HAITI
ET LE MONDE A LA CROISEE DES CHEMINS (45) : LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET
LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ET GUERRE ISRAELO-HAMAS/IRAN ; HAITI :
LE CONSEIL PRESIDENTIEL VS BANDITS
JEAN-ROBERT
JEAN-NOEL
7 MAI
2024
La 44e chronique sur l’interrogation
« Haïti et le monde à la croisée des chemins (?), a analysé la situation
mondiale et haïtienne, en se basant sur les guerres Russo-Ukrainienne, Israélo-Hamas,
et sur la complexité de la saga haïtienne, dominée par les gains territoriaux
des bandits et leur visée de la prise directe du pouvoir Haïti.
Dans cette 45e chronique,
les mêmes thèmes persistent auxquels il faut ajouter l’Iran qui régionalise un peu
plus le conflit Israélo-Hamas, tandis qu’en Haïti, l’installation du Conseil Présidentiel
de Transition (CPT) semble faire pencher la balance du coté de la communauté
internationale (CI) par rapport à la visée des bandits d’imposer leur solution
ou tout simplement de faire partie de la solution.
Pourtant, rien n’est joué si l’on se
base sur les déclarations des bandits et des luttes internes pour la présidence
du CPT. On croirait que la situation épineuse d’Haïti n’affecte en rien les
deux acteurs de terrain de la crise multiforme du pays, à savoir les bandits
qui continuent avec leurs stratégies d’occupation de territoires et de rendre
invivable la vie en Haïti, tandis que les membres du CPT se préoccupent de qui sera
président du CPT, au point de se diviser en deux groupes dont celui majoritaire
a fait le choix d’Edgard Leblanc. Et les pratiques de corruption semblent
régner de plus belle au sein de ce CTP.
C’est pourquoi je titre cette 45e
chronique : « HAITI ET LE MONDE A LA COISEE DES CHEMINS (?) :
LE MONDE, GUERRE EN UKRAINE ET LA CONTRE OFFENSIVE RUSSE ET GUERRE
ISRAÉLO-HAMAS/IRAN ; HAITI : LE CONSEIL PRESIDENTIEL VS BANDITS.
I.
SITUATION
AU NIVEAU MOMDIAL
Avant de rentrer dans le vif du sujet
en relation avec les grands points d’actualité internationale que nous allons analyser,
parlons rapidement de l’élection présidentielle au Sénégal gagnée haut la main
par Bassirou Diomaye Faye (44 ans), l’homme avec deux épouses officielles, qui,
en moins d’une semaine après son investiture, a mis en place avec son Premier
Ministre, Ousmane Sonko, un gouvernement de plus d’une vingtaine de ministres et
arrêté des mesures en faveur du Sénégal par rapport à la Communauté
Internationale. C’est un événement en soi, et dans un pays africain en plus. On
pourrait se pencher sur la saga Trump qui occupe l’actualité aux USA. On y
reviendra dans un article ultérieur.
Maintenant regardons ensemble les
autres points saillants de l’actualité internationale : La guerre Russo-Ukrainienne,
la Guerre Israélo-Palestinienne et l’engagement américain dans ses deux
conflits et leurs répercutions sur la politique interne américaine.
1.1. Guerre Russo-Ukrainienne, les Russes à
l’offensive
Par rapport à notre dernière chronique,
la situation a connu des avancées diverses de la part des Russes et des
Ukrainiens. L’Ukraine qui perd du terrain dans le Donbass, se contente de
défendre surtout les zones-clés de la ligne de front de 1200 Km et de toucher
les sites stratégiques de la Russie (Usines Gaz, Pétrole, centres de production
des armes et munitions, aérodromes). Sur le terrain, les Russes avancent avec
beaucoup de pertes en vies humaines et en matériels militaires, mais en
grignotant du terrain ukrainien, en étant actifs sur plusieurs zones névralgiques
du front et en continuant à bombarder à distance les 7 grandes villes
ukrainiennes avec des fortunes diverses.
