demander qu’en dépit de tout, est-il possible de conduire une révolution tranquille en Haïti en lieu et place du chaos annoncé résultant, entre autres, du verdict de la commission indépendante d’évaluation et de vérification électorale? Avant de répondre à cette interrogation, passons en revue comme d’habitude les faits saillants du mois, faisons un clin d’œil à la situation économique du pays, déduisons les conséquences possibles du verdict de la ClEVE et terminons sur la nécessité d’une révolution tranquille (?).

Faits saillants du mois de mai 2016

La Commission d’éthique et d’anti-corruption du Sénat continue minutieusement ses travaux en relation avec les fonds PETROCARIBE. Le 16 mai 2016, le  Commissariat des Cayes est attaqué par des gens déguisés en militaires avec à la clé des blessés et des morts (un policier sur place et les assaillants quelques heures plus tard par la chute de leur véhicule dans un ravin en direction de Jérémie), et Guy Philippe, le tombeur de l’ex-Président Aristide en 2004 et actuel candidat au Sénat en ballotage favorable pour le second tour dans la Grande-Anse, est accusé et convoqué (mandat) sans succès au parquet de Jérémie. Le budget 2015-2016 est rectifié à la baisse et n’est pas encore ratifié par le Parlement à cause des négociations sur les fonds communaux (10 M HTG/Commune). Pourtant, des nominations de secrétaires d’Etat sont enregistrées dans l’administration publique. L’inflation est passée à 15.3% en avril 2016 et la gourde autour de 63 gourdes pour 1 dollar américain. Le salaire minimum est revu à la hausse (175 HTG - 350 HTG). Les pluies provoquent des inondations un peu partout dans le pays, en particulier à Léogane, avec des dégâts matériels et des morts. Le banditisme aussi fait des morts et des blessés parmi la population et la police. Heureusement, le 18 Mai, fête du drapeau et de l’université, grandiosement commémoré à travers le pays, en particulier à l’Arcahaie où le Président Privert a annoncé qu’une équipe du Palais National va travailler à la préparation du dialogue national, démontre la ferveur de la jeunesse haïtienne pour le drapeau. Il en a été de même pour l’événement annuel « Livres en folies » avec ses près de 200 auteurs, leurs 1500 titres et plus,  et les dizaines de milliers de visiteurs et d’acheteurs. Face à une telle situation, que faire? Une révolution tranquille à la manière du Canada? Avant d’y arriver, regardons ensemble la situation économique et la situation politique suite aux résultats de la CIEVE.

Loin d’une révolution de croissance telle que souhaitée

En mai 2011, après la prise de pouvoir par Martelly le 14 mai de cette même année, j’avais écrit, « Haïti, nécessité d’une révolution de croissance économique » (réf : http://jrjean-noel.blogspot.com/2011/05/haiti-necessite-dune-revolution-de.html ). Cinq (5) ans plus tard, il n’en est rien. Le PIB/hab. est actuellement à 800 USD selon Kesner Pharel du Group Croissance. Trop faible pour changer la donne économique. Entre temps, la situation sur le plan démographique, environnemental, socio-économique et politique demeure intacte, pour ne pas dire s’empire. Si la croissance du PIB a été au rendez-vous (3.44% en moyenne de 2011 à 2015), elle est loin d’une révolution de croissance telle que souhaitée. La situation politique caractérisée par une exacerbation de la bataille des clans nous plonge de plus en plus dans ce chaos annoncé mais heureusement différé à chaque fois et nous fait ignorer notre situation économique, mis à part certains spécialistes et des fouineurs comme moi. On dirait que nos politiciens, toutes tendances confondues si toutefois il y a tendances, se fichent pas mal de la dégradation générale du pays et de ses conséquences sur notre vie de peuple. La prise du pouvoir pour le pouvoir (ôte-toi que je m’y mette) pour occuper l’espace laissé par l’autre sans objectifs, ni stratégies, ni efforts, ni résultats orientés vers le développement du pays, semble être leur seule motivation. De gouvernement en gouvernement, on s’accuse de corruption et Haïti, pays riche en ressources naturelles et minières, périclite en queue du classement mondial et en tout, sauf dans la liberté d’expression : nous avons la diarrhée verbale et rien d’autre, surtout en politique. La situation politique s’envenime à l’approche du 14 juin 2016, date de fin de mandat du Président Privert selon l’accord politique du 6 Février 2016.

Au niveau de la présidentielle le processus à reprendre à zéro 

Le rapport de la CIEVE est un document très sérieux de 107 pages y incluses les annexes. Il a diagnostiqué sans complaisance le processus électoral de 2015 et a fait des recommandations pour reprendre le processus à zéro (réf. http://lenouvelliste.com/lenouvelliste/article/159395/Rapport-de-la-Commission-independante-devaluation-et-de-verification-electorale).  Le travail technique de cette commission n’a pas pu débaucher sur  un reclassement objectif des candidats à la présidence ni d’établir des fraudes caractéristiques pour un seul candidat comme le claironnait l’opposition à Martelly. Le rapport a établi la vérité des votes, a épinglé les partis politiques et les mandataires, les observateurs électoraux qui ont gangréné la machine électorale, avec souvent la complicité des membres des bureaux de votes. Ce rapport nécessite une lecture approfondie de chaque haïtien susceptible de le faire. Il ne faut pas se laisser intoxiquer par les politiciens et même par des journalistes qui ne se sont pas donné la peine de  bien lire ce rapport avant d’en parler. C’est un rapport qui nous met en face de nous même.
Lisez avec attention la principale recommandation du rapport de la CIEVE: « Vu que le CEP a distribué des cartes d’accréditation « en blanc » aux partis politiques pour être utilisées par n’importe quels mandataires, que le CEP n’a pas gardé un registre de ces cartes d’accréditation aux fins de vérification et /ou d’audits, que ces cartes d’accréditation pouvaient être transférées entre partis politiques sans aucun contrôle et/ou autorisation du CEP, vu le nombre important d’outils sensibles non retrouvés, les variances non justifiées entre les différents outils, la proportion de votes irretraçables, la proportion de fausses CIN enregistrées, et la proportion de dossiers incomplets, l’analyse des résultats montre que les élections présidentielles étaient entachées d’irrégularités, de négligences, de fautes professionnelles graves et / ou de fraudes ». A la lecture de cette recommandation, on comprend, pleinement maintenant et après coup, le sens de la petite phase de François Benoit, le président de la CIEVE, qui découle de cette recommandation et qui a fait la une de tous les médias. En effet, la CIEVE par l’organe de son président, François Benoit, « recommande que, tout au moins, au niveau de la présidentielle le processus soit repris à zéro ».
Ce n’est pas tout à fait la même chose que dit le rapport qui, à mon humble avis, remet tout le processus en question. Il ne faut pas oublier que les élections (parlementaires 2e tour, municipales, et présidentielles 1er tour) ont eu lieu en même temps. Le verdict pour la présidentielle est valable pour l’ensemble du processus électoral. Toutefois, si on remet en question les élections parlementaires, la présidence de Privert, qui trouve sa légitimité dans le Parlement, pourrait être remise en question. Déjà des voix s’élèvent pour demander son départ pour le 14 Juin 2016, alors que lui voit son départ en 2017 lors de l’installation du nouveau président issu des urnes dans de nouvelles élections à organiser par le nouveau CEP dont le mandat vient d’être illégalement élargi. C’est donc une situation assez compliquée et très complexe qui pourrait déboucher sur ce chaos heureusement et intelligemment toujours différé.
On est donc retourné  à la case départ. Par cette recommandation, la CIEVE a pratiquement accusé tout le monde, ou, tout au moins, nous met face à notre miroir pour paraphraser Le Nouvelliste. Selon la commission, le système étant « gangréné » avec la présence des représentants des partis politiques, tout le processus a été entaché d’irrégularités et de fraudes commises par ces représentants de partis politiques avec la complicité de certains membres de la machine électorale. Donc il ne sera plus question d’avoir les représentants des partis politiques comme membres des Centres de vote et/ou de Bureaux de vote. Quand on regarde l'ensemble des recommandations de la CIEVE, elles sont très spécifiques pour redonner confiance au processus et nécessiteront du temps pour être mises en application. 

Le Président Privert a remis le rapport au CEP pour application et a demandé aux partis politiques de respecter les recommandations du rapport. Seront-ils d’accord avec le Président, en tout cas pas le PHTK qui n’a jamais reconnu cette commission, d’autant que le principal perdant de ce verdict reste son candidat à la présidence, Jovenel Moïse, qui est l’objet d’un changement de stratégie par la faune d’en face.

Changement de stratégie par rapport à Jovenel Moïse

De toute manière, bien avant les résultats de la CIEVE, l’opposition à Martelly avait déjà réorienté sa stratégie anti Jovenel Moïse. Ils ont pu accéder à un certain nombre de « contrats bidons »  pour  démontrer que J. Moïse a bénéficié malhonnêtement  de l’argent de l’Etat, donc l’éliminer plus tard pour corruption. C’est le changement de stratégie par rapport à Jovenel et PHTK amorcé depuis deux semaines avant la remise du rapport de la Commission. Avec la mise en détention provisoire (illégale selon le Sénateur Sénatus, ancien commissaire du gouvernement de Port-au-Prince) d’Eustache Saint-Lot, l’ancien directeur de BMPAD, qui assure la gestion des fonds de PETROCARIBE, le mandat contre Guy Philippe, la menace de recourir à INTERPOL pour faire revenir Roro Nelson en Haïti, des mesures d’interdiction  de départ contre deux anciens premiers ministres de Martelly, Lamothe et Paul,  contre les membres de l’ancien CEP réputés proches de l’administration Martelly (annulées aux dernières nouvelles suite à la sortie de l'ex-Premier Ministre E. PAUL accompagné de ses ministres pour aller vérifier à la Direction de l'immigration si oui ou non il y a eu interdiction), on a cette impression, cette sensation même  que le Pouvoir en place semble vouloir, à travers ses commissaires du gouvernement, en particulier, Danton Léger, passer à une autre phase. A-t-il les moyens de sa politique? Les propos de Privert à son depart pour Cuba et la lettre du PM E. JEAN-CHARLES désapprouvent les mesures prises par Danton Léger, qui est d'ailleurs l'objet d'une convocation en justice de la part d'Evans Paul.

En tout cas, désapprouvé au pas, il envoie des signaux assez forts pour inquiéter PHTK et le forcer à abandonner la scène politique. Si le Commissaire Danton Léger arrive à effrayer suffisamment les proches de Martelly, obtiendra-t-il leur réduction sans résistance ? Rien ne le présage. Tout au moins pas Michel Martelly dont Sweet Micky a refait surface en force au cours de cette deuxième moitié du mois de mai 2016 tant en Haïti qu’à l’étranger, en se déhanchant sur la scène et en inventant de nouvelles musiques et danses. Alors, à quoi faudra-t-il s’attendre? A une réplique en bonne et due forme de l’équipe d’en face ou à une forme d'entente entre nous vers une révolution tranquille ?

Nécessité d’une révolution tranquille ?

Il est clair que le rapport de la CIEVE a l’aval de l’administration Privert pour des raisons évidentes. Et le G8 et le G30 se retrouveraient dans la reprise totale du processus au niveau présidentiel. Très certainement pas Jovenel Moïse, le premier classé selon le CEP  présidé par Pierre Louis Opont. La bataille pour le pouvoir au niveau présidentiel est donc relancée avec son lot de surprises. Le PHTK menacé de toutes parts devrait en principe réagir pour essayer d’évincer Privert du pouvoir le 14 Juin 2016 ou après à la manière de l’ancienne opposition, actuelle alliée de l'administration en place, qui a combattu avec acharnement et violences l’administration Martelly. Les parlementaires proches de PHTK ne devraient pas non plus accepter ce verdict de la CIEVE à cœur joie, à moins des négociations en sous-main. L’ambition du Président Privert de ne remettre le pouvoir qu’en 2017 s’affiche clairement maintenant. Il l’a dit d’ailleurs lors de sa prise parole à cette cérémonie de remise de rapport de la CIEVE. Par rapport à ce tableau plutôt sombre, ce chaos qui se précise, y-aurait-il une autre alternative que ce spectre de guerre civile, le prétexte tout indiqué pour une intervention de très longue durée de la communauté internationale et peut-être américaine, cette fois-ci non déguisée? Une révolution tranquille à la manière du Canada ferait l’affaire. Comment s’y prendre pour mener à bien cette révolution tranquille? En laissant de côté nos intérêts mesquins de clans, en pensant Haïti d’abord et avant tout, en s’asseyant ensemble pour dialoguer sur la vision, les objectifs et les stratégies  de cette Haïti que nous voulons. Tout le monde, à part quelques rares énergumènes, sait qu’il n’y a pas d’autre solution que le dialogue, la grande concertation nationale sans exclusive ; c’est la seule porte de sortie pour Haïti. A moins qu’on préfère le chaos et son lot de surprises désagréables et d’incertitudes.

Chaos ou révolution tranquille ?

La menace du chaos, de guerre civile suivie d’une occupation de longue durée de notre pays, suffit-elle à nous pousser vers cette révolution tranquille (ref. https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volution_tranquille ) à amorcer après la grande concertation nationale (dialogue national) entre nous? Nous les nains, si nous possédions ne serait-ce qu’un tout petit morceau de gêne de nos héros forgeurs de patrie, il nous serait possible d’hériter de leur grandeur d’âme, ou tout au moins de quelque chose qui lui ressemble. Alors chaos ou révolution tranquille? La balle est principalement dans le camp de nos politiciens. Qu’ils donnent pour une fois le signal de la grande entente nationale, de cette révolution tranquille !!! En attendant, concentrons-nous sur la 100e édition de la COPA AMERICA qui a lieu aux USA du 3 au 26 Juin avec la participation historique d'Haiti. Une bonne chose pour nous sortir momentanément de cette grisaillerie politique!

samedi 30 avril 2016

HAITI, UN CHALLENGE A LA HAUTEUR DE LA VISION DE NOS PERES FONDATEURS ?