Malgré les 61 Mrds d’USD votés par la
Chambre Basse des USA, les Russes avancent inexorablement en attendant la
concrétisation de cette aide sur le terrain, les Ukrainiens se battent à 1
contre 4 à 5 dans certaines zones. Avec un manque criant de munitions et d’hommes,
c’est un véritable exploit de leur part. Ingénieux, avec les moyens du bord,
ils arrivent à frapper la Russie en profondeur à partir de matériels adaptés et
fabriqués en Ukraine pour la grande majorité, en détruisant des usines et des
aérodromes et avions russes. Ils utilisent les matériels occidentaux (britanniques,
français et autres), mis à disposition pour frapper la Russie, surtout dans les
zones occupées. Les dégâts sont conséquents, 13% de l’économie russe liées au
Gaz et au pétrole sont perdus. Les Américains ont demandé aux Ukrainiens de
suspendre les bombardements sur le gaz et le pétrole, malheureusement sans
succès. Il faut noter que l’effort de guerre de la Russie se base sur l’exportation
de ces produits, tout en manœuvrant par alliés interposés dont l’Iran, pour nuire
à l’approvisionnement de l’Ukraine en armes et en munitions.
1.2. Guerre Israélo-Hamas, l’Iran s’implique
davantage
En effet, Israël était un gros fournisseur de l’Ukraine en armes et munitions. Sous l’instigation de l’Iran, allié de la Russie, le
Hamas a déclenché, le 7 octobre 2023, la guerre Israélo-Hamas, privant par
ainsi l’Ukraine de l’appui israélien. Israël est devenu trop occupé dans son
offensive contre le Hamas dans la bande de Gaza, dans ses démêlés avec le Hezbollah
libanais et les Houthis du Yémen, tous des proxis d’Iran, pour continuer à
aider l’Ukraine.
Les alliés occidentaux d’Israël comme les USA, les Britanniques
et les Français, ont dû prioriser leur allié par rapport à l’Ukraine. Les Israéliens,
qui ont dû frapper un consulat Iranien en Syrie, tuant une quinzaine de personnes
dont des généraux de l’Iran, ont eu comme réponse une attaque massive et
directe de l’Iran de 300 drones et missiles supersoniques et balistiques dont
99% ont été interceptés par Israël et ses alliés occidentaux et arabes. Israël
a dû répliquer en attaquant des bases iraniennes sans succès si l’on en croit la
dérision avec laquelle le ministre des Affaires étrangères de l’Iran a
ridiculisé cette attaque israélienne. Ceci a eu pour effet de désamorcer l’escalade
au niveau de la région.
Entre temps, le premier ministre israélien, Benjamin
Netanyahu, maintient la pression sur la bande de Gaza malgré les injonctions
américaines pour un cessez-le-feu, en continuant à raser les infrastructures (bâtiments
et autres) et à tuer les Palestiniens de cette zone sous prétexte d’éradication
des leaders du Hamas. Ce qui a provoqué une antipathie presque mondiale contre
Israël, en particulier aux USA, où les étudiants propalestiniens protestent
avec violence contre le génocide israélien. Comme l’a souligné un citoyen
engagé haïtien, Dimitri Norris : « Israël à force de se croire au-dessus des lois et
de toutes autres formes de considérations est peut-être en train de perdre la
seule bataille qui vaille, celle de l'opinion publique américaine. »
1.3. Les Américains s’engagent un peu plus
Le Gouvernement américain, malgré les
protestations de la plupart des étudiants et d’une bonne partie de la population
propalestinienne, a dû se battre pour le vote d’un bill de plus 100 Mrds d’USD
pour venir en aide à l’Israël et à l’Ukraine. L’engagement américain du côté israélien
a permis de faire face à l’attaque de l’Iran, et aussi à se défaire des
attaques des Houthis pro-iraniens au niveau de la Mer Rouge et dans la
protection des navires qui traversent le Canal de Suez. Malgré tout, plus de
35% du commerce mondial ont dû éviter cet itinéraire. Ce qui contribue à la
situation d’inflation que vit le monde actuellement et en particulier les USA,
en pleine année électorale.
J’emprunte ce constat de Dimitri Norris pour terminer la synthèse de l’actualité mondiale et faire la transition vers la situation haïtienne : « Enfin on ne saurait ne pas terminer cette synthèse de l’actualité mondiale sans mentionner l'intervention du représentant de la Fédération de Russie au Conseil de Sécurité sur le dossier haïtien. Définitivement le peuple haïtien et la nation haïtienne ont un champion et je parie que la question haïtienne est une des priorités de la diplomatie russe ».
II.