HAITI, UN CHALLENGE A LA HAUTEUR DE LA VISION DE NOS PERES FONDATEURS ?
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
30 AVRIL 2016

Après l’investiture et l’installation du gouvernement Enex JEAN-CHARLES, qui, en d’autres circonstances,  aurait été perçu comme un gouvernement idéal, il a a été plutôt accueilli avec indifférence. Toutefois, avec  la présence des personnalité comme Marcus Garcia, un journaliste de renom et homme de culture à la Culture et Communication, Evelt Evéillard, qui a eu une longue carrière au ministère des Travaux Publics,  Guito Laurore, un cadre du ministère de l’agriculture, promu ministre, Yves Batien, un ingénieur civil  et  économiste de renom, au ministère de l’économie et des finances, pour ne pas les citer, on peut qualifier sans ambages ce gouvernement de consensus. Personne n’aurait à redire par rapport à ces personnalités dans n’importe quel gouvernement issu d’élections ou pas. Il en a été de même pour la mise en place du nouveau CEP provisoire et  le choix des Directeurs généraux. Mais, là où le bât blesse, c’est la nomination de Danton Léger au poste de commissaire de gouvernement de Port-au-Prince, un opposant farouche à Martelly, qui a annoncé la couleur dès sa prise de fonction, interdiction de départ, convocation des hauts responsables de l’Etat sous l’administration Martelly. L’accouchement  de la commission parlementaire d’éthique et d’anti-corruption présidée par le Sénateur Youri Latortue, proche de Martelly, est vite perçue comme une sorte de réaction  d’autoprotection de l’équipe d’en face et naturellement rejetée par le groupe majoritaire au Sénat, proche du Président Privert, et la lettre ouverte de Martelly à ce dernier l’accusant, entre autres,  de « démartellisation » marque la rupture entre les deux principaux protagonistes de l’Accord du 6 Février. Enfin,  c’est l’installation de la commission indépendante d’évaluation et de vérification électorale, «  une commission d’élimination de Jovenel MOISE », selon le célèbre historien et écrivain haïtien, Michel Soukar (réf. Le point de Radio Métropole du 26 Avril 2016), une sorte de compromis, selon moi, entre la commission prévue par l’Accord  et celle exigée par l’ancienne opposition politique à Martelly et certains secteurs de la société civile. Deux  camps donc  prêts à en découdre, soit disant pour Haïti, discours oblige, mais, en réalité, qui se fichent du sort  de notre Mère Patrie  dont tous les indicateurs sont au rouge. C’est dans cette atmosphère politique de suspicion, de méfiance et d’inquiétude qu’évolue Haïti Chérie durant ce mois d’Avril 2016. Alors faut-il composer pour sauver ce qui peut l’être encore ou aller vers le chaos et ses conséquences néfastes? 
Avant de répondre à ce double questionnement, passons en revue les autres faits saillants du mois, jetons une lumière sur leurs influences, pour la plupart, plutôt  négatives par rapport à la situation actuelle du pays, proposons des pistes pour cet impossible dialogue entre nous et terminons sur des conclusions appropriées.

A.     ANALYSE D’AUTRES FAITS SAILLANTS DU MOIS D’AVRIL 2016
L’ingérence de la communauté internationale
Les faits saillants synthétisés à l’introduction de cet article auraient suffi pour une analyse approfondie de la situation haïtienne sur le plan politique ; malheureusement d’autres faits saillant sont venus assombrir le tableau. L’ingérence ouverte de la communauté internationale qui avait mis une certaine sourdine après la prise de pouvoir de M. Privert. On en prend pour preuves les déclarations de John Kerry, le secrétaire d’Etat américain, de Kennet Merten, de l’ambassadeur américain, les visites en Haïti des représentants de cette communauté, OEA, USA. Il faut noter aussi les diverses rencontres des représentants de la communauté avec le Président Privert, avec le Parlement, leur position anti-commission, leur insistance pour l’organisation sans délai du second tour de la présidentielle, la convergence de vues de cette communauté par rapport aux pro-martellistes. Ce qui rend suspicieuses aux yeux des pro-Privert comme le Sénateur Bien-Aimé, toutes réflexions, déclarations et actions de la Communauté internationale. C’est l’effet inverse chez les pro-Martellistes.
Le voyage du Président Privert aux Nations Unies, perception et réalité
Et puis, brusquement, il est annoncé le voyage du Président Provisoire J. Privert aux Nations Unies pour la signature de la COP21 à New York par les chefs d’Etat et de Gouvernement en l’absence des Chefs d’Etat des deux plus grands pollueurs, le Président de la Chine qui a délégué son Vice premier Ministre et le Président Obama en déplacement à Londres pour le 90e anniversaire de la Reine Elizabeth, il a délégué, son secrétaire d’Etat, John Kerry. Il faut signaler que ce voyage, prévu depuis le Sommet de Paris Décembre 2015 (B. Ethéart réf. http://lesmeilleurstextes.blogspot.com/2016/04/signature-de-laccord-de-paris.html  ), est perçu comme une convocation par le grand frère américain pour rappeler à l’ordre le Président Privert. Suite à la sortie du Secrétaire d’Etat américain vis-à-vis des « soit disant leaders haïtiens » qui mettent à rude épreuve la patience des USA et de ses alliés de la communauté internationale,  à celle de Kennett Merten, le responsable du dossier Haïti au département d’Etat américain, à la rencontre du CORE GROUP avec la Président Provisoire,  aux visites de certains  ambassadeurs du Core Group , Américain, allemand  pour ne citer que  ceux-là au Parlement haïtien, au positionnement anti-commission de vérification  de la Communauté internationale, la déduction est vite faite d’assimiler le voyage de Privert aux USA à une convocation. Pourtant, il n’en était rien.
Les manifestions de rue de PHTK
Entre temps, le Parti du Président Martelly met la pression. Les manifestations non violentes  de rue de la PHTK, dont celle du 24 Avril 2016, mais nuisibles pour la circulation, augurent des lendemains préoccupants, d’autant que des voix s’élèvent réclamant le départ du Président provisoire, le 14 mai prochain. Selon Jean Mona Metellus, on a enregistré des casses lors des manifestations de PHTK aboutissant au Parlement, une voiture de Caraïbes FM a subi des dommages. C’est encore préoccupant, si PHTK tombe aussi dans l’utilisation de la violence. Le parti de l’Ex-Président Martelly réclame le respect de l’accord signé le samedi 6 Février 2016, l’organisation du second tour des élections tel que prévu par l’ancien CEP, le rejet de la commission de vérification et le départ du Président Privert pour avoir violé l’accord et qui serait  en train de manœuvrer pour se perpétuer au pouvoir. La sortie du Coordonnateur de LAPEH, l’ex-Sénateur Jean Hector Anacacis, qui menacerait de rejoindre PHTK dans la rue, le Sénateur Riché ANDRIS qui va déjà de sa proposition pour remplacer Privert après le 14 Mai, les voix qui s’élèvent pour un nouvel accord, autant d’indices qui traduisent un malaise. Un malaise sérieux, somme toute !
La fissure dans le mur du G8 provoquée par la commission de vérification
De plus, il y a l’annonce par le Leader de Pitit Dessalines, Jean-Charles Moïse, que son groupe investirait la rue très prochainement (menace à peine voilée contre PHTK) pour  exiger la mise en place de la Commission de vérification sans ajouter, cette fois-ci, à l’avance, les résultats de la commission, en insinuant seulement  qu’il serait au second tour des élections. Par déduction, il faudrait conclure la mise à pied de Jovenel Moïse et/ou de Jude Célestin. Et puis, il y a ce spot d’Eric Jean-Baptiste (5e  selon les résultats de l’ancien CEP) qui passe sur les antennes de radio exigeant la mise sur pied de la commission de vérification qui devrait mettre dehors de la course électorale tous les fraudeurs, les juger, les mettre en tôle  et désigner deux candidats qui n’ont pas fraudé, dont naturellement lui-même. Une lecture au second degré laisse entrevoir une fissure dans le mur du G8 pour le second tour avec une probable dispersion des forces. En nous basant sur la dernière sortie d’Anacacis, Jude Célestin se sentirait menacé par l’équipe autour de Privert et par ses pairs du G8, M.  Jean-Charles Moïse qui se verrait déjà au second tour, de même que M.  Eric Jean-Baptiste qui parle des fraudeurs à éliminer, dont tout au moins, trois des quatre candidats placés avant lui par le CEP déchu. Ces fraudeurs pourraient être n’importe qui. Souvenez-vous que, lorsque la candidate Maryse Narcisse avait contesté les résultats du CEP, le Camp Lavalas avait relevé sur un échantillon « non aléatoire » des cas d’irrégularités assimilables à des fraudes. « Parmi les Procès-Verbaux  suspects, la grande majorité est profitable à Jovenel Moïse, puis Jude Célestin et quelques-uns sont en faveur de Moïse Jean Charles » selon Yvon Feuillé, avocat de Maryse Narcisse (Réf.http://www.hpnhaiti.com/site/index.php/elections/17371-haiti-elections-apres-confirmation-des-cas-de-fraudes-au-ctv-le-bcen-deliberera-c ). Donc, par déduction, seul Lavalas n’avait pas fraudé, mais les autres, oui. Depuis, l’expression « unique bénéficiaire des fraudes » attribuée à Jovenel Moïse est devenue « principal bénéficiaire des fraudes ». Eric Jean-Baptiste, qui a vu le nombre de ses votants revu à la baisse par l’ancien CEP comme tous les autres candidats lors d’une épuration de certains procès-verbaux, sauf quelques rares cas, dont Luco Désir, mais qui se targue, malgré tout, de n’avoir pas triché, profiterait bien de la mise à pied de ses collègues du G8 placés en position favorable par le CEP déchu.
La nature qui demande des comptes et nous pousse à la réflexion
Par rapport à ce constat politique plutôt dramatique à la limite plus comique que tragique, les dernières pluies viennent nous rappeler notre vulnérabilité, inondations dans plusieurs zones du pays, Léogane, Port-au-Prince, Cité Soleil, Tabarre, des pertes en vies humaines, des dégâts matériels. Il s’en est suivi un embouteillage monstre de plus de 4 heures de temps  au niveau de la Plaine du Cul de Sac, le lundi 25 avril 2016 et durant toute la semaine du 25 au 29 avril 2016, le pont de la route neuf ayant été effondré, le mois dernier, suite à  son déboulonnage systématique par des riverains affamés (?), la rivière Grise en crue, le Pont Croix-des-Missions (en mauvais état) et le pont Tabarre n’ont pas permis de circuler correctement ce jour-là du nord au sud de la zone métropolitaine (et vice versa) et de desservir la partie Nord du département de l’Ouest et les départements de l’Artibonite, du Centre, du Nord, du Nord-Est et du Nord-Ouest. Une journée de perdue et une semaine au ralenti à cause des conséquences de nos inconséquences, des milliers de dollars américains de perte pour ne pas dire des millions ! La nature nous demande des comptes et nous pousse à la réflexion. Ce qui nous a interpellé l’Ing. Brunet Georges et moi, sur la nécessité de résoudre définitivement ce problème de communication du nord au sud de la zone métropolitaine, en suggérant  la construction  de quatre (4) ponts supplémentaires sur la Rivière Grise au niveau de Pernier, de Eddy One, de  Santo 17, de Santo 8 et la reconstruction des deux (2) ponts  de la Croix des Mission et de la Route Neuf. Ces ouvrages et les tronçons de route de raccordement et de prolongation jusque vers  les grands axes routiers existants nécessiteraient approximativement 25 M USD d’investissement de l’Etat haïtien. Une bagatelle par rapport à nos dépenses futiles pour l’accession et le maintien de nos politiciens au pouvoir ou même pour nous en débarrasser!
Le 6e Sommet du Groupe Croissance sous le thème : «Financer les infrastructures en Haïti ».
Heureusement qu’il y a eu la semaine de la Finance et de la technologie du 18 au 22 avril 2016  et la martinée du bilan du projet de « Participation de la Société Civile dans le processus budgétaire d’Haïti », le 28 Avril 2016, un projet conduit par le Group Croissance pour le compte de l’USAID. Ces deux évènements ont permis à la plupart d’entre nous de sortir de l’intoxication des informations en provenance de la politique politicienne pour penser réellement pays. La semaine de la Finance du Group Croissance  a  mis à nu la situation de la finance du pays par le gouverneur de la Banque centrale,Jean Baden Dubois, et le ministre des finances, M. Yves Bastien : le déficit budgétaire de l’ordre de 7 milliards de gourdes, l’utilisation de la planche à billets, la situation inflationniste qui en découle (14.8 en Mars 2016). C’a été l’occasion de passer en revue la situation précaire de la majorité des mairies du pays qui  selon le sénateur, Francenet Denius, responsable de la commission « Intérieur et Collectivités territoriales », a déclaré que le budget annuel moyen des communes haïtiennes est estimé seulement à 4 millions de gourdes, soit quelque 65 000 dollars américains. Le clou de ce 6e sommet a été la présentation des travaux des élèves du Collège Gatts Pressoir sur la robotique. De l’autre côté, 10 universités ont été primées par le Group Croissance pour leurs travaux sur les objectifs de développement durable (ODD) et la planification budgétaire y relative. Des réflexions sérieuses venant des jeunes de tous les recoins du pays pour nous rappeler que, en dépit des turpitudes actuelles, ils jettent les bases du « pays que nous voulons » à l’horizon de 2030. Avec la participation du Député Gerry Tardieu et du Ministre de la Planification, Me Aviol Fleurant, ces réflexions arriveront au niveau du Parlement et du Gouvernement.
B.     INFLUENCES  DES FAITS SUR LA SITUATION ACTUELLE DU PAYS
A partir de l’analyse de la majorité de ces faits, un dénominateur commun saute aux yeux, la bataille pour le pouvoir  politique et le partage des maigres ressources économiques actuelles du pays. Nous sommes arrivés à cette extrémité, à ce « carrefour dangereux » selon le mot de Marvel Dandin, tant au niveau politique, économique et écologique à cause de notre manière de gérer nos 27750 km2, notre espace vital. La gouvernance correcte de cet espace vital est le cadet de nos soucis depuis la disparition de nos derniers Héros (Dessalines, Pétion et Christophe). Les nains que nous sommes devenus n’ont jamais su s’élever à la hauteur de nos pères fondateurs. On dirait que l’héritage légué est trop lourd pour nos frêles épaules.
En outre, nous avons de sérieuses difficultés à nous imprégner des notions démocratiques occidentales. Chaque tentative de notre part pour organiser des élections démocratiques débouche sur des crises qui mettent à mal notre développement.  La licence que nous confondons avec la démocratie nous pousse à dire n’importe quoi sans la vérification de nos sources et d’accepter n’importe quelle rumeur sans une analyse critique. La destruction de l’autre est notre sport favori. « L’ôte-toi que je m’y mette » est notre passe-temps et notre jeu favori. La notion d’économie, tout au moins dans les faits, nous est inconnue. La stabilité politique, garante de tout développement économique et social, est une utopie à laquelle nos politiciens ne croient. L’opposition à une administration élue ou pas se confond à son élimination pure et simple, par la violence s’il le faut. Dès qu’une équipe est au pouvoir, elle est automatiquement mauvaise. Il faut à tout prix la bloquer jusqu’à sa capitulation. Nous n’avons pas la culture du compromis, du consensus, du dialogue gagnant-gagnant, mais celle du dialogue pour la capitulation et la défaite de l’autre.
A titre d’exemples : Le bloc minoritaire au Sénat (G6) a bloqué toutes les initiatives de Martelly, car c’est un « vendeur de pays », un « vagabond », « un dictateur » qui n’a pas voulu organiser des élections et qui n’a manifesté aucune velléité en ce sens. Maintenant  c’est le tour de Privert, le modéré, l’homme qui avait la réputation de maitriser  toutes les ficelles de la vie politique et d’être un fin spécialiste de l’administration publique haïtienne. Le bloc minoritaire au Sénat est pro-Martelliste et est très exigeant vis-à-vis de Privert. Allié au bloc majoritaire de la Chambre basse, il a démontré sa force lors du rejet de l’énoncé de politique général de Fritz Jean et de la ratification de celui d’Enex Jean-Charles. Ce bloc est contre la commission de vérification et serait favorable à un départ de Privert. Car, selon la plupart d’entre eux, Privert n’a pas respecté l’accord signé dont il a été le principal auteur et bénéficiaire. Ce crime commis du fait de la non-organisation du second tour des élections dans les délais impartis devra se solder par son départ le 14 Mai 2016 au plus tôt ou en Juin 2016 au plus tard. La même stratégie nihiliste : il faut éliminer l’autre, le forcer à capituler.
Nous sommes donc ramenés à l’organisation de ce fameux second tour de la présidentielle. Les élections parlementaires et les municipales étaient plutôt acceptables, puisque le Parlement fonctionne et que  les maires élus connaissent leur sort. Le nouveau CEP vient de publier les résultats des municipales. Comme pour toutes élections, il y a des contestations. Pour la présidentielle, les contestations ne suffisent pas. Il faut les vérifier jusqu’à l’élimination des fraudeurs, parce que les fraudes s’étaient concentrées uniquement au niveau de la présidentielle, car les fraudeurs, qui sont tellement intelligents, se sont arrangés  pour ne pas trop frauder pour les législatives et les municipales (ironie). Le problème est donc la présidentielle. Essayons donc de le résoudre.
C.      PISTES POUR CET IMPOSSIBLE DIALOGUE ENTRE NOUS
Nous avons de sérieux problèmes à résoudre, l’insécurité alimentaire, le chômage, la misère grandissante, la santé, l’éducation, la saison pluvieuse et la saison cyclonique de 2016, la situation environnementale lamentable, le déficit d’infrastructures, le déficit budgétaire, le manque de moyen financier, le déficit de gouvernance, l’instabilité politique, l’insécurité en termes de banditisme, de viol, de vol, de kidnapping, etc. Tout est prioritaire. Mais la politique nous prend à la gorge et ne nous permet pas de réfléchir. Attaquons le problème politique lié aux élections  parlementaires complémentaires, municipales et des collectivités territoriales, en laissant de côté, tout au moins momentanément, la présidentielle à moins de trouver une entente sur cette question. Il faudrait donc, d’abord et avant tout,  enterrer la hache de guerre, une sorte de préalable avant la mise en application de ces trois propositions.
a)      Trouver un consensus pour l’organisation de ces élections en Octobre 2016
 La commission d’évaluation et de vérification électorale pourra boucler correctement son mandat très certainement en désaccord avec une partie de la classe politique. La leçon tirée du travail de la commission  aiderait à huiler la machine électorale.
Il est capital d’arriver à  un consensus pour l’organisation de ces élections avant la fin du mois d’Octobre 2016 avec l’introduction légale du vote électronique. Et le CEP prendra toutes les dispositions pour l’organisation de ces élections à titre de tests.
Une fois ces élections achevées sans magouilles, le CEP actuel deviendrait un CEP permanent.  
b)      Maintenir l’administration actuelle jusqu’au 7 Février 2017
Parallèlement, l’administration actuelle et le Parlement trouveraient une entente pour (i) prolonger le mandat de l’administration provisoire jusqu’au 7 Février 2017, (ii) renforcer le pouvoir judiciaire et (iii)  organiser la grande concertation nationale pour le développement d’Haïti  axée sur (1) l’humain, (2) le social, (3) l’environnemental, (4) l’infrastructurel, (5) l’économique et la finance, et (6) la politique (gouvernance) avec des éléments de base des 17 objectifs de Développement Durable (ODD) à regrouper autour des six (6) axes, en vue d’aboutir à ce pays que nous voulons en 2030. Cette grande concertation nationale amenderait ou changerait la constitution de 1987 en vue, entre autres, d’harmoniser le calendrier électoral avec des élections générales tous les 5 ans.
c)      Trouver une entente pour  favoriser une gestion du pouvoir par les protagonistes actuels
(i)                   Durant deux ans par l’opposition à Martelly du 7 Février 2017 à 7 Février 2019 
(ii)                 Durant deux ans par Jovenel Moïse du 7 Février 2019 à 7 Février 2021
(iii)                Une autre option serait l’organisation du second tour de la présidentielle en octobre 2016 en cas d’entente préalable entre nous ; toutefois le mandat de l’élu s’étendrait du 7 Février 2017 au 7 Février 2021.
La communauté internationale, qui jouerait un rôle d’observateur dans la grande concertation nationale, s’engagerait à financer, en partie comme à l’ordinaire,  les administrations issues de cette entente entre Haïtiens et/ou de ces élections.