SITUATION
AU NIVEAU D’HAITI
Depuis la mise sur pied, le 29 février
2024, de ce mouvement « viv Asanm » par des bandits, beaucoup d’eau a
coulé sous les ponts. Ariel Henry, « deyò, deyò nèt » a
officiellement démissionné ; les bandits ont posé des actes répréhensibles
malgré leurs promesses d’accompagner le peuple dans une forme de révolution contre
ses bourreaux et de changer le système haïtien ; le Conseil Présidentiel de
Transition (CPT) est mis en place et la division reprend le dessus comme d’habitude.
2.1. Les bandits persistent et signent
Pendant tout le mois de
mars et jusqu'à la fin d'avril 2024, la zone métropolitaine de Port-au-Prince a
été ravagée par des actes criminels sans précédent. Les bandits ont ciblé une
quinzaine de commissariats de police, assassinant des agents et s'emparant
d'armes ; des prisons ont été attaquées, entraînant la libération de plus de
4000 détenus, renforçant ainsi leurs rangs ; plusieurs ministères ont été
saccagés et leurs équipements et archives détruits ; des banques et des
entreprises privées ont été cambriolées, avec des vols d'argent, de nourriture
et d'autres biens ; des institutions gouvernementales ont été délibérément
détruites, y compris les archives nationales et le journal Le Moniteur ; des
établissements de santé et des pharmacies ont été pillés, avec des équipements
détruits et des médicaments volés ; des écoles, tant publiques que privées, ont
été dépouillées et vandalisées, y compris le Collège Saint Martial ; même les facultés
d'État ont été attaquées, avec des dommages infligés aux installations de
l'Agronomie, de la Médecine, de l'École Normale Supérieure, entre autres ; des
domiciles privés ont été la cible de pillages, de vols, de viols et de
violences meurtrières. Ce déchaînement de violence au nom de la révolution ne
fait que perpétuer la souffrance du peuple depuis trop longtemps.
Donnons la parole à nouveau à notre
ami Dimitri Norris : « Et parlant de mutilations ce qu'on
retiendra du mois d'Avril 2024 c'est les destructions d'ouvrages marqueurs de
l'identité haïtienne par la coalition de gangs "Viv ansamm". Elle dit
vouloir faire la révolution… La mise à sac de la bibliothèque nationale, des
Presses nationales, du Petit Séminaire Collège Saint Martial et de tant
d'autres monuments marquant la mémoire nationale et surtout plus encore la
destruction de l'école Élie Dubois montre que sous un narratif de révolution
est en train d'avoir lieu un génocide civilisationnel et mémoriel. »
La zone métropolitaine de Port-au-Prince
est pratiquement sous le contrôle des bandits, on estime à 10% l’espace sous le
contrôle de l’Etat. La majorité des gens restant au niveau de la zone
métropolitaine se concentre sur ces 10% de territoires. Plus de 150,000
personnes ont abandonné la zone métropolitaine en se réfugiant dans les zones de
province. Une crise humanitaire est en train d’être vécue au niveau de la zone
métropolitaine avec des répercutions sur les zones de province. Or il se trouve
que cette zone représente environ 80% des activités économiques du pays et le point
central de toutes les décisions politiques. Le pays est donc paralysé à l’heure
actuelle, les communications avec les zones de provinces sont pratiquement
inexistantes, les bandits contrôlant les entrées et les sorties de la zone métropolitaine.
Que restera-t-il au conseil présidentiel de transition comme territoire à gérer
au niveau de la zone métropolitaine de Port-au-Prince
2.2. Le Conseil Présidentiel de Transition
et les préoccupations politiciennes
Après maintes
tractations de la communauté internationale à travers la CARICOM, une solution
institutionnelle en dehors de la constitution a été trouvée avec les acteurs
politiques pour la mise en place d’un Conseil Présidentiel de Transition (CPT)
de 9 membres dont 2 observateurs. Ce CPT devra choisir un premier ministre, mettre
en place avec le premier ministre un gouvernement, rétablir la sécurité, mettre
en place un conseil électoral, réformer la constitution à valider par le peuple,
organiser les élections générales et remettre le pouvoir aux élus en février
2026.
Cette solution a
été contestée par plusieurs groupes dont le groupe Viv ansanm. Certains voulaient
utiliser l’article 149 de la constitution de 1987, d’autres comme « viv
Ansanm veulent faire partie de la solution. Le CPT a eu toutes les peines du
monde à être installé. Une fois installé, les divisions apparaissent au grand
jour quant au choix du coordonnateur. Et Haïti continue de se péricliter au
grand dam du peuple haïtien ne sachant à quel saint se vouer.