En guise de conclusion, Haïti sortira grandie de cette lourde épreuve soldée par la grande concertation nationale jetant  les bases du pays que nous voulons en 2030, et sera le premier pays à prendre une option sérieuse pour la mise en application des 17 Objectifs de Développement Durable. N’est-ce pas un challenge à la hauteur de la vision de nos pères fondateurs ? Il est toujours bon de rêver grand pour son pays ! Peut-être que nos politiciens et nos hommes politiques, transformés en Hommes d’Etat, feront leur ce grand rêve d’une Haïti émergente après 2030, le Rwanda de la Caraïbe!

jeudi 31 mars 2016

HAITI, CHAOS EVITE OU DIFFERE ? « CONPOZE » OU PERIR ?



HAITI, CHAOS EVITE OU DIFFERE ? «  CONPOZE » OU PERIR ?
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
31 MARS 2016

Bonne fête à la Constitution de 1987. 29 ans déjà ! L’université Quisqueya, une fois de plus, s’est penchée sur la constitution de 1987. La conclusion, il faut la changer. Il en faudra une autre. En tout cas, c’est ce que j’ai ressenti en regardant la télévision. Donc, il faut composer, dialoguer, concerter pour arriver à cette nouvelle constitution. C’est la voie indiquée : konpoze !

Le Premier Ministre, Fritz JEAN,  a vu son énoncé de politique générale rejeter par la chambre basse (prévisible bien avant le vote).  Le processus a recommencé. Ce qui a donné lieu à la nomination d’un autre Premier Ministre par le Président en la personne de M. Enex JEAN-CHARLES. Comme M. Privert a, cette fois-ci, composé avec les forces politiques au Parlement, l’énoncé de politique générale de M. JEAN-CHARLES est passé comme une lettre à la poste et même dans la précipitation. Le Gouvernement Jean-Charles est investi et installé dans une période d’une semaine. Un nouveau Conseil Electoral Provisoire (CEP) est mis en place et est présidé par le Patron de Média, Léopold BELANGER. Une autre étape est donc franchie dans la mise en application de l’accord signé le 6 février 2016 entre M. Martelly, Chancy et Privert. Il est clair qu’on n’est plus dans les délais indiqués dans l’Accord en question à cause de ce mois de retard sans « composition ». «  Le chaos est-il définitivement évité ou différé ? » (Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2016/02/haiti-le-chaos-evite-ou-differe-konpoze.html ). Faudra-t-il continuer à composer selon le conseil du Premier sortant, Evans Paul, qui, cette fois-ci, a participé aux cérémonies d’investiture et d’installation de son remplaçant, M. Enex JEAN-CHARLES ?

KONPOZE pour le partage de la « pomekêt »
Mis à part la Primature et le Ministère de l’Economie et des Finances, le Président PRIVERT aurait, cette fois-ci, « tout donné », selon son chef de Cabinet, M. BELLERIVE (Réf. Invité du Jour de Valéry Numa, le 29 Mars 2016). Et nos parlementaires qui ont, presqu’à l’unanimité, voté l’énoncé de politique générale, se sont partagés à cœur joie la « pomekêt » gouvernementale, selon l’expression savoureuse de Valery Numa. Nous avons tellement grignoté le gâteau gouvernemental  haïtien qu’il ne resterait qu’une « Pomekêt ».  Cela fait sourire, mais c’est bien triste d’en arriver là et de continuer à nous battre pour nos clans et non pour Haïti. En tout cas, pour le partage de la « pomekêt », nous avons su « KONPOZE », tout au moins l’Exécutif et le Parlement. Pour le CEP aussi.

La Pomme de discorde, Evaluation ou Vérification  du processus électoral?
Les neuf secteurs concernés se sont battus et déchirés, pour la plupart, avant de désigner leur membre au CEP avant le choix définitif des neufs membres par l’Exécutif. Selon les premiers commentaires, on aurait affaire à des gens sérieux susceptibles de compléter le processus électoral, incluant  la commission d’évaluation ou de vérification ? L’accord parle d’évaluation et non de vérification. C’est la nouvelle pomme de discorde. Pour certains, il faut vérifier tout le processus électoral (9 Août et 25 Octobre 2015) avec à la clef l’exclusion de Jovenel Moïse. Pour d’autres, il faudra vérifier pour crédibiliser le processus et déterminer qui, parmi les candidats à la Présidence, sont arrivés en première et deuxième position. Pour d’autres enfin, c’est une perte de temps : Si la présidentielle est « entachée d’irrégularités assimilables à des fraudes », quid des parlementaires (qui ont donné lieu à ce Parlement qui a élu au second degré le Président Privert) et quid des municipales dont les élus attendent d’être investis et installés ? En tout cas, il faudra mettre en place une commission d’évaluation selon l’accord, une commission de vérification selon les partis de l’ancienne opposition à Martelly. Le travail de cette commission, quel qu’en soit le résultat, sera décrié par une partie des forces en présence.

La grande concertation nationale
L’idéal serait de composer, trouver un consensus sur la question pour éviter le chaos qui pourrait en découler. Pour y parvenir, il faudrait commencer par penser Haïti d’abord et avant tout. Or Haïti est le cadet des soucis de la majorité de nos politiciens. On en prend pour preuve le partage de la « pomekêt » gouvernementale. Alors, seront-ils assez grands, eux qui sont si petits, pour arriver à un consensus pour compléter le processus électoral comme, par exemple, (i) voir l’ancienne opposition se mettre ensemble derrière Jude Célestin en vue de battre démocratiquement Jovenel Moïse, (ii) voir Jovenel Moïse désister pour laisser l’ancienne opposition se battre entre elle, (iii) se mettre d’accord pour une gestion d’un an par l’actuel pouvoir, de deux ans par l’opposition à Martelly et de deux ans par Jovenel Moïse. Entre temps, on procéderait à la finalisation des sénatoriales, des municipales ; on ferait les collectivités territoriales et on ferait la grande concertation nationale qui déboucherait sur la nouvelle Haïti. Quel beau rêve !!!

Le réveil brutal
Reveille-toi, JEAN-NOEL. Tu crois qu’Haïti peut se qualifier pour le Mondial de Russie après son match nul face au Panama au stade Sylvio Cator  et sa défaite (1-0) face à Panama à Panama City, le 29 Mars 2016? Tu n’y crois plus ? Alors pourquoi rêves-tu de cette grande concertation nationale entre Haïtiens? Le tremblement de terre de 2010, au lieu de nous unir, a créé plus de division entre nous. Actuellement la misère fait rage, le dollar se change à 62.50 HTG, l’inflation est à 14%. L’insécurité frappe la seule force publique dont nous disposons sous l’œil presqu’indifférent de notre société et de nos politiciens. L’insécurité alimentaire est en passe de s’aggraver avec le retour de la sécheresse après les inondations dans certaines parties du pays. Nos infrastructures (ponts) sont en danger à cause de notre négligence au niveau de l’Etat et notre ignorance citoyenne. Nos politiciens au lieu de penser Haïti pensent à la pomekêt gouvernementale dont chaque clan aimerait en faire une bouchée au détriment de l’autre ou des autres. La corruption va s’accélérer dans ce contexte particulier. La masse a faim et aura encore plus faim, la classe moyenne est à genoux, la bourgeoisie profite de ses rentes sur le dos de la masse et de la classe moyenne. Personne ne prend conscience du danger qui nous guette (en tout cas pas une masse critique).  C’est cela, notre réalité. C’est le réveil brutal.

C’est le moment avant qu’il soit trop tard !

Justement, c’est le moment de nous concerter, de composer entre nous, de trouver les solutions à cette réalité complexe qui pourrait déboucher sur ce chaos. Il faut se réveiller, s’asseoir ensemble au nom de et pour Haïti. C’est le sursaut national. Il y va de notre salut à tous. Tout autour de nous tourne dans le sens positif, Cuba, la République Dominicaine, la Jamaïque. Ils ont composé pour éviter le chaos et non le différer. Pourquoi pas nous ? Nous nous sommes mis ensemble une fois. Nous avons étonné le monde. Qu’est-ce qui nous empêche de le refaire vis-à-vis de nous-mêmes une seconde fois ? Nous prenons de plus en plus conscience que seule une entente sérieuse entre nous pourra nous sortir de ce bourbier.  Alors, qu’attendons-nous ? C’est le moment avant qu’il soit trop tard !!! Alors composer ou périr?

lundi 29 février 2016

HAITI, LE CHAOS EVITE OU DIFFERE ? « KONPOZE OU DEKONPOZE ? »