Quant à la
communauté internationale, elle a applaudi et commence à prendre des
dispositions pour l’arrivée de la Force Multinationale. Avec l’arrivée de
certains matériels emmenés par les Américains, on sent une certaine panique
parmi les bandits qui se traduit par un langage plus conciliant. Et du côté du CPT et du côté des bandits, les
deux principaux acteurs de terrain, Haïti reste le cadet de leurs préoccupations.
Que va-t-il se passer ? L’avenir dira le reste.
2.3. Haïti n’est toujours pas la priorité
Quand on regarde de plus près la situation
d’Haïti, les deux groupes qui occupent le terrain n’ont rien à voir avec le bien-être
du peuple haïtien. Les bandits se renforcent et veulent accéder directement au
pouvoir pour consolider leur prédominance et leurs privilèges afin d'échapper
à la justice. Pour les politiciens au niveau du CTP, ils veulent préserver
leurs privilèges, ceux de leurs clans et de leurs patrons au niveau du secteur
des affaires. Dans les deux camps Haïti n’est toujours pas la priorité. Car ce
sont les mêmes qui ont conduit notre pays à cette extrémité et qui se battent maintenant
pour accéder au pouvoir politique. Les bandits veulent y accéder pour se
protéger, tandis les politiciens pour perpétuer le système ou tout au moins
pour le renouveler.
III. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
La situation au niveau mondial reste
très préoccupante. A côté de la guerre Russo-Ukrainienne qui voit l’offensive
russe s’accentuer sur le terrain, au point déloger les Ukrainiens sur au moins
une position occupée depuis 2014 dans le Donbass, la guerre Israélo-Hamas se
régionalise avec les attaques israéliennes sur un Consulat iranien en Syrie,
tuant une quinzaine de personnes dont des généraux iraniens. Les Iraniens ont dû
directement répliquer. Ils ont envoyé 300 drones et missiles, interceptés par les
Israéliens avec l’appui de ses alliés occidentaux, dont en premier lieu les Américains.
Les Israéliens ont remis ça en attaquant des installations en Iran, sans succès
à ce qu’il parait, puisque les Iraniens se sont moqués des Israéliens.
Le Gouvernement américain qui a déconseillé les
Israéliens de répliquer, puisque la massive attaque iranienne n’a tué personne
et n’a pas fait trop de dégâts, a quand même forcé le Congrès à passer un bill
de plus de 100 milliards d’USD, dont 61 milliards d’USD pour l’Ukraine promis
depuis longtemps et bloqués au niveau de la Chambre basse pour des raisons de
politiques politiciennes. En attendant l’arrivée de cet argent, les Russes profitent
du manque en hommes et en munitions de l’Ukraine pour accaparer plus de
territoire dans le Donbass et menacer la ville de kharkiv, la 2e ville du pays.
On comprend que, dans ces
circonstances, la crise multiforme et multidimensionnelle haïtienne ne
constitue qu’une simple épine dans les pieds de l’Occident, trop occupé avec les
deux autres guerres citées plus haut. C’est vrai que la dimension humanitaire
de la crise haïtienne force l’ONU à prendre des décisions pour l’atténuer. Cela
reste au niveau des palabres. Les actions sur le terrain tardent à se concrétiser
si l’on fait exception de quelques avions déversant leurs cargaisons sur le
pays. Mais comment atteindre les populations quand les principales routes du
pays, surtout à la sortie de la zone métropolitaine de Port-au-Prince, sont
sous le contrôle des bandits ? Il faut noter aussi quelques matériels
militaires emmenés par les Américains, créant une forme de panique chez la
plupart des bandits.
Ces politiciens, membres du CPT, qui,
hier encore, faisaient partie, des groupes politiques qui armaient les bandits,
et qui se battent actuellement pour coordonner le CPT, pourraient-ils prendre
de la hauteur pour consacrer la première place à Haïti au détriment de leurs
intérêts immédiats et personnels ? Le sort du peuple est le cadet des
soucis de ces deux groupes qui se battent pour les broutilles de pouvoir. Haïti
est vraiment à la croisée des chemins. Quand et comment trouver le vrai chemin
à suivre ?