HAITI,  LE CHAOS EVITE OU DIFFERE ? « KONPOZE OU DEKONPOZE ? »
JEAN-ROBERT JEAN-NOEL
29 FEVRIER 2016

Dans mon bilan 2015 et  perspectives 2016, j’avais insisté sur le rôle à jouer par le Parlement haïtien issu des élections contestées du 9 Aout et du 25 Octobre 2015 (Réf. http://jrjean-noel.blogspot.com/2016/01/haiti-bilan-2015-perspectives-2016-de.html ). En effet, le Parlement a changé la donne politique. Il a négocié par l’intermédiaire de ses deux présidents (Sénat et Chambre des Députés), Jocelerme Privert (LAVALAS) et Cholzer Chancy (Ayiti An Aksyon), le départ de Martelly, le 7 Février 2016, (Réf. http://ehaitinetwork.com/texte-de-laccord-signe-le-6-fevrier-2016-au-palais-national/# ). Il a accaparé la Présidence par une élection au second degré, mettant aux prises, en finale, le Président du Sénat, M. Privert, M. Egard Lablanc et M. Déjean Bélizaire, deux anciens présidents du Sénat, avec l’élection de M. Privert comme Président Provisoire de la République d’Haïti, le 13 Février, et son investiture, le 14 Février 2016 (« Coup d’Etat Parlementaire »). Le Président Privert, après consultation avec les forces vives du pays et les blocs parlementaires dont le Vice-Président du Sénat, M. Ronald Larêche, et le Président de la Chambre basse, M. Cholzer Chancy, a choisi et nommé comme Premier Ministre l’économiste, Fritz JEAN, ancien Gouverneur de la Banque de la République sous le régime LAVALAS, investi, le 26 Février 2016, en l’absence de M. Evans Paul, le Premier Ministre sortant qui a boudé, à tort ou à raison, la cérémonie d’investiture de son remplaçant, « pour ne pas cautionner la violation de l’accord du 6 Février et de la Constitution de 1987 amendée » , et a conseillé au Président Privert dans son langage imagé habituel mais, cette fois-ci, menaçant de « composer au lieu de décomposer », ponctué, à la fin, d’un « kreol pale, kreol komprann ». Que faut-il  comprendre de cette nouvelle conjoncture ? Et que faire ?

Confusion, insécurité politique et banditisme

J’ai oublié la réussite du Carnaval 2016 sans mort, le train-train quotidien qui nous tenaille et nous fait prendre conscience de notre précarité, l'inondation dans le Nord à Port-de-Paix (28-29 Fevrier) et au Cap-Haitien (en deux occasions) et dans l'Ouest (zone métropolitaine),  ponctuée de morts et de dégats matériels et due à des pluies qui anormalement arrosent le mois de Février, une bonne nouvelle pour la campagne agricole de Printemps 2016, un indice pour une bonne année agricole peut-être (?). Revenons à nos moutons politiques. 

En introduction,  j’ai énuméré les principales choses politiques, et,  même là encore, j’ai dû être sélectif. 

J’ai omis les déclarations de certains candidats à la Présidence et les notes du G8 qui donnent l’impression de ne pas se retrouver dans le processus en cours. Même la FANMI LAVALAS, qui semble, jusqu’ici,  être, sans oublier INITE et VERITE avec la présence de certains de leurs cadres au Palais National dont l'ex-Premier Ministre JM Bellerive (Ref. Le Nouvelliste), le principal bénéficiaire de la situation depuis le départ de Martelly, campe encore sur sa position d’avant ce départ, et a même été dans les rues, ce 29 Février, pour marquer le 12e anniversaire du second départ d'Aristide pour l'exil et fustiger le régime corrompu de Martelly qui devra impérativement être audité.

Quant à Jean Charles Moïse, il ne jure que par la mise à pied de l’autre Moïse, Jovenel, dans la course électorale (l’exclusion de l’autre).  André Michel, qui vient de sortir un livre sous le titre « Echec » en parlant de l’administration Martelly, est déçu du choix de M. Jean en lieu et place de Mme Manigat proposée par la Plate-Forme JUSTICE et qui avait l’aval de l’opinion publique. La FUSION est contre tout le processus en cours. Le silence de Jude Célestin, le principal catalyseur des énergies vers les événements du 22 Janvier  ayant fissuré de manière irréversible l’édifice de l’administration Martelly, qui ne réclame rien jusqu’à présent dans le gâteau et que tout le monde semble oublier, ne doit pas être perçu comme une acceptation de tout ce qui se passe actuellement et qui semble l’éloigner de la présidence du pays.

Quant à PHTK et consorts, principales victimes de la situation actuelle, ils enterrent leur candidat à la députation de Desdunes assassiné, M. Prévilon. Il était aussi ex-garde de corps du candidat Jovenel Moïse et du Président Martelly. La présence de l’équipe Têt Kalé, y inclus l’ex-Président Martelly et sa femme, Jovenel Moïse et le haut état-major de PHTK, et les discours prononcés à l’occasion  des funérailles de Toro, le surnom du candidat à la députation de Desdunes, témoignent de la volonté de cette équipe de continuer la lutte et de ne pas se laisser faire.

Les diverses sorties dans les médias du Premier Ministre, Evans Paul, KP rebaptisé « Koz Pèp La », « l’humiliation » subie par lui et son gouvernement lors de l’investiture du Président Privert, le choix de bouder l’investiture du nouveau Premier Ministre, la reprise du langage codé plutôt menaçant, l’évocation par lui de la non invitation de la KID, son parti, qui est représenté au Parlement, le rappel par lui de la présence de PHTK qui a une majorité relative au Parlement, une force avec laquelle il faut compter (interview avec Marie Lucie Bonhomme à Vision 2000),  laissent entrevoir qu’il a repris son manteau de leader politique et est prêt à se battre pour maintenir sa place sur l’échiquier politique.

Cette confusion politique, ce malaise, favorise la remontée de l’insécurité politique (mort du candidat de PHTK) et du banditisme (plusieurs cas motels et non mortels en relation avec le tirage d’argent à la banque, cambriolage de maisons d’habitation, de maisons d’affaires et autres). Pas un jour ne passe sans qu’il y ait un cas de vol des gens revenant de la banque ou plus grave encore un cas de mort par balle. Il en résulte une crispation générale ponctuée de peur et de crainte de la personne d’à côté, de l’autre, de cet inconnu qui rode dans notre quartier.

Et l’économie dans tout ça ?
La situation économique du pays n’est pas en reste. Le Président Privert l’a qualifiée de catastrophique. Ce qui a fait tiquer le ministre de l’économie et des finances, M. Wilson Laleau, et le Premier Ministre, Evans Paul. Ils ont démontré chiffres à l’appui que la situation n’est pas si mal que ça. Ils ont peut-être raison en comparaison aux années précédentes ou par  rapport aux prévisions budgétaires pour l’exercice 2015-2016 en cours. Mais le Président Privert n’a pas tort si on se réfère à la situation microéconomique. Nous avons actuellement une situation de misère presqu’intenable.

En effet, selon la Commission nationale de sécurité alimentaire (CNSA) et le Programme alimentaire mondial, « Une évaluation de la sécurité alimentaire en situation d’urgence (EFSA), menée par le PAM et la Coordination Nationale de la Sécurité Alimentaire (CNSA) en Haïti, a estimé que environ 3,6 millions d’haïtiens sont en situation d’insécurité alimentaire (700,000 ménages). Parmi eux, environ 1,5 million (300,000 ménages) sont en insécurité alimentaire sévère ». De plus, le dollar varie entre 61 et 62.50 HTG selon la banque commerciale considérée. La finance est nerveuse et réagit en fonction de la donne politique. Les déclarations des responsables politiques et économiques en sont pour quelque chose. La vérité c’est que, à cause de la fluctuation à la hausse du dollar par rapport à la gourde,  de l’inflation autour de 13%, les ménages haïtiens ressentent dans leurs ventres et leurs poches les contrecoups de la situation économique et financière du pays.

Il faudra l’atténuer  rapidement par la mise sur pied d’un vaste programme de création d’emplois couvrant le territoire national et qui prenne en compte la campagne agricole de Printemps, la saison pluvieuse y incluse la saison cyclonique (Juin-Novembre 2016), la situation des gens les plus vulnérables qui ont besoin d’autres formes d’assistance. Il faut donc agir sur  l’urgence tout en initiant le durable.

L’élégance de Privert
Dans ses prises de parole, le Président Privert a évoqué la situation du pays, la question de la sécheresse, de l’insécurité alimentaire et la mise en application de l’accord du 6 Février. Lors de l’investiture du Premier ministre Jean, il a élégamment remercié le Premier Ministre Paul ainsi que son gouvernement pour avoir aidé le pays dans des moments difficiles et surtout ces derniers jours, et ce malgré les propos de ce dernier en relation avec la manière dont M. Privert conduit le processus en cours, et sa menace à peine voilée par rapport à ce chaos qui, selon lui, s’en vient, si la nouvelle administration ne « compose pas ». Il en a fait de même vis-à-vis de tous ceux qu’il a consultés avant de choisir le nouveau  Premier Ministre. Ce dernier se pose en rassembleur et promet de faire de son mieux pour faire face à la situation découlant de son choix un peu controversé. De toute manière, il doit jouer serré pour convaincre les blocs parlementaires lors de la présentation de son énoncé de politique générale et dans le choix de ses ministres. Sans quoi le processus recommencera tel que prévu par la Constitution amendée, nous fera perdre un temps précieux et pourra déboucher en fin de compte sur ce chaos qui fait peur.

La mise en application de l’accord
Tout ce processus rentre dans le cadre de la mise en application de l’accord du 6 Février 2016 entre la Présidence de Martelly et le Parlement, les deux institutions co-dépositaires de la souveraineté nationale. Cet accord a sciemment écarté l’option Pouvoir Judiciaire symbolisé par la Cour de Cassation (CC), en s’appuyant sur la constitution amendée qui n’aurait pas dû s’appliquer à  Martelly puisque publiée sous sa présidence. Malheureusement dans le souci d’écarter l’option CC, qui avait l’aval de la majorité des acteurs dont le l’Ex-Président Martelly et le G8, ils ont opté pour cet accord. C’est donc un accord inédit voulu par le Parlement et, en particulier, par Privert, l’un de ses rédacteurs et signataires.  Ce qui lui a permis de devenir président, élu par le Parlement au second degré, et de pouvoir choisir son Premier Ministre en la personne de Fritz Jean de tendance lavalassienne comme lui, plus ou moins dans les délais impartis.

Jusqu’à date, le Président Privert est dans les délais dans l’application de l’accord. Après l’élection du Président, la nomination du premier ministre (PM), il a mis le cap sur la redynamisation du Conseil électoral provisoire (CEP). Il est à noter qu’il a mené en parallèle le processus de mise en place du CEP et celui du PM. C’est ainsi que la plupart des secteurs prévus à l’article 289 de la Constitution de 1987 (Décret électoral) ont pratiquement refait ou sont en passe de refaire  le même exercice, si l’on excepte le secteur syndical qui a reconduit sa représentante, respectant par ainsi le mot redynamisation du CEP au lieu  de remplacement tel que exigé par la plupart des acteurs dont FANMI LAVALAS.

 En parlant de délais, alors que l’accord parle de 120 jours maximum au moment de sa signature, le 6 février 2016, on n’a pas vraiment 120 jours du 6 Février au 14 Mai 2016, la date prévue pour l’investiture du nouveau président élu. L’accord fait un certain nombre d’exigences qui seront difficiles à respecter, tels ses point IV  et V et leurs sous points, reproduits texto plus bas :

« IV. De la redynamisation du Conseil électoral provisoire (CEP)
« 1. Convocation, à l’initiative du Président provisoire des secteurs ayant délégué des représentants au précédent Conseil électoral provisoire (CEP) aux fins de confirmer ou de désigner de nouveaux membres en vue de la reprise des activités au CEP, dans un délai n’excédant pas 72 heure ». Déjà fait, mais pas dans  le délai imparti.

« 2. Publication de l’arrêté Présidentiel de nomination des nouveaux membres du CEP ». Pas encore fait car certains secteurs concernés prennent leur temps soit disant pour bien désigner leur représentant au sein du CEP.

« V. De la poursuite du processus électoral initié au cours de l’année 2015 ».
« 1. Relance par le CEP du processus électoral après évaluation des étapes déjà franchies :
« a) Mise en application des recommandations techniques de la Commission indépendante d’évaluation électorale ». L’accord n’a pas spécifié par qui ? Est-ce par le CEP redynamisé ou par une autre commission d’évaluation? A noter que l’accord parle d’évaluation et non de vérification comme exigé par le G8, FANMY LAVALAS et autres. Cette question de sémantique pourrait être une pomme de discorde entre l’ancienne opposition et l’actuelle administration.
« b) Finalisation et proclamation des résultats des élections municipales ».

« 2. Organisation du deuxième tour de l’élection présidentielle, des élections législatives partielles et des élections locales (24 avril 2016) ». C’est tout un travail à mener par le CEP pour rester dans les délais.

3. Proclamation des résultats définitifs (6 mai 2016).

4. Installation du Président élu de la République (14 mai 2016).

En guise de conclusion, les défis et la concertation

La bataille pour le pouvoir politique, l’adaptation de la nouvelle administration à la pratique du pouvoir, la primauté de l’intérêt des clans sur l’intérêt collectif, le rejet de l’ancienne opposition de tout ce qui rappelle Martelly, la réaction des bénéficiaires du régime Martelly, celle du PHTK et alliés par rapport à toute tentative éventuelle de les mettre hors-jeu, le  difficile équilibre à garder par l’administration actuelle, la polarisation qui se dessine au niveau du Parlement (risque de paralysie), la marginalisation du pouvoir judiciaire sont autant de défis à surmonter par les acteurs en présence.

Il ne faut pas négliger non plus l’attitude forcément attentiste de la communauté internationale (wait and see) qui s’est montrée par un passé récent plutôt proche de Martelly et qui devrait prendre son temps avant de se retrouver par rapport à la nouvelle administration dont la  tendance devrait se rapprocher de la manière lavalassienne.

C’est dans cette ambiance d’incertitudes qu’évolue la nouvelle administration. Ce chaos évité par l’accord du 6 Février 2016 s’éloignera-t-il définitivement ou seulement différé pour rebondir durant l’administration Privert ou après la clôture définitive du processus électoral? On ne devrait pas attendre longtemps pour la réponse à cette interrogation.


Une fois de plus, le maître mot reste et demeure la concertation, le dialogue. La revanche, l’exclusion, « l’ote-toi que je m’y mette » ne nous mèneront nulle part. N’oublions pas que l’administration actuelle n’est que le fruit d’un consensus, d’un « Accord politique pour la continuité institutionnelle à la fin du mandat du Président de la République en l’absence d’un président élu et pour la poursuite du processus électoral entamé en 2015.»